Le Belge Mathieu Remmerie, l'un des commissaires qui a infligé la pénalité à Vettel: "Un arbitre n’est pas toujours populaire"
Entretien avec le Belge Mathieu Remmerie, un des commissaires sportifs ayant infligé la pénalité à Sebastian Vettel.
- Publié le 20-06-2019 à 07h56
- Mis à jour le 20-06-2019 à 11h47
Entretien avec le Belge Mathieu Remmerie, un des commissaires sportifs ayant infligé la pénalité à Sebastian Vettel. C’était son baptême du feu en tant que commissaire sportif F1 lors du GP du Canada et il s’est de suite retrouvé sur le bûcher médiatique, incendié par la moitié du monde suite à la décision d’infliger une pénalité coûtant la victoire à Sebastian Vettel. Mais le Belge Mathieu Remmerie assume et n’est pas dégoûté.
La preuve, il remettra cela ce week-end au Castellet dans le cadre du GP de France où le président du collège sera cette fois Tim Mayer, tandis que Yannick Dalmas succédera à Emanuele Pirro en tant que représentant des pilotes.
"Je devais à la base débuter en tant que stagiaire en Autriche, mais deux semaines avant son décès, Charlie Whiting m’a contacté pour me demander si je pouvais assurer la fonction de commissaire sportif au Canada et en France. Et j’ai bien sûr directement accepté."
Mais comment notre compatriote en est-il arrivé-là ?
"Je suis un passionné de sport automobile depuis toujours. J’ai travaillé pour le RACB en tant que karting manager. Fin 2012, j’ai quitté la fédération pour reprendre le bureau de courtiers d’assurance de mon père. Mais j’ai continué à aller sur les circuits en tant que commissaire sportif pour des épreuves nationales, puis internationales comme la F3 ou la F2. Un job bénévole. On nous rembourse juste nos frais. Mais c’est chouette de pouvoir vivre la course ainsi de l’intérieur, au cœur de l’action."
Même quand il s’agit de prendre des décisions controversées ?
"J’ai été surpris de l’ampleur prise par cette affaire. J’ai reçu quelques e-mails après le Canada dont un très méchant. Mais cela fait partie de la fonction d’être critiqué. J’y suis habitué. Je pense que tout arbitre s’expose, que ce soit en football ou en F1. Y avait-il penalty ou pas ? Chacun a son idée. Mais je ne fais pas cela pour être populaire…"
Qu’a-t-il répondu à ses amis ou connaissances qui l’ont chambré après Montréal ?
"Qu’ils peuvent venir une fois en direction de course pour voir comment on travaille. Ce n’est pas facile. Il y a beaucoup de décisions à prendre, souvent rapidement. Si nous avions infligé la même sanction pour un pilote évoluant au 9e rang, cela n’aurait pas eu les mêmes répercussions. On était bien conscients que la pénalité risquait d’influencer le résultat du GP. Mais on ne doit pas tenir compte de cela. Notre rôle est de faire appliquer le règlement, pas de le changer. Et dans ce cas-là, il est clair."
Il y a eu unanimité, pas d’hésitation ?
"Je ne peux pas faire de commentaire sur ce qu’il se passe ou se dit au sein du collège. Je peux juste vous confier qu’il n’y a pas eu de vote, mais plutôt un consensus. Moi, j’étais le petit nouveau. Plutôt là en observateur. Je dois encore apprendre, voir comment cela fonctionne."
Pas échaudé alors ? "Pas du tout. J’ai déjà dû prendre des décisions importantes par le passé. J’ai déjà été critiqué. Mais je suis toujours là, prêt à faire le boulot en mon âme et conscience."
“Ils n’ont fait qu’appliquer la règle”
Stoffel Vandoorne et Jérôme D’Ambrosio sont d’accord avec la sanction de Vettel dont Ferrari demande officiellement la révision. Moins de deux semaines après l’arrivée controversée du GP du Canada, on n’a pas fini de parler de la vive polémique liée à la pénalité de cinq secondes infligée à Sebastian Vettel et lui coûtant la victoire face à Lewis Hamilton. Le sujet fait débat. Les avis sont toujours aussi partagés.
“Je trouve pour ma part qu’il n’y a pas tant matière à discussion”, estime Jérôme D’Ambrosio. “Le règlement stipule clairement qu’en cas de sortie de piste, ce qui n’est pas contestable, il faut revenir sur le circuit en toute sécurité et ne pas recouper la trajectoire. Ce que Vettel n’a pas fait. Si Hamilton ne levait pas le pied, c’était le crash assuré.”
L’avis de Stoffel Vandoorne, encore pilote de GP l’an dernier, est identique.
“Les commissaires sportifs n’ont fait qu’appliquer le règlement”, nous a-t-il confié au Mans. “Maintenant, la seule question que l’on peut se poser, c’est de savoir si la règle est bonne. Mais ce n’est pas à eux de juger cela.”
En gros, ce ne sont pas les gendarmes qui établissent le code de la route.
De son côté, la Scuderia Ferrari n’a pas encore digéré une sanction les privant, il est vrai, de leur premier succès de la saison.
Si l’écurie a finalement décidé de ne pas interjeter appel (elle avait quatre jours pour le faire), elle a officiellement utilisé son droit de demande de révision d’une pénalité auprès de la FIA pour autant qu’elle possède un élément neuf.
On imagine toutefois difficilement quel élément nouveau pourrait faire changer d’avis le collège des commissaires sportifs qui a reçu justement le soutien public, le week-end dernier au Mans, du président de la FIA Jean Todt.
D’autant que l’analyse détaillée des images de la caméra embarquée par l’ex-pilote de GP Jolyon Palmer devenu commentateur des GP accrédite la thèse du “blocage volontaire” de Sebastian Vettel qui a regardé dans son rétroviseur où était Lewis Hamilton et a ensuite tourné son volant vers la droite “alors qu’il aurait très bien pu à ce moment virer à gauche et lui laisser de la place comme le stipule le règlement”, indique le Britannique.
Remontés, Ferrari et Sebastian Vettel doivent plutôt espérer prendre leur revanche sur la piste du circuit Paul Ricard où l’on avait assisté à une course dominante l’an dernier de Lewis Hamilton.
“Nous étrennons de bonnes évolutions ici qui devraient nous aider à poursuivre sur notre lancée du Canada”, a indiqué Mattia Binotto, le directeur sportif d’une Scuderia aux abois.