Eyong Enoh, le pasteur de Sclessin
Très croyant, Eyong Enoh fait passer sa foi et sa famille avant le football. Entretien.
- Publié le 04-03-2016 à 12h06
- Mis à jour le 04-03-2016 à 12h13
Très croyant, Eyong Enoh fait passer sa foi et sa famille avant le football. Sur le terrain, sa fougue est frappante et reste un élément essentiel de son jeu. À tel point qu’il est parfois à la limite dans ses interventions, ce qui lui a d’ailleurs valu une exclusion précoce lors de son premier match en Rouche la saison dernière à Bruges . Mais en dehors, Eyong Enoh est l’exact opposé du joueur rugueux qui ne lâche rien.
Calme, posé, toujours disponible sont des qualificatifs qui reviennent pour qualifier le Camerounais. Le milieu sait d’où il vient et où il va. Sans se prendre la tête. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien qu’il est considéré par tous ses coéquipiers comme le grand frère du vestiaire, le sage rouche .
Quo de plus logique finalement pour ce fervent croyant qui fait passer sa foi, au même titre que sa famille, avant le football ? "J’ai commencé à m’investir dans la religion bien avant que le football professionnel ne débarque dans ma vie. Quant à ma femme et à mes enfants, c’est ce qui me donne envie de me lever le matin" , nous précisait-il la saison dernière dans un entretien qu’il nous avait accordé .
La religion, Enoh aimerait y revenir une fois sa carrière pro terminée avec un objectif bien précis. "J’aspire à devenir pasteur. J’ai eu cet appel bien avant le début de ma carrière et je veux y revenir."
Cette ouverture d’esprit, cette volonté de partager, Enoh aimerait aussi la mettre à profit dans le monde du football. trouve un prolongement "Pour moi, être pasteur, cela revient à jouer le rôle de parent. Je veux aller à la rencontre des jeunes, les écouter, les guider. L’éducation de la jeunesse, c’est ce qui m’importe le plus" , explique ce papa de cinq garçons.
Aider son prochain, c’est dans la nature du Camerounais de 28 ans comme en témoignent les études de médecine démarrées au Cameroun sous l’insistance de son père, qui, avant d’être le directeur principal des douanes de son pays, se rêvait lui-même médecin. Mais ses parents n’ont jamais pu financer ses études. Et le père d’Enoh, fort de sa réussite, a, lui, pu offrir à ses enfants cette possibilité de poursuivre un cursus universitaire.
"Mon père était très exigeant avec mes quatre sœurs (NdlR : il en a malheureusement perdu une) et mon frère. On a tous reçu une éducation formidable", avoue le milieu. "J’ai commencé des études de médecine à l’âge de 17 ans. J’aimais ça."
Beaucoup mais autant que le football. Son père a pu déplorer cette orientation, mais il n’a jamais découragé son fils.
"Je devais me débrouiller seul. Je me levais le matin, j’allais faire mon jogging puis je partais à l’entraînement tout en pensant à aller m’acheter des chaussures," se remémore le milieu, leader naturel d’un vestiaire où son autorité ne fait pas débat.
"Un vrai papa poule"
Le 5 octobre 2014, Eyong Enoh disputait ses premières minutes sous le maillot rouche à Bruges. Son match se terminait après 11 petites minutes et cette exclusion pour un tacle sur Vormer .
"À l’époque, tout le monde en Belgique pensait qu’Eyong était une personne agressive. Il y a eu pas mal de doutes émis à son encontre" , se souvient Bernadette, sa femme depuis bientôt 10 ans.
Un an et quatre mois plus tard, le statut du Camerounais a bien changé. "Il est devenu le grand frère, le papa du vestiaire. Comme partout où il est passé" , poursuit Bernadette.
Son épouse le confie : le milieu aime passer du temps en famille avec ses cinq garçons (Bashan Leeon qui joue à l’Ajax en U10 , Joseph Prince, David Priestly, Samuel Jamon et Ian Asher). "C’est un véritable papa poule. Très attentionné envers nos fils. Dès qu’il le peut, il passe du temps avec eux."
Mais, malheureusement, la femme et les cinq garçons du Standardman sont restés à Amsterdam. "On ne se voit que deux à quatre fois par mois. Dès qu’il a un jour de congé, il revient à la maison. Mais nous sommes constamment connectés. Parfois, les enfants me demandent où est leur papa, mais ils comprennent très bien la situation."
Bernadette n’est pas surprise d’entendre que son mari envisage de devenir pasteur. "C’est une mission qu’il avait entamée avant sa carrière. Il veut transmettre son expérience aux jeunes ainsi que son amour de Jésus. Sa foi est très importante. Elle l’aide à relativiser les choses comme ce fut le cas après son exclusion à Bruges."
"Eyong est un modèle au pays"
Arrivé à Sclessin lors du dernier mercato, Collins Fai a eu la chance de pouvoir compter sur son compatriote pour faciliter son intégration. "Je le prends naturellement sous mon aile" , nous avait-il précisé après la victoire face à Charleroi.
Des propos corroborés par Collins Fai qui ne tarissait pas d’éloges envers son aîné : "C’est un honneur de pouvoir évoluer à ses côtés. C’est une chance qu’il soit ici. Au Cameroun, Eyong est un modèle pour tous les jeunes joueurs comme moi. C’est un immense plaisir que de partager le vestiaire avec lui. Il agit vraiment comme un grand frère avec tout le monde et je vais pouvoir profiter de son expérience."
Inspiré par Milla, comparé à Verón
Alors qu’il n’avait que quatre ans, Eyong Enoh a assisté, à la télévision, à la belle épopée du Cameroun au Mondial 1990 (éliminé en quart de finale par l’Angleterre) . "C’est à ce moment-là, comme de nombreux jeunes Camerounais, que j’ai eu envie de devenir footballeur professionnel. Nous avons tous été inspirés par Roger Milla et ses coéquipiers de l’époque."
À l’âge de 16 ans, Enoh, fait ses premiers pas en D1 camerounaise à Mount Cameroun. Très vite, le Standardman se fait remarquer au point d’être surnommé Verón. Ses coéquipiers le comparaient déjà au célèbre médian défensif argentin pour son style de jeu agressif. Plus jeune, Enoh évoluait sur le flanc ou en tant que numéro 8 !