Thomas Briels, le collectionneur de médailles des Red Lions
Nos Reds Lions entament mercredi en Inde la Coupe du Monde avec l’ambition d’enfin remporter un titre majeur. Notre équipe nationale a glané cinq médailles dans les 3 grandes compétitions internationales (JO, Coupe du monde et Euro), mais jamais l’or. Dont 4 lors des 11 dernières années. Un seul Belge est monté sur ces 4 podiums : Thomas Briels. L’actuel capitaine des Red Lions évoque ces 4 moments historiques du hockey noir-jaune-rouge… Avant d’en écrire un 5e, à Bhubaneswar ?
- Publié le 23-11-2018 à 19h13
- Mis à jour le 25-11-2018 à 16h52
Nos Reds Lions entament mercredi en Inde la Coupe du Monde avec l’ambition d’enfin remporter un titre majeur...
Notre équipe nationale de hockey entame cette semaine en Inde la 6e Coupe du monde de son histoire. Une compétition, le deuxième événement le plus important de la discipline après les Jeux Olympiques, dans laquelle la Belgique n’a jamais brillé. Auréolés de leur médaille d’argent aux derniers JO 2016 de Rio, nos Red Lions, souvent bien placés mais jamais gagnants, peuvent-ils enfin remporter un titre majeur ? Ce doit être l’ambition, évidemment, mais, à Bhubaneswar, les Belges ne seront pas les seuls à briguer l’or, c’est aussi l’objectif des Pays-Bas, champion d’Europe en titre, de l’Australie, tenante du titre, ou de l’Argentine, champion olympique, notamment…
Après un mini-séjour à Mumbai, Shane McLeod et ses Red Lions ont pris leurs quartiers ce samedi à Bhubaneswar, au sud de Calcutta, à 50 km de la côte du Golfe du Bengale. Un match d’entraînement contre l’Angleterre, disputé en trois quart-temps lundi, servira de dernier ajustement avant le début de la Coupe du monde que la Belgique aura l’honneur d’ouvrir mercredi contre le Canada, avant de rencontrer le pays hôte dans le choc de ce groupe C, et de conclure ses premiers devoirs contre l’Afrique du Sud. Si la logique est respectée, Belges (3es mondiaux) et Indiens (5es au ranking de la FIH) doivent donc se disputer la première place du groupe, directement qualificative pour les quarts de finale. Le 2e, comme le 3e de chaque groupe, disputera lui un barrage de rattrapage pour rejoindre le top 8. Et c’est là que les choses se corseront sans doute pour les joueurs de Shane McLeod, l’entraîneur néo-zélandais de notre équipe nationale, puisque le groupe des Belges croisera, en barrages ou en quarts, avec la poule D, celle de l’Allemagne et des Pays-Bas. Deux gros morceaux donc, pour les Red Lions, ambitieux mais prudents…
"Nous allons prendre cette Coupe du monde étape par étape, même si c’est sûr que nous voulons jouer la finale", avoue Shane McLeod. "Notre poule est un groupe très intéressant et l’on doit en être conscient. Jouer contre l’Inde, en Inde, est très compliqué. Ensuite devraient se dresser normalement sur notre route l’Allemagne ou les Pays-Bas. La première étape cruciale sera de passer les quarts de finale et une fois en demi-finale on jouera naturellement pour aller jusqu’au bout…"
En sanskrit, Bhubaneswar signifie le seigneur des mondes. Le devenir sera l’ambition des Red Lions…
Les 4 grandes distinctions du hockey belge et de Thomas Briels
Notre équipe nationale a glané cinq médailles dans les 3 grandes compétitions internationales (JO, Coupe du monde et Euro), mais jamais l’or. Dont 4 lors des 11 dernières années. Un seul Belge est monté sur ces 4 podiums : Thomas Briels, l’actuel capitaine des Red Lions. L’Anversois évoque ces 4 moments historiques du hockey noir-jaune-rouge… Avant d’en écrire un 5e, à Bhubaneswar ?
