"Motivateur", "bon orateur", "honnête": "S’il continue, Belhocine fait partie des candidats" assure Michael Verschueren
La situation de Karim Belhocine rappelle celle de Besnik Hasi en 2014 : les joueurs l’adorent mais beaucoup de doutes subsistent.
- Publié le 09-05-2019 à 06h49
- Mis à jour le 09-05-2019 à 09h30
La situation de Karim Belhocine rappelle celle de Besnik Hasi en 2014 : les joueurs l’adorent mais beaucoup de doutes subsistent.
Les liens sont aussi nombreux que déroutants. La situation actuelle de Karim Belhocine fait largement penser à celle de Besnik Hasi en 2014. Autant au niveau des espoirs que des doutes qu’il génère.
L’adjoint de John van den Brom avait repris l’équipe à une journée de la fin de la saison régulière, au moment du renvoi du néerlandais. Il avait conclu l’exercice par un titre totalement inespéré.
Karim Belhocine peut aussi obtenir sa récompense. Symbolique cette fois, en assurant la cinquième place qui permet de rêver d’Europe, voire en allant chercher la quatrième dont on rêve au RSCA.
S’il parvient à finir la saison en boulet de canon, le Français verra sa cote remonter dans le petit jeu consistant à déterminer qui sera le coach l’année prochaine.
En le confirmant comme intérimaire, la direction mauve lui a affirmé qu’il ne s’agissait pas d’une mission de quelques matchs sans possibilité d’aller plus loin.
Ils lui ont d’entrée de jeu promis que son nom ferait partie de la short-list. "S’il continue sur sa lancée actuelle et qu’on voit ce qu’il est capable de mettre en place, il est légitime de le considérer comme un possible entraîneur d’Anderlecht" , a lancé Michael Verschueren. "Rien n’est toutefois encore arrêté. Nous sommes en train d’analyser les profils et trancherons le plus rapidement possible pour communiquer à ce sujet en fin de saison ou tout juste après."
Karim Belhocine a donc une chance de se retrouver comme T1 dans l’organigramme officiel du club. Celle-ci est toutefois mince. Beaucoup de monde à Anderlecht se souvient de ce qui s’est passé avec Besnik Hasi et certains freinent des quatre fers.
Un motivateur avant tout
Quand on interroge les joueurs, ils parlent de Belhocine comme d’un meneur d’homme. "C’est un motivateur avant tout", lance Pieter Gerkens. "Il sait comment nous préparer à affronter un adversaire. On l’a vu durant les derniers matchs."
Les joueurs n’ont pas révélé tous les secrets de leur coach mais ont levé le coin du voile. C’est par la parole, qu’il parvient à faire la différence. "Karim est un bon orateur et il parle beaucoup" , poursuit Gerkens. "Il sait comment il doit pousser un joueur dans le bon sens pour qu’il donne ce petit pourcentage supplémentaire qui fait la différence. Cela lui arrive souvent d’engueuler quelqu’un qui fait mal le boulot. C’est très important de pouvoir dire les choses."
Sven Kums retrouve en lui son équipier de Courtrai et de Gand. "Karim a d’ailleurs été mon capitaine et je retrouve un peu les qualités que je lui avais connues. Quand il nous sort un discours, il le fait avec beaucoup de passion et de grinta. Et ça nous inspire."
L’homme que tout le monde adore
Karim Belhocine a un côté capitaine d’armée dans ses discours mais pas uniquement. Sa proximité avec les joueurs ne l’empêche pas d’être très dur à l’entraînement.
"Je n’irai pas jusqu’à dire que c’est un tueur" , sourit Pär Zetterberg. "Si quelqu’un ne fait pas son travail à 100 %, il le dit directement. Pareil si un joueur triche."
Kara Mbodj confiait que Belhocine était même parfois très dur à l’entraînement avec ceux qui ne donnent pas tout. "Ce n’est pas un cool" , confirme Sven Kums. "Si tu n’as pas envie de t’entraîner à 100 %, il ne veut pas de toi."
Son passé de T2 lui a permis de créer un lien particulier avec les joueurs. Il est devenu une sorte de confident. Surtout pour les joueurs qui connaissaient des passages à vide ou sur le banc.
Le changement de poste ne lui a pas fait changer d’approche. La proximité est sa grande force. "Un gars comme Verschaeren est plus libéré avec lui" , dit Michael Verschueren. "L’entraîneur le comprend bien et le met en confiance. Ça clique bien avec beaucoup de joueurs."
Le dialogue est sa méthode. Elle peut parfois être brute. "Il ose dire la vérité et ce qu’il observe" , dit Gerkens. Mais quel que soit son choix, il le justifie. Il va d’ailleurs personnellement voir les joueurs déçus pour débriefer avec eux et justifier sa décision. On nous rapporte que même les réservistes sont plus sereins depuis qu’il est là.
