Comment Kompany a marqué Manchester: "Même les fans de Man U soutiennent son travail"
Vincent Kompany et son association Tackle4MCR, à qui iront les bénéfices de son match de gala de ce mercredi, luttent pour offrir un toit aux sans-abri de Manchester. Plongée au cœur du travail social du Prince dans sa ville d’adoption.
- Publié le 11-09-2019 à 07h50
- Mis à jour le 11-09-2019 à 13h11
Vincent Kompany et son association Tackle4MCR, à qui iront les bénéfices de son match de gala de ce mercredi, luttent pour offrir un toit aux sans-abri de Manchester. Plongée au cœur du travail social du Prince dans sa ville d’adoption.
Quelques tentes sont plantées dans l’étendue d’herbe qui sépare Hyde Road et Coverdale Cress dans la banlieue sud-est de Manchester. Deux femmes sont debout. Stoïques au milieu de ce qui s’apparente plus à une décharge qu’à un lieu de résidence.Elles vivent pourtant là. Et depuis un moment déjà. "C’est leur choix", souffle-t-on dans le voisinage. Car à quelques mètres de là, se dresse le Spin (Supporting People In Need, NdlR : Aider les personnes dans le besoin), un refuge pour sans-abri.
Google Maps nous annonce une église, mais c’est bel et bien ce centre d’aide qui se dresse en plein milieu d’un quartier pauvre de la ville.
Les murs blancs auraient bien besoin d’un coup de peinture et côté déco, on pointera davantage le fier drapeau des Citizens volant au vent que les déchets qui traînent dans l’entrée.
Mark nous ouvre. Avec un accent à couper au couteau, le petit bonhomme grisonnant nous demande d’attendre. Diane, la responsable du Spin, est occupée avec les résidents. Impatient, comme le laisse entendre son débit de paroles effréné, Mark nous invite à faire le tour du propriétaire.
"Andy Burnham, le maire du Grand Manchester (NdlR : Manchester et sa périphérie), était encore ici vendredi pour inaugurer notre nouvelle capacité d’accueil pour les chiens" , lance-t-il en pointant quatre niches de luxe.
Ce coup-ci, Burnham était là sans Vincent Kompany. Fin mai, les deux hommes étaient présents au Spin pour sa grande inauguration. Un moment fou pour les responsables du centre et les sans-abri qu’il accueille.
Mission impossible
"Vincent ne devait pas venir. Et il l’a fait, souligne Diane, la responsable du lieu. Il voulait soutenir notre travail et a donc fait acte de présence alors qu’il avait un match important juste après et qu’il aurait pu nous snober."
Lorsqu’il a décidé de monter l’association Tackle4MCR (NdlR : lisez for Manchester), il le fait main dans la main avec le maire de la ville. "Andy Burnham a annoncé, via son projet "un lit tous les jours", vouloir trouver une solution définitive aux sans-abri durant son mandat qui se termine en 2020, explique Diane. Une mission ultra-ambitieuse qui lui a déjà valu pas mal de critique."
Pas parce que les Mancuniens sont contre ce plan, mais plutôt car ils savent qu’une solution ne sera pas aussi rapidement trouvée vu le profond ancrage du problème. Certains quartiers de Manchester sont littéralement jonchés d’hommes et de femmes vivant dans les rues de la ville. Le quartier de Piccadilly est le plus réputé en la matière dans le centre.
Le Spin est officiellement soutenu financièrement par la Ville depuis mai ("Et encore pour 14 de nos 34 résidents", précise Diane) et peut en partie compter sur l’argent levé par Kompany et Tackle4MCR.
À l’heure actuelle, plus de 300 000 livres ont été levées. La soirée de gala organisée par Kompany et sa femme Carla a été une franche réussite qui a contribué à la majeure partie de cette enveloppe.
Merci Oasis
En février dernier, The Prince a invité tout le beau monde de Manchester pour une soirée strass et paillettes au Hilton. Il a pu compter sur la présence de grandes stars dont son ami, et grand fan de City, Noël Gallagher (membre fondateur du groupe Oasis) qui a donné un concert intimiste et offert une guitare vendue aux enchères contre 50 000 pounds.
Tackle4MCR ne cesse de grandir et affirme viser le million de livres de rentrées et donc d’investissement à l’automne.
Comment quadrupler son budget ? Via le match de gala en l’honneur de Vincent Kompany qui a lieu ce mercredi à l’Ethiad Stadium. Tous ses amis et des gloires de Premier League ont répondu présent pour tenter de remplir le stade ainsi que les caisses de son association.
Objectif boiler pour l’hiver
"De ce budget total, nous recevons un pourcentage calculé selon nos besoins, explique Diane. Nous ne prenons pas un million sinon je n’aurais pas à me tracasser de l’achat d’un boiler pour l’hiver comme c’est le cas maintenant."
L’argent gagné grâce à Kompany va autant atterrir au Spin que dans les services de réinsertion ou même de terrain.
Le défenseur d’Anderlecht a presque été visiter toutes les associations qu’il aide de près ou de loin. En douce, sans caméra et sans prendre de selfie pour mettre en avant son travail. "Ce serait trop facile et trop intrusif", résume-t-il. Quand ce n’est pas lui, c’est sa femme qui s’est déplacée.
Kompany a précisé dans un article du Guardian que rien de ceci n’était lié à un sentiment de culpabilité. Il ne s’en veut pas de gagner des millions chaque année.
