Six nations: succès en trompe-l'oeil pour la France, le Pays de Galles s'offre un Grand Chelem, l'Ecosse frôle l'exploit dans un match fou

Le fiasco total est évité: le XV de France a profité de la faiblesse de l'Italie pour s'offrir un succès peu convaincant et contre le cours du jeu (25-14) en clôture de son Tournoi des six nations, raté, samedi à Rome.

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Six nations: le XV de France s'offre un succès en trompe-l'oeil en clôture
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Le fiasco total est évité: le XV de France a profité de la faiblesse de l'Italie pour s'offrir un succès peu convaincant et contre le cours du jeu (25-14) en clôture de son Tournoi des six nations, raté, samedi à Rome.

Au moins les Bleus sont-ils parvenus, après l'Ecosse (27-10), à battre l'autre équipe de leur niveau dans la compétition.

Pour engranger un cinquième succès en seize rencontres depuis l'arrivée au poste de sélectionneur de Jacques Brunel, fin 2017.

Pour éviter, aussi, de terminer le Tournoi avec quatre défaites au compteur pour la première fois depuis le passage à six nations en 2000 et l'humiliation d'une première défaite depuis 2013 face aux Azzurri. Lesquels n'ont pas remporté le moindre match dans le Tournoi depuis février 2015 (22 défaites de rang).

Mais ce succès très poussif, puisque les Bleus étaient encore sous la menace italienne jusque dans les dernières minutes, ne cache aucunement tous leurs manquements à six mois de la Coupe du monde au Japon (20 septembre-2 novembre).

"Ce Tournoi est une déception, je ne vais rien vous apprendre ou inventer. On a été trop inconstants, quelques fois pas bons, mauvais" a reconnu Brunel.

Qui sait, d'ailleurs, ce qu'il serait advenu si l'ouvreur transalpin Tommaso Allan n'avait pas oublié cinq points accessibles au pied. Ou si Tito Tebaldi n'avait pas commis un en-avant devant la ligne française (65e) alors que les Bleus n'avaient que six points d'avance, une nouvelle occasion manquée par les Italiens incapables de concrétiser leur domination.

Ou, enfin, si Damian Penaud, au prix d'une superbe défense, n'avait pas fait échapper à Marco Zanon le ballon alors qu'il s'affalait dans l'en-but (75e) durant dix dernières minutes suffocantes... Où le XV de France n'a pu souffler qu'après son troisième essai, signé Penaud justement (79e).

Mais Penaud et les Bleus naviguent actuellement loin, très loin des meilleures nations sudistes et européennes: les Gallois qui sont parvenus à les battre (24-19) malgré un retard de seize points en ouverture, les Anglais qui les ont laminés le 10 février (44-8) et les Irlandais qui les ont surclassés dimanche (26-14).

Quelles solutions?

L'encadrement de Jacques Brunel, qu'il soit renforcé ou non en vue du rendez-vous japonais, va devoir trouver les solutions pour éviter le fiasco d'une première élimination en poules en Coupe du monde.

Et pas seulement, après avoir tenté en vain de retirer le capitanat à Guilhem Guirado après la débâcle de Twickenham, par la seule magie d'une préparation de deux mois et demi, agrémentée de trois matches amicaux.

"On ne se fait pas de films, on sait ce qu'on a à travailler. On ne se prend pas pour d'autres. On est à notre place, on le sait et on va tout faire pour que ça change vite", a estimé Félix Lambey, pour qui les Bleus sont "lucides" sur leur niveau actuel.

Ces derniers ont énormément souffert à Rome pour les probables adieux au Tournoi du capitaine italien Sergio Parisse, détenteur du record d'apparitions dans la compétition (69).

Dès le début le début de rencontre, les Bleus, très indisciplinés (14 pénalités), ont étalé toute la fébrilité qui les a escortés durant 80 minutes, où l'Italie a eu largement la possession du ballon (65%) et l'occupation du terrain (71%).

Penaud, Ntamack et la mêlée

Ils ont ainsi perdu leurs deux premières touches (1re et 4e) et multiplié les imprécisions, permettant à Tommaso Allan de placer les Azzurri devant (6e et 12e, 11-0).

