Nafi Thiam fait sa rentrée ce samedi: "Elle doit sentir le soutien de tout un club"
Le président Alain Decors veut renforcer les liens du RFCL avec sa championne.
- Publié le 17-05-2019 à 08h02
- Mis à jour le 17-05-2019 à 11h13
Le président Alain Decors veut renforcer les liens du RFCL avec sa championne. Ce samedi, à Gaurain, ce sera l’heure de la rentrée pour Nafi Thiam. La championne olympique de l’heptathlon, blessée au mollet en janvier dernier, débutera sa saison par les Interclubs, sous le regard d’Alain Decors, le dynamique nouveau président du RFC Liégeois, club dont elle porte les couleurs.
"Nafi, qui disputera son premier heptathlon de la saison à Talence les 22 et 23 juin, a manifesté son intention de s’aligner ce samedi sur 200 m et au javelot, la première épreuve faisant partie de sa stratégie pour améliorer son total à l’heptathlon. Et elle prendra également part au relais 4x100m", explique le dirigeant liégeois, ancien spécialiste du 400 m haies de bon niveau.
Est-ce, pour vous, une fierté de voir une championne olympique au service du club ou trouvez-vous cela normal ?
"Les deux. C’est évidemment une fierté, et je trouve aussi ça normal dans le sens où, d’après tous les échos que j’en ai, c’est une jeune femme très simple, honnête, bonne camarade et qui respecte ses engagements. Ce mardi, à Naimette, j’ai pu voir qu’elle est restée une heure dans la tribune du stade avec ses copines, à raconter comment son stage en Turquie s’est passé, etc. Je ne suis donc pas surpris de la voir participer à trois épreuves. C’est à la fois pour parfaire sa préparation, pour rendre service à son club et aussi par plaisir vu qu’elle se sent bien dans le groupe constitué autour d’elle."
Quel est l’impact d’avoir une championne de son statut à Liège ?
"Il est évidemment positif à tous les niveaux. C’est une championne abordable, elle aime beaucoup les enfants et ne rechigne jamais à prendre un selfie, voire... dix selfies à la suite, lorsque les enfants la sollicitent. Pour ça, elle a un coeur en or. Quand on voit sa relation avec les jeunes, et la part de rêve qu’elle suscite chez eux, on ne peut que se féliciter de l’avoir chez nous. Avec ses camarades d’entraînement, la relation est excellente également. Et pour le reste, je sais que d’autres clubs nous jalousent sa présence à Liège, que ce soit du côté francophone ou néerlandophone d’ailleurs: beaucoup de clubs flamands, avec plus de moyens que nous, ont essayé en vain de l’attirer chez eux."
Qu’est-ce qui la retient à Liège d’après vous ?
"C’est avant tout son attachement à son entraîneur. Comme on dit, on ne change pas une équipe qui gagne ! Tant qu’elle gagne des titres, qu’elle continue à progresser, elle va rester avec Roger Lespagnard à Liège."
N’est-ce pas aussi une question de considération ?
"Je vais peut-être vous étonner mais sur ce point précis, le club ne l’a pas spécialement gâtée jusqu’ici. Pour en avoir discuté avec son entourage et après analyse de la situation a posteriori, il apparaît en effet qu’on n’a pas fait beaucoup de choses pour elle."
Sachant cela, il est finalement étonnant que Nafi soit restée.
"Peut-être, mais c’est une fille honnête, sensée, intelligente. Et le fait qu’elle réussisse sportivement avec Roger est un facteur essentiel pour elle, un facteur stabilisant. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles je suis monté au créneau pour la défendre à la suite de sa prise de parole sur l’incident de Berlin : c’est pour qu’elle sente qu’il y a un club derrière elle."
En tant que président, quelle relation entretenez-vous avec elle ?
"Je la laisse tranquille ! Mais elle sait que je suis là - j’échange beaucoup avec Roger et avec sa maman - et qu’elle peut faire appel à moi. Vous savez, Nafi reste assez farouche... parce qu’elle est intelligente. Il y énormément de monde qui essaie d’avoir des contacts directs avec elle et c’est de plus en plus compliqué. Moi-même, venant d’être élu à la tête du RFCL en mars, je ne me sens pas encore cette légitimité. Mais je tenais à ce qu’elle sente le soutien de tout un club. Entre autres initiatives, je vais organiser des déplacements collectifs aux Interclubs, à Leiden, aux Pays-Bas, pour sa compétition suivante, et à Talence pour la supporter. J’ai, par ailleurs, déjà pris mon billet d’avion pour Doha. Il faut que Nafi se rende compte qu’il y a, derrière elle, un club bienveillant et qui est honoré par sa présence. Et cela va peut-être développer chez elle un attachement supplémentaire au club."
"On ne se sent plus représentés par la LBFA"
Le nouvel homme fort du club liégeois veut que l’on tire les leçons de l’affaire Thiam.
Alain Decors compte bien s’appuyer sur l’héritage que laissera Nafi Thiam au club pour faire évoluer celui-ci. "C’est important qu’il reste quelque chose de son passage au RFCL et qu’on franchisse un palier grâce à l’engouement qu’elle suscite" , explique celui qui est aussi directeur général de la société Belgium Airport Services à l’aéroport de Liège. "Chaque année où Nafi ramène un titre, on fait 30 % d’affiliés en plus à l’école d’athlétisme. Il faut le savoir. Certes 20 % de ces affiliés vont abandonner en cours de route, mais il en restera toujours 10 %. Aussi, quand le président de la LBFA, Thomas Lefebvre, indiquait dans sa fameuse lettre ouverte que Nafi ne rapportait rien financièrement, que ce soit directement ou indirectement, c’est faux ! On rétrocède, je crois, 37 euros à la fédération par affilié. C’est de la mauvaise foi : cette jeune fille fait un bien fou à l’athlétisme belge, francophone et liégeois en particulier."
Ce n’est pas le seul reproche formulé par le président du RFCL à l’égard de sa fédération.
"Ce qui s’est passé à l’Euro de Berlin me choque" , dit-il. "La manière dont on a traité Nafi était tout à fait inopportune. Je ne me sens pas capable de juger sur le fond de l’affaire mais la forme relative à l’interpellation de Nafi sur son lieu de la compétition était déplorable, contre-productive et elle a perturbé l’athlète pour la suite de la journée et pour le lendemain. Heureusement, cela n’a pas prêté à conséquence sur son résultat. Mais, après cela, il faut avoir l’honnêteté de reconnaître un dysfonctionnement et en tirer des leçons pour l’avenir en mettant en place une procédure d’interpellation décente et efficace."
À la demande de plusieurs clubs, une enquête interne indépendante a été mise en place afin de faire la lumière sur cet épisode fâcheux de Berlin. "Mais on se trompe de cible si l’on cherche à tout prix à savoir ce qui s’est passé là-bas" , reprend Alain Decors, peu confiant, du reste, dans les résultats de cet audit figurant à l’ordre du jour de l’assemblée générale du 15 juin prochain.
Notre interlocuteur regrette, enfin, que les clubs aient été quasiment absents du grand déballage du printemps dernier suite à l’affaire de la convention, un point toujours pas réglé. "Et ce alors que les clubs, aujourd’hui, ne se sentent absolument plus représentés par cette LBFA qui multiplie les entorses à son propre réglement, à ses propres statuts ! Je me suis, par ailleurs, élevé contre certaines inepties qu’on veut nous faire avaler dans le seul but de diluer le pouvoir de contestation. J’ai vraiment l’impression qu’on est en fin de cycle..."