9 novembre 1988: le FC Liégeois de Robert Waseige dompte le grand Benfica
Il y a 30 ans, le 26 octobre 1988, le FC Liégeois, alors entraîné par Robert Waseige, éliminait, en Coupe Uefa, le grand Benfica, récent finaliste de la C1
- Publié le 09-11-2018 à 16h47
- Mis à jour le 17-07-2019 à 16h32
Suite au décès de Robert Waseige à l'âge de 79 ans, nous vous reproposons ce grand format, retraçant la folle victoire du RFC Liégeois sur Benfica, lors de la Coupe d'Europe 1988-1989.
Il y a 30 ans, le 26 octobre 1988, le FC Liégeois, alors entraîné par Robert Waseige, éliminait, en Coupe Uefa, le grand Benfica, récent finaliste de la C1.Le club liégeois, premier club champion de Belgique, connut trois glorieuses époques : celles de ses cinq titres, au sortir du 19e siècle lors de la création de la compétition belge (1896, 1898, 1899) et après la Deuxième guerre mondial (1952 et 1953) avec une demi-finale européenne en Coupe des Villes de Foire 1964, et, enfin, les années 80, lorsque l'homme d'affaires André Marchandise succéda à Jules Georges, période ponctuée d'une victoire en Coupe de Belgique 1990 (buts de Luc Ernès et Nebosja Malbasa contre le Germinal Ekeren) et de beaux parcours en Coupes d'Europe (deux quarts de finale, en 1990 contre le Werder Brême et en 1991 contre la Juventus).
Durant ces eighties, le club liégeois emmené par Robert Waseige ne parvint pas à accrocher un sixième titre de champion. Mais il se hissa à deux reprises sur le podium de notre élite, en en 1985 et 1989. En 1988, il termina 5e seulement, mais en ordre utile pour disputer la Coupe de l'Uefa la saison suivante, et forger le plus grand exploit européen de son histoire en éliminant, le 9 novembre 1988, le grand Benfica Lisbonne, en seizièmes de finale...
Après avoir enfilé onze buts à l’US Luxembourg (7-1 et 4-0), les élèves de Robert Waseige se voient offrir un adversaire de prestige en ce mois de novembre 1988. Benfica, c'est deux Coupes des Clubs champions à son palmarès et il vient de disputer quelques mois plus tôt une nouvelle finale de C1 (perdue contre le PSV d'Eric Gerets). Le club est un habitué des longs parcours continentaux (le club portugais a perdu la finale de la Coupe de l'Uefa 1983, battu par Anderlecht). Pourtant, lors du match aller disputé à Rocourt le 26 octobre 1988, les Liégeois ne cultivent aucun complexe d'infériorité. Même lorsque le génial Chalana transforme un penalty au début de la seconde période, et place le club lisboète en position de force.
“Nous avons été menés à un moment psychologiquement délicat, mais la manière utilisée pour répliquer fut parfaite : énergie, intelligence, volonté exacerbée de s’imposer coûte que coûte, du football authentique, quoi...” Robert Waseige ne boudait pas son plaisir après ce succès au 2e tour aller de la Coupe de l’Uefa, car grâce à des buts de son duo d'attaque serbe, Varga, renard des surfaces, et Malbasa, auteur d'un magique coup franc, le FC Liégeois gardait intactes ses chances de qualification avant le retour au Portugal (2-1).
Ce 9 novembre 1988, devant 80.000 personnes, les Sang&Marine forgèrent l'exploit. Malbasa fut le premier à dégainer, profitant d'un ballon relâché par le gardien Silvino à la 18e minute. Solidaires comme toujours les Liégeois arrachèrent leur qualif, malgré l'égalisation de Lima peu avant l'heure de jeu et la poussée benfiquiste pour arracher les prolongations. Liège était en huitièmes de finale après avoir éliminé Benfica : le plus grisant des faits d’arme européens tissés par une formidable bande de copains que les vicissitudes de l’existence n’ont jamais vraiment dessoudée.
Luc Ernes n’a pas oublié. Surtout le match aller : “Je me souviens de tout. Je revois l’ouverture du score par Chalana, sur coup de réparation peu après le repos, l’égalisation de Varga, le but de la victoire de Malbasa. Personnellement, j’avais tiré sur le montant mais je pense que j’étais hors-jeu. Je me rappelle également que les deux mains de mon adversaire direct possédaient chacune... six doigts.”