Euro 2007 > Manchester
- 1. Pays-Bas 2. Espagne 3. Belgique
La médaille la plus inattendue: "Un exploit qui a tout changé"
En 2007, les Belges ne rêvaient pas encore ouvertement d’une médaille lors d’un grand tournoi. Rien ne laissait penser que les championnats d’Europe de 2007 constitueraient le grand déclic tant attendu. Les Red Lions ignoraient tous qu’il y aurait un avant et un après Manchester 2007. Les Belges, coachés par Adam Commens, étaient plongés en pleine morosité lors de cet été historique. En juin, ils avaient achevé le Champions Challenge, soit l’équivalent de la D2 du Champions Trophy, à la dernière place. Giles Bonnet avait d’ailleurs fait les frais de ce parcours calamiteux.
"À cause de nos résultats au Champions Challenge et de notre changement de coach, personne ne nous attendait à Manchester", se souvient Thomas Briels.
Versés dans le groupe de l’Angleterre, de l’Allemagne et de la République tchèque, les Belges avaient besoin d’un premier exploit pour sortir de la phase de poule. "Nous étions David contre Goliath."
À force de courage, les Reds ont atteint la demi-finale qu’ils ont perdue face aux Pays-Bas (6-1). "Il n’y avait pas vraiment eu match."
À nouveau, les protégés d’Adam Commens étaient condamnés à une mission périlleuse lors de la petite finale face aux champions du monde en titre, l’Allemagne. Un succès signifiait une médaille de bronze et surtout un retour de la Belgique aux Jeux Olympiques. "Personne n’a oublié ce tip in de Truyens lors de la dernière minute. Il scellait notre victoire 4-3 face aux Allemands. Je n’ai aucun doute sur le fait que ce goal a été le plus important de toute l’histoire du hockey belge", confie Briels qui jouait seulement son 2e tournoi avec les A. Ce jour-là, les Belges ont écrit une grande page de leur histoire. "Je me souviens d’un match de préparation face aux Allemands de Zeller and co. Ils nous avaient battus 9-1 ! Cette victoire à Manchester constituait une énorme surprise. Cette médaille représentait beaucoup pour nous. Non seulement nous devions jouer à 200 % de notre potentiel, mais nous étions dépendants de l’état de forme de notre adversaire. Assurément, c’était la médaille la plus dure à conquérir."
Au coup de sifflet final, les larmes ont coulé. "Tout le monde pleurait car certains ne pensaient plus qu’ils iraient un jour aux JO. L’équipe s’est structurée de manière plus professionnelle par la suite."
Euro 2013 > Boom
- 1. Allemagne 2. Belgique 3. Pays-Bas
La médaille la plus populaire: "La communion avec le public était intense"
Après la médaille de bronze en 2007, les Belges ont raté le coche lors des championnats d’Europe en 2009 et 2011. Vu leur absence à la Coupe du monde 2010 et leur 5e place aux Jeux Olympiques de 2012, ils ont attendu leur rendez-vous à domicile pour confirmer la nouvelle vague noir-jaune-rouge. Lors de l’Euro 2013, les hockeyeurs du Vieux Continent se sont donné rendez-vous en périphérie d’Anvers, à Boom lors d’un mois d’août féerique pour les Red Lions. Personne n’a oublié la première présence des Belges en finale, et tout le monde garde en mémoire cette communion historique entre une équipe et ses supporters. "Je conserve d’abord l’image d’un public présent en masse à Boom", confie Thomas Briels. "J’ai joué de nombreux tournois durant ma carrière. Boom 2013 a été le plus chouette et le plus beau. La fédération avait abattu un travail de dingue. L’organisation était parfaite. Le village était terrible."
