Eddy Merckx a fait gagner Johan Museeuw: "Il m’a fait monter ma selle… et j’ai gagné le Mondial"
Sélectionneur national de 1986 à 1997, Merckx a porté Johan Museeuw au titre arc-en-ciel à Lugano en 1996.
- Publié le 27-06-2019 à 07h46
- Mis à jour le 30-06-2019 à 08h03
Sélectionneur national de 1986 à 1997, Merckx a porté Johan Museeuw au titre arc-en-ciel à Lugano en 1996. Triple champion du monde sur route (1967, 1971 et 1974), Eddy Merckx a également ramené deux titres arc-en-ciel à notre pays en qualité de sélectionneur national. Coach de la RLVB de 1986 à 1997, le Bruxellois a porté Rudy Dhaenens (1990, Utsunomiya) et Johan Museeuw (1996, Lugano) au titre mondial.
"Un moment que je ne suis évidemment pas près d’oublier, sourit le Lion des Flandres, dont la coque de téléphone portable est aujourd’hui encore habillée de l’arc-en-ciel. Deux jours avant la course, Eddy m’avait convaincu de changer ma position sur le vélo. Il se baladait toujours avec une clé dans sa poche, une habitude qu’il avait conservé de sa période de coureur. En me regardant rouler lors de l’un de nos derniers entraînements collectifs, il me tend son outil en me promettant que si je remontais ma selle de deux millimètres, je deviendrais alors champion du monde. Ce n’est habituellement pas le genre de réglages que l’on modifie à l’approche d’une échéance aussi importante qu’un Mondial mais lorsque c’est le plus grand coureur de l’histoire qui vous le suggère, on l’écoute forcément un peu plus attentivement… (rires) Je me suis rapidement senti à l’aise dans ma nouvelle posture et les faits ont donné raison à celui qui était alors mon coach puisque je me suis imposé le dimanche… Mon titre ne s’explique évidemment pas seulement par le fait de cette savoureuse anecdote, mais je pense que cet épisode a probablement également impacté ma confiance en mes moyens."
Un sacre qui avait comblé Merckx d’un intense bonheur. "Eddy m’est tombé dans les bras à l’arrivée, poursuit le triple vainqueur du Tour des Flandres. Nous avons ensuite fêté l’événement dignement à l’hôtel avec toute l’équipe et le staff en vidant plusieurs bouteilles de champagne. La note réglée par la Fédération était assez salée mais un titre arc-en-ciel valait bien cela non… ? (rires) Je peux dire que deux Merckx m’ont permis de devenir champion du monde cette année-là puisqu’à côté du rôle d’Eddy, Axel s’était révélé être un équipier extrêmement précieux dans le final de la course. Deux hommes emplis des mêmes valeurs de simplicité et d’altruisme. Dès qu’il met le nez dehors, Eddy est sans cesse sollicité, tantôt pour un autographe, tantôt pour un selfie, mais je ne l’ai jamais vu refuser ce type de petit plaisir à quelqu’un. Je dois également parfois composer avec le fait d’être devenu un personnage public, mais cela n’a absolument aucune commune mesure avec ce que vit notre plus grand champion cycliste. Je me souviens que dans la foulée des Jeux olympiques d’Atlanta, en 1996, nous étions allés boire un verre dans un café presque exclusivement remplis de cowboys (rires). Eh bien, même eux le connaissaient puisqu’à peine la porte franchie ils lui avaient lancé ‘Eddy Merckx, how are you ?’ Il ne vit pourtant pas pour cette forme de reconnaissance et se nourrit des bonheurs les plus simples : un bon verre de vin partagé avec des amis, une sortie à vélo…"
Une bonhomie que le Bruxellois adoptait également lorsqu’il enfilait le costume de sélectionneur national. "Eddy était toujours d’un calme à toute épreuve, poursuit Johan Museeuw. Il attachait une réelle importance à la vie de groupe, aux moments d’échange à table par exemple, mais n’était pas du genre à palabrer du matin au soir. Ses briefings étaient d’ailleurs du même goût et allaient le plus souvent à l’essentiel. Il voyait toujours extrêmement clair tactiquement mais peinait parfois à comprendre que tout le monde ne disposait pas des mêmes capacités que lui qui était capable d’attaquer au début, au milieu et à la fin d’une course… (rires) De l’équipier au leader, il vouait le même respect pour chacun. Une approche qu’il appliquait également au quotidien car peu lui importe que vous soyez puissant ou misérable, il vous abordera de la même manière : gentiment. Le trait de caractère principal d’un immense champion, mais surtout d’un homme bien."