À Liège, les Lisboètes ont vécu l'enfer. “Ce soir-là, nous n’avons pas reconnu notre stade de Rocourt, si froid d’habitude. Il vibrait d’un engouement phénoménal. Trente mille personnes l’avaient investi. Les nombreux Portugais de Belgique y avaient embrasé de multiples feux de Bengale. L’ambiance était magique. Le FC Liégeois de l’époque représentait, pour nous,une seconde famille. Les liens qui nous unissaient ne se sont jamais dénoués. Chapeauté par Robert Waseige, notre entraîneur, le vestiaire s’apparentait à un ensemble homogène. Ce soir-là, notre motivation s’était révélée extrême, presque surnaturelle. Notre public nous avait transcendés.”
Une des stars du Benfica de l’époque se nommait Chalana: “Il parlait un peu français et était, comme moi, colombophile. La veille du match, nous avions échangé quelques mots. Je lui avais offert un pigeon. Il m’avait promis de me faire cadeau d’un des siens au retour. J’attends toujours son volatile...”
Chaude nuit lisboète
Luc Ernes, actuel entraîneur de l'Etoile Faimes, en lutte pour le titre en P2 liégeoise, associe à ce souvenir celui du match retour : “À Rocourt, nous avions bénéficié de l’effet de surprise. Personne ne s’attendait à un Liège aussi conquérant. Une victoire par deux buts à un à domicile ne constituait pas un gage de qualification. À Lisbonne, nous avons été, tout simplement, héroïques pour arracher un formidable partage. Malbasa était lesté d’un énorme bandage à la jambe. Il a inscrit un but en extension totale. Veyt a doublé notre avantage sur coup franc mais l’arbitre nous a refusé le point. Qu’est-ce qu’on a souffert, ce soir-là ! 80.000 Lusitaniens ont hué leur équipe. C’était... abominable. Ils hurlaient tellement que nos oreilles bourdonnaient. Nous ne nous entendions plus sur la pelouse.”
Qualification forgée, les joyeux drilles du FC Liégeois se sont alors abîmés dans la nuit lisboète : “À l’époque, nous étions sérieux sur le terrain mais nous faisions souvent la fête en dehors. Quain, Quaranta, Giusto,Wegria et moi puis Stojic, Veyt et le génial Australien Graham Arnold incarnions de bien gais lurons. Il nous arrivait, bien sûr, de faire le mur quand nous étions en retraite. Ce soir-là, Robert Waseige nous avait donné quartier libre. Dirigeants, journalistes, supporters et joueurs, nous nous sommes tous retrouvés dans la même boîte, l’Éléphant blanc. André Marchandise, notre président, nous a offert à boire. Nous avons commandé des bouteilles de whisky. Je me revois encore enfouissant un saucisson dans la bouche de Roger Laboureur. Il était dans un état...”
Les Liégeois n’avaient pas beaucoup dormi à l’heure de reprendre l’avion : “Une grève des contrôleurs aériens a retardé notre retour. Nous avons vidé tout ce qui était buvable. Quand il s’est posé en Belgique, l’avion a vomi des épaves...”
La magie ne s’est pas diluée avec le temps : “Nous étions de vrais amis. Nous le sommes restés. Nous nous revoyons toujours avec un plaisir intact. Nous ne nous sommes jamais cachés. Nous n’étions pas des hypocrites. Nous savions préparer nos matches mais nous allions aussi, volontiers, prendre un verre au Châlet, avec nos supporters.”
Robert Waseige demeure l’entraîneur emblématique de cette formidable bande de copains : “J’ai travaillé neuf ans avec lui au FC Liégeois puis une saison à Charleroi. Il m’a marqué de manière indélébile et pas seulement parce qu’il m’a fait venir de la Villersoise à Liège. Il m’a énervé, piqué jusqu’à l’os, il m’en a fait baver mais il m’a aussi toujours soutenu. Je lui dois ma carrière, même si un jour, excédé, je l’ai calé contre le tableau du vestiaire. Nous en avons vécu des aventures, avec lui. Un jeudi, nous nous sommes échappés entre deux entraînements. Nous nous sommes rendus à Tongres pour manger un croque-monsieur... et boire quelques bières. Quand nous sommes revenus au stade, l’entraîneur s’est fâché : Foutez le camp : vous puez l’alcool!”