Les Red Lions ont joué un rôle majeur dans cette bonne ambiance générale. Un sentiment de légèreté flottait dans l’air. Sous le regard du roi, les Lions ont chanté a cappella la Brabançonne devant des tribunes qui affichaient complet. Le silence des 8 000 supporters en disait long sur le respect des fans qui ne se privaient pas de hurler durant les actions des protégés de Marc Lammers. En parallèle, les Red Panthers ont également performé avec leur 4e place. Côté Lions, on a mis la barre très haut. En phase de poule, l’Allemagne, l’Espagne et la Russie n’avaient pas été des équations trop compliquées à résoudre. En demi-finale, les Anglais ont été balayés très facilement.
"Nous les avions battus 3-0 le jour de mes 26 ans", se rappelle l’attaquant qui avait inscrit un but précieux. "J’avais mis le 1-0. Tout le public avait alors chanté pour mon anniversaire. Les fans avaient joué un rôle exceptionnel."
Lors de la finale, l’Allemagne s’était à nouveau mise sur notre route. À la mi-temps, les Belges menaient, mais Simon Gougnard était sorti K.-O. avant la pause. Il ne remontait plus sur le terrain ce qui déréglait le dispositif des Belges. "Refaire le match ne sert à rien", coupe l’attaquant au format de poche. "Simon était très important dans le milieu. Il nous a manqué. S’il n’était pas sorti, le match aurait été différent. On jouait vraiment très bien."
Boom 2013 a "changé tout en ce qui concerne le lien entre l’équipe et ses supporters." Quant aux joueurs, ils devenaient plus costauds et plus expérimentés.
JO 2016 > Rio
- 1. Argentine 2. Belgique 3. Allemagne
La médaille la plus historique: "La récompense de 12 ans de sacrifices"
À chaque tournoi, les Belges étaient attendus. Quelques déceptions ont jalonné leur route dont celle de l’Euro 2015 à Londres. Une équipe transparente n’avait même pas accroché la demi-finale. À un an des JO de Rio, l’inquiétude était de mise. Shane McLeod est alors arrivé le 1er octobre 2015 pour remettre de l’ordre. Son nettoyage a conduit les Red Lions vers la médaille la plus prestigieuse de leur histoire, l’argent olympique.
"Les attentes étaient énormes. Nous sentions la pression partout autour de nous. La Fédération voulait cette médaille. Elle en parlait déjà cinq ans plus tôt. À Londres, nous n’étions pas assez bons, mais nous n’étions pas passés si loin."
Shane McLeod était la pièce qui manquait au puzzle. "Il a tout changé au niveau de la mentalité. Nous avons travaillé très durement. Nous avons multiplié les workshops et les meetings. Chaque détail était soigné. Nous avons appris à nous connaître parfaitement. Le groupe a beaucoup mûri durant cette année de préparation."
Avant les JO, les Red Lions ont disposé d’une préparation idéale. "En club et en équipe nationale, nous avons trimé comme des dingues." Il fallait encore confirmer sur le terrain ce qui fut fait admirablement jusqu’à la grande finale. "En quart de finale, nous battons l’Inde ce qui nous offre une demi-finale contre les Pays-Bas." Tous les Red Lions vous le diront. Le succès face aux Oranje représente le plus beau souvenir sportif. "Nous venions d’acquérir la certitude de remporter une médaille olympique, notre plus grand rêve. Notre prestation avait été grandiose. Nous étions tous focus à 100 %. Tu sentais un truc si fort qui nous liait tous. Nous ne pouvions pas perdre. Je donne un assist à Flo (van Aubel) sur le 3-1. Il restait 13 minutes de jeu. Avec Flo, nous avons fait un câlin sur le terrain après cette victoire. Mon plus beau moment."
En finale, le momentum était passé. La tension dynamique avant la demi-finale n’était plus la même. Le relâchement avait déjà commencé. "Nous aurions pu l’emporter. Je ne me souviens plus bien de la finale. Nous étions si contents après la demi-finale que nous n’avions plus le même sentiment."
