Le paradoxe du marathon: une distance où les "vieux" sont rois

Comment se fait-il qu’en athlétisme, tous les records du monde de course soient détenus par des athlètes de moins de 25 ans et pas celui sur marathon, qui appartient à des trentenaires ?

Igor Risbanne (Zatopek Magazine)
16 September 2018, Berlin: Eliud Kipchoge, Kenyan long-distance runner celebrates after wining the 45th BMW Berlin Marathon, in Berlin, Germany, 16 September 2018. Photo: Soeren Stache/dpa
16 September 2018, Berlin: Eliud Kipchoge, Kenyan long-distance runner celebrates after wining the 45th BMW Berlin Marathon, in Berlin, Germany, 16 September 2018. Photo: Soeren Stache/dpa ©BELGAIMAGE

Comment se fait-il qu’en athlétisme, tous les records du monde de course soient détenus par des athlètes de moins de 25 ans et pas celui sur marathon, qui appartient à des trentenaires ?
On parle de paradoxe à chaque fois qu’une situation échappe à la logique. C’est bien le cas pour le marathon. En effet, les records du monde sont régulièrement battus par des athlètes qui ont tous la trentaine bien sonnée alors que sur les distances plus courtes, ils sont beaucoup plus jeunes.

Vous n’êtes pas convaincu ? Alors prenons l’exemple de l’actuel record du monde du 1 500 mètres détenu par le Marocain Hicham El-Guerrouj. Il avait 23 ans lorsqu’il a signé cet exploit en 1998. Celui du 3 000 mètres appartient au Kenyan Daniel Komen. Il avait 20 ans lorsqu’il l’établit d’abord en plein air en 1996 avant de récidiver en salle deux ans plus tard. Si on s’intéresse aux distances plus longues comme le 5 000 ou le 10 000 mètres, on verra que ces deux records appartiennent à la même personne, l’Éthiopien Kenenisa Bekele. Il avait 22 ans lors du premier et 23 ans lors du second. Même chose pour des distances comme le 800 mètres, dont le record est propriété de David Rudisha (23 ans), le 400 mètres dans les mains de Wayde van Niekerk (24 ans) et bien sûr les 100 et 200 mètres qui appartiennent à Usain Bolt (22 ans). Dans ce panel de champions, personne n’est âgé de plus de 25 ans.

L’explication est de nature physiologique. Au-delà de 25 ans, les muscles commencent leur lente involution. Certes, cela se produit de façon imperceptible. Cela suffit néanmoins pour que les performances régressent de quelques pourcents.


Pourquoi tant de "vieux"?

Curieusement, cette loi ne s’applique pas pour les marathons. Aujourd’hui, le record sur marathon (2h01.39) appartient à Eliud Kipchoge. Il avait 33 ans lorsqu’il a signé cette performance à Berlin l’année passée. Au palmarès de ce record, on trouve aussi les noms de Dennis Kimetto (30 ans), Haile Gebrselassie (35 ans), Paul Tergat (34 ans) et même Carlos Lopes (38 ans). Idem chez les femmes. On se souvient qu’aux Jeux olympiques de Pékin, la course avait été remportée par la Roumaine Constantina Tomescu-Dita qui était alors âgée de 38 ans. Quant aux records du monde, on remarque que la plupart des détentrices étaient trentenaires ou presque au moment de leur exploit : Paula Radcliffe, Mary Keitany, Naoko Takahashi, Catherine Ndereba.

On dirait que l’âge n’exerce pas la même influence négative lorsqu’on allonge les distances de course. Pourquoi ? Cette question fait l’objet notamment d’un dossier dans la dernière édition du magazine Zatopek actuellement en kiosque. On y parle d’économie de course. Serait-il possible qu’elle s’améliore en vieillissant ? On évoque aussi l’influence de paramètres comme l’endurance et l’adaptation cardiovasculaire. Toutes les explications possibles sont passées à la loupe, y compris les plus inattendues.

Ainsi il se pourrait que ce paradoxe soit d’origine psychologique. Si les vieux excellent sur marathon, ce serait tout simplement parce que les jeunes ont tendance à délaisser cette discipline. Mais à présent que le marathon devient lui-même une course de plus en plus rapide, il se pourrait qu’on assiste à l’émergence d’une nouvelle génération de recordmen et de recordwomen plus jeune que la précédente. On verra !

2h17 à 43 ans !

Certains exploits ont tendance à passer inaperçus alors qu’ils méritent pourtant un grand coup de chapeau comme par exemple la course de l’ancien champion Bernard Lagat lors du dernier marathon de New York. Il a fini à la 18e place en 2 h17.20 secondes. À l’âge de 43 ans !

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