Andreas Beck savoure son passage chez les Pandas: "À Eupen, j’ai retrouvé le football à son état le plus pur"
Incarnant la figure du sage, Andreas Beck croque à pleines dents son passage dans les cantons de l’Est. Rencontre.
- Publié le 22-11-2019 à 18h47
- Mis à jour le 22-11-2019 à 19h22
Incarnant la figure du sage, Andreas Beck croque à pleines dents son passage dans les cantons de l’Est. Rencontre. Champion d’Europe U21, champion d’Allemagne, 290 matchs en Bundesliga , double champion de Turquie et ancien international allemand. Certains rêveraient d’un tel palmarès. D’autres s’en pavaneraient. Andreas Beck n’est pas de ceux-là. Tout en humilité, le défenseur né de l’autre côté du Rideau de Fer est revenu sur son parcours : celui d’un homme amoureux de son sport et de ce qu’il offre comme perspectives.
"Peu importe ce que je ferai après ma carrière, je sais que cela aura un lien avec le football." Andreas Beck est trop attaché au ballon rond pour le mettre de côté quand le temps sera venu. Mais à 32 ans, le défenseur ne veut pas encore penser à la retraite sportive. "Je m’amuse tellement sur le terrain" , lâche-t-il dans un grand sourire quand nous le rencontrons jeudi au Kehrweg.
Plus petit stade de D1A, l’enceinte de la KAS Eupen contraste avec ce que le défenseur a connu à Stuttgart, Hoffenheim et Besiktas. Mais l’essentiel n’est plus là pour l’ex-international allemand. "En signant ici, j’ai retrouvé le football à son état le plus pur" , savoure celui qui s’est lié au club germanophone pour trois ans l’été dernier.
"Je n’ai pas choisi le chemin le plus simple, parce que j’avais des opportunités en Allemagne et en Turquie, mais j’ai opté pour ce challenge parce que tous les éléments étaient réunis" , reconnaît le back droit à la tête bien faite. "Partout, le football est constitué de trois éléments. Le premier, c’est le jeu. C’est le plus important parce qu’il faut réussir personnellement et répondre aux objectifs du club. Les deux autres, ce sont les fans et les médias. À ce stade de ma carrière, je peux profiter à fond du jeu sans passer trop de temps aux considérations extérieures. Elles sont moins intenses et agressives en Belgique qu’elles ne l’étaient à Stuttgart ou à Besiktas."
Dans le privé aussi, Andreas Beck a trouvé un environnement propice à son rôle actuel : celui de mari et de papa. "Avec mes deux enfants, je ne peux plus imaginer vivre dans une ville de 15 millions d’habitants comme Istanbul."
À Eupen, il a découvert l’exact opposé, qui cadre avec sa personnalité. "Tout est plus calme dans la région et les centres d’intérêt comme Maastricht, Aix-la-Chapelle, Cologne ou Liège sont à proximité quasi immédiate", explique ce passionné de la nature humaine.
"Tout en étant proche de chez moi, je découvre une nouvelle compétition, une nouvelle culture, de nouvelles langues. C’est très intéressant d’ailleurs cette mixité linguistique en Belgique" , observe le néo-Eupenois.
"Pourquoi signes-tu dans ce petit club inconnu ?"
Ce passage chez les Pandas , Andreas Beck ne le regrette en rien. Et ce ne sont pas les interrogations qui l’entourent qui l’ont fait douter.
Les mêmes qu’en 2008 lors de son passage à Hoffenheim, club d’un village de quelques milliers d’habitants promu en Bundesliga. "Tout le monde me demandait : ‘Pourquoi signes-tu dans ce petit club inconnu ? ’ Regardez où il en est une décennie plus tard. Il est régulièrement qualifié pour les Coupes d’Europe et fournit des internationaux."
C’est précisément pendant qu’il jouait au TSG que Beck a franchi un cap, devenant international à 21 ans. "Hoffenheim a été très important pour moi. J’y suis devenu un professionnel à part entière et une figure reconnue de Bundesliga. C’était une période fantastique, j’y ai appris beaucoup. Maintenant je peux dire que je suis devenu mature en quittant Hoffenheim."
Destination la Turquie et Besiktas. "Je ressentais le besoin d’expérimenter quelque chose de nouveau, pour m’améliorer sur le terrain, mais aussi en tant que personne." En deux ans à Istanbul, il remporte deux titres de champion.
Titré, il l’avait déjà été avec Stuttgart, son club formateur, en 2007. Repéré lors d’un tournoi local, il intègre les U12 de Thomas Tuchel puis gravit les échelons jusqu’à l’équipe première. Impatient, il veut tout jouer mais voyage entre les A et la réserve. "On a remporté la Bundesliga, on a joué la Ligue des champions mais je n’étais pas un membre crucial du onze."
Ce sera le cas lors de son retour au VfB en 2017. Mais tout a changé dans le club de ses débuts, qui ne lutte plus pour les titres mais pour éviter la relégation.