Le Villersois se souvient encore: “Quand nous avions gagné, Robert Waseige nous octroyait une certaine liberté. L’image qu’il diffusait n’était pas du tout la même quand nous avions perdu. Même les anciens avaient peur d’aller le saluer quand, le lundi matin, dans le long couloir du vestiaire, nous passions devant la porte ouverte de son bureau. Cette image m’a marqué...”
Cette saison-là, en 1988-89, la Juventus de Cabrini, Altobelli et Laudrup, par deux courtes victoires (0-1 et 0-1) stoppa leur beau parcours liégeois au 3e tour de cette Coupe de l'Uefa, avant de tomber face au Naples de Maradona, futur vainqueur de l'épreuve.
Coupe de l'Uefa 1988/1989, 1/16es de finale
26/10/88 FC LIÉGEOIS - BENFICA 2-1
- Liège : Stojic;Wegria, de Sart, Habrant, Quaranta; Houben, Quain, Veyt, Ernes; Varga, Malbasa.
- Benfica : Silvino;Veloso, Ricardo, Mozer, Alvano, Paneira, Abel, Elzo (46e Magnusson), Hernani, Chalana, Vata.
- Les buts : 47e Chalana sur pen. (0-1), 59e Varga (1-1), 68e Malbasa (2-1).
09/11/1988 BENFICA – FC LIÉGEOIS 1-1
- Benfica : Silvino; Veloso, Ricardo, Garrido (67e Pacheco), Alvano, Paneira, Valdo, Hernani (46e Lagnusson), Chalana, Vata, Lima.
- Liège : Stojic; Wegria, de Sart, Habrant (64e Giusto), Quaranta; Houben, Quain, Veyt, Ernes (85e F. Waseige); Varga, Malbasa.
- Les buts : 18e Malbasa (0-1), 58e Lima (1-1).
Les grandes dates du FC Liègeois
- Septembre 1892
Création du FC Liégeois, section football du Liège Cyclist’s Union. - 7 janvier 1894
Le club porte pour la première fois une vareuse “rouge et bleu”. - 2 février 1896
1er match de championnat : FC Liégeois-SC Bruxelles 2-2 - 26 avril 1896
1er titre de Champion de Belgique de l’Histoire. - 19 février 1921
Création du 1er club officiel de supporters, dénommé Le Cercle des Supporters du Centre. Local établi à Liège, Place Cockerill. - 28 août 1921
Inauguration du Stade Vélodrome Oscar Flesch à Rocourt. - 1953
Le RFC Liégeois est sacré Champion de Belgique pour la 5e et... dernière fois. - 1er novembre 1954
Assistance record officielle : 47.000 spectateurs à Rocourt face au Spartak de Moscou. - 28 mai 1964
Le RFCL dispute les demi-finales de la Coupe d’Europe des Villes de Foire (ancêtre de l’Europa League), et est éliminé, après test-match, par le Real Saragosse (2-0), futur vainqueur. - 9 novembre 1988
Liège réalise un exploit retentissant, en sortant Benfica de la Coupe d’Europe (1/16es de finale de la Coupe de l’Uefa). - 19 mai 1990
Victoire en Coupe de Belgique face à Ekeren (2-1, buts d’Ernes et Malbasa). - 26 novembre 1994
Dernière rencontre à Rocourt (0-0 face au Cercle Bruges). - Mai 1995
Le RFC Liégeois est relégué en D3, en raison de ses problèmes financiers, après 50 saisons passées parmi l’élite. - Mai 1996
Le RFCL (rebaptisé RTFCL) est sacré champion de D3. - 2003
Pour sa 100e saison en séries nationales, le club ne reçoit pas sa licence et est renvoyé en D3. - 2004
Battu par le White Star Woluwe en barrages, le RFCL est relégué en Promotion pour la première fois de son histoire. - 4 juin 2006
Le RFCL remporte à Opwijk le droit de remonter en D3 via le tour final. - 27 avril 2008
Le RFCL remporte le titre en D3B, au terme d’une victoire au CS Verviers. - 16 avril 2010
Ayant retiré sa demande de licence pour la D2, le RFC Liège se voit reléguer en division 3. - 11 septembre 2010
3.000e match de championnat au RFC Huy (D3B). - 2015
Le club liégeois est enfin de retour à Rocourt. - 27 mai 2018
Le club rejoint la division 1 amateur.