Zoom sur le nouveau parcours de la Doyenne (INFOGRAPHIE)
Nous avons pris le sillage de la formation Wallonie-Bruxelles pour reconnaître le tracé remanié de Liège-Bastogne-Liège.
- Publié le 26-04-2019 à 07h39
- Mis à jour le 26-04-2019 à 11h01
Nous avons pris le sillage de la formation Wallonie-Bruxelles pour reconnaître le tracé remanié de Liège-Bastogne-Liège. Assis sur la banquette de la camionnette fluo aux couleurs de l’équipe Wallonie-Bruxelles, Julien Mortier prend soin de s’enduire les avant-bras d’une épaisse couche de crème solaire. "Ça chauffe déjà" , sourit le Hennuyer, désormais installé en province de Liège en voyant le thermomètre flirter avec les 20° C sur le coup de 10 h.
Samedi dernier, à la veille de l’Amstel Gold Race pour laquelle elle n’avait pas reçu de wildcard, la formation dirigée par Christophe Brandt avait programmé une reconnaissance des cent derniers kilomètres de Liège-Bastogne-Liège.
"Nous avons procédé de la sorte pour chacune des grandes classiques belges sur lesquelles nous avons été invités" , explique Bernard Smeets, le manager de la performance qui pilote ce repérage. "En plus d’une bonne immersion dans le sujet, cela permet également de travailler la cohésion de notre collectif, une valeur qui n’est certainement pas étrangère à notre bon début de saison."
L’occasion idéale de nous glisser dans leur sillage pour découvrir de plus près un tracé profondément remanié. Au départ de Vielsalm, Kevyn Ista, Dimitri Peyskens, Eliot Lietaer, Julien Mortier, Mathijs Paasschens, Tom Wirtgen et Justin Jules nous ont donc servi de guides et d’analystes pour décrypter les spécificités du grand lifting de la Doyenne.
"Les changements ne se cantonnent effectivement pas seulement au déménagement de la ligne d’arrivée de Ans vers le centre de Liège et le boulevard d’Avroy, juge Kevyn Ista. Certaines côtes ont été déplacées et d’autres supprimées ou rajoutées. C’est donc l’équilibre global du tracé qui s’en trouve chamboulé et qu’il convenait de réévaluer."
Trois bonnes heures après avoir enfourché leur vélo, les hommes de Christophe Brandt se félicitaient de l’initiative. "Cela valait le coup de prendre certains repères", jugeait ainsi le Bruxellois Dimitri Peyskens, 87e de Liège-Bastogne-Liège l’année dernière. "On a pu se mettre pas mal de choses bien en tête et identifier par exemple les endroits où il nous serait possible d’anticiper quelque peu les événements. Si les quinze derniers kilomètres sont bien moins exigeants que sur la précédente version de la Doyenne, ce tracé reste très exigeant, avec de nombreuses plages sans temps morts. Il est toujours difficile de prédire un scénario de course, surtout quand un tracé est chamboulé car tout le monde roule alors parfois un peu plus sur la défensive, mais je vois bien un groupe de dix à quinze hommes sortir en tête de la Roche-aux-Faucons avant de se disputer la victoire au sprint boulevard d’Avroy…"
La Roche-aux-Faucons : l’ultime tremplin
Intégrée au parcours de Liège-Bastogne-Liège depuis 2008 par des organisateurs désireux de densifier la phase finale de la course, la Roche-aux-Faucons deviendra cette année l’ultime difficulté d’un tracé en répertoriant officiellement onze. “C’est une côte très exigeante (NdlR : 1,3 km à 11 %) où les différences se font naturellement, à la pédale, juge Dimitry Peyskens , deux Doyennes au compteur. Quand une telle bosse se dresse devant vous après 240 kilomètres, elle devient un véritable juge de paix. Ce sera le dernier tremplin pour les véritables puncheurs désireux de se détacher et d’opérer une ultime sélection. Après le sommet officiel de la côte, il faut être capable de repasser le grand plateau pour relancer sur une partie plus plane à laquelle succède un deuxième palier qui ramène à Boncelles. C’est ce genre d’efforts qui fait souvent le plus mal aux jambes et où les plus costauds du peloton sont capables de faire la différence.”
La Redoute : “Les favoris y attaqueront”
Si la côte de la Redoute s’est éloignée de la ligne d’arrivée d’un petit kilomètre par rapport au tracé de l’édition 2018, tout le peloton ou presque s’accorde à dire que la difficulté qui domine Remouchamps retrouvera un rôle clé sur la Doyenne de dimanche. “Autrefois, une trop longue période creuse d’une grosse quinzaine de kilomètres séparait le sommet de la Redoute de la difficulté suivante officiellement répertoriée, La Roche-aux-Faucons”, analyse Eliot Lietaer, fort de ses cinq précédentes participations à Liège-Bastogne-Liège. “Désormais, on enchaîne plus rapidement avec la côte des Forges. La Redoute a également gagné une position dans l’enchaînement des bosses puisqu’elle devient l’antépénultième côte alors qu’il restait l’année dernière La Roche-aux-Faucons, Saint-Nicolas et Ans après elle. Je suis donc persuadé que l’on va à nouveau assister à une explication entre les favoris sur ce lieu mythique. Certains y passeront à l’attaque, c’est pratiquement sûr. Ce n’est peut-être pas à cet endroit que le nom du vainqueur final se décidera, mais une sélection importante s’y opérera inévitablement. À mon sens, c’est là que le vrai final sera lancé.”