Libre de partir quand Stuttgart bascule en D2, Beck est approché par Andreas Bleicher, membre du conseil d’administration de la KAS. Deux semaines plus tard, tout était sur papier, signé.
"Eupen savait qu’il n’engageait pas seulement le joueur, mais aussi la personne" , souligne le défenseur. "Je sais ce que c’est d’être un étranger. Je suis né en URSS. Avec mes parents, on a déménagé munis de deux sacs en Allemagne après la réunification de 1990. On m’a forcé à apprendre l’allemand. Je peux donc comprendre ceux qui sont dans cette situation."
Unique en son genre, le chemin qui l’a mené de l’Union soviétique aux cantons de l’Est est définitivement marqué du sceau de l’humilité.
"Eupen me permet de me sentir vivant sur le terrain. Avoir un contrat professionnel à mon âge, ce n’est pas gravé dans la pierre. Je suis redevable envers le club." Sur les prés comme en dehors auprès des jeunes, il s’attache à rendre ce qui lui a été offert.
Le rôle de grand sage est taillé pour Andreas Beck.
"Toujours emmerdant de jouer les clubs belges en Coupes d’Europe"
Quand on lui demande de livrer un regard sur la compétition domestique, Andreas Beck en dresse un portrait flatteur.
"C’est un championnat très compétitif avec beaucoup de talent", avance l’Allemand qui avoue avoir été particulièrement impressionné par La Gantoise. "J’étais sur le banc quand on a perdu 6-1 là-bas, parce que mon fils venait de naître, et j’ai pu réaliser à quel point le jeu des Gantois était à la fois très physique et très léché."
Ce qui a permis aux Buffalos de prendre la mesure de Wolfsburg en Europa League. "Cela ne m’a pas étonné", lance Beck. "C’est toujours emmerdant (sic) de jouer contre les clubs belges en Coupes d’Europe. Je ne comprenais pas pourquoi avant (rires) . Mais depuis que je joue à Eupen, j’ai découvert que les équipes belges disposaient d’un bon mélange entre la technique, le physique et une bonne mentalité."
"Je partageais le terrain avec des légendes"
Plus jeune, Beck a pu goûter à la sélection allemande avec Ballack, Lahm & Cie.
Sur le CV de l’arrière-droit allemand figurent aussi neuf caps avec la Mannschaft, qu’il a failli accompagner à la Coupe du monde 2010. Il était le dernier à sauter du groupe de Joachim Löw. "Je ne ressens aucune amertume. Cela m’a permis d’apprendre à gérer une déception et à rebondir par la suite. D’ailleurs, j’étais nommé capitaine de Hoffenheim quelques semaines plus tard."
Né en URSS en 1987, Andreas Beck aurait aussi pu porter les couleurs de la Russie. "C’est vrai que j’aurais pu avoir une carrière internationale plus longue avec la Sbornaïa (NdlR : l’équipe nationale russe) , mais j’avais fait toutes mes classes en équipes d’âge avec l’Allemagne et j’ai été champion d’Europe U21 en 2009. Puis j’ai joué avec Ballack, Schweinsteiger, Mertesacker, Lahm, Podolski… Je partageais le terrain avec des légendes."
Quelques années et un titre mondial plus tard, la Mannschaft est en pleine reconstruction après la débâcle de la Coupe du monde 2018. "Les derniers matchs ont été bons, mais on ne sait pas de quoi l’équipe est capable contre les meilleurs."
Dont font partie les Diables pour Beck. "Comme Joachim Löw, j’aimerais que l’Allemagne se frotte à la Belgique pour voir comment elle s’en sortirait face à une opposition plus forte."
"Un match différent de celui à Sclessin"
Match aller. Andreas Beck se souvient bien du 3-0 reçu au Standard il y a deux mois mais ne s’attend pas au même type de match. "Les Liégeois forment une très bonne équipe", concède celui qui s’est dit impressionné par leurs prestations contre l’Eintracht Francfort en Europa League. "On devra être à notre meilleur niveau et jouer de manière pragmatique pour décrocher quelque chose contre eux, mais je suis confiant quant à nos chances de leur poser des problèmes, notamment sur les phases arrêtées qui sont l’une de nos véritables armes."
"Impossible d’arrêter Arjen Robben"
Son meilleur équipier : "Roberto Firmino. Sa mentalité et sa capacité à travailler étaient remarquables à Hoffenheim. Cela lui a permis de se développer avant de partir pour 40 millions d’euros à Liverpool. Il est intelligent, avec et sans ballon, puissant et ne se blesse jamais. Il convient parfaitement au système de Jürgen Klopp."
Son pire adversaire : (Il soupire.) "Les gars du Bayern, évidemment. Ce sont les meilleurs. Pendant douze ans, j’ai dû me farcir Frank Ribéry et Arjen Robben à leur meilleure période. Tu sais ce qu’ils vont faire et comment ils se comportent, mais tu ne sais pas les arrêter (rires) ."