Emma Puvrez: "Nous jouerons pour battre l'Australie"
Emma Puvrez joue sans complexe et revit après une expérience délicate en 2014
- Publié le 24-07-2018 à 11h13
Emma Puvrez joue sans complexe et revit après une expérience délicate en 2014 Calée dans un canapé du luxueux hôtel Marriot situé dans le West India Quay, Emma Puvrez arbore un large sourire. Son visage est lumineux et démontre un épanouissement maîtrisé. La jeune Red Panther de tout juste 21 ans a retrouvé sa joie de jouer. La compétition ne lui fait pas peur. L’enjeu ne la tétanise plus. Avec ses forces et ses faiblesses, la joueuse de l’Antwerp se donne sans compter et jouit de chaque minute passée sur le terrain. L’immense stade de la Lee Valley Hockey ne lui semblait plus démesurément grand. Le chemin parcouru est un signe d’espoir pour de nombreuses joueuses qui ont été lancées dans le grand bain trop tôt.
Un Mondial 2014 douloureux
Emma Puvrez aurait pu tout arrêter du jour au lendemain. Elle n’avait jamais rêvé du strass et des paillettes de l’élite mondiale. Quand elle a démarré à 5 ans avec quelques copines à Taxandria, elle ne voyait qu’un hockey-loisir qui suffisait à son bonheur. Une sélection provinciale plus tard, Puvrez s’est retrouvée enfermée dans une spirale qui l’a dépassée. Retenue en U15, elle a basculé en U16 avant d’être happée par Pascal Kina pour un test training qui s’est transformée en statut de test player chez les A.
Alors qu’elle jouait au Victory, l’attaquante a été bombardée dans la sélection des Red Panthers qui jouaient la Coupe du Monde 2014 à La Haye. L’expérience a été douloureuse, pire traumatisante. "J’avais 16 ans à peine. J’ai souffert durant ce tournoi. Le stade de La Haye était trop grand pour moi. Je ressentais tellement de stress que j’étais incapable de développer mon jeu."
Elle n’a pas oublié le vacarme qui émanait des tribunes lors d’un Pays-Bas - Belgique cauchemardesque. "Je n’ai quasi pas touché la balle. Sur un match, je pouvais être contente si j’en touchais cinq. Avec ces quelques balles, je devais accomplir des miracles et si possible marquer un but. Cette période a été très difficile. Ce premier tournoi n’était pas bon du tout."
Entre les matches, elle plongeait, en plus, la tête dans les syllabi pour étudier. "Je me mettais beaucoup de pression à l’époque pour réussir mes études et le hockey", poursuit celle qui étudie le Sport en Beweging. La Haye a détruit le rêve naissant d’Emma Puvrez qui l’a payé durant quelques années.
En 2017, elle a carrément choisi de faire un pas en arrière en reprenant le chemin des terrains avec les U21. Sa timidité et son allergie maladive au stress l’empêchaient d’exploiter son potentiel lors des grandes échéances. "Il y a un an, j’ai fait le choix avec Niels Thijssen de jouer les championnats d’Europe avec les U21 à Valence. Attaquante, je me sentais plus libérée car je contrôlais mieux les attentes et la pression qui l’accompagne. J’avais surtout besoin de me retrouver en répondant à deux questions. Pourquoi as-tu commencé à jouer au hockey ? Quel plaisir en retires-tu ? À ce moment, je ne ressentais aucun plaisir. Avec les U21 , j’ai joué un grand rôle dans l’organisation du jeu. J’ai pu essayer et oser sur le terrain car je n’étais pas enfermée dans un registre strict comme maintenant."
Un repositionnement
Les U21 ont achevé l’Euro espagnol à la deuxième place et ont remis Emma Puvrez sur les bons rails. "Le feedback de Niels Thijssen était vert sur toute la ligne." En septembre, elle a donc achevé la première partie de sa convalescence. En janvier, elle a terminé sa remise à niveau lors du stage en Argentine et au Chili. "Dès le premier soir, le staff est venu vers moi avec une idée précise : me faire jouer en défense."
Surprise, l’attaquante a pris l’option de relever ce challenge qui n’était pas un ultimatum. "J’aimais ce défi. Il m’a été présenté positivement. Thijssen estimait que je gagnais beaucoup de balles, que j’étais plus à l’aise avec le jeu devant moi et que mes passes aboutissaient presqu’à 100 %. En plus, mon jeu offensif leur plaisait. Moi, j’ai besoin de toucher des balles."