Wanne-Stockeu-Haute Levée: le retour de la trilogie
Enchaînement diabolique qui a participé à construire la légende de Liège-Bastogne-Liège, la trilogie Wanne-Stockeu-Haute Levée fait son grand retour sur le parcours, elle qui n’avait plus été empruntée dans son ensemble depuis 2015 en raison de travaux (remplacée par la succession Pont-Bellevaux-Ferme Libert ces deux dernières saisons). “On peut même parler de quadrilogie cette année, sourit Kevyn Ista. Avant de négocier Wanne, il faut en effet d’abord gravir Mont-le-Soie une petite dizaine de kilomètres en amont (km 161, 1,7km à 7,9 %) . Il sera important de basculer en bonne position à son sommet car le bas de la descente qui suit est assez technique avec plusieurs virages qui nous amènent rapidement au village de Grand-Halleux, le pied de la côte de Wanne que l’on ne négocie désormais plus par le même versant (NdlR : autrefois au départ de Spineux) . On vire à droite à l’église sans beaucoup de vitesse pour attaquer les premières rampes d’une difficulté dont les deux paliers (3,6 km à 5,1 %) sont séparés par une petite descente. On rejoint ensuite Stavelot en dévalant sur une chaussée étroite et tortueuse par endroits pour aborder Stockeu (1 km à 12,5 %) que l’on monte jusqu’à la stèle Eddy Merckx. À peine le temps de reprendre son souffle que l’on est déjà dans la Haute Levée (3,6 km à 5,6 %) . En l’espace de vingt kilomètres, on enchaîne donc quatre bosses exigeantes qui opèreront déjà une sérieuse sélection dans un peloton qui restera étiré sur tout ce passage.”
La Côte des Forges: “Idéale pour anticiper”
Longtemps ultime difficulté du parcours de la Doyenne, la côte des Forges (1,3 kilomètre à 7,8 %) fait un retour par la grande porte cette année sur le tracé de Liège-Bastogne-Liège puisque son sommet n’est distant de l’arrivée que de 25 kilomètres. “Le profil de cette bosse n’a rien d’insurmontable, mais ce qui la rendra difficile en course ce dimanche, c’est qu’on l’aborde après un virage assez serré, pratiquement sans vitesse, juge Eliot Lietaer. Or, c’est précisément ses premières rampes qui sont les plus difficiles (NdlR : 10 %). Cet endroit pourrait être stratégique car il est, selon moi, idéal pour y anticiper quelque peu la grosse explication entre les grands noms. Si un outsider y a encore de bonnes sensations mais qu’il sait qu’il lui sera difficile d’accompagner les meilleurs coureurs du peloton dans la montée de la Roche-aux-Faucons (NdlR : dix kilomètres plus loin), c’est là qu’il doit tenter sa chance. Cette ascension est plutôt rectiligne, ce qui signifie que le coureur qui s’y détache est souvent en point de mire, mais si cela se regarde un peu derrière lui…”
Les 15 derniers kilomètres : un final très roulant
Si le peloton déboulera à Boncelles au même endroit que l’année dernière, il ne traversera désormais plus la N63 pour plonger vers Seraing et rejoindre la côte de Saint-Nicolas mais poursuivra sa route sur la chaussée principale pour ensuite bifurquer vers l’Université de Liège et la rue de la Belle Jardinière qui l’emmènera vers la ville par la Gare des Guillemins. “À Boncelles puis dans la descente qui nous ramènera à Liège, je ne pense pas qu’il se passera grand-chose, juge Dimitri Peyskens. La chaussée est souvent large et roulante, en bien meilleur état également que la route qui nous conduisait autrefois à Seraing.” Une fois arrivé dans le centre urbain, le parcours se fait un peu plus technique. “Il y a quelques enchaînements de virages, près de la gare par exemple, qui pourraient permettre de faire une différence un peu sous l’effet de la surprise, continue le coureur de chez Wallonie-Bruxelles. Mais si un leader peut encore compter sur le soutien d’un équipier pour assurer le tempo à cet endroit, je vois mal comment on pourrait échapper à une ultime explication au sprint sur le boulevard d’Avroy en cas d’arrivée en petit groupe.”
Teuns : “Je préférais l’ancien final”
S’il retournera encore ce vendredi reconnaître les soixante derniers kilomètres de Liège-Bastogne-Liège, Dylan Teuns a pris soin d’aller repérer le nouveau parcours en amont du triptyque ardennais. “Et j’avoue que je trouvais l’ancien final bien plus beau !”, juge le coureur de chez Bahrain-Merida, 20 e de la Doyenne l’année dernière. “Saint-Nicolas était, à mes yeux, une côte idéale pour permettre à un homme fort d’opérer une décision avant Ans. J’y avais d’ailleurs attaqué sur la version espoirs de Liège-Bastogne-Liège. À son sommet, il ne restait plus que six kilomètres pour rejoindre la ligne d’arrivée. Désormais, une fois que l’on arrive en haut de la Roche-aux-Faucons, il reste quinze bornes sans aucune difficulté. À mon sens, si une différence se fait sur ce tronçon, ce sera plus par l’effet d’un coup de poker payant que parce que l’homme qui s’y dégagera sera le plus fort. Je juge donc ce nouveau final moins ‘honnête’, si je peux m’exprimer ainsi. J’espère que la réelle décision se fera donc plus tôt dans la course.”