Fabrice Rogge: "Les jeunes ne doivent pas oublier leurs origines sportives"
- Publié le 30-08-2018 à 08h21
- Mis à jour le 03-09-2018 à 12h45
La THL et l’ARBH veulent protéger les écoles de jeunes.
Il faut protéger les écoles de jeunes. Chaque semaine, le même refrain est entonné durant le mercato c’est-à-dire durant toute l’année vu qu’il n’existe pas une période officielle (et respectée) de transferts.
Personne ne contestera l’impérieuse nécessité de préserver les jeunes joueurs. Que le hockey reste un loisir jusqu’à 14 ans sonne comme une évidence. Que les parents ne mettent pas leurs enfants sous pression en est une autre. La réalité est différente.
Au fil des ans, la notion de clubman a sombré avec les dernières parcelles d’amateurisme du stick belge. Par conséquent, il n’est pas rare de voir des scouts venir zieuter les jeunes talents. Les puissants ne reculent devant aucun sacrifice (ou presque) pour s’offrir les stars de demain.
La question des indemnités ressort donc à intervalle régulier. Un club peut-il se plaindre de voir un de ses "enfants" rejoindre le matricule d’à côté ? Marc Coudron se mouille. "Cette problématique revient sur la table depuis 2005", confie le président de l’ARBH. "Que les clubs viennent avec une solution pour qu’une réflexion soit opérée ! Prenons un exemple concret : Tom Boon. Il a joué au White Star jusqu’à 10-11 ans avant de jouer à Uccle Sport, au Racing, à Bloemendaal et en équipe nationale. Qui l’a fait grandir ? Durant ses premiers pas, il a progressé, mais il a payé des cotisations qui ont profité à ses clubs. Moi, je l’ai coaché bénévolement quand il était petit. Dois-je être indemnisé ?" Les exemples se ramassent à la pelle. "Anouk Raes a grandi avec le Pingouin, mais elle a aussi offert de grands moments à son ancien club. N’a-t-elle pas contribué à l’essor du club nivellois ?"
"Favorable à une indemnisation"
Marc Coudron ne balaie pas d’un revers de main la problématique, mais il refuse de s’enliser dans un débat stérile. "Les raisons d’un départ sont nombreuses. Le club a toujours la possibilité d’améliorer son encadrement, son installation et ses ambitions pour garder ses jeunes."
Le président de la Top Hockey League, un comité qui réunit les présidents des clubs de DH, s’est aussi penché sur ce danger qui menace le stick. "Perdre un jeune à 18 ans est embêtant", confirme Fabrice Rogge. "Former un jeune est un investissement financier. Je suis favorable à une indemnisation. Les jeunes oublient trop vite leurs origines sportives. Un jeune talent a besoin d’un club structuré pour s’épanouir. Je regrette que les clubmen aient disparu. À la THL, nous réfléchissons à une indemnisation, mais la question dépasse largement le cadre de la Top Hockey League."
En basket, un club doit verser 50 euros à l’ancien club par année de formation. En aucun cas, les parents ne mettent la main au portefeuille. "Il est clair qu’on parle d’argent quand on évoque une indemnisation, confirme Fabrice Rogge. Si on ouvre cette porte, il faut savoir vers où on va. N’oublions pas qu’il faut absolument que les enfants ou les parents ne soient mis sous pression. Nous pourrions proposer un contrat à un jeune afin de le garder jusqu’à ses 18 ans. Aujourd’hui, on gagne plus qu’un peu d’argent de poche avec le hockey. Nous devons évoluer avec cette donne."
Le président de l’ARBH tire la sonnette d’alarme sur un autre péril qui menace nos jeunes : l’arrivée d’étrangers de seconde zone. "Je suis favorable à l’obligation d’aligner au moins 5 jeunes entre 16 et 18 ans. Certains clubs pensent régler leurs problèmes en enrôlant un étranger qui n’est pas plus fort qu’un Belge de leur propre école de jeune."
Si les mouvements entre les clubs avant les 18 ans sont le fruit d’un grand nombre de paramètres plus ou moins objectifs, il faut analyser les transferts de jeunes belges au sein de la Division Honneur. Le phénomène se dégonfle alors. Sur les 69 mouvements annoncés par les 12 clubs messieurs de Division Honneur, seulement 36 concernent des Belges. Parmi ceux-ci, 24 sont âgés de plus de 22 ans. Il ne reste que 12 jeunes U22 qui ont changé de maillot durant un mercato très controversé. Aucun n’a engagé plus de trois jeunes belges. L’Antwerp tient la palme avec Van der Putten, Stockbroekx et Devillé. Le Dragons (avec Lootens et T. Willems), l’Orée (avec Masso et Sidler), le White Star (avec Caytan et Freyling) suivent la marche. Delavignette (au Racing), Poncelet (retour au Léopold) et Damien Le Clef (Herakles) ont également changé de terrain.
À quand les licences ?
Derrière la situation des jeunes, le cas des anciens inquiète également. En 2018, les clubs usent de tous les moyens pour attirer de nouveaux joueurs. Des enveloppes se perdent. Des annonces de changement interviennent déjà en janvier. Des dents grincent quand un joueur affronte lors du playoff son futur club pour une place en EHL. Sage, Fabrice Rogge temporise. "Je ne vois pas beaucoup de mouvements entre les clubs belges cette saison. La THL veut harmoniser les règles de transfert en délimitant une période de mercato. Nous souhaitons qu’aucune annonce n’intervienne avant une date fixée. Ces mesures visent avant tout à éviter du stress inutile. Une équipe ressent déjà assez de pression chaque dimanche."
À nouveau, Marc Coudron attend qu’un club apporte une piste de réflexion avant de lancer un think tank.
Les licences mettraient évidemment de l’ordre à cet imbroglio. Tout le monde en parle. Tout le monde applaudit des deux mains devant cette initiative mais, jusqu’ici, rien n’est fait.