En visite chez Thorgan Hazard: "Parfois, je bats Romelu à des concours de finition"
Avec huit buts et quatre assists, Thorgan Hazard est le Diable le plus efficace cette saison
- Publié le 03-11-2018 à 07h21
- Mis à jour le 03-11-2018 à 08h45
Avec huit buts et quatre assists, Thorgan Hazard est le Diable le plus efficace cette saison Loge n°14 du Borussia-Park. C’est dans cette magnifique enceinte que Thorgan Hazard invite pour revenir sur un début de saison pour le moins fructueux avec Mönchengladbach : huit buts, quatre passes décisives et une troisième place en championnat. En quelques mois, il est même devenu le Diable Rouge le plus en vue et il peut se targuer de présenter de meilleures statistiques que son grand frère, Eden. Pas de quoi lui faire perdre la tête dans son discours, mais plutôt l’occasion, pour lui, de mettre en avant son travail mais aussi l’aide de ses équipiers.
Thorgan, comment expliquez-vous vos très belles statistiques personnelles ?
"J’ai la chance de jouer tous les matches et l’équipe tourne bien. L’entraîneur a également changé de système de jeu avec un 4-3-3 qui me permet d’être davantage entre le milieu de terrain et l’attaque, alors que je devais davantage défendre dans le 4-4-2 de la saison dernière. Nous nous procurons plus d’occasions et je suis un petit peu plus chanceux."
Ce n’est quand même pas que de la chance ?
"La saison passée, notre entraîneur, Dieter Hecking, me tapait sur les doigts car il voulait que je sois plus concentré à la finition. Moi, je prends le football comme un jeu et lorsque je ratais une belle opportunité, cela pouvait me faire rigoler mais ça ne faisait pas rire le coach. Je suis plus concentré aux entraînements et je joue aussi avec des équipiers qui se font de petits concours de finition après les séances. J’y participe désormais et en sélection, j’ai déjà battu Romelu. Cela veut quand même dire que je ne suis pas trop mauvais (sourire) ."
Traversez-vous la meilleure période de votre carrière ?
"Peut-être. On dit souvent qu’un joueur arrive à maturité à 26-27 ans et je n’en suis pas loin (25 ans) . J’espère que je vais encore continuer à progresser mais je sens que je traverse une bonne période. Je joue beaucoup, le coach me fait confiance depuis un long moment et l’équipe est plus forte que l’an dernier : la concurrence est donc plus costaude et il faut être performant chaque week-end."
Vous êtes le Diable qui a les plus belles statistiques : c’est une fierté pour vous ?
"Non, pas spécialement. Beaucoup de gens regardent les statistiques et si je peux en avoir tout en aidant l’équipe, c’est parfait pour moi. On parle aussi de mes performances car le club tourne bien."
Par contre, être plus décisif que votre frère Eden, c’est quand même un plaisir, non ?
"Eden a bien commencé la saison. Il est parti très vite en étant même décisif lorsqu’il montait au jeu. Je lui ai dit qu’il allait trop vite et qu’il devait se calmer (sourire) . Mais je suis bien en ce moment et je suis bien revenu dans le parcours, même si je pense qu’il aura été plus de fois décisif que moi en fin de saison."
C’est une compétition entre vous ?
"C’est plus un petit jeu mais on n’est vraiment pas obnubilé par cela."
Pour vous qui avez tout le temps entendu que vous aviez moins de talent que votre frère, ce qui vous arrive en ce début de saison doit être réconfortant.
"Mais j’ai toujours moins de talent que lui, cela n’a pas changé ! Mais si on m’avait dit, il y a cinq ans, que j’en serais où j’en suis aujourd’hui, j’aurais signé des deux mains. Je joue à un bon niveau, j’évolue dans l’une des meilleures compétitions du monde et j’ai réussi à me faire une place chez les Diables : j’ai de quoi être fier. C’est le travail qui est en train de payer."
Comme Eden, avez-vous l’impression que tout vous réussit pour l’instant ?
"C’est clair que c’est plus facile quand tu as la confiance et la réussite. J’ai commencé ma saison avec un match de Coupe d’Allemagne durant lequel j’ai planté trois buts. Ce n’était pas un gros adversaire mais ça m’a permis de me lancer."
Vous auriez pourtant pu avoir un coup de fatigue après un long Mondial et de courtes vacances.
"Je n’ai pas eu une longue préparation mais c’est plutôt une bonne chose pour moi. Je préfère que le processus soit plus rapide, ce qui permet de moins courir et de faire moins de travail athlétique en préparation."
Malgré votre excellent début de saison, on ne parle pas beaucoup de vous. Est-ce parce que vous jouez en Bundesliga et pas en Premier League ?
"Je n’ai pas l’impression qu’on me sous-estime en Belgique mais les gens font plus attention au championnat anglais car il est plus médiatisé et il y a plus de Belges qui y jouent. Mais peut-être que l’arrivée d’Axel (Witsel) à Dortmund va changer quelque chose. Il est en train de montrer que la Bundesliga, ce n’est pas n’importe quoi."
Peut-être qu’un titre de champion d’Allemagne pourrait vous aider à faire les gros titres…
"Nous occupons une bonne position (3e) mais c’est compliqué car il y a de grosses équipes devant nous (Dortmund et le Bayern). J’espère que nous allons continuer comme cela, notamment grâce à l’arrivée d’un très grand attaquant très efficace comme l’est Alassane Plea. En interne, nous ne parlons quand même pas du titre. Notre objectif est juste de retrouver l’Europe."
"Le Real me veut? Pour la réserve alors..."
