A Monaco, le petit prince Charles Leclerc court à domicile: "Gagner chez moi serait incroyable"
Le jeune Monégasque Charles Leclerc aura du mal à rééditer sa pole 2017 en F2.
- Publié le 25-05-2019 à 06h43
- Mis à jour le 25-05-2019 à 17h53
Le jeune Monégasque Charles Leclerc aura du mal à rééditer sa pole 2017 en F2. Né et pas seulement résident en Principauté, élève pas toujours très régulier au lycée Albert Ier, Charles Leclerc est seulement le troisième véritable Monégasque à disputer le GP de Monaco après Olivier Beretta et Louis Chiron dans les années cinquante. Ce dernier était monté sur le podium dès sa première participation en 1950 sur Maserati. Un buste à son effigie rend hommage à ses exploits sur le port de la Principauté, juste en face de la piscine.
Après une pole dès sa première participation dans les rues où il a grandi, en 2017 en F2 (une panne mécanique l’avait empêché de transformer l’essai), le jeune héros local avait encore été déçu l’an dernier. Quatorzième seulement en qualifications sur sa Sauber, il n’avait pu terminer suite à un crash à la sortie du tunnel consécutif à des problèmes de freins.
Douze mois plus tard, Charles est de retour pour son GP à domicile aux commandes d’une Ferrari : "Un rêve de gosse. C’est dingue de voir ma tête en énorme sur les tribunes. Cela m’a surpris au début. Même à la gare, il y a des affiches avec mon portrait."
Tout semble avoir évolué si vite.
"Quand j’étais petit, je suivais le GP depuis la terrasse d’un ami. Je devais avoir quatre ou cinq ans. On jouait aux petites voitures entre les sessions où mon regard était toujours attiré par les bolides rouges", se souvient Charles dont le début de saison au sein de la Scuderia a été un mélange de frustrations et de déceptions avec un seul podium et des consignes parfois dures à digérer en cinq courses.
"J’aurais dû gagner à Bahrein sans un problème technique et j’aurais pu m’imposer à Bakou si je n’avais pas fait l’idiot en qualifications. Le bilan aurait pu être nettement plus positif. Mais la vérité du moment est que Mercedes est loin devant nous et qu’on a pas mal de travail pour tenter de les rattraper. On a compris des choses lors des tests après Barcelone, mais pas tout. On peine dans les virages lents. Et il y en a pas mal ici…"
À Monaco, l’homme prend toutefois souvent le pas sur la machine, grâce à l’audace, la prise de risque mais aussi l’expérience : "C’est un circuit de légende, le plus beau au monde, où il faut avoir un pilotage extrêmement précis, comme en kart. Le pilote peut compenser un peu, mais pas tout."
Évoluer à domicile ne constitue pas nécessairement un avantage. "Hormis que je peux dormir dans mon lit ! Ce n’est pas un tracé permanent et la majorité des pilotes sur la grille ont roulé bien plus que moi ici. S’il s’agit de trouver le meilleur restaurant pour manger le soir, un bel endroit pour aller courir, par exemple sur la pointe des douaniers, là oui je connais Monaco mieux que quiconque. Je connais aussi les beaux coins où plonger avec mes potes ou la plus belle plage pour jouer au foot. Mais une fois en piste, je perds mon avantage du terrain."
Ferrari espère faire oublier un début de campagne catastrophique en s’imposant dimanche.
"Gagner chez moi serait incroyable", s’exclame Charles. "Mais il faut rester réaliste. Il sera une fois encore très dur de battre Mercedes. Un podium serait déjà très bien. Je sais qu’on a une plus grande chance ici qu’ailleurs même si Red Bull est aussi très fort. Je vais tout donner pour ne rien regretter."
En espérant ne plus commettre de bourde cette fois. Et pouvoir égaler au moins la performance de Louis Chiron en montant les marches princières dimanche : "Je sais que le prince Albert II est un fan. Je lui ai offert mon casque l’an dernier après mon premier GP en Australie et il a apprécié."
Gageons que Son Altesse sérénissime aimerait lui remettre dimanche un trophée en retour…
Arthur Leclerc : "Gamins, on payait nos tickets à la tribune de la Piscine"
Charles Leclerc fait partie d’une famille de passionnés de sport auto. Son papa Hervé a couru jusqu’en F3.
