Ali Golizadeh s'adapte brillamment au football belge: "En Iran, je ne devais pas défendre"
Étincelant à Lokeren, Ali Gholizadeh est en train de s’adapter au football belge de manière spectaculaire et rafraîchissante.
- Publié le 01-12-2018 à 08h04
- Mis à jour le 01-12-2018 à 12h16
Étincelant à Lokeren, Ali Gholizadeh est en train de s’adapter au football belge de manière spectaculaire et rafraîchissante. Daknam. Dimanche dernier, 22 h 15. Charleroi vient de battre Lokeren et d’enchaîner, pour la première fois depuis dix mois, deux succès de rang. Ce succès, les Zèbres le doivent en partie à Ali Gholizadeh, impliqué dans trois des quatre carolos. Mais en zone mixte, le joueur ne souhaite pas s’exprimer. "Je ne me sens pas capable de le faire en anglais ni en français. Je ne souhaite pas d’interview sans Mehdi à mes côtés…", souffle-t-il au team manager du club, avant de foncer vers le car.
Charleroi. Salle de presse du Mambourg. Mardi. 14 h. Cette fois, Mehdi Bayat est là. Pour jouer le rôle de traducteur auquel il s’est habitué ces derniers mois. Ali, lui, est détendu, souriant. En confiance. Comme sur le terrain. Surtout depuis qu’il a inscrit ce fameux premier but en championnat. "Un but qui me fait beaucoup de bien", avoue-t-il. "Depuis que je suis arrivé, j’avais cette envie de marquer. La semaine précédent le match à Lokeren, j’ai inscrit un but avec mon équipe nationale. Et j’avais l’objectif de faire la même chose avec mon club. Maintenant que le compteur est ouvert, je dois continuer de la sorte."
Et continuer à donner des assists, aussi. Ce qu’il a pris l’habitude de faire puisque qu’il en a déjà délivré quatre, dont un caviar à Jérémy Perbet, dimanche
"Quatre assists, ce n’est pas mal… mais c’est loin de la cadence que j’avais en Iran. Je suis avant tout un donneur d’assists. En Iran, on me connaît pour ça. Faire marquer les autres, c’est mon plaisir. J’espère atteindre rapidement la barre des dix passes décisives."
Un objectif ambitieux qu’il faudra mêler à un repli défensif assidu. Une condition sine qua non pour rester dans les plans de Felice Mazzù à long terme.
"Mais je suis en train de progresser sur ce plan-là", sourit l’Iranien de 22 ans. "Je suis de plus en plus exigeant avec moi-même. Je comprends de mieux en mieux les consignes du coach, même si tout n’est pas encore parfait."
Ce qui est tout à fait normal, lorsqu’on sait qu’en Iran, ses tâches défensives étaient quasi nulles. "Je jouais dans une équipe qui exploitait principalement les contre-attaques et au sein de laquellle nous étions trois à ne pas participer aux tâches défensives. On se focalisait uniquement sur l’attaque. Et ça a plutôt bien marché, puisqu’on a terminé troisièmes."
Mais à son arrivée en Belgique, il y a rapidement eu un décalage. "Lors de mes premiers matchs, je voulais d’abord mettre mes qualités individuelles et offensives en avant, ce qui est normal, je pense. Je jouais mon football, tout simplement. Mais j’ai rapidement compris qu’ici, on attendait autre chose de moi. Et ça ne me dérange pas. Je me sens de mieux en mieux."
Même si le football belge est forcément différent. "Il est plus physique qu’en Iran, c’est clair. La vitesse d’exécution est également plus rapide ici."
Mais ça, il semble s’y être rapidement adapté. Comme le prouvent ses combinaisons avec Benavente, Henen ou Bruno ces dernières semaines. "Même si on ne parle pas la même langue, avec Cristian, David et Massimo, on se comprend car on est des joueurs de ballon. Que ce soit avec eux ou avec le coach, la communication se fait de mieux en mieux."
Si bien que l’évolution de Gholizadeh n’est pas sans rappeler celle de Benavente, qui a lui aussi dû apprendre à défendre après son arrivée à Charleroi. "La saison dernière, quand j’étais venu voir le Sporting avant de signer, Benavente était sur le banc. Et désormais, c’est un des meilleurs joueurs de l’équipe… et du championnat. Sa trajectoire est donc un exemple pour moi."
Et pour l’instant, Gholizadeh est en avance sur les temps de passage du Péruvien. Mais il lui reste encore du chemin.
"Venir à Charleroi m’a rendu très populaire"
Depuis qu’il a signé au Sporting, Gholizadeh a changé de statut en Iran.
Lors de chaque trêve internationale, Ali Gholizadeh rejoint la Team Melli, la sélection iranienne. Où il prend du galon, match après match.