"Toute ma jeunesse, je me suis nourri du racisme et du rejet. J’ai toujours considéré que la pire chose dans la vie était de ne pas agir. J’avais 16 ans quand je me suis dit que je voulais être la meilleure version possible de moi-même. Tout ce que je fais pour les autres, je le fais car je le souhaite et que j’en suis capable. Je gagne des montants énormes grâce au football et je me suis demandé si j’en faisais assez. J’ai été éduqué par une mère presque communiste et un père réfugié politique. C’est mon passé."
Lukaku ? Non. Kompany ? Oui.
Au Spin, on appuie la manière de penser du joueur et l’influence de son background sur ses actes. "Il peut être un exemple pour ses confrères, dit Diane. Il n’a pas oublié d’où il venait et c’est le plus important. Il s’est élevé en voix de Manchester et de son combat pour sortir les personnes de la rue."
Sa popularité en ville dépasse largement le cadre du football. Tomasz, un Slovaque venu tenter sa chance dans le nord de l’Angleterre il y a quelques années, affirme être fan de Manchester United. Aime-t-il Romelu Lukaku ?
"Pas du tout, il se plaint trop." Il préfère le jeu de Kevin de Bruyne mais affirme apprécier Vincent Kompany. "Manchester City est un club sans tradition, mais Kompany en est un personnage historique. Puis, c’est un gars classe qui est impliqué ailleurs que sur le terrain."
Même son de cloche chez Cathy qui dit même détester City mais qui fait une drôle de moue gênée quand on lui demande s’il en va de même pour Kompany.
"Nous sommes une majorité de Skyblues au refuge, dit Diane. Mais quand nos collaborateurs fans des Red Devils voient ce qu’il apporte à notre cause, je peux vous affirmer qu’ils le respectent et le soutiennent. Ils le disent à demi-mot car ils sont trop fiers mais c’est pourtant le cas."
Il a eu des larmes
Pour Vincent Kompany, le Spin est un des nombreux projets qu’il soutient. Il lui tient à cœur par sa belle histoire (une église infestée de rats transformée en refuge) et parce qu’il était présent à l’ouverture "pour voir comment on travaille sur le terrain", a-t-il dit à la presse locale.
Cette journée reste gravée dans les esprits des collaborateurs de Diane. Mark en tremble encore en en parlant. Il est l’un des trois hommes à la base du projet après avoir lui-même été sorti de la rue par un proche. Avoir été félicité par Vinnie pour son travail a été un moment important pour lui. Une validation de son gros travail.
Kompany avait eu des mots forts ce jour-là. "J’ai un jour discuté avec un sans-abri qui m’a détaillé ses défis au quotidien. C’était dur. Offrir un lit à ceux qui doivent dormir dehors est le minimum que nous devons essayer d’atteindre. Et même si nous y parvenions, il y a encore beaucoup de travail par la suite."
Son départ vers Anderlecht deux jours après l’inauguration du Spin a été comme un coup de couteau en plein cœur de Mark. "J’étais vraiment triste. Son investissement devenait à peine officiel qu’il était déjà parti. J’espérais qu’il puisse être une sorte de lien qui allait renforcer notre travail."
Selon la responsable du centre, il y a eu beaucoup de larmes lorsqu’il a annoncé son départ. Le match de mercredi sera l’occasion de compenser quatre mois d’absence. "On nous a promis des tickets", sourit Mark. Mais, il le sait, c’est surtout le montant final de la recette qui importera le plus.
"Joueur/entraîneur ? Je vais en discuter avec lui"
Ryan Giggs s’explique avant de jouer pour le match de gala de Vincent Kompany.
Ryan Giggs sera l’un des adversaires des légendes de Manchester City que Kompany devait mener ce mercredi soir depuis le terrain s’il ne s’était pas blessé. Il tentera de vaincre le joueur gallois depuis le banc.
Vincent Kompany profitera peut-être de la rencontre pour demander à Giggs comment il avait géré en tant que joueur/entraîneur durant quelques matches à l’époque.
"Si nous en avons l’opportunité, c’est certain nous en parlerons. Il a déjà adapté sa méthode en donnant les clés à Simon Davies les jours de match."
Le T1 du RSCA n’est pas un inconnu pour le Gallois, car les hommes ont joué ensemble à Manchester United. "Déjà avant cela. Nous avions 11 ans. Je jouais à Deans Youth et lui dans un autre club. C’est un bon gars qui saura épauler Vincent."
Malgré son attache à United, Giggs respecte énormément Vincent Kompany. "Il a fait beaucoup de bonnes choses pour la ville et pas uniquement sur le terrain. Ce genre d’événement n’arrive pas souvent et ce sera une belle soirée. Je sais que certains supporters ne vont pas bien m’accueillir, mais je le fais pour Kompany, une bonne personne qui lève des fonds pour une bonne cause."
Il espère que son équipe de légendes de Premier League pourra battre les légendes de City malgré leur jeunesse. "On joue vraiment 45 minutes par mi-temps ? Pfff. Et j’ai appris que c’était en direct sur Sky. Je ferais mieux de rentrer chez moi."
Ce sera aussi une belle opportunité pour lui de rejouer sur un grand terrain avec toute la Class of 92.
"Nous le faisons encore mais sur petit terrain ou pour le club que nous avons racheté, mais cela m’a fait très plaisir quand Vincent nous a demandé de jouer. Ce sera un beau match amical… Ou pas, vu que Scholes est invité." (rires)
Le RSCA s’entraîne à l’académie de City
Ce mercredi, les Mauves s’entraîneront au complexe d’entraînement de Manchester City. De quoi rappeler des souvenirs à Vincent Kompany qui refoulera la pelouse de l’académie des Skyblues avec sa casquette de manager. Les Mauves ont voyagé ce lundi vers Manchester pour assister au match de gala de Kompany. Ils ont eu l’après-midi pour flâner dans la ville.