Mehdi Carcela se livre: "Le Soulier d’or ? Je préfère mille fois être champion"
À 29 ans, Mehdi Carcela se sent bien dans ses bottes. Et croit encore au titre car "le Standard est plus fort face aux meilleurs".
- Publié le 25-01-2019 à 06h23
- Mis à jour le 25-01-2019 à 09h01
À 29 ans, Mehdi Carcela se sent bien dans ses bottes. Et croit encore au titre car "le Standard est plus fort face aux meilleurs". Son absence lors du gala du Soulier d’or, il y a neuf jours, a fait couler beaucoup d’encre.
"Il aurait dû être là et je tiens à m’excuser de son absence, au nom du Standard de Liège ", avait expliqué Michel Preud’homme, assis aux côtés d’Alejandro Pozuelo et Hans Vanaken, juste avant la remise du trophée. Mais le coach liégeois n’en a pas tenu rigueur à son meneur de jeu, qu’il a titularisé face à Courtrai.
Et sur le terrain, Carcela a fait du Carcela, en enchaînant les dribbles, en se montrant disponible et en amenant du danger dans le rectangle adverse.
De bon augure pour le Standard, avant un déplacement compliqué à l’Antwerp ce vendredi et alors qu’il ne reste que 18 matchs à jouer avant la fin du championnat. Car si Mehdi Carcela les joue à son meilleur niveau, les Rouches peuvent viser haut. Très haut.
Mehdi, entre remporter le Soulier d’or et être champion de Belgique, vous choisissez quoi ?
"(du tac au tac) Je préfère mille fois être champion avec le Standard."
Vous pensez que c’est possible dès cette saison ?
"Tout est possible. Genk est très fort, c’est certain, mais les playoffs redistribuent les cartes. On a vu la saison dernière que tout pouvait arriver."
Les ambitions du Standard seront dictées par votre régularité. Et celle de l’équipe.
"Il nous est déjà arrivé de ne pas être assez dedans face à des plus petites équipes, c’est vrai. Ce sont des matchs lors desquels il faut aller chercher la motivation. Je crois que c’est humain. Nous n’avons pas la même attitude lorsqu’on joue un match contre Séville ou un plus petit match."
Comment explique-t-on cela ?
"C’est le Standard. Cela a toujours été comme cela. Nous sommes plus forts face aux meilleures équipes. C’était déjà le cas lors de mes passages précédents. Il y a aussi le fait qu’en début de saison, nous devions prendre nos marques avec le nouveau staff. Certaines équipes ont fait mieux que nous. Mais à l’heure actuelle, nous avons plus de points que l’année dernière à pareille époque. Les choses évoluent positivement."
Le coach mental, Rudy Heylen, vous aide également ?
"Oui, je parle souvent avec lui. Comme beaucoup de mes équipiers. Il cherche la meilleure manière de stimuler chacun d’entre nous. Avec moi, c’est en souriant, en blaguant à gauche à droite. Avec d’autres joueurs, c’est différent."
Dans une récente interview, Michel Preud’homme a déclaré que certains joueurs faisaient plus de sacrifices que vous pour atteindre certains objectifs. Et que vous ne vouliez pas spécialement passer à l’étape supérieure. Qu’en pensez-vous ?
"J’ai 29 ans et j’ai déjà passé beaucoup d’étapes ( sourire ). À Benfica, j’ai goûté au plus haut niveau. Mais revenir au Standard était mon choix. Surtout pour la qualité de vie. Car pour être heureux, je dois avoir ma famille et mes amis autour de moi."
Avec la mentalité d’un gars comme Renaud Emond, par exemple, vous seriez aujourd’hui dans un grand club ?
"Je sais que certains pensent cela. Mais ce n’est pas une question de mentalité. Mais de choix."
Mais sur base de votre talent, vous auriez pu jouer dans un club du top, non ?
"Quand j’étais plus jeune, oui. J’ai reçu plusieurs offres de clubs du top européen. Puis il y a eu l’accident (NdlR : le coup de pied de Mavinga reçu face à Genk, en 2011, qui lui a fracturé le nez et la mâchoire) et je suis parti à Anzhi. La plupart des gens pensaient que c’était pour l’argent mais ce n’était pas le cas. Je pense toujours que c’était le meilleur choix pour ma carrière. J’ai joué avec Eto’o, Roberto Carlos… et j’ai eu Hiddink comme entraîneur. C’était un club ambitieux. Nous avons éliminé Liverpool en Europa League. Puis il y a eu des soucis d’argent et j’ai dû trouver autre chose."
Quand on vous dit que vous êtes trop fort pour la Belgique, cela vous ennuie ?
"Je pense que les gens qui disent cela sous-estiment le niveau du championnat belge. Je suis un bon footballeur, mais il y en a d’autres en Belgique. C’est très difficile de jouer ici."
Et après ? L’idée d’un transfert vous trotte encore dans la tête ?
"Lors de chaque mercato, je pourrais être transféré à Dubai, en Chine ou en Amérique. S’il y a une offre intéressante, on ne sait jamais. Mais je pense que c’est encore un peu tôt. Moi, je veux juste finir la saison avec le Standard et devenir champion avec ce club. Si cela fonctionne, alors je penserai à partir."
En Angleterre, cette fois ?
"J’ai toujours dit que je voulais essayer au moins une fois toutes les meilleures compétitions. J’aimerais bien jouer en Angleterre. J’ai eu l’opportunité d’y aller plusieurs fois dans ma carrière mais ce n’était jamais le bon moment. Car je me sentais toujours bien là où j’étais."