“Il a même roulé à Monaco et a terminé dans les rails au virage du Tabac”, se souvient Arthur, le petit frère de 18 ans, actif en F4 en Allemagne. “Mon grand frère Lorenzo était le meilleur ami de Jules Bianchi dont le papa Philippe possédait une piste de karting à Brignoles. C’est comme cela que tout a commencé pour nous. On roulait souvent là-bas quand nous étions jeunes et je me souviens que papa était dur avec nous. Il n’hésitait pas à nous dire quand on faisait de la m… Il nous a appris à nous endurcir. Pas étonnant que Charles ait été aussi sévère avec lui-même lors de son crash aux qualifs de Bakou. On tient cela de papa.”
Un père avec qui, gamins, ils ont assisté à leurs premiers GP de Monaco : “On habite du côté de la Place d’Armes. On n’a pas de vue sur le circuit donc du coup on achetait nos billets pour aller voir passer les F1 depuis la tribune de la Piscine. Mon plus lointain souvenir est celui de la Ferrari de Michael Schumacher.”
Et aujourd’hui, c’est son grand frère qui pilote une monoplace rouge : “C’est magique. On a assisté à des GP un peu bizarres cette saison. Mais Charles a fait du top boulot. Ce serait génial de le retrouver sur le podium dimanche.”
Arthur n’est pas jaloux : “Il y a du positif et du négatif à voir son grand frère accomplir son rêve alors que vous derrière vous aspirez à la même chose. Je suis fier. Mon papa ne pouvait pas payer le kart a tout le monde et donc il a misé sur le plus fort des trois. Et il ne s’est pas trompé. Maintenant, depuis la disparition de papa, les liens entre nous se sont resserrés. Depuis qu’il n’y a plus grand monde pour s’occuper de nous dans la famille, hormis maman bien sûr, mais je veux dire dans le monde du sport auto, on s’entraide plus qu’avant. Charles vient dès qu’il peut voir mes courses et n’est pas avare de conseils.”
Après une première saison en F4 française avec deux victoires et une pole sous la pluie à Francorchamps, Arthur dispute le championnat d’Allemagne de F4 avec déjà un podium dès le premier week-end à Hockenheim : “Le but est de décrocher le titre.”
Et ensuite ?” Je suis actuellement réserviste chez Venturi, le team monégasque de Formula E. J’ai déjà effectué un tests avec eux à Marrackech et cela s’est très bien passé. Sinon je passe beaucoup de temps dans le simulateur pour eux. L’électrique représente une belle alternative aujourd’hui à la F1 qui reste le rêve d’enfant pour tout jeune pilote. Honnêtement, je ne pense pas trop au futur ni à mon frère. Je me concentre actuellement sur moi et ma saison en F4. On verra bien où cela me mène. Aujourd’hui, j’ai intégré la filière Charouz-Sauber et cela me permettra de suivre le GP de Monaco, le premier de Charles en Ferrari, chez Alfa Romeo.”
Un casque en hommage à Jules et papa
Comme pas mal d’autres pilotes, Charles Leclerc porte un casque à la livrée spéciale pour son GP à domicile. "Le graphisme est divisé en deux. Il y a un hommage à mon père Hervé d’un côté et de l’autre les couleurs de Jules Bianchi qui était mon ami et parrain sportif. Sans eux, jamais je n’aurais parcouru tout ce chemin…"
De son papa, décédé il y a un peu plus de deux ans, il a aussi hérité la passion pour Ayrton Senna. "C’était son pilote préféré. C’est devenu aussi le mien, un autre prince de Monaco."
Charles va profiter de chaque instant ce week-end : "À Monaco, le plus grand plaisir, c’est la qualif. Les sensations et la montée d’adrénaline y sont plus importantes qu’ailleurs. Je ne ressens pas trop de pression. Plus du soutien. Tout le monde en ville voudrait que je fasse bien. Mais i l y a des pilotes nettement plus célèbres que moi ici à Monaco. J’ai encore beaucoup à apprendre. Techniquement et dans le retour aux ingénieurs, je peux encore progresser."