Sous contrat jusqu’en 2020, il n’exclut pas la possibilité de prolonger à Mönchengladbach
Thorgan Hazard entame sa quatrième saison à Mönchengladbach et il commence à maîtriser les bases de l’allemand. "Sehr gut, kein problem", répond-il lorsqu’on le questionne sur sa capacité à s’exprimer dans la langue de Goethe. Pourtant, il aurait très bien pu décrocher un beau transfert lors du dernier mercato. Valence et Dortmund étaient notamment intéressés. Et, dernièrement, une rumeur annonçait que le Real Madrid suivait sa progression. "De l’intérêt du Real ? Pour moi ?", s’étrangle-t-il. "On trouve beaucoup de choses sur Internet. Ou alors, c’était pour l’équipe réserve…"
Cette blague illustre bien son état d’esprit : il n’a pas envie de trahir un club qui lui a permis de grandir au plus haut niveau. "J’ai l’impression de pouvoir encore progresser à Gladbach et ce n’est pas parce que nous ne jouons plus la Coupe d’Europe depuis deux ans que ma décision est mauvaise. Et je suis en train de le prouver", dit-il. "Il y avait de bonnes offres mais, personnellement, je n’ai jamais émis le souhait de partir et le club a rapidement confirmé que je n’étais pas à vendre. Je sens qu’on me fait confiance. J’ai un contrat jusqu’en 2020 et nous discutons avec les dirigeants mais je leur ai dit que j’attendais la fin de saison pour savoir où le club en sera. Prolonger ? C’est une idée que j’ai en tête mais on ne sait jamais les offres qu’on aura à l’avenir."
Ce n’est pas pour autant qu’il ne vise pas plus haut. S’il peut maintenir un niveau de jeu aussi élevé, Mönchengladbach ne sera pas en mesure de le retenir plus longtemps. Mais la direction fixerait un prix de départ assez élevé. "Je m’en fous de ma valeur", dit-il, lui qui partage l’état d’esprit de son frère quant à la possibilité d’aller au clash pour forcer un départ. "Je ne vois pas l’intérêt d’aller jusqu’à une telle extrémité avec un club qui m’a permis d’en arriver là où j’en suis aujourd’hui. Il y a toujours eu beaucoup de respect entre nous et si, un jour, je dois partir, je ne pense pas qu’il y aura de clash. Ce serait bête."
Pas intéressé par un départ en janvier, il répète sans cesse bien se sentir en Allemagne. D’autant que sa famille y a trouvé ses marques.
"Madame Hazard est très contente d’être ici. Elle est néerlandophone et nos enfants vont à l’école en néerlandais aux Pays-Bas. C’est une facilité pour elle. Maintenant, elle savait qu’en épousant un joueur de foot, elle serait susceptible de changer de pays. L’Espagne ? Ah, il y a le soleil, c’est différent. Mais mon épouse pense avant tout à ses enfants et pour le moment, ils sont très bien ici."
"Je suis là pour bousculer la hiérarchie"
Il commence à se faire une place plus importante chez les Diables Rouges
Petit à petit, Thorgan Hazard prend de la place dans le noyau des Diables. Une titularisation en Écosse et une mi-temps contre les Pays-Bas ont démontré qu’il était capable, à terme, d’ennuyer les titulaires.
"Ma progression est constante. Au début, je n’étais pas dans le groupe, puis j’ai été repris en jouant quelques minutes et maintenant, je suis parfois titulaire. C’est à moi de montrer ce que je peux faire quand je suis dans le onze de base. Je suis là pour bousculer la hiérarchie, pour viser toujours plus haut mais la concurrence est rude avec beaucoup de grands joueurs", dit-il.
Sa chance est de pouvoir évoluer dans le couloir ou dans l’un des trois postes offensifs.
"Je préfère jouer à l’une des places offensives. Mais quand le coach te dit de jouer dans un couloir pendant une Coupe du Monde, tu es content, même si ce n’est pas ta position naturelle. J’étais déjà très content de jouer, après avoir raté les deux derniers grands tournois, même si, à l’époque, la décision de l’ancien sélectionneur (Marc Wilmots) était logique car je n’avais pas le même statut qu’aujourd’hui."
Jouer dans le couloir lui offre au moins un avantage : être proche de son grand frère sur la pelouse. Leur complémentarité a souvent paru évidente.
"Pourtant, ce n’est pas calculé. J’essaye juste de combiner avec le joueur qui est le plus proche de moi. Mais quand tu as quelqu’un comme Eden dans l’équipe, tu vas forcément lui donner beaucoup le ballon car c’est un super joueur."
À l’avenir, il pourrait encore prendre plus de place dans le noyau, notamment à cause des retraites de certains cadres. Mais, à l’heure actuelle, ce sont davantage les défections dans le staff technique qui inquiètent. Thierry Henry vient de partir et le nom de Roberto Martinez a, un temps, circulé au Real.
"Si le coach Martinez a la chance de diriger le Real Madrid, il faut qu’il fonce. Cela n’arrive pas chaque année. Mais on serait content qu’il reste. C’est un petit peu comme pour Thierry Henry car tout le monde a été content de travailler avec lui. Nous avons appris à ses côtés et lui était très content de faire partie de notre groupe. Mais c’est logique qu’il soit parti dans un club", explique celui qui compte 17 capes. "Avec Thierry, on faisait des exercices de finition et d’ailleurs quand j’arrivais en sélection après avoir raté une occasion avec Gladbach, je lui disais : ‘Faut qu’on travaille car je n’arrête pas de rater des occasions.’ Je n’ai plus de contact avec lui aujourd’hui. Je ne sais même pas si j’ai son numéro de téléphone. Mais j’espère quand même qu’il viendra nous dire au revoir lors du prochain rassemblement."