Heureusement pour eux, les Bleus ont marqué sur leur première incursion dans le camp italien, par Dupont au relais d'une accélération de Penaud (16e, 7-6), déjà. Et ont pu compter sur la faiblesse italienne, incapable de concrétiser par un essai sa domination (24e, 28e, 40e). Déjà, également.

Autre maigre satisfaction, sa bonne tenue en mêlée qui a permis au XV de France de creuser l'écart par la botte de Romain Ntamack (21e, 10-6) et de récupérer une précieuse pénalité devant sa ligne d'en-but (28e), comme en seconde période (66e).

Au rayon des autres satisfactions, la prestation de Penaud ou celle de Ntamack, fiable au pied, auteur d'un drop important à la 63e minute (20-14) et d'une belle double sautée pour Maxime Médard sur l'essai de Yoann Huget (47e, 17-9). Pauvres cache-misères.

Le Pays de Galles s'offre un Grand Chelem en écrasant l'Irlande

Le Pays de Galles impressionnant: à six mois de la Coupe du monde, le XV du Poireau est allé chercher le douzième Grand Chelem de son histoire en étouffant l'Irlande samedi sous la pluie de Cardiff (25-7).

Warren Gatland, qui faisait ses adieux au Tournoi des six nations après onze ans de bons et loyaux services (agrémentés de deux tournées à la tête des Lions), remporte lui son troisième Grand Chelem après ceux de 2008 et 2012: un record pour un sélectionneur.

Les Gallois enchaînent une quatorzième victoire consécutive, un record national qui leur permet de doubler l'Irlande au classement de World Rugby. A six mois du Mondial au Japon (20 septembre-2 novembre), voilà la Principauté sur les talons des doubles champions du monde All Blacks.

"C'est difficile de mettre des mots sur ce qu'on a fait, on a travaillé de façon incroyablement dur depuis un an. On a pris l'habitude de gagner. C'est un groupe spécial, on travaille dur les uns pour les autres", a exulté le buteur gallois Gareth Anscombe.

"Les garçons méritent d'écrire l'histoire. On a été exceptionnel dans la gestion du match et dans le défi physique. L'émotion a joué un grand rôle dans ce match", a réagi Gatland, après avoir versé sa larme sur le podium. "Je suis enthousiaste pour la Coupe du monde."

"Je suis fier de ce que j'ai accompli en tant que coach, avec mon staff", a-t-il lancé. "C'est quand même assez spécial. Les matches comme aujourd'hui vont me manquer... les célébrations comme aujourd'hui aussi."

Côté Verte Erin, c'est la grise mine. Le XV du Trèfle, qui sortait lui-même du Grand Chelem 2018, a commencé l'édition 2019 avec une défaite à Dublin contre l'Angleterre (32-20) et termine avec presque un zéro pointé chez son cousin celte.

Qui aurait pu prévoir un tel final? Pas forcément favoris au début du Tournoi, les Gallois ont réalisé un sacré parcours, sinueux en diable.

Il y a d'abord eu cette remontée lors de la première journée en France, avec cette victoire arrachée après un retard de seize points à la mi-temps (24-19). Il y a aussi eu ce succès contre la favorite Angleterre, construit patiemment grâce à une défense hermétique (la meilleure du Tournoi), une discipline de fer et un essai après 35 temps de jeu.

Et tout ça sans un véritable buteur. Anscombe, même s'il a tout réussi samedi (20 points), n'a pas la précision de Leigh Halfpenny, laissé à la maison, ou encore de Dan Biggar, laissé sur le banc. Jusqu'à cette "finale", le N.10 avait manqué plusieurs pénalités, refusant même d'en tenter certaines que ses deux aînés auraient réussies sans trop y penser...

Toit ouvert, match fermé

Au Millennium Stadium, les Irlandais ont coulé avant même la 80e seconde. Hadleigh Parkes a marqué le premier essai, à la réception d'un petit coup de pied d'Anscombe par-dessus le premier rideau irlandais.

Le reste a été une affaire de précision, de discipline et de défense, des domaines dans lesquels les Gallois excellent en ce moment.

