La DH en visite chez Sergio Conceiçao: “Je ne reconnais plus mon Standard”
Sergio Conceição a reçu la DH au Portugal pour évoquer ses années rouches et sa nouvelle vie de T1. Rencontre avec un champion qui n'a jamais oublié le club liégeois.
- Publié le 24-12-2015 à 09h33
- Mis à jour le 24-12-2015 à 10h45
Quatre ans et demi après avoir quitté Sclessin où il a entamé sa carrière d’entraîneur en tant que T2, Sergio Conceição nous a reçus chez lui, à Guimarães où il est désormais entraîneur principal, en compagnie de celui qui était son mentor à Sclessin, son ami, Dominique D’Onofrio.
L’occasion pour le Soulier d’Or 2005 d’ouvrir l’album souvenir et d’évoquer ce qui restera à jamais son club de cœur : le Standard.
Sergio, plus de quatre ans après votre départ, suivez-vous toujours les résultats des Rouches ? “Bien entendu. Le Standard est resté gravé dans mon cœur.”
Cela ne vous a donc pas échappé que le club a occupé la lanterne rouge cette saison ?
“Voir le Standard à la dernière place, cela m’a fait mal au cœur. J’ai ressenti un sentiment d’incompréhension. Comment un club, qui quelques années auparavant, était sur le toit du football belge, a-t-il pu descendre si bas ?”
Reconnaissez-vous encore votre Standard ?
“Pas du tout. Aujourd’hui, le Standard est devenu un club comme un autre. Il y a peu, le Standard était l’équipe phare du pays. Ça, ça me fait mal. Aujourd’hui, je ne reconnais plus mon Standard. Il a perdu de son âme. Les personnes passent et le club reste, c’est vrai. Mais l’histoire du club est faite par les personnes qui y passent. Je ne m’explique pas cette dégradation.”
Vous évoquez ici Lucien D’Onofrio ?
“Oui. Au Portugal, c’est un dieu. Il a ses entrées partout. Son travail a été reconnu. En Italie, pareil. Mais en Belgique, il était toujours la cible privilégiée des critiques. Il n’a pas eu la reconnaissance qu’il méritait. Je ne dis pas ça parce qu’il a été mon manager pendant plus de dix ans et qu’il est mon ami, mais le football a besoin de personnalités comme Lucien. Je n’ai jamais compris pourquoi en Belgique, après tout ce qu’il a fait pour le football et le Standard en particulier, on ne cessait de s’acharner sur lui. Au Portugal et en Italie, c’est le roi. En Belgique, c’était un pestiféré. C’est incompréhensible.”
À vous entendre, l’âme du club est partie en même temps que lui ?
“La question ne se pose même pas.”
En 2011, il vous aurait été impossible de poursuivre sous Duchâtelet ?
“C’était impossible. Pour poursuivre une aventure, il faut connaître le projet et les ambitions du club. Rester pour rester, cela n’a pas d’intérêt.” Vous aviez déclaré que le Standard manquait de connaisseurs du foot. “Je maintiens. Pour faire des résultats, c’est primordial !”
Connaissez-vous le nouveau président ?
“Uniquement de nom.”
Il a fait appel à Daniel Van Buyten.
“C’est une bonne chose. Daniel a réalisé une grande carrière et il connaît les rouages du milieu. Les anciens pros doivent être représentés dans les clubs.”
Il aurait pu faire appel à vous pour le poste de T1 . L’a-t-il fait ?
“Il n’y a eu aucun contact entre le Standard et moi.”
Votre nom a pourtant circulé après le licenciement de Muslin, êtes-vous déçu de ne pas avoir été sondé ?
“ Non, c’est le football. Il faut alors avancer. Mais le Standard est et restera toujours important pour moi.”
Un retour sera-t-il encore possible ?
“Cela peut arriver un jour. Ce que le Standard m’a donné, j’aurais envie de lui rendre. Si ça n’arrive pas, tant pis.”
"Supporters, l’âme du club, c’est vous"
Sergio Conceição adresse un message aux fans liégeois. Après une saison 2014-2015 délicate et un début de championnat plus que compliqué cette saison, l’enfer de Sclessin a perdu beaucoup de sa superbe. Une constatation qui se révèle être insupportable aux oreilles de Sergio Conceição.
"C’est dommage. À mon époque, un match nul à Sclessin n’était jamais accepté. Alors entendre que les supporters sont parfois résignés ou encore qu’ils ont applaudi les joueurs après une défaite 4-1 à Ostende, c’est assez bizarre. Avant, Sclessin était réputé pour son ambiance torride. D’ailleurs, je me souviens du discours tenu au Portugal par Jorge Jésus lorsqu’il avait affronté le Standard en Europa League avec Braga. Il louait la ferveur et l’ambiance qui régnait au Standard. L’image du club, son âme, c’est les supporters. Ils doivent être toujours là avec leur passion et leur ferveur."
L’ambiance des grandes soirées à Sclessin manque encore au Portugais. "Je me souviens encore du moment où j’ai soulevé le Soulier d’Or à Sclessin. J’ai connu la Lazio, l’Inter Milan, Porto, mais Sclessin, c’est différent. À Guimaraes, je retrouve cette ferveur."
Une ferveur qui peut parfois mener à des dérives comme ce fut le cas la saison dernière.
"J’ai vu le tifo contre Steven Defour. Je comprends leur frustration et la déception, mais il ne fallait peut-être pas aller jusque-là."
