Thomas Chatelle et Xavier Chen préfacent la nouvelle saison: "Le favori, c'est Bruges"

Lorsqu’on demande à nos deux consultants quel est leur favori pour le titre, la réponse fuse : le Club Bruges.

"Cela me paraît être le club le mieux armé à tous les niveaux" , estime Thomas Chatelle. "Le trio Verhaeghe-Mannaert-Clément est bien huilé. Ils connaissent le foot et connaissent les ingrédients qu’il faut pour réussir. Bien sûr, les Brugeois ont perdu Wesley, mais les autres cadres devraient rester, notamment Vanaken."

"Wesley était un joueur décisif, mais j’imagine qu’Okereke, qui a coûté 8 millions, a aussi des qualités" , poursuit Xavier Chen. "Philippe Clément n’arrive pas en terre inconnue mais j’ai l’impression qu’il va faire une sorte de table rase tactique du passé par rapport à Leko. Avec lui, ce sera un 4-3-3. Cela demandera un peu de temps. C’est le seul point d’interrogation à Bruges selon moi."

Mais le mercato n’est pas encore terminé. "Bruges va encore réaliser un coup sur le mercato, je pense" , estime Chatelle. "Il faudra aussi voir qui sera le gardien. Horvath, ce n’est pas la stabilité même pour être champion. Il faut peut-être amener un peu de changement à cette position."

"Un vrai candidat au titre"

En animant le mercato dès le mois de juin, le Standard s’est repositionné dans l’esprit de nos consultants. "C’est un vrai troisième candidat au titre , admet Xavier Chen. Vanheusden, Avenatti sont des noms ronflants, Amallah est un super joueur. Boljevic aussi. Avec la largeur du noyau et le système mis en place l’an passé, le Standard peut faire une très bonne saison."

D’autant qu’il a recruté des joueurs qui connaissent déjà le championnat. "C’est bien vu , souligne Thomas Chatelle. Avoir recruté très tôt est également une très bonne idée. Cela apporte de la sérénité dans le groupe. L’arrivée de Mbaye Leye dans le staff est un joli coup aussi. Il a cette finesse psychologique pour récupérer des garçons comme Mehdi Carcela, par exemple. L’an passé, on sentait des tiraillements internes. Et c’était visible sur le terrain."

Il faudra quand même se méfier de la taille, énorme, du noyau. "Il y a beaucoup de monde et donc cela fera forcément beaucoup de déçus , dit Chen. Mais si l’on regarde leur noyau, c’est du solide. Offensivement, avec Avenatti et Oulare en plus d’Emond, qui est sous-estimé, cela fait du beau monde. Après, il faudra voir pour le poste de gardien, qui est la grande question pour le moment."

Et sa réponse pourrait dessiner de manière plus concrète les ambitions des Rouches. "Vu que nous sommes dans la deuxième année de Preud’homme, il faudrait un titre, que ce soit le championnat ou la coupe , estime Chatelle. Les choses vont dans le bon sens, le club semble sur les rails."

"Il est évident que Preud’homme est revenu avec un projet à long terme. Je vois le Standard progresser cette saison. Pour moi, il peut viser la deuxième place" , conclut Chen.

"Qui pour remplacer Osimhen ?"

L’une des grandes inconnues avant le début de la saison s’appelle Charleroi. "L’après-Mazzù va être compliqué" , ne cache pas Thomas Chatelle. "Il va falloir reprendre d’autres habitudes. Le système Mazzù fonctionnait bien avec la mentalité carolo : organisation et on s’arrache. Il faudra voir si Belhocine veut inculquer autre chose. La recette Mazzù, c’était ‘on est l’outsider et on est l’équipe la plus emmerdante à jouer’ . Je ne sais pas si Belhocine veut aller dans ce sens-là. Et vouloir être plus ambitieux est compliqué."

