Belfodil: "Un joueur hybride insaisissable"
Alex Teklak analyse l’importance prise par Ishak Belfodil dans le dispositif de Jankovic.
- Publié le 10-12-2016 à 12h00
- Mis à jour le 10-12-2016 à 12h05
Alex Teklak analyse l’importance prise par Ishak Belfodil dans le dispositif de Jankovic. Un seul être vous manque et tout est dépeuplé. Ce vers de Lamartine collait à la peau des Standardmen jeudi soir face à l’Ajax. Sans leur maître à jouer, Ishak Belfodil, les Rouches ont manqué de calme, de clairvoyance mais aussi de folie dans le jeu, tout ce l’Algérien sait amener.
"Quand il est arrivé, au-delà de son but (NdlR : contre Genk), c’est les esprits qu’il a directement marqués", lance Alex Teklak. "On sentait chez lui, et c’est encore le cas maintenant, un tel désir de revenir au-devant de la scène que cela transpire dans sa gestuelle. Belfodil sait pourquoi il est là et il le prouve chaque semaine."
Réfutant lui-même l’idée qu’il est un attaquant de pointe malgré le fait que plusieurs coaches l’aient contraint à ce rôle, Belfodil a parfois même du mal à décrire son style de jeu. "J’aime être assez libre pour faire jouer mes équipiers" , nous précisait-il en septembre dernier.
"Son rôle sur le terrain est un peu hybride", souligne Alex Teklak. "Il n’est pas ce que l’on peut à proprement nommer un numéro 10 mais il évolue en tant que tel. Il a un rôle sur le terrain un peu hybride, sans être un numéro 10, c’est à ce poste qu’il évolue. C’est difficile de le cataloguer car il a beaucoup de variantes dans son jeu ce qui le rend insaisissable. Il est bon de la tête; il sait marquer dans les seize mètres, il garde les ballons, joue dos au but ou encore se balade entre les lignes et parfois même se retourne pour partir dans un raid solitaire. Mais je nuancerais tout de même en précisant que toutes ces qualités n’apparaissent que quand le Standard est bien en place."
Depuis son arrivée dans notre championnat, Ishak Belfodil n’a pas encore été mis sous l’éteignoir par un joueur ou par la tactique adverse.
"Il a cette faculté à imposer son impact psychologique à ses adversaires et ce, parce qu’il est en confiance. Dès ses premiers gestes, son premier contrôle, il envoie un message à ses opposants en mettant la barre très haut."
Comme ils le déclaraient jeudi (voir ci-contre), ses équipiers cherchent systématiquement l’Algérien sur le terrain.
"Que ce soit Hubert ou les défenseurs, Laifis notamment via des balles plombées, tout le monde cherche Belfodil et c’est à partir de son contrôle, du pied ou de la poitrine, que l’action offensive démarre. Les ailiers partent alors dans la profondeur. Cela permet au Standard, en très peu de passes, d’être dangereux. C’est ce qui a manqué aux Liégeois jeudi face à l’Ajax. Des joueurs comme Dompé et Edmilson ou encore Sa étaient obligés de surcharger leur jeu de dribbles."
Le plus actif dans les 16 mètres
En championnat, Belfodil est le Liégeois qui touche le plus de ballons dans le rectangle adverse.
Polyvalent. Voici sans doute le mot qui qualifie le mieux Ishak Belfodil. À part son petit rectangle, il a déjà visité toutes les parties du terrain quitte à parfois servir les intérêts de l’adversaire. "C’est un joueur qui se frustre une fois qu’il est privé de ballon. Quand c’est le cas, on le voit souvent décrocher bas, trop bas même, parfois derrière Trebel et Enoh (ou Cissé) car il a besoin de toucher le cuir . Il faut alors le contrôler et lui dire qu’en agissant ainsi, il joue le jeu de l’adversaire. Quand cela va moins bien, il faut encore le canaliser et lui dire que c’est devant qu’on a le plus besoin de lui."
Et devant, tout devant, dans la surface adverse, c’est là qu’il semble se sentir le mieux si on en juge les statistiques. De tous les Standardmen, Belfodil est celui qui a le plus de contacts (68) avec le ballon dans la surface adverse devant Edmilson (58) et Dossevi (44).
"Il sait parfaitement bien s’infiltrer. Sa position fait qu’il touche les ballons entre les lignes pour ensuite, une fois la passe réalisée, plonger dans les seize mètres où il est très attentif à la position de l’attaquant avec lequel il joue. Il a cette capacité à bien lire le jeu et à ne jamais se positionner dans la même zone que Sa."
Selon Alex Teklak, Belfodil est également doté de l’instinct du buteur. "Son but contre Zulte de la tête en est la parfaite illustration. De Fauw garde bien le contact avec lui mais ne peut rien. Belfodil est le type de joueur qui se nourrit du contact de son défenseur pour faire la différence. C’était également le cas pour son premier but contre Genk."