Ces gars avaient sacrifié 12 ans de leur vie pour cette médaille. "Et nous avons répondu le jour J en sortant notre plus beau jeu. Il est difficile de mettre des mots sur ces JO car tu ne peux pas tout expliquer. Sur le moment, tu ressens de l’émotion et beaucoup de confiance."
Le lendemain de la finale, Thomas Briels a partagé dans les hauteurs de Rio une journée détente avec 7-8 Reds autour d’une ou plusieurs caïpirinha. "Cette journée appartient aux plus belles de ma vie. Nous chantions. Nous étions relax. Nous pouvions relâcher toute la pression d’une année si intense. Le soleil était radieux."
Euro 2017 > Amstelveen
- 1. Pays-Bas 2. Belgique 3. Angleterre
La médaille la plus amère: "Nous étions venus pour l’or et rien d’autre"
Des 4 médailles remportées par les Red Lions actuels, celle d’Amstelveen est certainement celle qui eut le goût le plus amer. Dans la zone d’interviews, certains Reds avaient déjà enlevé la breloque d’argent qui semblait brûler leurs yeux. Les Belges auraient dû remporter leur première médaille d’or lors de ce championnat d’Europe 2017. Un peu plus d’un an plus tard, Thomas Briels est toujours fâché par ce match raté en finale. "Je suis toujours déçu. Nous avions proposé un beau jeu en finale. Nous y croyions vraiment. Après notre victoire face aux Allemands en demi-finale, personne n’avait levé le pied. Nous n’étions pas encore contents car nous étions venus pour l’or et que l’or."
Un grain de sable a enrayé la mécanique lors de ce triste jour d’août 2017. Si les Red Lions ont livré une première mi-temps correcte, ils avaient oublié que les Pays-Bas disposaient d’un joueur de plus, les 12.000 supporters tous vêtus d’orange dans les tribunes du Wagener Stadium. "À la mi-temps, nous menions 1-2 avec la conviction que notre jour était arrivé. Nous avions fait le break 0-2 sans pour autant bien jouer. À 1-2, les tribunes se sont enflammées. Ce goal stratosphérique a tout changé. Je ne sais pas l’expliquer, mais il a tout changé. Si cette balle était passée au-dessus, nous devenions une demi-heure plus tard champions d’Europe."
Amstelveen reste une pilule difficile à avaler. Elle démontre surtout l’ambition de cette génération dorée. "Nous jouons notre jeu en toutes circonstances. Nous ne nous adaptons pas à nos adversaires. On pose notre structure. Si chacun prend ses responsabilités, nous devenons redoutables."
Les Belges avaient eu besoin des shoot out en demi-finales pour écarter l’Allemagne. "Quand tu as un Vincent Vanasch dans ton équipe, tu abordes avec confiance les shoot out. Je me souviens d’un match en EHL à Bloemendaal avec Vinchou. Il avait arrêté 20 des 24 shoot out alors que nous jouions ensemble à Oranje Zwart. La séance avait duré près d’une demi-heure !"
Quand il replonge dans l’Euro 2017, Thomas Briels se plaît à rappeler l’humiliation 0-5 infligée en phase de poule par les Belges face aux… Pays-Bas ! "A Rio, nous les avions battus en tournoi officiel pour la première fois. Un an plus tard, nous les battions très nettement pour la première fois chez eux. Ils ont pris une claque devant 12.000 de leurs supporters."
Les Red Panthers, aussi, avaient conquis la médaille d’argent à Amstelveen. "Nous les avions regardées. Elles ont quelques années de retard sur nous, mais elles bossent. Aujourd’hui, nous sommes 3es au ranking FIH car nous avons fait preuve de beaucoup de régularité lors des derniers grands tournois. Il nous reste encore un vide à combler : la médaille d’or", conclut le capitaine des Red Lions depuis janvier 2017…