Aujourd’hui, elle a disputé 11 matches dans la peau d’un back droit dont celui face à la Nouvelle-Zélande. Après avoir couru 7 kilomètres et stoppé plusieurs percées des Blacksticks, elle avait le sentiment du devoir accompli. "Je ne ressentais pas autant de pression qu’en 2014. Je me sens libérée même si j’ai commencé le match avec du stress." Dès sa première touche de balle, elle avait déjà envoyé un signal positif à toute son équipe. Son match a d’ailleurs été de bonne facture. "J’aime défendre. Je prends vraiment du plaisir. Il faut aussi dire qu’il est plus facile de vivre avec l’équipe en 2018. Tout le monde parle avec tout le monde."
Comme Boccard
Le mérite de cette renaissance est à attribuer à Niels Thijssen qui, par son style, a insufflé une grande confiance aux 18 Red Panthers. "Il est calme et comprend les gens. Il me met à l’aise. Il veut toujours que les Panthers aient une part de liberté sur le terrain."
Comme Gauthier Boccard, Emma Puvrez a réussi sa reconversion défensive. Le Red Lion et la Red Panther avaient fait tout leur écolage en tant qu’élément offensif avant de bifurquer vers un flanc défensif. Leurs histoires diffèrent, mais, dans les deux cas, elles démontrent qu’il est possible de changer de rôle tardivement. "Je n’ai jamais appelé Gauthier", souffle Emma Puvrez. "Je ne le croise jamais. Je ne ressentais pas le besoin de l’appeler pour écouter son expérience (rires)."
Une valeur sûre
Niels Thijssen avait compris avant tout le monde le potentiel offensif de sa numéro 8. En effet, il a pris le risque de la sélectionner alors qu’il y avait du monde qui se bousculait au portillon pour figurer à l’arrière. "J’étais ravie et un peu surprise d’être dans la sélection des 18", reconnaît-elle sans ambages. "Duquesne et Raymaekers sont deux excellentes défenseuses. Moi, je n’étais qu’un test."
Un test qui se transforme en valeur sûre et d’avenir. Emma Puvrez a réussi son premier test contre la Nouvelle-Zélande en prenant sa revanche sur un début de carrière très houleux. L’avenir s’annonce plus dégagé pour cette joueuse qui fête ses 21 ans ce mercredi.
"Nous jouerons pour battre l'Australie
Les Red Panthers espèrent profiter des espaces laissés par les Australiennes
Les Red Panthers affronteront l’Australie mardi à 14 h 30 (15 h 30, heure belge) avec le ferme espoir de débloquer leur compteur. Comme le Japon a perdu face aux Aussies, les Belges gardent un bon espoir de poursuivre l’aventure en cas de bon résultat mardi.
"Nous voulons toujours gagner nos matches", rappelle sur un ton catégorique Emma Puvrez, presque vexée quand on lui parle des bienfaits d’un partage. "Nous savons que nous aurons besoin d’une victoire pour sortir de la poule. J’ai vu le match entre l’Australie et le Japon. Les Australiennes ont dominé la première période avant que le Japon ne se réveille."
L’Australie est considérée à juste titre comme une Nouvelle-Zélande un peu moins impériale. "Je dirais plutôt que l’Australie laisse plus de place pour jouer que les Néo-Zélandaises. En Australie, les 4 filles en défense ont un long flick. Notre adversaire appuie son jeu sur des qualités physiques affirmées. Elles sont très rapides. Techniquement, elles valent la Nouvelle-Zélande, avec quelques joueuses-clefs dont Emily Smith."
Le dernier Belgique-Australie remonte à juin 2017 lors des demi-finales de World League à la Rasante. Le match s’était soldé par une courte défaite 0-1 à la suite d’un pc. Sur l’ensemble de la rencontre, les Red Panthers avaient bousculé les Australiennes. Un an plus tard, les Belges ont conquis le titre de vice-championnes d’Europe avec toute la confiance qui l’accompagne.
"Nous sommes bien rentrées dans le tournoi"
Vingt-quatre heures après la défaite 4-2 contre la Nouvelle-Zélande, Emma Puvrez était fière du visage affiché par son équipe même si elle regrettait la perte d’un point. "Dans le cercle, nous avons souffert car elles se trouvaient toujours dans ton dos, prêtes à plonger sur tout. Je ne savais pas toujours à quel moment y aller. Nous avons eu l’occasion de montrer que nous avions préparé cette Coupe du Monde avec sérieux durant 10 mois. Je suis heureuse car j’ai pris du plaisir. L’équipe aussi."