Votre style de jeu correspond pourtant plus à la Liga qu’à la Premier League.
"Oui, l’Angleterre, c’est moins technique. Mais il y a plus d’espaces. Donc je pense que je pourrais m’acclimater."
Mehdi carcela sur…
Son accident en 2011: "Chris Mavinga est devenu un ami"
C’était il y a huit ans. Chris Mavinga fracturait le nez et la mâchoire de Mehdi Carcela lors du match décisif pour le titre entre Genk et le Standard. Le Liégeois passait proche de la mort. "C’est du passé, même si on m’en parle toujours avant les matchs contre Genk", sourit Carcela, qui a gardé contact avec Mavinga après l’accident. "On s’appelle de temps en temps. Nous sommes devenus amis", ne cache pas le médian rouche. "C’est la preuve que quelque chose de bien peut survenir de quelque chose de mauvais. Il joue maintenant à Toronto, en MLS (avec Laurent Ciman). Il vit son rêve américain."
La chanson: "J’ai enregistré une chanson d’amour en portugais quand j’étais à Benfica"
Passionné de musique, Mehdi Carcela écoute "un peu de tout". "Mais mon groupe préféré, c’est Queen, le meilleur groupe de tous les temps", avoue-t-il. À ses heures perdues, le Liégeois est lui aussi… chanteur. "J’adore chanter", sourit-il. "Quand j’étais à Benfica, j’ai même enregistré une chanson d’amour en portugais. Mais je suis trop timide pour la montrer." Et devenir acteur, cela le tenterait ? "Oui, après le foot, ce serait fantastique. Mais pas à Hollywood, c’est trop ambitieux. Qui sait, je pourrais devenir une sorte de marque comme Jean-Claude Van Damme. Ah, finalement, non (rires)."
Sa position préférée: "Je préfère jouer sur le flanc mais Michel Preud’homme sait comment m’utiliser"
Mehdi Carcela ne le cache pas : "Je préfère jouer sur un flanc car j’ai plus de liberté pour m’exprimer." Pourtant, cette saison, sous les couleurs du Standard, ces positions sont principalement occupées par Mpoku, Djenepo et Maxime Lestienne. L’international marocain, lui, est le plus souvent utilisé dans une position centrale, de numéro 10, derrière Renaud Emond. "Comme numéro 10, j’ai parfois de la liberté aussi. Michel Preud’homme me connaît bien et il sait comment il doit m’utiliser. Il me donne une certaine liberté, même quand je joue dans l’axe."
"Je suis un peu fou mais pas arrogant"
L’image qui a été collée à Mehdi Carcela ne correspond pas à qui il est vraiment.
Demandez à vos amis ce qu’ils pensent de Mehdi Carcela. Certains vous répondront que c’est un joueur brillant doté d’un talent énorme, évidemment, mais d’autres vous diront qu’il se la pète ou qu’il se croit plus beau que tout le monde. Mais même si on lui a souvent collé cette image, le joueur liégeois est le premier à s’en défendre.
"Les gens ont une fausse image de moi", explique-t-il lucidement. "Je sais ce qu’on pense de moi mais croyez-moi, je suis quelqu’un d’honnête. Et souvent mal compris."
Car pour le comprendre , il est le premier à le dire, il faut apprendre le connaître.
"D’après ce que les gens voient à la télévision, je peux comprendre l’image que certains ont de moi. Mais à la maison, je ne suis pas du tout la même personne que sur le terrain. Ce ne serait pas sain. Parfois, durant le match, certains joueurs viennent me trouver en me disant : ‘Je pensais que tu étais arrogant mais en fait, tu es très gentil.’ Je suis un peu fou, c’est vrai, mais pas arrogant."
Et le monde du football ne lui plaît pas spécialement.
"C’est du business. Trop de business, selon moi." Et il compte bien changer de vie après sa carrière.
"Je ferai certainement quelques matchs de mini-foot avec mes potes mais certainement rien en rapport avec le football professionnel. J’ai l’intention de prendre un sac à dos et de voyager à travers le monde."
Pour faire des rencontres, des vraies. Avec des gens qui auront, en face d’eux, le vrai Mehdi Carcela.
"Mon frère Junior Edmilson me manque "
Si le monde du football ne plaît pas forcément à Mehdi Carcela, il y possède tout de même quelques amis. Paul-José Mpoku, Luis Pedro Cavanda ou Réginal Goreux, évidemment. Mais aussi Junior Edmilson, qui a quitté Sclessin pour le Qatar et Al Duhail l’été dernier.
"Son choix est personnel et je le respecte", explique Carcela. "Il peut faire ce qu’il a à faire là-bas, garder le même niveau puis revenir en Europe. Et pourquoi pas au Standard ?"
Ce qui ne serait pas pour déplaire à son pote.
"Il me manque, c’est normal. C’est mon petit frère. Sur le terrain, on s’entend parfaitement. Et en dehors aussi. Je suis heureux pour lui, il mérite le meilleur."
Mais son départ n’a pas facilité la tâche sportive de Mehdi Carcela.
"J’ai moins de liberté sans lui. Mpoku attire également l’attention mais en Belgique, désormais, on met quatre hommes sur moi. Il faut apprendre à vivre avec ça. J’ai eu plus d’espaces lors des matchs européens que lors des rencontres face aux équipes de bas de classement en Pro League. Est-ce que cela explique pourquoi j’ai été meilleur face aux gros ces derniers mois ? C’est possible…"