Henri Pescarolo : « Invraisemblable si Toyota ne gagne pas »
Rencontre avec l'ancien quadruple vainqueur et autre légende vivante du Mans
- Publié le 15-06-2018 à 15h07
- Mis à jour le 15-06-2018 à 15h08
Rencontre avec l'ancien quadruple vainqueur et autre légende vivante du Mans
Au même titre que Jacky Ickx, Tom Kristensen, Derek Bell, le Docteur Ullrich ou encore Steve McQueen, Henri Pescarolo fait partie des légendes des 24 Heures du Mans.
Agé aujourd'hui de 75 ans, le barbu à la voix célèbre est de retour dans la Sarthe après une année d'absence suite à une grosse opération au coeur. Les fans ne pouvant pas assister à la course sur place pourront écouter ses commentaires toujours pertinents et ses avis souvent tranchés sur l'antenne d'Eurosport retransmettant la course 24h sur 24 avec notre compatriote et collègue Jacques Leunis aux commandes.
Henri, que pensez-vous de l'équivalence des technologies ?
« Je pense qu'elle donne enfin une chance aux teams privés. Cela fait 12 ans que l'on attendait cela. Si elle avait existé à mon époque, dans les années 2005 ou 2006, on aurait pu lutter face à Audi et on ne serait pas morts comme pas mal d'autres teams privés. Aujourd'hui, il ne reste plus qu'un constructeur en proto et du coup l'ACO drague les privés en leur donnant une petite chance. Quand tu es à 2 ou 3 secondes au tour, tu peux espérer profiter d'une défaillance des usines devant. Pas quand tu rends plus de dix secondes. »
Mais un proto privé ne peut pas battre sur le papier une usine avec un proto hybride. C'est écrit noir sur blanc dans le règlement.
« C'est normal. Après avoir perdu Peugeot, Audi puis Porsche, les organisateurs ne veulent pas prendre le risque de voir le dernier constructeur qu'il leur reste s'en aller aussi la queue entre les jambes après une nouvelle défaite. »
C'est du tout cuit pour Toyota donc cette année ?
« Cela a l'air évident oui. Ils essaient de gagner depuis 1985 et il serait invraisemblable qu'ils n'y arrivent pas cette année. Maintenant ils n'engagent que deux voitures et tout peut arriver sur 24h. La victoire ici n'est jamais acquise d'avance. »
Que pensez-vous de la nouvelle règlementation et des protos hypercars à partir de 2020 ?
« Cela me paraît pas mal. Je trouve cela intéressant d'obliger les constructeurs à vendre leurs moteurs à des clients, comme en F1. Car si ce n'était pas le cas, si Renault, Mercedes et Ferrari ne vendaient pas le moteur, il y aurait combien de voitures sur la grille ? La réduction des coûts était impérative aussi. A l'époque de mon team, on se battait avec un budget de 3,5 millions face à Audi qui en dépensait 60. Mais ces dernières années, pour Porsche c'était encore cinq fois plus. »
En 1972, vous avez remporté les 24H du Mans en compagnie de Graham Hill, le seul pilote à avoir décroché la fameuse triple couronne. Quel souvenir avez-vous du Britannique ?
«C'était un personnage exceptionnel. Un super pilote mais aussi un grand monsieur. Pour l'anecdote, je n'étais pas très heureux quand Matra m'avait annoncé que j'allais rouler avec Graham. Je pensais qu'il était trop vieux pour gagner Le Mans. Mais c'est lui qui a fait la différence de nuit sous la pluie. A cette époque, la majorité des pilotes faisaient de la F1 et Le Mans. C'était beaucoup plus facile qu'aujourd'hui et les pilotes étaient plus polyvalents. Par contre, j'ai tenté plusieurs fois de disputer Indianapolis mais je n'ai jamais trouvé de voiture. C'est une épreuve de dingues ! »