Patrick Sangwa, de Herstal à futur entraîneur national du Burundi?
Patrick Sangwa, le T1 de Herstal, est très convoité par les instances du Burundi.
- Publié le 16-10-2019 à 14h46
Patrick Sangwa, le T1 de Herstal, est très convoité par les instances du Burundi.
Patrick Sangwa, en prenant la tête de l’équipe de Herstal, se révèle au milieu du foot national. Pourtant, il a déjà connu l’élite.
Patrick Sangwa, parlez-nous de votre carrière de joueur ?
"Elle a été très courte, en fait. J’ai joué, au Burundi, jusqu’à l’âge de 10 ans. Mes parents accordaient plus d’importance aux études, j’allais au foot en cachette. Puis j’ai subi une double fracture tibia-péroné. Et j’ai arrêté."
Êtes-vous tout de même resté dans le milieu du foot ?
"J’ai commencé à encadrer mes équipiers à ce moment-là. À 10 ans. J’avais déjà la fibre d’entraîneur, c’était inscrit."
Vous avez donc poursuivi sur cette route…
"À 20 ans, j’ai pris en charge l’équipe d’Espoir FC, une D4 du Burundi. Ensuite, j’ai rejoint Flamengo, club plus structuré de D3, avec qui on est montés en D2. Après deux saisons à cet échelon, le club a fusionné et j’ai eu la chance, en 1997, de coacher, en D1, la nouvelle entité : Espoir Flamengo. L’année d’après, je coachais l’équipe universitaire de Rumuru. Enfin, Atletico, un des meilleurs clubs du pays, qui a notamment formé Shabadi Nonda, m’a fait venir."
Sacré parcours. Mais comment avez-vous finalement rejoint notre pays ?
"J’étais comme adjoint en équipe nationale cadets quand, en raison de la situation politique tendue et de massacres qui ont causé la mort de plus de 100 000 personnes, j’ai dû quitter le pays. Avant de rejoindre la Belgique en 2000, j’ai transité par la Suisse."
Voilà donc près de 20 ans que vous côtoyez le foot belge…
"Un vrai parcours du combattant avant d’arriver à Herstal."
Vous pouvez nous raconter ?
"Mon premier club a été Fraiture Sport, où j’étais adjoint en diablotins. J’ai ensuite suivi les cours d’entraîneur et ai rejoint les cadets de Loncin, via Émile Lejeune. Stockay (juniors provinciaux), Cointe (4 ans en jeunes et une saison avec l’équipe B), Esneux (P4-P3), Sart-Tilman (juniors et équipe A en P4) et retour à Esneux (2 ans) ont précédé mon arrivée chez les Armuriers."
Vous êtes détenteur du diplôme UEFA A. Avez-vous des ambitions plus élevées que la D3 amateurs ?
"J’ai des envies, mais pas dans l’immédiat. À deux reprises, des contacts ont eu lieu afin de reprendre l’équipe nationale du Burundi. Mais je ne suis pas encore prêt à franchir le pas. L’actuel entraîneur fédéral, Olivier Niyungeko, je l’ai eu comme joueur à Atletico."
Justement, pouvez-vous nous parler du football burundais ?
"Localement, il est en difficulté en raison d’une absence de suivi financier. Mais il est en progrès. Avec comme principal souci un exode massif des bons joueurs vers l’Afrique du Sud. Il y a beaucoup de joueurs de qualité là-bas. Prenons l’exemple de Mémé Tchité. D’autres joueurs avaient un potentiel plus élevé, mais ils ne sont pas sortis du pays à l’époque. Puis, il y a ce rêve européen pour tant de gamins…"
“Être dominant, la philosophie… idéale”
“Mon rêve d’entraîner à ce niveau date d’il y a si longtemps. J’ai dû effectuer une remise à niveau par rapport à mon diplôme obtenu en même temps que Drazen Brncic, Patrick Tamburrini ou Serge Sarlette.” Mais Patrick Sangwa est heureux chez les Armuriers. “La mentalité est différente en nationale, sans être dure à vivre. Je n’avais plus suivi les compétitions nationales depuis trois ans, j’avais donc un manque de connaissances sur les adversaires. Santo (Ventura), mon T2, m’a bien aidé. Ceci dit, je constate une diminution du niveau, de la D3, par rapport à l’ancienne promotion.”
Le coach d’origine africaine voit d’ailleurs de bonnes surprises dans son nouvel élément national. “On me parlait pourtant d’un monde de requins. Je suis calme et je fais confiance, pas à l’aveugle. Même si la gentillesse constitue ma principale qualité et mon principal défaut…”
Quant à sa philosophie… “L’idéale est d’avoir les joueurs pour être dominant, comme Guardiola le préconise. Mais on doit surtout souvent savoir s’adapter à l’effectif dont on dispose. Au Burundi, j’avais les mains libres afin de choisir mes joueurs. Dès lors, avant 2000, j’ai été un précurseur de la défense à trois avec des éléments bien définis.”
“Il faut passer par le petit chemin…”
Les entraîneurs d’origine africaine sont une denrée rare. Patrick Sangwa offre son explication. “Un jeune joueur africain formé dans un grand club a souvent tendance à se voir trop beau trop vite. Certains passent à côté d’une carrière à cause de ça. Quant aux joueurs africains ayant réussi une belle carrière, ils désirent trop vite recevoir des propositions de coacher les équipes du plus haut niveau.”
Le coach herstalien conseille une autre approche. “Il faut d’abord travailler et prouver. Tout le monde doit passer par le bas niveau, regardez Dominique D’Onofrio ou José Riga, pour atteindre le haut. Comme on dit, il faut passer par le petit chemin avant d’arriver en haut.”