Vital Heynen: "Je veux marquer l’histoire du volley"
Depuis 2012, le Limbourgeois enchaîne les sélections et les résultats jusqu’à devenir champion du monde de volley avec la Pologne.
- Publié le 11-09-2019 à 15h09
- Mis à jour le 11-09-2019 à 15h10
Depuis 2012, le Limbourgeois enchaîne les sélections et les résultats jusqu’à devenir champion du monde de volley avec la Pologne. Vital Heynen, sélectionneur de l’équipe nationale de volley de la Pologne, c’est comme si Éric Gerets dirigeait la Seleção de Neymar, tant les Polonais sont devenus l’une des plus grosses équipes du monde, se parant d’or lors du dernier championnat du monde, et tant rares sont les entraîneurs belges à se hisser à un tel sommet dans leur sport.
Si le Limbourgeois veut éviter toute comparaison avec son compatriote, il partage tout de même quelques caractéristiques. "On a peut-être le même caractère . Mais il ne faut pas comparer. Moi, dans le milieu du volley, je ne suis encore qu’un entraîneur moyen" , rigole-t-il. "Pourtant, si on transposait ma carrière dans le football, je pourrais m’offrir un yacht" , déclarait-il au Zeit en mai dernier. "Mais, en volley, je n’aurai qu’une barque."
Cette relative modestie cache pourtant une ambition dévorante, qu’il avait lancée lorsqu’il reprit le Noliko Maaseik en 2006, menant le club vers la gloire pendant six ans.
Au départ, il ne se prédestinait pourtant pas au coaching principal, lui qui avait déjà glané des succès en tant que joueur en Belgique. "Et puis Maaseik m’a offert cette opportunité" , nous disait-il en 2017.
Parti rejoindre la sélection allemande avec un impressionnant sac de trophées made in Belgium et Europe (des podiums en CEV Cup) , ce père de trois filles a tout de suite laissé sa carte de visite dans le paysage du volley international.
Ce succès dans le Limbourg avec l’un des meilleurs clubs de Belgique augurait en effet ce que ce quinquagénaire allait faire au niveau mondial dans la foulée pour devenir ce coach à succès.
Parce que, depuis 2012, Vital Heynen a endossé le costume d’entraîneur principal de trois sélections : l’Allemagne, la Belgique et la Pologne.
Et si cette dernière destination est de loin la plus prolifique au niveau des résultats et des perspectives, les Allemands et les Red Dragons ont pu profiter de sa personnalité pour engranger des résultats probants : troisième au Mondial 2014, lauréat des Jeux européens 2015, cinquième des Jeux olympiques londoniens pour l’Allemagne ; top 4 à l’Euro 2017 pour la Belgique.
Arriver à ce sommet mondial avec la Pologne en 2018 et se qualifier à nouveau pour les Jeux olympiques, ce n’était pourtant pas un rêve. "C’était un objectif. En 2009, j’avais dressé une liste des choses à faire, à atteindre. J’ai pour l’instant presque tout réussi. Il ne m’en manque plus qu’un."
Ce manque, c’est le titre olympique qui tend les bras à sa sélection l’année prochaine, qui l’attend depuis 1976. "J’ai signé en Pologne pour cet objectif. Le Mondial, c’était fantastique mais c’était un peu par hasard. D’ailleurs, l’Euro n’est qu’une étape dans la préparation aux Jeux olympiques."
Et pourtant, on voit mal comment les Polonais passeront à côté de cet événement (qui se déroule dans quatre pays, dont la Belgique, à partir de vendredi). C’est que, sur le banc de touche, la griffe Heynen fera encore des miracles. Énergique, " ayant toujours la bouche ouverte", comme nous confiait François Lecat il y a deux ans, Heynen arrive à faire sortir le meilleur de ses joueurs. Loin de n’être qu’un simple entraîneur, le Limbourgeois a besoin de s’intéresser bien plus à la personnalité de chacun et de se rendre très proche des joueurs et disponible pour eux.
"Je veux rendre les joueurs heureux durant les entraînements, en match", explique-t-il. "J’aime les gens, donner des conférences. Pour moi, le bonheur doit primer. La réussite n’est qu’une conséquence du travail fourni."
Vital s’inquiète tant du bonheur de ses protégés qu’il a convié femmes et enfants lors du dernier stage de la sélection, histoire de figer davantage le sourire sur leurs visages. "Leur permettre d’être heureux ne pourra que les aider à progresser. À l’entraînement, je ne vois pas des joueurs, je vois des enfants qui s’amusent."
La recette du succès semble donc simple et il l’avait déjà trouvée en 2006 lorsqu’il se hissa à la tête de Maaseik. Mais cette méthode, aussi efficace soit-elle, n’empêche pas une certaine remise en question pour celui qui n’"a pas peur de prendre le mur si un jour le mur est trop fort pour [lui]". "Depuis que je suis entraîneur, j’ai toujours adopté cette manière et ça fonctionne, même si certains me disent que je suis fou."
Ambitieux, ses résultats parlent pour lui et il fait tout pour y parvenir. "Je veux marquer l’histoire de ce sport que j’aime tant" , nous expliquait-il il y a deux ans, lors de sa prise de fonction en Belgique . "J’ai une grande gueule, je veux être quelqu’un de différent."
“Club ou sélection ? Ce n’est pas clair”
Être l’entraîneur de l’équipe nationale de volley polonaise, c’est être l’équivalent de Roberto Martinez avec les Diables rouges. “En Pologne, le volley est le premier sport, que ce soit chez les hommes ou les dames, qui ont elles aussi des résultats. Ici, tout le monde nous connaît et j’ai droit à toutes les facilités possibles. Je dois d’ailleurs filtrer les demandes d’interview tant je suis sollicité. Les joueurs sont fiers de porter ce maillot.” S’il a trouvé la meilleure situation pour s’épanouir, Vital Heynen avait pourtant réalisé l’un de ses rêves en 2017 lorsqu’il succéda à Dominique Baeyens à la tête des Red Dragons. “Je voulais faire quelque chose pour mon pays”, s’enthousiasmait-il à l’époque. C’est finalement en Pologne qu’il a filé, laissant les Red Dragons orphelins alors qu’il devait les emmener aux Jeux olympiques. “En Belgique, il y avait trop de conflits avec les clubs. On ne pouvait pas disposer des joueurs comme on le voulait. Ce n’est d’ailleurs pas toujours clair. La priorité est-elle le club ou l’équipe nationale ?”
"Le polonais, c’est compliqué"
La langue maternelle de Vital Heynen, c’est le néerlandais. "Et pourtant, je ne le parle plus trop. D’ailleurs, jouer l’Euro aux Pays-Bas me permettra de reparler un peu cette langue." Depuis 2012 et son exil pour l’Allemagne, l’entraîneur a élargi sa palette linguistique jusqu’à devenir polyglotte de par ses nombreux ports d’attache en clubs (Tours, Friedrichshafen, Bydgoszcz ou encore Ankara), qu’il combine avec ses postes successifs à la tête d’équipes nationales. Il peut passer du français à l’anglais ou à l’espagnol et il a même commencé l’italien, lui qui entraînera également le club de Peruggia. "Mais le polonais, c’est compliqué" , sourit-il. "J’ai essayé de l’apprendre, et d’ailleurs, quand je sors un mot en polonais, tout le monde est content. Heureusement pour moi, avec l’anglais, j’arrive à me faire comprendre. Tout le monde parle l’anglais. J’ai plus de facilités avec les langues latines."