Besnik Hasi avait utilisé les mêmes bases. Il a remis en confiance ses joueurs de par sa connaissance de leur mentalité, leurs soucis, etc. Il était à l’écoute de tout le monde et ne laissait personne à l’écart.
Le discours du groupe actuel est le même qu’à l’époque. Sven Kums et Pieter Gerkens ont ouvertement posé la question : "Le groupe apprécie Karim, alors pourquoi ne pas continuer avec lui ?"
Un retour à un jeu simple
Les Mauves apprécient également chez lui sa simplicité tactique. Vu la situation, impossible de jouer à la Vanhaezebrouck. Belhocine partage les principes de celui qui était son T1 au RSCA mais a préféré mettre en place une grosse organisation et un jeu sans fantaisie.
Nouvel écho à Besnik Hasi. Le coach avait avancé Kouyaté sur l’échiquier pour soulager les joueurs offensifs et mis en place un 4-4-1-1 qui quadrillait mieux le terrain en perte de balle.
L’instantanéité du moment nécessite ce type de retour aux sources qui soulage souvent les joueurs, qui ne s’empêtrent pas dans de complexes questions de positionnement ou de ligne de course.
Belhocine a prouvé deux choses tactiquement en deux matchs : il sait lire le jeu de l’adversaire et s’y adapter, comme face à Bruges, et a compris que les meilleurs joueurs doivent être alignés à leur meilleure position.
Des questions tactiques
Sur la longueur, cela ne suffit pas. Certaines langues se délient déjà en coulisses, laissant planer un doute quant aux qualités de tacticien de Belhocine.
Pour beaucoup, il se résume à un people manager doublé d’un motivateur. Et ça s’arrête là. Il a certes pris de l’expérience depuis, mais le passé du coach, à Courtrai notamment, donne en partie raison à ceux qui doutent de lui.
Bien qu’il puisse se targuer d’avoir replacé Marusic comme latéral droit, le groupe courtraisien le considérait plus pour ses qualités humaines que tactiques. On disait de lui qu’il était encore joueur dans sa tête. Il a évolué depuis mais n’en reste pas moins un jeune coach.
Anderlecht est conscient qu’un profil à la Vanhaezebrouck n’est pas le bon pour reconstruire l’équipe actuelle. Il faudra toutefois un coach capable de ramener du football au Parc Astrid. Michael Verschueren résume tout en disant qu’il faut trouver le bon profil, "et pas à la Weiler".
Une ligne de conduite appréciée par la direction
Michael Verschueren est positivement impressionné par le travail de Karim Belhocine. Par ses résultats, d’abord, mais également par son travail au quotidien.
"On a beaucoup parlé avec Karim quand je lui ai proposé ce défi" , explique le directeur sportif. "Je lui ai demandé s’il était OK de suivre le projet de jouer avec les jeunes. Il m’a dit qu’il n’allait pas le faire mais qu’il jouerait avec les meilleurs joueurs. Et visiblement, ce sont les jeunes. Il leur fait confiance et ose prendre des risques. Il va dans la bonne direction."
Contrairement à Fred Rutten et Hein Vanhaezebrouck, Belhocine travaille davantage en dialogue avec les autres membres du staff et de la direction. "Il consulte souvent ses adjoints" , affirme Pär Zetterberg. "Et s’il a encore une question, il vient me voir."
Un lien qui deviendra plus difficile avec la direction et le vestiaire
Besnik Hasi était également un homme de la direction. Un fidèle serviteur de la maison mauve. Depuis bien plus longtemps que Karim Belhocine même.
Sa relation avec Roger Vanden Stock a toutefois changé une fois le costume de T1 endossé à titre officiel. Les attentes, le stress, la pression et toutes les autres joyeusetés sont inhérentes au travail d’entraîneur d’Anderlecht et elles changent même le plus jovial des hommes.
Si actuellement "tout le vestiaire adore Karim" , comme le résume Sven Kums, ce ne sera pas aussi simple par la suite. Le groupe va changer du tout au tout cet été. Avec une arrivée possible de dix recrues, il n’aura pas le temps de créer un lien avec eux comme il a pu le faire avec les joueurs actuels.
Il n’en aura plus le droit non plus. Un coach se doit d’avoir une certaine distance vis-à-vis de son groupe pour ne pas laisser l’affectif prendre le pas sur la vérité du terrain.
Son impact auprès des joueurs s’en verra diminué. Il ne pourra plus justifier tous ses choix, ni commencer à se comporter comme l’ami d’un joueur sous peine de voir les autres considérer qu’il y a des traitements de faveur.
Plus que l’aspect purement sportif de son profil, c’est la question de l’impact de ses méthodes sur la longueur qui pose question au sein de la direction. Pour l’instant, celles-ci fonctionnent à merveille, mais une interrogation laisse planer un gros doute : jusqu’à quand ?