"Il y a un parallèle à effectuer entre ma situation en club et celle en équipe nationale, analyse-t-il. Le fait de montrer que j’étais capable de m’adapter en Europe m’a crédibilisé en Iran. Le sélectionneur Carlos Queiroz en a parlé avec moi. Il m’a dit qu’il était content de ce que je montrais."
Petit à petit, Gholizadeh se rapproche d’une place de titulaire en sélection. Une étape importante pour celui qui avait vécu la Coupe du monde comme 24e homme. "J’avais été fier et heureux d’intégrer le groupe mais cela a aussi été une grande frustration. Quand tu es le dernier sur la liste, ce n’est pas la même chose. Depuis que je suis rentré de Russie, je n’ai d’ailleurs qu’un objectif : prouver que je mérite de faire partie intégrante de la Team Melli."
En participant à l’Asian Cup qui se déroule en janvier prochain (l’Iran est dans le groupe du Yémen, du Vietnam et de l’Irak). "Il existe une liste élargie et sur cette liste, treize noms vont sauter. Le sélectionneur annoncera sa liste définitive et si je suis sélectionné, je répondrai à l’appel. Si je peux y aller, ce serait une vraie revanche personnelle par rapport au Mondial. Et je sens aussi que Charleroi est en train de m’apporter ce petit plus nécessaire pour revendiquer une place dans le onze de base."
Extrêmement fier de pouvoir défendre les couleurs de l’Iran, Gholizadeh a changé de statut au pays depuis sa signature au Sporting. "Contrairement à Kaveh Rezaei, je n’évoluais pas dans un grand club où tous les supporters voulaient me voir rester. Moi, j’étais dans une plus petite équipe. Et je sens qu’aujourd’hui je bénéficie d’un soutien national. Les Iraniens sont fiers de moi, ils me suivent. Le fait d’avoir quitté l’Iran et rejoint Charleroi a d’ailleurs considérablement augmenté ma cote de popularité."
"Rezaei m’aide énormément"
Même s’il est parti à Bruges, l’attaquant a pris Gholizadeh sous son aile et le conseille.
Entre Kaveh Rezaei et Ali Gholizadeh, l’amitié est sincère et date de plusieurs années. "On s’est connus chez les jeunes, à Saipa", explique l’ailier carolo. Qui demande énormément de conseils à son aîné.
"Dès que j’ai su que Charleroi me suivait, j’étais en contact avec Kaveh", explique Ali. "Il m’a expliqué ce qui m’attendait et m’a encouragé à venir en Belgique. Et lors de mon arrivée à Charleroi, il était mon équipier. Et cela m’a énormément aidé, sur et en dehors du terrain."
Mais quelques semaines plus tard, Rezaei a quitté le Sporting pour le FC Bruges pour plus de 6 millions d’euros. "Lorsqu’il m’a annoncé son départ, j’étais, avant tout, très content pour lui… et pour le pays. Car c’est une fierté de voir qu’un joueur iranien dispute la Ligue des Champions. Mais sur le moment, c’est clair que ç’a été difficile, car nous étions très proches."
Mais le départ de Rezaei n’a finalement rien changé. Car proches, les deux hommes le sont toujours.
"Kaveh m’aide encore. Il m’aide à m’adapter au football belge, en me parlant, en me conseillant. Lorsque le coach m’a placé sur le banc durant quelques semaines, je me suis posé des questions. Kaveh m’a expliqué que j’étais peut-être arrivé dans une position trop confortable, dans le sens où il y avait peu de concurrence à mon poste. Et une fois que la concurrence de Massimo Bruno ou David Henen est arrivée, j’ai dû l’accepter. Et finalement, cela tire le groupe vers le haut, je m’en rends compte. Kaveh m’a dit de continuer à me battre et à tout donner pour montrer que je mérite de jouer. J’applique ses conseils tout en acceptant les choix du coach. Car s’il me met sur le banc, c’est qu’il a ses raisons. Moi, je m’adapte et je travaille."
C’est la méthode Rezaei. Qui a déjà fait ses preuves…
"Noorafkan doit s’accrocher"
Si l’adaptation de Gholizadeh se fait de manière positive, celle d’Omid Noorafkan, l’autre Iranien arrivé cet été, est beaucoup plus compliquée. À tel point qu’un retour à Esteghlal est envisagé dès le mois de janvier.
"Je parle beaucoup avec Omid et il vit des moments difficiles. Avec Rezaei, on lui dit de s’accrocher et de continuer à se battre pour montrer qu’il a sa place. En Iran, il est considéré comme un des meilleurs jeunes joueurs du pays. Il a toutes les qualités requises pour s’imposer en Belgique. Mais il y a beaucoup de concurrence à son poste, au milieu du jeu. Et lui, contrairement à moi, n’a pas directement reçu sa chance. C’est sans doute pour cela que sa situation est plus compliquée."
Ce qui n’empêche pas les deux hommes d’être inséparables. "On se voit très souvent, même en dehors du football. Si ce n’était pas le cas, il y aurait un problème. On essaye de s’entraider."