Rencontre avec le meilleur buteur des Diables Noirs: "L’humain avant les performances"
À 30 ans, Alan Williams, le meilleur buteur des Diables Noirs, a décidé de mettre un terme à sa carrière.
- Publié le 16-05-2018 à 18h32
- Mis à jour le 16-05-2018 à 18h35
À 30 ans, Alan Williams, le meilleur buteur des Diables Noirs, a décidé de mettre un terme à sa carrière. Le choc Dendermonde-Soignies en demi-finale des playoffs de la Bofferding League du 6 mai dernier aura donc été le tout dernier match de la carrière d’Alan Williams. Auteur des trois pénalités des Hennuyers ce jour-là, l’arrière d’1 m 88 n’a pas réussi à boucler ses deux décennies dans le milieu de l’Ovalie sur une victoire. C’est d’ailleurs avec quelques larmes qu’il a rangé ses crampons au placard sur la pelouse flandrienne, avec tout de même une Coupe de Belgique gagnée fin mars.
"Je pensais que ça serait plus éprouvant", répond l’international dont le poste de prédilection reste l’ouverture (n°10). "Même si, sur le moment, c’était évidemment un peu difficile. Mais ça faisait longtemps que je le savais."
Alan Williams n’a en effet pas pris cette décision sur un coup de tête à un âge qui laisserait pourtant pas mal d’opportunités pour la plupart des sportifs. Malheureusement, sa santé en a décidé autrement. "J’ai un petit souci d’audition et je dois me faire opérer de l’oreille interne (NdlR : ce 17 mai) . On m’installera une prothèse, ce qui rendra ensuite les chocs totalement interdits. Je suis un peu déçu évidemment mais c’est comme ça."
C’est donc un chapitre de plus de vingt ans qui se ferme. Pourtant, au départ, c’est avec le ballon rond qu’il a commencé alors que Kevin, son aîné d’un an avec qui il est très proche, découvrait le ballon ovale à Soignies à 9 ans. "Quand on était petits, on se disputait souvent. Nos parents ne voulaient donc pas que l’on pratique le même sport. Mais le football ne me plaisait pas trop alors j’allais parfois compléter l’équipe de Kev au rugby le lendemain du foot. Quand il a intégré Waterloo chez les jeunes, je l’ai suivi. Comme j’étais plutôt grand, j’ai joué devant au début pour ensuite migrer derrière."
Rapidement , ses qualités techniques et athlétiques l’ont poussé vers la France qu’il a découverte très jeune avec son frère avant que leurs chemins se séparent : Aurillac, Gaillac, Castres, Montluçon et Cognac… avec une période professionnelle après Castres où il était devenu champion de France espoir.
"C’était chouette même si parfois, c’était juste à mi-temps. J’ai pu durant quelques années vivre à fond le rugby. J’ai ensuite fait le choix de reprendre le chemin du travail."
C’est en partie cette raison qui l’a ramené en Belgique, à Soignies où il a retrouvé son frère, devenu joueur-entraîneur. "Kevin et moi n’avions jamais pu jouer en seniors ensemble mais on voulait le faire un jour et je n’avais plus beaucoup d’années devant moi", confie celui qui ne veut pas s’attarder sur ses résultats. "Je préfère me souvenir de l’aspect humain plutôt que des performances. Sportivement, le titre avec Castres est un bon souvenir mais à Cognac, humainement, c’était génial avec des jeunes formidables. Et puis avec Kev, ça l’était aussi." De quoi effacer les mauvais souvenirs. "Ma seule déception est de ne pas pouvoir jouer un peu plus. Mais je n’ai pas à me plaindre, j’ai réalisé de belles choses."
"Contre des gars que je voyais à la télé"
Alan Williams a été international durant 14 ans. En 2007, il affrontait l’Argentine au Stade Roi Baudouin.
En plein développement à l’époque, l’équipe nationale réussit un joli coup en 2007 en recevant l’Argentine en août au Stade Roi Baudouin pour un amical alors que les Pumas préparent le Mondial français qu’ils termineront sur le podium. Alors que le score était, tout logiquement en faveur des Sud-Américains, les Diables Noirs de Richard McClintock sauvent l’honneur avec un essai inscrit en bout de ligne par… Alan Williams, un gamin de 18 ans, déjà titulaire. "Ça faisait bizarre car ces adversaires, on les voyait à la télé. En plus, à 18 ans, c’était chouette mais surtout impressionnant."
Diable, Alan l’a été durant 14 années. "Le premier, c’était contre la Lettonie", se souvient celui qui a étrenné sa première sélection à 16 ans. "À l’époque, ce n’était pas jeune mais aujourd’hui, le rugby a tellement évolué que ce ne serait plus possible physiquement sauf si on est vraiment au dessus du lot."
Là aussi avec la vareuse nationale, il a décroché de beaux résultats comme un titre européen du groupe B avec les U20 en 2007. Depuis, l’équipe nationale a évolué réussissant à se maintenir dans l’anti-chambre des Six Nations. "Revenir en équipe nationale, c’était toujours gai. On se connaît depuis des années, on s’attache. La situation n’a pas toujours été simple car tu peux entrer en conflit avec ton club qui ne veut pas te libérer. Mais je préfère à nouveau me concentrer sur l’aspect humain, les mecs que j’ai côtoyés toutes ces années. C’est totalement différent de l’esprit de club. Si on rejoint les Diables, c’est parce qu’on le veut tant il y a peu d’argent. C’est vrai que l’équipe a progressé mais on reste encore loin d’une éventuelle Coupe du Monde. En fait, on est entre deux chaises. Si on descend, on se retrouve face à de très faibles équipes. Mais dans le Six Nations B, les équipes sont déjà professionnelles."
"Buteur parce que je m’ennuyais"
En rugby, si on joue avant tout avec les mains, avoir un bon pied peut s’avérer très utile pour faire avancer l’équipe ou surtout marquer. Les buteurs ont d’ailleurs des postures bien particulières avant une pénalité ou une transformation. Et pour devenir le meilleur buteur de l’équipe nationale, il faut travailler sans cesse. "Tous les jours après l’entrainement. En fait, c’est bien : seul, personne ne t’ennuie. Ensuite, il faut effectuer des petits pas pour bien se placer." Pour Alan, le plaisir de botter est venu par nécessité. "Quand on était enfant, Kevin jouait après moi et donc, je devais l’attendre. Comme je m’ennuyais, j’ai commencé à le faire pour passer le temps. Ce n’est donc pas arrivé par hasard."