"Il flotte entre les lignes"
S’ils ont tenté de minimiser son absence jeudi soir, ses équipiers ont loué ses qualités
Que ce serait-il passé si le Standard avait pu aligner Ishak Belfodil jeudi soir contre l’Ajax ?
On ne le saura jamais. Si ses équipiers ont assuré qu’ils pouvaient s’en sortir sans lui, ils ont tout de même reconnu les qualités évidentes de l’Algérien, au même titre que la direction et le coach.
Ce qu’en pensent les joueurs
"Il y a évidemment une différence avec ou sans lui", reconnaît Réginal Goreux, conscient de l’impact que Belfodil peut avoir sur le jeu des siens. "C’est difficile de parler d’un joueur absent mais Ishak fait partie de ces joueurs de qualité qui nous apportent beaucoup."
Guillaume Hubert, lui, mettait l’accent sur l’importance de l’Algérien sur ses relances.
"C’est un joueur qui fait du bien et sur lequel on peut s’appuyer pour garder le ballon. Personnellement, je le cherche souvent sur mes relances. Il flotte entre les lignes, posant pas mal de problèmes aux adversaires. Son absence a été importante mais il faut tout de même dire que les joueurs qui ont évolué à sa place ont fait le job."
Ce qu’en pense Jankovic
Avant le match de jeudi, Aleksandar Jankovic avait évoqué l’absence de son maître à jouer. "On a évolué une seule fois sans lui et on a perdu. Il est tellement important pour nous qu’on n’a pas eu le temps d’essayer autre chose. Il pèse énormément sur le jeu."
À l’issue du match, le coach ne pouvait éluder le manque de l’Algérien. "Il nous a manqué et pas seulement dans sa complémentarité avec Orlando Sa. Je n’ai pas d’autre profil comme le sien."
Ce qu’en pense la direction
En recrutant Ishak Belfodil, Olivier Renard réalisait un coup de poker, gagnant jusqu’à présent. "Même quand il est dans un moins bon jour, il est décisif", nous a-t-il assuré lors d’un entretien en novembre dernier. "Mais ce que j’aime chez lui, c’est sa lucidité et son professionnalisme. Il est toujours le premier en salle de musculation."
"Un style atypique"
Rapide balle au pied, technique, robuste et bon dans le jeu aérien, Ishak Belfodil a ajouté une corde supplémentaire à son arc : la réalisation des coups francs. Il en a fait la preuve dimanche dernier à Charleroi en convertissant un coup-franc des 26 mètres. Mais il n’en était pas à son coup d’essai puisque lors de la venue de Waasland-Beveren, sa tentative échouait sur le poteau. "Sa course d’élan, sa prise d’appui et sa technique de frappe sont atypiques. Quand on le voit s’élancer, on se dit qu’il va rater. Il est un peu raide au moment de frapper mais c’est un geste qu’il a automatisé à force de le répéter. C’est son langage corporel."
Belfodil doit se poser
En posant ses valises à Sclessin lors du dernier jour du mercato, Ishak Belfodil faisait une croix sur un juteux contrat dans son ancien club des Émirats, Baniyas SC. Sa volonté était de retrouver les joies du foot européen. À seulement 24 ans, l’international algérien, qui a déjà connu huit changements de club, est en quête de stabilité. C’est d’ailleurs ce qu’il nous déclarait en septembre pour sa toute première interview en Belgique : "J’aimerais bien me poser deux ou trois ans dans le même club." Sera-ce au Standard où il a signé un contrat d’un an plus une autre année en option ? C’est en tout cas le souhait de toute la direction liégeoise. Mais entre les espérances et la réalité, il y a souvent un monde. Belfodil l’a toujours déclaré : il veut rendre au Standard ce qu’il lui a donné en le recrutant. Depuis son premier match, l’Algérien tient parole. Au point de prolonger son bail en bord de Meuse d’un an ? Possible et surtout souhaitable.
"Sa a plus besoin de Belfodil"
Contre l’Ajax, Orlando Sa a souvent semblé chercher son compère Ishak Belfodil. Il faut dire que les deux hommes n’ont pas mis longtemps avant de trouver des automatismes. Selon Alex Teklak, le Portugais serait plus dépendant de l’Algérien.
"Même si j’aime beaucoup Orlando Sa, on voit qu’il a davantage besoin de Belfodil alors que ce dernier n’a besoin de personne pour être performant. L’Algérien est capable d’apporter autant de possibilités à n’importe quel attaquant."
L’attention générée chez l’adversaire par l’ancien joueur de l’Inter Milan libère évidemment des brèches. "L’attaquant qui joue en profondeur avec lui aura toujours des possibilités et sera moins sous le monopole d’un marquage strict."
À noter que cette saison, le duo Belfodil-Sa a déjà planté 13 buts en championnat : neuf pour le Portugais et quatre pour l’Algérien.