Cédric Taymans préface les Championnats d'Europe des Belges: "Il sont tous capables d'un podium"
- Publié le 26-04-2018 à 07h40
Cédric Taymans a emmené à Tel-Aviv huit judokas francophones au sein d’une délégation forte de quatorze Belges.
Comme tous les lundis, quand ils ne sont pas en stage ou en compétition, les élites francophones ont rendez-vous de 10 à 12 h, à Limal, pour l’entraînement. À quelques jours des Championnats d’Europe, la séance dirigée par Cédric Taymans est logiquement plus light que d’habitude. L’essentiel de la préparation qui a mené Toma Nikiforov et Cie en Russie, en Hongrie et, tradition oblige, à… Jodoigne est terminé. Le DT est le premier à sortir de la salle. Le temps de se changer, il est prêt à évoquer cet Euro 2018 en Israël où la Belgique présente une délégation forte de quatorze judokas, dont huit francophones…
Cédric, comment s’est passée cette préparation ?
“Très bien ! D’abord, parce qu’on ne déplore aucune blessure, ce qui est toujours la hantise quand on se donne à fond et que la fatigue implique qu’on est parfois à la limite. Bien sûr, il y a quelques bobos, mais rien d’anormal. Je les sens tous prêts et impatients de monter sur les tatamis, dès ce jeudi, en Israël, notre premier véritable objectif de la saison .”
En tant que DT francophone, quel est votre objectif ?
“Réussir le mieux possible ! Mais n’attendez pas de moi que je parle en termes de médailles. Tout ce que je veux dire est qu’ils ont tous leur place à ces Championnats d’Europe. Inutile que je leur mette la pression car ils se la mettent assez comme ça. De Toma Nikiforov à Anne-Sophie Jura, tous les judokas francophones alignés sont capables de monter sur le podium. Et j’imagine que c’est pareil pour les Néerlandophones.”
Il n’empêche, l’Euro 2017, à Varsovie, fut un échec…
“En termes de médailles, oui, puisqu’on n’en a décroché aucune… Mais, quand on dresse un bilan, il n’y a pas que le résultat, il y a aussi la manière. Et, l’an dernier, j’ai vu de bons combats, certes mal récompensés. Mais c’est le judo ! J’ai la chance d’avoir le soutien inconditionnel du CA et de pouvoir travailler sereinement, à long terme. Tous nos judokas n’en sont pas au même stade de leur carrière. Certains n’en sont même qu’au début .”
Toma Nikiforov est le leader de cette délégation, non ?
“Avec Toma et Charline, mais aussi Dirk, même s’il a un peu de mal depuis les Jeux de Rio, on peut compter sur des champions. Ils savent gagner. Mais ils peuvent perdre aussi… Quoi qu’il en soit, il est évident que leur palmarès inspire le respect. Ils sont des exemples pour les plus jeunes. Et ça se voit lors de tous les entraînements ou stages.”
Toma Nikiforov, 25 ans en - 100 kg : "Il a le judo dans le sang"
“Toma est le leader naturel de notre délégation tout simplement parce qu’il a déjà écrit l’histoire du judo francophone. C’est un champion. Avec ses avantages et ses inconvénients… Il ne faut pas lui apprendre le judo. Il l’a dans le sang ! Sur un tatami, Toma est capable de tout. Un champion, ça gagne. Mais ça perd aussi… Et ses combats en 2018 reflètent cette réflexion. Après s’être imposé à Visé, il est tombé à Paris, a perdu le bronze à Düsseldorf, mais il s’est relevé en décrochant l’argent à Ekaterinbourg. Toma figure parmi les quatre ou cinq meilleurs judokas de sa catégorie avec le Néerlandais, le Géorgien, un des deux Azéris et un des trois Russes. Sans oublier le Français… Sur le tatami, je n’ai rien à lui reprocher. Mais il est délicat à gérer en dehors. Toma est un talent pur, mais encore un enfant. Avec lui, il faut trouver le juste milieu dans l’encadrement car il faut éviter qu’il ne vive contre-nature. Il n’est jamais aussi fort que quand il est épanoui.”
Sami Chouchi, 25 ans en - 81 kg : "Il n'a jamais rien lâché"
“Après deux graves blessures à l’épaule et une autre au genou, l’an dernier, juste avant le Mondial, Sami a enfin connu une préparation complète sans souci et il est évident que son moral en est décuplé. Mais il n’a jamais rien lâché. Son gabarit longiligne le rend plus fragile, mais je n’en connais pas beaucoup qui mettent autant d’impact physique dans leur judo, surtout dans une catégorie aussi dense que les -81 kg. Comme Toma, Sami est un… grand enfant. Sa bonne humeur est communicative, même s’il a souvent besoin d’être rassuré. Aucun doute : c’est un talent ! Et il ne demande qu’à éclore, d’autant que Sami a mis ses études entre parenthèses, en septembre, pour se consacrer à 100 % sur le judo. Mais, lui aussi, il faut parfois gentiment le recadrer en dehors du tatami, notamment au niveau de son poids.”