Car les moyens sont limités. "Dans tous les cas, la première chose à faire est de trouver un bon attaquant" , indique Xavier Chen. "Le système Mazzù se basait aussi sur des grands attaquants : Rezaei, Osimhen. Comment ce dernier va-t-il être remplacé ? Ce sera la question centrale. Quant au casting dans le staff, il est, je crois bon même si on s’attendait peut-être à un nom plus ronflant. Mais le côté hargneux de Belhocine colle bien à Charleroi."

Chatelle acquiesce. "Le plan Belhocine tient la route mais c’est un fameux challenge pour Mehdi Bayat. Il vient d’être élu président de la Fédération, c’est un mec hyperambitieux qui essaye de se partager. On parle de son nouveau plan, de son nouveau stade. C’est aussi son grand challenge. Charleroi reste son bébé mais il doit trouver l’équilibre pour insuffler un nouveau souffle à cette équipe. Et cela commence par trouver une perle en attaque…"

"Kompany doit bâtir son style"

Du côté anderlechtois, la grande attraction se nomme évidemment Vincent Kompany, le joueur-entraîneur des Mauves. "C’est très, très bizarre… mais, en même temps, on a envie d’y croire" , admet Thomas Chatelle. "C’est une telle opportunité d’avoir quelqu’un comme Kompany qui revient. Cela ne peut être que bénéfique… mais j’aurais peut-être préféré qu’il ne soit que joueur durant un an avant de devenir coach. Car son niveau de joueur pourrait pâtir de sa casquette de coach. Chacune de ses fautes sera mise sous la loupe et il le sait très bien."

Le tout, en tentant de mettre en place un nouveau type de football, à la Guardiola. "Je suis assez positif par rapport à cela" , indique Xavier Chen. "Vincent a cette volonté de bousculer les choses. Je trouve que c’est positif que Kompany soit sur le terrain pour incarner cette philosophie. Même s’il fait des erreurs. Tous les ballons vont passer par lui vu la construction par l’arrière."

"Par moments, il devra tout de même faire preuve de pragmatisme" , ajoute Chatelle. "Mais il aura plus de crédit que d’autres. Et le système du championnat lui donne du temps."

"J’espère qu’il va avoir ce temps" , rétorque Chen. "Faire revenir Kompany pour le rétrograder uniquement comme joueur quelques mois plus tard, ce serait dommage…"

Chatelle le coupe . "Ce n’est pas possible. Si le projet Kompany échoue, c’est le projet de Coucke qui s’écroule."

"C’est vrai" , reprend Chen. "Comme Preud’homme au Standard, il est invirable (sourire) . Si Kompany ramène la flamme à Anderlecht, ce sera déjà une réussite."

Avec un mélange entre de jeunes talents comme Doku, Verschaeren, Amuzu, Sambi et des joueurs plus expérimentés comme Nasri. "C’est le coup de l’été" , s’enflamme Chatelle. "On attendait des coups ainsi grâce à Kompany, c’est chose faite." "On verra son état physique et mental… mais il colle parfaitement au projet de jeu" , souligne Chen.

Un projet de jeu qui va mettre du temps pour se développer. "Si Guardiola venait entraîner en Belgique, mettrait-il exactement le même système en place ? Pas sûr", questionne Chatelle. "Mais Kompany encouragera ses joueurs même après une erreur. Il y a du talent à Anderlecht mais seront-ils tous capables de s’imbriquer dans le nouveau système ?"

Chen : "Kompany ferait une erreur un copier/coller de Guardiola. Il doit bâtir son propre style. En préparation, c’est nécessaire de pousser certains principes à l’excès, quitte à s’adapter en compétition. Il n’y a pas d’Agüero à Anderlecht, il faudra s’adapter."

Tout en faisant des résultats. "Selon moi, un top 3 avec un bon fonds de jeu, ce serait déjà très bien" , dit Chatelle . "Oui, une qualification européenne permettrait d’envisager la suite sereinement" , termine Chen.

