Stars interdites de jouer, sabotage dans le staff et ambiance pourrie: la grave crise de l'adversaire du RSCA
Le Fener ou l’art de jeter l’argent par les fenêtres: une impressionnante master class en 8 points de l'équipe turque, qui arrive ce mercredi à Bruxelles pour le match de Ligue Europa contre Anderlecht
- Publié le 24-10-2018 à 15h54
L’emballage est beau à Fenerbahçe : un grand club populaire, un entraîneur prometteur au passé de joueur prestigieux et plusieurs grands noms dans l’effectif. Mais quand on ouvre la boîte, ce n’est pas un cadeau qu’on trouve, juste un sacré panier de crabes. Le Fener est plongé dans une crise profonde et ne semble pas prêt d’en sortir. 1) Plus d’argent de la Ligue des Champions depuis 11 ans
Depuis le printemps 2014 et son 19e titre de champion, le club n’a plus rien gagné en Turquie. Deux finales de Coupe perdues et trois deuxièmes places en championnat. Sa dernière participation à la Ligue des Champions remonte déjà à la saison 2007-2008, une éternité. Et ça ne sent déjà pas bon pour la saison prochaine vu l’actuelle… 15e place en championnat, la première non-relégable.
2) Une punition européenne qui a fait très mal
Logiquement, Fenerbahçe aurait dû participer à l’édition 2014-2015 de la Ligue des Champions, récompense de son titre national. Mais l’UEFA a puni le club pour une sombre affaire de corruption en Turquie lors de la saison 2010-2011. Pendant deux saisons, le Fener n’avait plus le droit de se produire sur la scène continentale. Un coup dur pour l’image du club. Et pour ses finances.
3) Un directeur sportif dépense sans compter puis s’en va
Loin de baisser les bras, les dirigeants de Fenerbahçe ont décidé de repenser leur club après cette sanction européenne. La plus grosse décision fut de nommer Giuliano Terraneo au poste de directeur sportif, un Italien passé par la Lazio et l’Inter. Sa mission : attirer des grands noms dans un championnat où la règle du nombre d’étrangers sur la feuille de match venait d’être sérieusement assouplie. Nani, Van Persie et Kjaer, entre autres, débarquent lors de l’été 2015. Près de 43 millions sont dépensés en quelques semaines. Le Fener voit grand, trop grand… Les résultats ne suivent pas malgré les gros investissements. À peine dix mois après son arrivée, Terraneo s’en va.
4) L’UEFA encore fâchée : trop peu de rentrées financières
Les généreux salaires offerts aux vedettes, eux, sont toujours bien là. Les dirigeants de Fenerbahçe assument mais le club ne parvient plus à rentrer dans les clous du fair-play financier. Trop de dépenses, pas assez de rentrées. L’UEFA sanctionne le Fener (moins de joueurs peuvent être inscrits sur la liste A, celle qui permet de jouer en Coupe d’Europe) mais décide surtout de surveiller près de ce mauvais élève.
5) Un package brésilien pour 22,5 millions en Arabie
Fenerbahçe n’a donc plus le droit de faire n’importe quoi avec son argent. Malgré la manne des droits TV en Turquie (514 millions d’€ par saison, contre un peu plus de 80 millions chez nous), le club doit faire des économies drastiques. La direction veille à vendre au moins autant qu’elle n’achète à chaque mercato. Le plus gros achat de l’été se nomme Jailson, un milieu défensif brésilien pris pour 4 millions à Gremio. Dans l’autre sens, Fenerbahçe réussit à vendre les Brésiliens Josef et Giuliano pour 22,5 millions à deux clubs saoudiens. Un joli coup mais insuffisant pour équilibrer le budget.
6) Interdit de trop faire jouer les stars Valbuena et Soldado
Ce qui plombe encore les finances de Fenerbahçe, sont les revenus plantureux des grands noms étrangers. Les dirigeants doivent absolument faire baisser la masse salariale pour éviter des sanctions plus lourdes de l’UEFA. Une obligation qui provoque une situation ubuesque cette saison : avec seulement 6 buts inscrits en 9 matches, Fenerbahçe a la plus mauvaise attaque de la D1 turque. Mais l’entraîneur Philip Cocu n’a pas le droit d’utiliser ses armes offensives comme bon lui semble. Il lui est interdit de faire trop jouer Mathieu Valbuena et Roberto Soldado. Les deux vedettes seront en fin de contrat l’été prochain mais une clause de leur contrat prévoit une prolongation automatique d’un an s’ils dépassent un quota de matches (25 pour le milieu offensif français, 20 pour l’attaquant espagnol). Hors de question pour la direction qui veut se débarrasser de ces deux trentenaires au salaire affolant (3,5 millions par an pour Valbuena, 4 millions pour Soldado). Lors du 0-0 à Sivasspor samedi passé, Valbuena est, par exemple, resté 90 minutes sur le banc… Plusieurs autres gros salaires sont carrément écartés du groupe, comme l’ancien Brugeois Nabil Dirar. Avec l’espoir de les vendre au plus vite.
7) Un vestiaire divisé et forcé d’apprendre l’anglais
Actuellement à Fenerbahçe, il y a donc de gros salaires qui ne jouent pas (ou très peu) et des salaires enfin modérés qui, eux, jouent. Autant dire que ça ne favorise pas l’ambiance dans le vestiaire. La fracture est surtout visible entre les Turcs et les étrangers. La direction l’a bien compris et a instauré une nouvelle règle étonnante : les étrangers sont obligés de parler en anglais dans les locaux du club et les Turcs sont forcés d’apprendre la langue de Shakespeare. Le Turc n’est donc plus la langue usuelle dans le club stanbouliote ! Pour les dirigeants, seule une bonne communication pourra renforcer la cohésion de l’équipe sur le terrain.
8) Cocu sur un siège éjectable, le magicien croate est prêt
Bien consciente de la situation compliquée du club, la direction tente de soutenir au mieux Philip Cocu, l’ex-entraîneur à succès du PSV (3 titres de champion en 4 saisons) recruté cet été. Mais cela commence à devenir intenable, d’autant qu’il y a des soucis internes au sein du staff technique. Les adjoints néerlandais amenés par Cocu et les entraîneurs turcs ne s’entendent pas. La rumeur dit même que les Turcs saboteraient le travail des Néerlandais en laissant filtrer leur travail de recherche dans la presse... On a cru plusieurs fois que Cocu allait sauter, notamment après la lourde défaite à Zagreb en Ligue Europa (4-1) mais le siège éjectable n’a pas encore été activé. Si les noms d’Arsène Wenger et de Roberto Carlos ont été cités, le favori à sa succession est déjà connu : Zlatko Dalic, le sélectionneur qui a emmené la Croatie en finale de la Coupe du Monde. Oui, il faudra bien un magicien au Fener.