Les dessous du clash entre Rutten et Verschueren
Le Néerlandais était à la fois surpris et soulagé de recevoir son C4.
- Publié le 17-04-2019 à 06h57
- Mis à jour le 17-04-2019 à 11h45
Le Néerlandais était à la fois surpris et soulagé de recevoir son C4.
Fred Rutten ne rentrera pas dans l’histoire comme l’entraîneur le plus légendaire d’Anderlecht. Si un classement fictif était rédigé, il occuperait les dernières places. Avec Hein Vanhaezebrouck. Et il se positionnerait peut-être juste devant Herbert Neumann, que Michel Verschueren avait limogé après trois défaites au bout de ses trois premiers matchs, en août 1995.
Michael, le fils de Michel, a limogé son deuxième entraîneur en cinq mois. En concertation avec Marc Coucke, évidemment. Et - selon le communiqué officiel - "de commun accord" avec Rutten. Pourtant, une dispute vers neuf heures, hier matin, était à la base de la rupture. Quand Rutten a fait savoir à Verschueren qu’il ne comptait pas poursuivre la saison prochaine, ce dernier a crié : "Alors, on arrête directement !" Bizarrement et au grand étonnement de Rutten, la RTBF avait déjà annoncé à 8 h que le coach serait viré.
Lundi, Verschueren s’était mis autour de la table avec Rutten. Avait-il encore le courage de terminer la saison ? Avait-il encore des solutions et des idées ? Avait-il encore l’envie ? L’après-midi et le soir, Rutten avait assisté aux deux matchs contre OHL. En se disant qu’il serait encore là le lendemain.
Mais au même moment , les membres du noyau dur BCS étaient en pourparlers avec Verschueren. Leur principal souhait : que Rutten lance des jeunes en cette fin de saison, vu que tout est déjà perdu. Rutten, lui, était formel : pas question de faire jouer une demi-équipe de U21 lors des six derniers matchs. Il voulait même réduire le noyau A. Un Cobbaut, par exemple, ne recevrait plus une seule minute de jeu. En d’autres mots : Verschueren et Rutten n’étaient plus sur la même longueur d’onde. Hier matin, il a été remercié.
Rutten ne le dira pas tout haut, mais il a commis l’erreur de sa vie en signant à Anderlecht. Il n’était que le cinquième choix, et il l’a senti dès qu’il a ouvert la porte de Neerpede. Cela n’a jamais bien fonctionné entre lui et plusieurs personnes clés (Verschueren et des joueurs importants comme Trebel) du club.
Les autres entraîneurs contactés (De Boer, Cocu), eux, avaient vite compris que le Sporting serait un cadeau empoisonné. Déjà au stage à La Manga, Rutten avait des regrets. Il a découvert un groupe qui selon lui n’avait pas assez de qualité pour décrocher un ticket européen, un avis qui n’était pas partagé par ses patrons.
Et le club ? Selon Rutten, il était en ruines. En janvier, il se disait déjà qu’il ne serait plus à la tête d’Anderlecht la saison prochaine. Mais entre-temps, il était déterminé à réussir. Et donc, il a pris des mesures impopulaires.
Un exemple : même si un jeune (Yari Verschaeren) a sauvé sa peau en qualifiant à lui seul Anderlecht pour les playoffs 1, il se fichait de l’école des jeunes. Quand l’équipe A s’entraînait à Neerpede, les jeunes devaient aller à l’autre complexe d’entraînement. Et les entraîneurs des jeunes n’avaient plus accès aux lieux dédiés au noyau A. Rutten s’est fait beaucoup d’ennemis en quatre mois à Neerpede.
À ses conférences de presse, ses paroles étaient souvent creuses. "S’il parle de cette façon à ses joueurs, on comprend leur manque de motivation", disait un supporter, hier.
À deux reprises, il a toutefois montré un autre visage : quand Zetterberg a donné son avis sur Verschaeren dans la presse et quand Verschueren a déclaré que Rutten devait terminer troisième pour rester coach.
Avant le match contre l’Antwerp, Verschueren s’est d’ailleurs installé parmi les joueurs pour écouter la théorie de Rutten.
"J’étais trop tôt à Neerpede pour un autre rendez-vous", explique Verschueren. "Et j’avais déjà de temps en temps assisté à ses théories."
Le Néerlandais a très mal pris cette ingérence de la part du manager général, qu’il a considérée comme une motion de méfiance. Il a compris que ses jours étaient comptés. Surtout quand il a vu quelques joueurs avec le sourire dans le vestiaire à Sclessin, pendant que les supporters faisaient la guerre avec la police et bloquaient le car.
De plus en plus de joueurs allaient trouver Verschueren pour se plaindre de leur coach. La situation était devenue intenable.
Rutten n’était même pas déçu en apprenant que Verschueren mettait un terme à leur collaboration. Que du contraire. Il était soulagé. Le 16 avril était son 100e jour comme coach d’Anderlecht, et en même temps le plus beau. Avec cette équipe et dans cette ambiance pourrie, il tenait même compte d’une défaite contre Gand, qui aurait passé la lanterne rouge des playoffs 1 à Anderlecht.
Que les supporters ne se fassent toutefois pas d’illusions. Le C4 de Rutten ne résout pas tous les problèmes. Avec ou sans Fred, Anderlecht reste malade.