Même sous la pression verte autour de la 25e minute, les Gallois n'ont pas cédé, laissant le XV du Trèfle se tirer une balle dans le pied, à l'image de ce bras cassé joué vite et échappé par CJ Stander (28e) ou de cet en-avant en suivant (31e). Et dire que Joe Schmidt avait demandé que le toit reste ouvert malgré les intempéries prévues...

Sous "leur" pluie, les Gallois ont gagné les mêlées, dominé les touches, forçant les Irlandais à donner des munitions à Anscombe, irréprochable à plus de 40 mètres (35e, 40e) pour donner seize longueurs d'avance à la pause (16-0).

Et le XV du Poireau n'a pas ralenti en seconde période, Anscombe agrandissant encore l'écart de trois nouvelles pénalités (49e, 54e, 70e) sans réplique jusqu'à l'essai de Jordan Larmour après la sirène.

Les Irlandais étaient venus gâcher la fête comme ils avaient mis fin à la série de 18 victoires des All Blacks en 2016 ou annihilé les chances de Grand Chelem anglais en 2017. Ils repartent de Cardiff avec des doutes. Pas idéal à six mois du grand rendez-vous planétaire.

L'Ecosse frôle l'exploit dans un match fou en Angleterre

L'Ecosse a frôlé l'exploit en Angleterre, à savoir une première victoire à Twickenham depuis 1983, mais s'est fait rejoindre sur le fil au terme d'un match fou (38-38) samedi en clôture du Tournoi des six nations.

C'est une +remontada+ comme on en a rarement vu de mémoire d'Anglais: menant 31-0 après une demi-heure de jeu, le XV de la Rose s'est écroulé à partir de ce moment-là, encaissant 6 essais face à des Ecossais révoltés et survoltés.

Et quand Sam Johnson a donné l'avantage aux siens sur une passe à l'aveugle de Finn Russell, éblouissant en seconde période (76e), Twickenham n'en croyait pas ses yeux: le XV du Chardon venait d'infliger un incroyable 38-0 à l'équipe d'Owen Farrell, sonnée.

Le maître à jouer de l'Angleterre venait d'ailleurs de quitter la pelouse, remplacé par George Ford après avoir offert une pénalité aux Ecossais en percutant Darcy Graham avec l'épaule. Heureusement pour le N.10, Greig Laidlaw a raté son tir (68e) et l'Angleterre a limité les dégâts avec l'essai égalisateur de l'ouvreur remplaçant (80e).

Un avertissement majeur pour l'entraîneur Eddie Jones qui croyait ses hommes partis pour réaliser une nouvelle démonstration de force, dans la foulée des corrections infligées à l'Irlande (32-20), la France (44-8) et l'Italie (57-14).

McInally surprend Farrell

Après 30 minutes, le bonus offensif était acquis et les Ecossais dans les cordes. L'ailier Jack Nowell avait frappé d'entrée en résistant à plusieurs plaquages (2e), le flanker Tom Curry surpris la défense écossaise à la réception d'une touche (9e), le deuxième ligne Joe Launchbury enfoncé le clou (13e) et l'ailier Jonny May inscrit son 6e essai du Tournoi (29e).

On croyait May parti pour dépasser l'Irlandais Jacob Stockdale, auteur de 7 essais en 2018. Il n'en fut rien: le talonneur écossais Stuart McInally sonna le tocsin avant la pause en contrant un jeu au pied de Farrell, résistant sur 60 m au retour de l'ouvreur et d'Elliot Daly (35e), et l'humiliation annoncée prit un visage complètement inattendu.

Après McInally et avant Russell, c'est Ali Price qui a endossé le costume de héros national: une passe sautée pour Sam Skinner et c'est Graham qui finit dans l'en-but (47e), puis un coup de pied par-dessus pour tromper Billy Vunipola, vampiriser la défense anglaise et envoyer Magnus Bradbury sous les poteaux (50e).

Le clou du spectacle se nomme Finn Russell: un ballon judicieusement expédié en bout de ligne pour le doublé de Graham (57e), une interception sur Farrell en personne pour un contre en solitaire (60e) et une superbe fixation pour trouver Johnson dans l'intervalle (76e). Insuffisant pour l'emporter, mais les Ecossais s'en souviendront.

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