Cristian Leiva: le Vidal des Sporting
Il y a dix ans, Cristian Leiva quittait la Belgique après deux saisons passées à Anderlecht et à Charleroi. Retour sur un personnage haut en couleurs.
- Publié le 09-12-2018 à 08h43
- Mis à jour le 09-12-2018 à 14h34
Il y a dix ans, Cristian Leiva quittait la Belgique après deux saisons passées à Anderlecht et à Charleroi. Retour sur un personnage haut en couleurs. Avant même de signer à Anderlecht à l’été 2006, Cristian Leiva s’était déjà taillé une sacrée réputation. Arrêté pour possession présumée de drogue, il était considéré comme un joueur avec un caractère à part. Il l’a prouvé pendant ses deux années en Belgique.
Cet été-là, Anderlecht avait effectué son shopping en Argentine. Lucas Biglia et Lucas Pareja ne tardèrent pas à s’intégrer au groupe. Cristian Leiva n’était pas dans le même cas.
"Il était plus âgé et avait déjà un beau passé en Argentine", explique José Garcia, l’ancien Team Manager d’Anderlecht qui encadrait spécifiquement les hispanophones. "Il y avait beaucoup d’ego dans ce vestiaire et il en faisait partie. Il avait un caractère très fort, mais était un gars sympa et honnête en dehors du terrain."
Sauf que, sur la pelouse du Parc Astrid, il n’a jamais su faire ses preuves. Barré par un gars comme Yves Vanderhaeghe, il ne fut presque jamais titulaire et ne monta que sporadiquement au jeu.
"Il n’arrivait pas à se faire au système et à la vie en Belgique", poursuit Garcia. "Il n’a pas su être patient. Ça lui a coûté cher."
L’Argentin ne supportait pas le fait de ne pas être le patron et, surtout, de ne pas jouer. En décembre 2006, il a fait une première sortie dans les médias. D’abord interdit de parler sur ordre du club, il contourna les règles pour étaler son spleen.
Il est devenu fou en stage
"Je veux que les fans sachent comment je me sens à Anderlecht", dit-il. "Il est exclu que je reste ici. J’ai perdu mon temps pendant six mois. Je veux signer dans un autre club belge, mais sans faire la guerre au club."
Son dossier traîna. Le joueur avait déjà explosé à plusieurs reprises au cours de la saison, mais péta véritablement un câble à La Manga. En furie, il quitta un des entraînements du stage.
Interrogé à froid, il ne regretta pas son écart. "Ma patience a des limites. J’ai le sentiment qu’absolument rien ne changera pour moi et que je ne recevrai pas ma chance."
Le départ Yves Vanderhaeghe conditionna son avenir. "Leiva reste et devra prouver sa valeur à l’entraînement", dit Herman Van Holsbeeck. L’Argentin continua de faire la gueule et refit une nouvelle sortie quelques jours avant la fin du mercato.
"Comme un soldat qui va seul à la guerre"
"Je ne me sens pas bien dans ma peau. Comme si j’étais un soldat qui va seul à la guerre. Rien n’a changé. Je suis la cinquième roue de la charrette."
Il évoqua même une rupture de contrat, mais refusa de retourner au pays. Un échec qui risquait d’attirer les quolibets de ses compatriotes et qu’il voulait éviter à tout prix.
Walter Baseggio vint à la rescousse. L’ancien médian mauve revint au bercail et offrit une porte de sortie à Leiva qui partit pour un autre Sporting, celui de Charleroi.
Il garda son logement à Bruxelles avec des allers/retours pour faire la connaissance de Jacky Mathijssen qu’il préféra largement à Franky Vercauteren. Son contrat de prêt à peine signé, il évoqua l’idée de rester un peu plus longtemps au pays noir.
Après quelques semaines, il prit place dans l’équipe. Dans la peau d’un titulaire. "Je l’ai vu arriver et je me suis dit qu’on avait Arturo Vidal", plaisante Thierry Siquet, T2 de Charleroi à l’époque. "Il avait le style du Chilien : très agressif avec une grosse grinta tout en ayant une bonne technique. On a rapidement vu comment l’utiliser au mieux."
Un profil ouvrier
Leiva déborda d’envie. De prouver qu’Anderlecht avait eu tort, surtout. "L’intégration s’est faite rapidement car il était passé par Anderlecht", dit Siquet.
Le coach a toujours eu une bonne relation avec le joueur. Il le qualifie de gars "cool", mais ne nie pas avoir connu quelques coups de sang de Leiva. "Il était explosif, c’est clair. Il était capable de choses superbes puis d’exploser. Il s’entendait bien avec les autres joueurs mais n’en était pas moins un personnage spécial et réservé."
Charleroi apprécia son travail et son profil ouvrier qui plut aux fans du Mambourg. Leiva l’a compris et leur fit une déclaration d’amour. "J’ai envie de poursuivre avec Charleroi. J’ai découvert tout un environnement ici. Je me sens bien. Ma femme est heureuse en Belgique et ma fille aussi. C’est pour cela que je veux rester en Belgique."
Une fois un deuxième prêt à Charleroi entériné, de douze mois ce coup-ci, il put enfin se lâcher sur le RSCA.
"Ils n’ont pas eu de patience avec moi. Tout changeait pour moi qui venais d’Argentine. Je devais me faire à la manière de jouer. Chez moi, on porte davantage le ballon alors qu’en Belgique, on nous demande de jouer en un temps."
Sa cible préférée ? Franky Vercauteren, son coach à Anderlecht. "Il y a eu une incompréhension entre la direction et lui car il ne recherchait pas un profil comme le mien. J’ai été considéré comme un objet, pas comme un humain."
Il ne joue plus à cause du fisc
À Charleroi, il joua tout ou presque. Jusqu’au trois-quarts de la saison. La fiscalité s’en mêla et Leiva sortit une nouvelle fois de ses gonds.
Anderlecht avait adapté son salaire à la baisse suite à une nouvelle législation au sujet des travailleurs étrangers. Il ne l’accepta pas alors qu’au moment de son premier prêt, il se dit prêt à jouer gratuitement en n’étant payé qu’en primes.
Il ne se rendit plus aux entraînements et Mogi Bayat, alors dirigeant du club, lui inventa une blessure diplomatique pour qu’il n’affronte pas Anderlecht. "Il a un problème avec ce club." Charleroi ne voulait pas le conserver et le mit de côté jusqu’au bout de la saison. Jusqu’à ce qu’il disparaisse de la circulation.