Cette année, sur Facebook, une page avait été créée par des supporters du Standard pour appeler au retour de Conceição au Standard en tant que T1. "Vous me l’apprenez. C’est une initiative touchante."
"Sergio avait le profil idéal pour remplacer Muslin"
En septembre dernier, il a beaucoup été question du retour de Sergio Conceição, alors libre, à Sclessin pour prendre la relève de Slavo Muslin. Pour son ancien T1 et ami, Dominique D’Onofrio, le Portugais constituait le choix numéro 1.
"Sans aucun doute. En tant que joueur, il a apporté une mentalité, une grinta qu’il aurait pu ramener en tant que coach. Il ne cachait pas ses émotions, excessives ou non, les supporters l’adoraient comme c’était le cas partout où il est passé. Au Standard, il incarnait l’image parfaite du vrai Standardman . Il tirait l’équipe vers le haut. C’était le profil idéal après le départ de Muslin d’autant qu’il avait obtenu de beaux résultats à Braga."
Aujourd’hui, le T2 de l’époque est devenu T1. Une évolution qui ne surprend guère l’ancien mentor des Rouches. "Avec moi en tant que T2, Sergio s’est rendu compte de l’exigence du métier d’entraîneur. Il est passé de l’autre côté du miroir. Je savais déjà, à l’époque, qu’il était fait pour ça."
Des propos également tenus par Siramana Dembelé. "Il a énormément appris aux côtés de Dominique. On savait que c’était dans cette voie-là qu’il allait s’engouffrer."
"J’ai beaucoup appris avec Dominique"
Sergio Conceição est reconnaissant envers son ami qui lui a mis le pied à l’étrier.
C’est à l’été 2010 que l’aventure du coaching a véritablement démarré pour Sergio Conceição lorsqu’il est devenu l’adjoint de Dominique D’Onofrio.
"C’est moi qui avais sollicité Dominique pour devenir son adjoint. J’étais directeur sportif au PAOK Salonique, mais le terrain me manquait", se remémore le Portugais.
Dominique D’Onofrio n’avait pas hésité un instant avant d’accéder à la requête de son ancien joueur. "Je lui ai dit oui, mais à une seule condition : qu’il soit impliqué à 200 %. Je connaissais déjà la réponse évidemment."
Pour l’actuel T1 de Guimaraes, cette première année d’apprentissage aura été primordiale. "Elle a conditionné le début de ma nouvelle carrière. C’était fantastique à tous les niveaux, que ce soit les entraînements, l’ambiance dans l’équipe et au final, les résultats. Ce n’était vraiment pas facile car avant la trêve, on a connu beaucoup de problème. Après janvier, on a créé un groupe, animé d’une envie et d’une passion commune. C’est dommage de ne pas avoir réalisé le doublé. Cette année m’a confirmé que je voulais devenir entraîneur."
À l’époque, l’ancien médian n’avait pas de diplôme en poche. "Je me suis alors arrangé pour qu’il puisse bénéficier d’une formation accélérée sur un an", ajoute Dominique D’Onofrio.
Aujourd’hui, Sergio Conceição détient sa Pro Licence obtenue dès son retour au Portugal à l’été 2011.
Il y a quatre ans, le duo Conceição-D’Onofrio officiait sur le banc liégeois. Une association que l’on pourrait retrouver un jour ailleurs ? "Et pourquoi pas", s’exclame le Portugais avant que Dominique D’Onofrio ne tempère, en rigolant : "Du calme, hein, je suis vieux moi Sergio, tu sais."
Sergio Conceição ne réfute pourtant pas l’idée de retravailler un jour avec son mentor. "Travailler avec Dominique me plairait vraiment beaucoup. C’est mon ami, mais je connais aussi ses qualités. Si, un jour, je gravis les échelons et que je pense à lui, je l’appellerai directement."
"Le penalty à Ostende et la qualif à Bochum"
Alors qu’il est passé par la Lazio, Parme, l’Inter Milan ou encore Porto, c’est bien au Standard que Sergio Conceição est resté le plus longtemps. "Trois saisons", se souvient-il. Pourtant, le Portugais ne devait effectuer qu’un passage éclair en bord de Meuse. "Dans ma tête, je venais ici pour six mois. Mais je me suis tellement plu que je suis resté trois ans."
En trois ans, Sergio Conceição a accumulé les souvenirs, bons comme mauvais. "Tu te souviens de ton premier match sous notre maillot?", lui demande Dominique D’Onofrio. "Ah! oui, mon exclusion au Cercle Bruges", rétorque Conceição après un bref moment de réflexion. "Je n’y comprends toujours rien. Je voulais jouer un coup franc rapide et j’ai poussé un joueur adverse, ce qui m’a valu une rouge ." Au rayon des mauvais souvenirs figure également cet ultime match de la saison 2004-2005 à Ostende. "Je t’en ai voulu, et tu sais pourquoi", lance Dominique.
"Tu avais déjà planifié ton après-match avec le baptême de tes enfants ! Tu voulais aller vite et tu n’as pas eu la bonne attitude." Conceição ne pouvait qu’acquiescer. "C’est vrai que j’ai été trop vite. Ensuite, j’ai été suspendu pour le test-match retour à Genk." Des grandes soirées, Conceição en a encore plusieurs en mémoire. "Il y a évidemment mon Soulier d’Or même si j’aurais préféré un titre de champion. Il y a également eu le match retour de quart de finale de Coupe contre La Gantoise à Sclessin. Comment ne pas citer le match de la qualification pour la Coupe Uefa à Bochum avec ce but égalisateur à la dernière seconde ! Quelle folie !"