Benjamin Harmegnies, 27 ans en + 100 kg : "Il a beaucoup progressé"
“ Benja , c’est un gros nounours ! Il y a toujours un truc qui ne va pas avant ou après. Mais quand il est sur le tatami, il est capable d’encaisser de fameuses doses d’entraînement. Et il a beaucoup progressé… La preuve par ses deux podiums de début de saison, l’argent à Sofia et le bronze à Prague. Mais il peut encore s’améliorer. Et il y travaille, même s’il n’a plus toutes les facilités qu’il a connues quand il avait le statut d’Élite à la Défense nationale.”
Joachim Bottieau, 29 ans en - 90 kg : "Intelligent, expérimenté"
“À 29 ans, Joachim est une valeur sûre en qui on peut toujours avoir confiance. C’est un gars intelligent, un judoka expérimenté. Après sa désillusion aux Jeux de Rio, il s’est isolé parce qu’il avait besoin de se ressourcer. Il est parti, seul, en Corée et au Japon, puis encore en Géorgie, pour être en accord avec lui-même. Chapeau ! Il y a trouvé les réponses à ses questions et il est revenu, s’imposant à Bucarest et se qualifiant pour le Mondial, à Budapest. Mais celui-ci n’a pas répondu à ses attentes. Il a encore beaucoup réfléchi avant de monter de catégorie à l’aube de cette saison, ce qui constitue un nouveau défi. Vu ses qualités, il est capable de le relever. Il l’a, du reste, déjà prouvé avec de beaux parcours à Sofia et à Agadir, mais aussi avec un superbe combat face au Japonais Baker, champion olympique, à Düsseldorf.”
Anne-Sophie Jura, 25 ans en - 48 kg : "Un modèle, un exemple"
"Anne-So est un modèle de professionnalisme. Elle est un exemple parce qu’elle met tous les atouts de son côté pour réussir : hygiène de vie, toujours à l’écoute. Elle est appliquée. Sereine, aussi, parce qu’elle n’est pas moins forte que les autres. Mais elle commet encore de petites erreurs, que l’expérience lui permettra de gommer. Anne-So a, certes, déjà 25 ans, mais elle s’approche du top européen, ce qui est à la fois nouveau et rassurant. À elle de gérer cette situation…"
Gabriella Willems, 20 ans en - 70 kg : "Elle est très déterminée
“Tout en étant la plus jeune de notre délégation, du haut de ses 20 ans, Gaby a déjà participé à l’ Euro , l’an dernier, à Varsovie, ce qui devrait constituer un avantage. D’elle, on peut affirmer qu’elle apprécie le haut niveau, le dépassement de soi. Gaby est une fille atypique, parfois lunatique, mais elle est très déterminée. Elle est structurée, conciliant ses études et le judo avec un certain bonheur. Son seul point faible, actuel, est la gestion des émotions. Mais on y travaille…”
Sophie Berger, 21 ans en - 78 kg : "Elle est bien dans sa peau"
“Sophie est montée en -78 kg, une catégorie qui, incontestablement, lui convient mieux pour développer son judo. La preuve ? Elle a déjà décroché trois médailles de bronze, cette saison, à Rome, à Varsovie et à Uster. Ralentie en 2015 par une opération des ligaments croisés du genou, elle est désormais bien dans sa peau, même si elle doit encore franchir un palier pour figurer dans le top européen et, a fortiori, mondial. Mais elle se construit !”
Charline Van Snick, 27 ans en - 52 kg : "Une championne, avec tout ce que ça sous-entend"
“Avec Toma, Charline est ce que j’appelle une championne, avec tout ce que ça sous-entend… Elle a un fameux caractère. Elle n’est pas facile, mais son palmarès plaide pour elle. Comme Dirk, Charline est médaillée olympique et, à ce titre, elle mérite le respect. Et puis, ses résultats sont révélateurs. En un an, elle a réussi à figurer dans le Top 10 mondial de sa nouvelle catégorie, les -52 kg. Pour y parvenir, elle a battu les meilleures ! Comme en octobre, à Abou Dhabi, où elle s’est débrouillée toute seule. Qui peut en dire autant ? Pour le DT francophone que je suis, ce n’est pas toujours évident. On ne se voit presque pas. On ne s’entend presque pas. Mais j’ai entière confiance en elle. Charline est souvent au rendez-vous, c’est-à-dire pas très loin du podium. Pour moi, avec elle, on gagne ensemble et on perd ensemble.”