Francis Joyon, un marin d’exception
Il y a quatre ans, sur le Rhum 2014, d’aucuns pointaient Francis Joyon comme un candidat au sacre si les conditions étaient difficiles, ce qui était une probabilité non négligeable.
- Publié le 13-11-2018 à 08h37
- Mis à jour le 13-11-2018 à 08h38
Il y a quatre ans, sur le Rhum 2014, d’aucuns pointaient Francis Joyon comme un candidat au sacre si les conditions étaient difficiles, ce qui était une probabilité non négligeable.
Ce ne fut pas le cas. Il finira sixième sur Idec. Partie remise. Mais le Breton de 62 ans avait déjà fait ses preuves. En 2008, il avait établi le record autour de la planète. Cinq ans plus tard, toujours sur le même bateau, il pointait un temps canon sur le mythique parcours de l’Atlantique Nord entre New York et le cap Lizard. Après un dernier coup d’éclat autour du globe en janvier 2017 quand il a enlevé le Trophée Jules Verne en un temps ahurissant de 40 jours et 23 heures (record du tour du monde en équipage), Joyon s’est préparé pour cette Route du Rhum. Ses adversaires étaient donc prévenus. Francis Joyon sait attaquer et se faire mal. Il connaît son bateau, vieux de 12 ans, sur le bout des doigts. Réfractaire à la course aux bateaux de dernière génération qui laisse une empreinte carbone très lourde, préférant faire vivre et durer, Francis Joyon ne disposait pas de ces fameux foils capables de faire voler les bateaux.
"Je préfère retaper un bateau. Cela correspond bien à ma philosophie et je me sens plus en paix avec moi-même que de construire un bateau neuf." Il ne présentait pas au départ une machine volante mais lui, le vieux loup de mer, il a marché sur l’eau. Après les bastons de l’Atlantique, Francis Joyon a maîtrisé l’écart avec François Gabart dans les alizés pour en découdre sur les contours de la Guadeloupe.
L’île que le marin connaît bien puisqu’il en était à sa 7e participation. Il avait décidé d’offrir un scénario hitchcockien aux habitants qui vivent au rythme du Rhum tous les quatre ans, un événement qui fédère toutes les catégories sociales et toutes les générations. La course au large porte en elle une dimension d’aventure qui a toujours fasciné l’imaginaire collectif. De l’infinité des océans, la course se transposait en régate.
Exit les Josse, Coville et Le Cléac’h, l’histoire était tracée pour un mano a mano de pure folie dans un finish aussi serré que le Rhum n’avait plus connu depuis 40 ans. Un bateau bancal pour Gabart, un filet de pêche dans la dernière ligne droite pour Joyon passé en tête sur une mer qui flirtait avec la pétole. Grignotant mille après mille dans un corps à corps avec François Gabart, Francis Joyon s’est enfin adjugé la Route du Rhum, coupant la ligne en vainqueur au terme de 7 jours 14 heures et 21 minutes, un nouveau record avec 7 minutes d’avance sur Gabart…