Fuglsang et Bernal à la hausse, Bardet et Quintana inquiètent: le baromètre des favoris et outsiders du Tour
Le Tour de Suisse et la Route d'Occitanie se sont achevés ce dimanche, une semaine après le Dauphiné Libéré. Les traditionnelles épreuves de préparation au Tour de France sont derrière le peloton et ceux qui veulent briller sur la Grande Boucle n'ont plus que leurs entraînements et championnats nationaux pour parfaire leur condition. C'est donc le moment de faire le point.
- Publié le 24-06-2019 à 14h00
- Mis à jour le 24-06-2019 à 14h07
Le Tour de Suisse et la Route d'Occitanie se sont achevés ce dimanche, une semaine après le Dauphiné Libéré. Les traditionnelles épreuves de préparation au Tour de France sont derrière le peloton et ceux qui veulent briller sur la Grande Boucle n'ont plus que leurs entraînements et championnats nationaux pour parfaire leur condition. C'est donc le moment de faire le point.
Les dernières courses ont permis d'en savoir plus sur l'état de forme des uns et des autres. Voici notre baromètre.
A la hausse
Egan Bernal (Team Ineos)
Une chute de Geraint Thomas et une victoire finale du Colombien au Tour de Suisse ont suffi à inverser leurs positions chez les bookmakers : Egan Bernal est désormais le favori théorique du Tour de France, devant son équipier/leader gallois. De son propre aveu ce dimanche soir, le jeune grimpeur est prêt à se mettre au service de Thomas en juillet... "s'il est plus fort que moi". Comme chaque année, les rivalités internes chez Sky/Ineos promettent donc de faire couler beaucoup d'encre. En attendant, Bernal a rassuré sur son état de forme après une fracture de la clavicule qui l'avait privé du Giro. Mais il n'a pas non plus écrasé un Tour de Suisse dont le plateau n'était pas des plus relevés. Après trois grandes étapes de montagne et un contre-la-montre, il se contente de 19 secondes d'avance sur un Rohan Dennis il est vrai époustouflant. Konrad, Benoot et Hirt sont à plus de 3 minutes. Aucun de ces hommes ne sera dans le top 5 à Paris, sauf grosse surprise. Mais cela reste tout de même une victoire finale dans une course par étapes prestigieuse. Le tout après presque trois mois sans compétition.
Jakob Fuglsang (Astana)
Ce n'est pas en Suisse mais bien à quelques kilomètres plus à l'Ouest que s'est déroulée LA véritable répétition générale avant le Tour de France. Le Dauphiné Libéré a d'abord vu Chris Froome tirer un trait sur sa Grande Boucle 2019, après une grave chute. Ensuite, il a permis aux Fuglsang, Yates, Pinot, Dan Martin, Quintana, Bardet et consorts d'en découdre. A ce petit jeu, c'est le dernier vainqueur de Liège-Bastogne-Liège qui s'est montré le plus costaud. Le Danois a donc attendu sa 35e année pour réaliser sa meilleure saison chez les professionnels et rien ne semble pouvoir l'arrêter ces derniers mois. Au point d'inquiéter la machine Ineos dans la course au maillot jaune ? Sur papier, il est en tout cas l'outsider n°1 à ce jour mais ses références sur les courses de trois semaines ne nous invitent pas à en faire un vainqueur potentiel : 11e de la Vuelta 2011, 7e du Tour 2013, 12e du Giro 2016 et 12e du Tour 2018 sont ses seules "références". Pour le reste, il a terminé cinq Tours et deux Vuelta hors top 20.
Thibaut Pinot (Groupama - FDJ)
En 2018, le Français s'est concentré sur le Giro et la Vuelta avec un succès mitigé : il était troisième du Tour d'Italie avant de tomber malade à deux jours de l'arrivée et il a remporté deux étapes en Espagne, se classant 6e au général final. Cette année, Thibaut Pinot revient sur le Tour de France car, de son propre aveu, le regarder à la télévision lui est insupportable. Plus expérimenté, plus calme et moins en proie à la pression qui entoure la Grande Boucle, il a axé tout son début de saison sur le mois de juillet. Vainqueur du Tour du Haut Var devant Bardet et Carthy en février, il était dans le coup à Tirreno mais moins en Catalogne. Le leader de la formation Groupama s'est toutefois rassuré en remportant le Tour de l'Ain et, surtout, en affinant sa forme sur le Dauphiné. Très offensif dans la deuxième étape, il avait impressionné les spectateurs et ses adversaires avant de rentrer quelque peu dans le rang par la suite tout en réussissant l'un des meilleurs chronos de sa carrière lors de la quatrième étape. "Mon objectif est d'arriver au Tour dans la même forme qu'en Lombardie l'année dernière", disait-il récemment à nos confrères de France Télévisions avant d'affirmer qu'il va "tout faire pour se hisser sur le podium à Paris". Le tracé du Tour 2019 semble en tout cas lui convenir et c'est peut-être l'année ou jamais pour rééditer sa performance de 2014 (troisième et meilleur jeune).