"Felice Mazzù colle à l’image de Genk"

À Genk, le mercato a été agité avec des départs de Trossard, Malinovskyi et Aidoo, mais le club limbourgeois a dépensé plus de 20 millions dans son recrutement (Bongonda, Nygren Hagi, Cuesta, Odey…).

"Mais Samatta et Berge sont toujours deux points d’interrogation" , note Thomas Chatelle. "Au travers de Genk, on voit que notre championnat est un tremplin et le Racing est en train de devenir une référence pour lancer des joueurs vers les plus grands championnats."

Cette saison, c’est sous les ordres de Felice Mazzù, qui a remplacé Philippe Clément, que les talents limbourgeois devront éclore. "Au moment de l’annonce de Mazzù à Genk, à chaud, j’ai fait un raccourci en me disant que son style défensif était très différent de Clément" , avoue Xavier Chen. "Puis en réfléchissant, je me dis qu’en termes de passion, de sens du travail, etc. Mazzù colle parfaitement au club. Cela semble naturel malgré ces contradictions. On a déjà vu face à Malines, en Supercoupe, qu’il n’avait rien chamboulé offensivement."

"Il l’avouait d’ailleurs : cela fonctionne bien donc je n’y touche pas" , ajoute Chatelle. " Mais dans l’organisation, il y a déjà eu des remaniements et il restera toujours un coach qui veut que défensivement, ce soit en ordre. Je rejoins également Xavier dans le sens ou il n’y a pas un club aussi humain que Genk dans les top clubs. Et Mazzù est quelqu’un de chaleureux. C’est un fameux pari de la part de De Condé, même s’il a les coudées plus franches après le titre."

Les années post-titre sont d’ailleurs souvent compliquées à Genk. "La meilleure performance après un titre, je pense que c’est une troisième place" , termine Chatelle. "Les dirigeants veulent être dans les PO1 et garder une philosophie de jeu, continuer à développer et vendre des joueurs, trouver des pépites. Et dans cette optique-là, Mazzù peut s’inscrire."

" Gand est nerveux et il y a le fantôme de Hein"

Derrière les prétendants habituels au titre, l’Antwerp, qui doit confirmer son nouveau statut et Gand font office de principaux prétendants au top 6… même si Jess Thorup est le favori des bookmakers pour être le premier entraîneur limogé.

"Cela m’étonne déjà qu’il soit toujours là" , sourit Xavier Chen. "Il a sauvé sa peau lors du dernier match face à Anderlecht" , rappelle Thomas Chatelle. "On est très nerveux dans la direction gantoise car tout l’avenir d’un club commence à être pensé. De Witte et Louwagie jouent leur crédibilité et le fantôme de Vanhaezebrouck est dans les couloirs depuis son licenciement d’Anderlecht."

Derrière, Zulte Waregem, Courtrai et Saint-Trond devraient se battre pour le top 6. "C’est bien d’avoir des clubs comme ça. C’est même nécessaire , estime Chatelle. Mais Courtrai et Saint-Trond ont perdu pas mal de joueurs. Cela me paraît compliqué pour jouer le top 6."

"Zulte Waregem pourrait faire quelque chose mais avec eux, c’est tout ou rien" , indique Chen.

Et Mouscron et Eupen ? "Que Mouscron refasse le coup de la saison passée, où le club jouait presque le plus beau foot de Belgique, alors que Storck, qui a fait des miracles, et la direction sportive ont changé, cela me paraît compliqué , avoue Chatelle. À Eupen et Mouscron, on se demande chaque année quelle est l’idée derrière. Déjà, qui incarne cette direction ? Qui tire les ficelles ? C’est toujours le même débat."

En bas de tableau, la lutte pour le maintien devrait concerner Malines et Waasland-Beveren "vu la faiblesse de leur noyau ". Le footgate leur a fait prendre du retard dans la construction de leur équipe. "Tout dépendra de ce qu’il se passe d’ici le 31 août" , indique Chen.