Footgate: les dessous de la perquisition chez Mogi Bayat
6 millions sur ses comptes, 2 travailleuses au noir dans la chambre à coucher.
- Publié le 09-03-2019 à 07h14
- Mis à jour le 09-03-2019 à 09h57
6 millions sur ses comptes, 2 travailleuses au noir dans la chambre à coucher. Il y a cinq mois éclatait le Footgate, le nouveau scandale du football belge, dix ans après celui qui avait impliqué Ye et Allata. Que s’est-il passé chez Arnaud - "Mogi", pour les amis - Bayat, le mercredi 10 octobre 2018, à partir de 5 h 40 du matin ? Het Laatste Nieuws a obtenu des révélations incroyables.
Lasne. 5, chemin des Hayes, quartier ultra-résidentiel, discret, boisé.
Les enquêteurs, qui attendent le "go", ont obtenu le renfort des unités spéciales. Cagoulés, armés jusqu’aux dents. Cachée par les arbres, les haies, la clôture, la "Villa Mogi". Une villa ? Un château bâti en U. Les photos aériennes montrent une piscine hollywoodienne, à l’arrière. En façade, la villa fait 50 mètres de long : 50 mètres. Ici vit la famille Bayat de l’homme d’affaires franco-iranien de 44 ans, l’agent le plus influent du football belge qui doit à ses contacts et réseaux tentaculaires le surnom de Mogi-Poly.
Bayat n’a rien vu venir. L’enquête dure depuis des mois. Il est le gros poisson. Sur les comptes de sa société Creative Management Group SPRL, plus de 6 millions d’euros. Rien n’a vraiment commencé que tout est déjà gelé. Bloqué.
Derrière le portail, une longue allée. C’est ce qui a forcé le juge d’instruction de Hasselt à faire appel aux unités spéciales. Il veut prendre Bayat par surprise, ne pas lui laisser le temps de détruire d’éventuelles preuves. S’il refuse d’ouvrir, le POSA (Protection, Observation, Appui, Arrestation), qui a prévu des béliers, a pour consigne de défoncer.
Juste avant 6 h, un trou est pratiqué dans la clôture de la propriété. La villa Mogi compte plus de 50 pièces. À partir de maintenant, toute porte qui résistera sera défoncée. Ce sera le cas du bureau de Bayat, de sa cave à vins et d’un local d’archivage.
À 6 h 02, Bayat, sorti du lit ainsi que sa femme, est mis en présence du chef d’enquête. "Perquisition". On lui montre le mandat ainsi qu’à Nathalie. Pour madame, les policiers ont même prévu un document : "Pour les dégâts à la clôture, envoyez la facture ; ce sera remboursé".
Mogi Bayat est isolé , à l’écart dans une chambre. Nathalie et les enfants rassemblés dans une autre pièce, sous la surveillance d’une policière, où très vite deux femmes les rejoignent : Mariia et Heorheta, 52 et 56 ans, toutes deux nées en Ukraine, toutes deux de nationalité roumaine.
Qui sont ces femmes ? Les enquêteurs les ont trouvées dans les chambres. À voir les vêtements, les brosses à dents et la familiarité des enfants, les enquêteurs subodorent qu’il s’agit peut-être de femmes de ménage que les Bayat n’ont pas déclarées et qui servent aussi de nounous pour les enfants. Les enquêteurs les embarquent. Direction police fédérale de Nivelles pour suspicion de travail au noir.
Les enquêteurs ne venaient pas pour cela mais pour ramasser chez les Bayat un maximum de preuves de fraudes dans le football belge.
Dans le corridor, les WC sont vite fouillés. Rien. Il en va différemment de la pièce suivante dont les murs, couverts de boiseries, peuvent dissimuler des placards. D’ailleurs, près de la télé, à droite, un enquêteur trouve un mécanisme. Il ouvre. Bingo, des dizaines de boîtes. Des boîtes de montres. 130 ! Philippe Patek, Rolex, Cartier. 130 boîtes de montres luxueuses, toutes vides. La décision est prise de les ramener à Hasselt. Est-ce en les offrant que Mogi Bayat achetait les gens pour étendre ses réseaux ?
La perquisition se poursuit à tous les étages dans les chambres, les salles de bain, les bureaux. La découverte suivante est faite à la buanderie : un coffre-fort posé contre une machine à laver.
L’agent de joueurs ne fait pas le difficile pour donner la combinaison. Re-bingo : des boîtes de montres Rolex et Philippe Patek. La plupart vides. Comme montres, on ne trouve que trois Rolex, une Patek et une Favre-Leuba, ainsi que des stylos Rolex et Mont Blanc et trois factures d’un bijoutier bruxellois connu pour des Patek entre 40 000 et 70 000 euros, un carnet et un sac de Nathalie Bayat contenant 7 500 euros (cash).
Puis la salle à manger, la cuisine, d’autres chambres. Des montres, encore des montres et maintenant des piles de papiers où les enquêteurs lisent des noms de clubs comme Sporting de Charleroi, Anderlecht, Genk, Standard, FC Courtrai, Lokeren et RC Lens. Et des dossiers de joueurs, Massimo Bruno, Vandenborre, Perbet. Les enquêteurs notent que Mogi Bayat range beaucoup de documents dans des sacs à faire les courses, des sacs Delhaize.
Avec plus de 50 pièces, la fouille dure la matinée. Ensuite, les voitures. Pas question de ne pas les fouiller. Chez les Bayat, on en a sept : une Ferrari California rouge (au nom de la société), une Smart Cabrio, une Porsche 911 Targa 4 GTS, trois Mercedes, une Jaguar type F et une Porsche de collection, old-timer.
Re-re-bingo. Sacré Mogi ! Dans l’un des véhicules, les enquêteurs trouvent de nouveaux sacs Delhaize avec des documents, encore, liés à des clubs et des joueurs.