Chris Bedia: "À Charleroi, je n’avais pas le droit à l’erreur"
Prêté à Zulte Waregem l’été dernier, Chris Bedia (22 ans) a un goût amer lorsqu’il évoque ses deux années au Sporting.
- Publié le 20-10-2018 à 08h21
- Mis à jour le 20-10-2018 à 10h38
Prêté à Zulte Waregem l’été dernier, Chris Bedia (22 ans) a un goût amer lorsqu’il évoque ses deux années au Sporting. Il est parti du Pays Noir il y a deux mois. Et il ne le regrette pas. Prêté à Zulte Waregem par Charleroi, Chris Bedia (22 ans) voulait absolument changer d’air cet été. Il nous explique pourquoi.
Chris, vous aviez commencé la saison à Charleroi comme titulaire… avant d’être prêté quinze jours plus tard. Que s’est-il passé entre-temps ?
"J’ai débuté le match contre l’Antwerp, une équipe difficile à jouer… puis j’ai été mis sur banc dès la semaine suivante, à Eupen. À ce moment-là, j’ai senti que j’allais revivre la même saison que l’an passé. Et il était hors de question que je reste une deuxième année sans jouer. J’ai donc appelé mon agent (Phillipe Piola) pour lui dire que je voulais être prêté."
Vous l’aviez déjà fait en janvier, non ?
"Oui, j’avais déjà l’intention de partir l’hiver dernier, mais Mehdi Bayat a souhaité que je reste, car il croyait en moi. Finalement, j’étais resté mais je l’ai regretté. La saison a été catastrophique, à titre personnel. Donc comme je voulais absolument éviter de revivre cela, il a accepté de me prêter cet été. Quand j’ai signé à Zulte Waregem, je l’ai directement appelé pour le remercier. Il a toujours été correct avec moi et je sais qu’il va continuer à me suivre. On reste en contact."
Cela veut dire que vous espérez un retour à Charleroi en fin de saison ?
"Je ne pense pas encore à cela. S’il faut y retourner, j’irai. Je vais d’abord tenter de faire une bonne saison à Zulte Waregem, l’avenir, on ne le connaît pas."
Mais le passé vous a, semble-t-il, fait mal.
"J’ai eu le sentiment, à Charleroi, que je n’avais pas le droit à l’erreur. Je suis un jeune joueur et on m’a mis une certaine pression, qui n’était pas facile à gérer."
Pourtant, en deuxième partie de saison dernière, vous aviez montré de belles choses.
"Mais je ne jouais pas mon football. Moi, mon jeu, c’est la percussion, les un contre un, la profondeur. Comme sur le but que j’ai marqué contre Anderlecht en PO1 il y a deux ans. C’est ça, mon jeu. Mais l’année dernière, je jouais simplement pour qu’on ne me fasse pas de reproche. J’étais en manque de confiance et je faisais ce qu’on me disait."
Mais votre première année, elle, avait été plutôt encourageante.
"Elle a été mitigée. J’ai eu quelques bons moments, mais j’aurais pu faire beaucoup plus. J’ai enchaîné des matches puis je suis retourné sur le banc. Malgré ça, j’avais reçu des offres. Et j’ai décidé de rester une deuxième année. Mais je l’ai regretté. Car comme je l’ai dit, elle a été catastrophique. J’ai même joué en réserve. Et ce n’est pas les matches avec la réserve qui allaient me remettre en forme."
Vous retirez quand même du positif de votre passage au Sporting ?
"Oui. J’ai beaucoup appris. Je me souviens de certaines discussions, avec Diandy, Baby, Saglik ou Mario (Notaro) , qui m’ont beaucoup aidé."
Pas avec Felice Mazzù ? Vous lui en voulez ?
"Non. Il faisait ses choix. Et si l’année dernière, il a été élu coach de l’année, je ne peux pas dire qu’il s’agissait de mauvais choix. Puis dans l’ensemble, mis à part les PO1, on a fait une très belle saison. Je ne veux blâmer personne, chacun sait ce qu’il a fait. Disons donc que c’était de ma faute, à moi, si ça s’est mal passé."
Vous aurez un esprit de revanche, dimanche ?
"Non, je ne suis pas comme ça. C’est un match comme un autre. Si on gagne, tant mieux, si on perd, tant pis."
Et si vous marquez, vous célébrez ?
"Non. Ça, c’est certain. Je respecte le premier club pour lequel j’ai joué en Belgique. Marquer et célébrer face à son ancien club, c’est vraiment être con."
"Ici pour rattraper le temps perdu"
Chris Bedia se sent bien à Zulte Waregem, où il estime progresser rapidement.
