Le 4x100m féminin en or, dix ans plus tard: "On sentait que quelque chose de pas très catholique s’était déroulé"
Il y a dix ans jour pour jour, notre relais féminin du 4x100 mètres décrochait l’argent aux JO avant de récupérer l’or, huit ans plus tard, suite à la confirmation de dopage d’une athlète russe…
- Publié le 22-08-2018 à 09h51
- Mis à jour le 22-08-2018 à 12h42
Il y a dix ans jour pour jour, notre relais féminin du 4x100 mètres décrochait l’argent aux JO avant de récupérer l’or, huit ans plus tard, suite à la confirmation de dopage d’une athlète russe…
C’est l’histoire de quatre filles. Quatre athlètes de haut niveau qui, il y a dix ans jour pour jour, dans le magnifique Nid d’oiseau de Pékin, décrochaient aux Jeux Olympiques une médaille d’argent dans le relais 4x100 mètres féminin. Un immense exploit dans l’histoire du sport belge réalisé par Kim Gevaert, Elodie Ouedraogo, Hanna Mariën et Olivia Borlée. Un quatuor qui, huit ans (2016) après sa performance, récupérera la médaille d’or suite à la confirmation de dopage de la Russe Yulia Chermoshanskaya, qui résista au retour de Kim Gevaert dans la dernière ligne droite.
Kim, quel souvenir gardez-vous de la finale à Pékin ?
"Un an avant les Jeux Olympiques, nous avions décroché la médaille de bronze aux championnats du monde à Osaka. Notre objectif était donc de décrocher un nouveau Top 3 même si on savait que ce serait très difficile face à des formations comme les États-Unis et la Jamaïque. Cette médaille d’argent représentait donc une très belle surprise. Sur le podium à Pékin, nous étions toutes très heureuses de notre performance. La nuit fut longue. Non pas parce qu’on a fait la fête, mais parce qu’après la course il y a eu les rendez-vous avec la presse, un live dans un show à la télévision chinoise et d’autres obligations."
Comme le contrôle antidopage où tout ne s’est pas passé normalement ?
"Oui, il y a eu de petits problèmes. Dans un premier temps, Yulia Chermoshanskaya ne voulait pas y aller. Puis elle s’y est présentée et à l’époque son échantillon fut négatif. Mais on sentait que quelque chose de pas très catholique s’était déroulé."
Après combien de temps cette histoire est-elle revenue dans l’actualité ?
"En novembre 2015, un journaliste allemand a évoqué dans ses articles un système de dopage étatique en Russie. On parlait alors de refaire des analyses pour certains athlètes. À l’époque, on rigolait en disant qu’on allait peut-être récupérer la médaille d’or mais je ne pensais pas que cela deviendrait une réalité."
Quand avez-vous reçu la confirmation du déclassement de l’équipe de Russie de la finale du relais 4x100 mètres ?
"En mai 2016, il y a eu une confirmation que l’échantillon de Yulia Chermoshanskaya était positif. La Russie pouvait faire appel, mais elle ne l’a pas fait. J’imagine que le dopage de son athlète était trop flagrant."
Après les JO de 2008, vous avez encore couru au Mémorial Van Damme avant de mettre un terme à votre carrière. Est-ce qu’une médaille d’or à cette époque aurait pu influencer votre décision ?
"Je ne pense pas. En revanche, j’ai peut-être perdu des sous à cause de cela. Au niveau de mes sponsors, une médaille d’or à la place de l’argent, c’était différent. Et je me voyais mal retourner chez mes sponsors huit ans plus tard pour réclamer quelque chose. Par contre, le COIB a versé la différence entre la prime pour l’or par rapport à l’argent…"
"Je ne m’attendais pas à autant d’émotions"
C’est le 9 septembre 2016, devant plus de 40.000 personnes, lors du Mémorial Van Damme que nos relayeuses ont reçu leur médaille d’or.
L’histoire retiendra donc que l’édition 2016 du Mémorial Van Damme a coïncidé avec la cérémonie protocolaire du 4x100 m féminin des JO 2008 ! À l’issue de leur tour d’honneur en voiture effectué sous les vivats d’un public déchaîné, Olivia Borlée, Hanna Mariën, Elodie Ouedraogo et Kim Gevaert sont montées, vêtues d’une tenue dorée, sur le podium dressé sur la pelouse face à la tribune présidentielle où se trouvaient le roi Philippe et la reine Mathilde. Les y attendaient Pierre-Olivier Beckers, le président du COIB également du CIO, et Jacques Rogge, le président belge de l’instance olympique à l’époque des faits, lesquels se sont… relayés pour passer les médailles d’or autour du cou de nos représentantes.
Pendant que les images de leur mémorable finale défilaient, le drapeau belge fut hissé tandis que la Brabançonne était entonnée par le public et… par les quatre athlètes, qui avaient pris soin de répéter dans la journée !
"Cela n’a pas été facile de chanter correctement la Brabançonne en néerlandais et en français, se souvient avec encore une certaine émotion Kim Gevaert. Je ne suis pas une bonne chanteuse (rires) . Ce fut un grand moment dans ma carrière. Une soirée géniale. Cela m’a fait plaisir de pouvoir partager cet instant avec ma famille et mes amis. Par exemple, mes trois enfants étaient dans les tribunes. J’ai vu ce jour-là des gens très émus. Je ne m’attendais pas à autant d’émotions huit ans plus tard. Bien sûr ce n’est pas comme si notre team avait franchi la ligne en premier à Pékin mais les organisateurs avaient mis les petits plats dans les grands."
Pour rendre hommage à quatre filles formidables qui parleront avec le Roi après la cérémonie protocolaire : "Il m’a demandé pourquoi il avait fallu attendre aussi longtemps pour recevoir ces médailles d’or, comment fonctionnaient les contrôles antidopage, etc. Il était très intéressé, se souvient Kim Gevaert. Mais je lui ai dit que même pour moi, il y avait encore des questions sans réponse."
"Déçue de rendre ma médaille… d’argent"
Une des grandes interrogations de Kim Gevaert quelques heures avant de recevoir sa médaille d’or au Mémorial Van Damme était de savoir si celle-ci était la même que celle donnée aux champions olympiques huit ans plus tôt…
"Et la réponse est oui, ajoute la double championne d’Europe des 100 et 200 mètres en 2008. Les organisateurs chinois avaient confectionné des médailles supplémentaires. Par contre, en novembre ou décembre 2016, j’ai dû rendre ma médaille d’argent. Cela m’a fait un peu mal au cœur car c’était celle reçue à Pékin. J’aurais bien voulu garder les deux…"