254 minutes jouées, une seule titularisation et zéro but. Résumés de la sorte, les débuts de Chris Bedia à Zulte Waregem ne sont pas pharamineux. Mais l’attaquant est positif.
"Ici, tout se passe bien, je suis content d’être là, avoue-t-il. On m’a bien accueilli, le coach me parle souvent, on travaille mes points faibles. Et le style de football est différent."
Sans doute plus adapté à ses qualités. "Zulte joue au ballon, c’est bien pour moi. Le coach insiste beaucoup sur les décalages, les appels. Avant que je signe, Doumbia et Méïté m’avaient dit que je progresserais, ici, comme cela a été leur cas avant moi. Et je pense qu’ils ont raison. J’espère rattraper le temps perdu et avoir du temps de jeu."
Ce qui n’est pas forcément le cas pour le moment.
"J’ai eu un petit souci médical qui m’a empêché de jouer durant deux semaines et le coach m’a parfois essayé sur la gauche, se défend Bedia. Et je pense qu’il a compris que ce n’était pas mon poste (rires). Par contre, comme deuxième attaquant, un peu plus en retrait, comme cela a été le cas contre Bruges, j’ai bien aimé. Malheureusement, on n’a pas concrétisé."
Et le premier objectif de Zulte Waregem est désormais de sortir de la crise. "Je suis confiant et je n’ai pas envie de penser négativement", note l’Ivoirien, qui habite dans une maison à dix minutes du centre d’entraînement. "Je suis bien, même si je ne comprends pas le néerlandais, sourit-il. Mais dans le vestiaire, je suis entouré de beaucoup de francophones." Dont Hamdi Harbaoui et Damien Marcq, ses anciens équipiers au Sporting. "Hamdi m’a dit qu’il avait aimé joué avec moi à Charleroi et avec Damien, on se remémore le passé et on rigole beaucoup. Et l’un comme l’autre continuent à m’appeler Le B (son surnom au Mambourg)."
Mais pour Francky Dury, c’est Chris. Pour le moment…
"Le sélectionneur de la Côte d’Ivoire m’a dit : ‘Oh, tu dors ?’"
Repris à plusieurs reprises avec la sélection ivoirienne U23, Chris Bedia lorgne logiquement vers les A, dont il connaît bien le sélectionneur, Ibrahim Kamara, qu’il a côtoyé dans les équipes d’âge. "Si j’ai des contacts avec lui ? De manière indirecte, oui. La dernière fois que je lui ai parlé, je ne jouais pas avec Charleroi et il m’a dit : ‘Oh, tu dors ?’ Je sais que si je ne marque pas, je n’irai pas en sélection. Car là-bas, il y a des tueurs (Zaha, Pépé, Cornet, Kodjia…)."
Et l’attaquant de Zulte Waregem compte bien en devenir un. Même s’il avoue être moins obnubilé par le but que par le passé. "Tant que je me plais et que j’ai un rôle important dans l’équipe, je m’épanouis. Finalement, marquer m’importe peu tant que je me sens bien. Et si je fais les efforts, je sais que cela va passer et que je vais être récompensé." Une récompense qui, pour lui, se matérialiserait par un appel de son sélectionneur. Pour faire ses débuts chez les Élephants.
Mazzù : "Chris Bedia est un des meilleurs joueurs que j’aie eus"
Le coach carolo est conscient du talent de l’Ivoirien. "Mais il doit encore s’améliorer dans certains domaines, et mentalement".
Si Chris Bedia n’a pas explosé au Sporting comme l’avait promis Mehdi Bayat, c’est une déception pour tout le club. Et en particulier pour son coach, Felice Mazzù, qui a tenté de le faire progresser.
"Même s’il n’est plus avec nous et peu importe ce qu’il pense de moi, je reste persuadé que Chris Bedia est un très grand joueur, précise le coach carolo. Il a d’énormes qualités footballistiques, c’est un fait. Mais il doit encore s’améliorer dans certains domaines, comme le jeu aérien ou les appels dans les espaces."
Et sur le plan mental. "J’ai toujours essayé de le faire s’améliorer sur ce point. Mais il n’est peut-être pas encore tout à fait prêt."
À l’inverse de Victor Osimhen, arrivé quelques jours après Bedia, et qui possède un profil comparable à celui de l’Ivoirien. "Effectivement, ce sont deux joueurs qui se ressemblent, indique Mazzù. Mais je dirais que, malgré son plus jeune âge, Victor est peut-être plus prêt que Chris. Ce qui ne change rien au fait que Bedia fait partie des meilleurs joueurs que j’aie eus à Charleroi, en termes de potentiel."
Inexploité à ce jour, malheureusement.