Alejandro Valverde (Movistar)
Le champion du monde fait-il encore partie des outsiders du Tour ? Rien n'est moins sûr. Mais à l'heure où Quintana (voir ci-dessous) est en perte de vitesse et alors que Landa sort d'un Giro éprouvant, il y a fort à parier que le Murcien aura un statut enviable dans la hiérarchie de son équipe. Pour son retour à la compétition après un printemps compliqué par des ennuis de santé et une chute à Liège-Bastogne-Liège, Valverde a signé une belle victoire dès la première étape du Tour d'Occitanie, devant un Eddie Dunbar de plus en plus impressionnant. Il a ensuite pu gérer son avance au classement général dans la roue d'Ivan Sosa, lors de l'étape reine, pour ajouter une nouvelle course par étapes à son palmarès. Ce n'était pas encore un tout grand Valverde mais sa forme ne va faire que grandir, en vue du Tour. On en saura plus après les étapes d'Epernay et de Colmar sur son état de forme, après lesquelles il disposera encore d'une semaine pour monter en puissance avant la montagne.
Dan Martin (UAE-Team Emirates)
Deuxième du Tour du Pays basque parmi un plateau relevé, Dan Martin espérait sans doute réussir de belles Ardennaises avant de tomber malade. Après un break de presque deux mois, il a effectué son retour à la compétition sur le Dauphiné Libéré. Décevant lorsqu'il concédait une trentaine de secondes lors de la deuxième étape face aux attaques répétées de Pinot, l'Irlandais a ensuite rassuré en ne concédant du temps aux meilleurs que dans le chrono de Roanne. De quoi confirmer une certaine montée en puissance avant de tenter de remporter une étape accidentée de début de Tour et viser un premier top 5 à Paris, lui qui reste sur trois tops 10.
Rigoberto Uran (EF Education First)
Difficile de savoir où se situe exactement le deuxième du Tour 2017. Ce qui est certain, par contre, c'est qu'il va mieux. Mieux que lorsqu'il se fracturait la clavicule sur Paris-Nice et mieux qu'en Californie, où il a éprouvé des difficultés à se mêler à la lutte, le mois dernier. Sur la Route d'Occitanie, il a titillé Sosa et Valverde jusque dans les derniers mètres de l'ascension finale, dans l'étape reine. Sa troisième place au général laisse entrevoir des progrès significatifs et les douze jours qui le séparent du grand départ à Bruxelles lui permettront peut-être de se rapprocher de sa meilleure forme.
Dans l'incertitude
Geraint Thomas (Team Ineos)
Après un hiver qui l'a vu prendre beaucoup de poids et un début de saison compliqué, notamment à cause de problèmes gastriques à Tirreno-Adriatico, certains attendaient du dernier vainqueur du Tour qu'il remette les pendules à l'heure, en Suisse. Un peu comme il l'avait fait en remportant le Dauphiné l'année dernière, juste avant son succès sur la Grande Boucle. Mais après une troisième place finale en Romandie, qui laissait entrevoir du mieux, Geraint Thomas a bien failli tout perdre la semaine dernière. Heureusement pour lui, sa chute lors de la quatrième étape ne l'aura privé "que" de cinq jours de course. Le Gallois a déjà repris l'entraînement et il compte bien s'y mettre à fond pour compenser ce manque de compétition. Il devra être affûté dès le début du Tour pour éviter les pièges d'une première semaine qui se terminera à la Planche des Belles Filles. Heureusement pour lui, la très haute montagne n'arrivera qu'en deuxième moitié de compétition.
Adam Yates (Mitchelton-Scott)
Présent depuis le début de saison, que ce soit dans les courses par étapes (notamment 2e de Tirreno et 5e au Pays Basque) ou dans les classiques, avec une belle 4e place à Liège, Adam Yates l'était tout autant au Dauphiné Libéré. Il semblait même bien parti pour l'emporter, avant de tomber malade dans les deux dernières étapes. Résultat, il offrait le maillot jaune à Fuglsang la veille de l'arrivée avant d'abandonner durant le dernier jour. Depuis lors, peu d'informations ont filtré sur son état de forme mais il y a fort à parier qu'il s'alignera à Bruxelles avec l'idée de faire mieux que sa 4e place de 2016.
Steven Kruijswijk (Jumbo-Visma)
Si l'on prend le classement du Tour 2018 et qu'on y enlève ceux qui seront absents cette année, le Néerlandais passe de la 5e à la 2e place derrière Thomas. Il y a donc un coup à jouer pour le grimpeur de 32 ans, cette année. Mais comme Adam Yates, il a dû renoncer lors de la dernière étape pour cause de maladie. Déjà en difficulté la veille à cause d'un refroidissement, il avait toutefois rassuré lors du contre-la-montre avec une belle quatrième place. Reste à savoir comment il s'est remis de ce contretemps.
Mikel Landa (Movistar) et Vincenzo Nibali (Bahrain Merida)
Les deux hommes comptent doubler Giro et Tour de France. A l'exception d'une 5e place au GP Lugano pour Nibali, ils n'ont pas couru depuis l'arrivée du Giro à Vérone. L'Espagnol y avait perdu le podium in extremis tandis que Nibali s'était hissé à la deuxième place finale. Comme toujours, il est difficile de prédire avec quel succès les deux hommes parviendront à enchaîner les deux courses de trois semaines. Tom Dumoulin (2e de chacune d'elle en 2018) a réussi à jouer les premiers rôles sur le Giro et le Tour la même année, mais il était le premier depuis bien longtemps. Il y a fort à parier que Landa et Nibali devront se contenter de chasser les étapes, en troisième semaine. D'autant plus qu'il y a une semaine de moins qui sépare le Tour et le Giro cette année.
A la baisse
Nairo Quintana (Movistar)
Après une année 2018 décevante, le Colombien n'a réellement rassuré ses fans qu'à Paris-Nice, où il a pris la deuxième place finale derrière Bernal. Resté sur sa faim au Tour de Catalogne, Quintana a ensuite pris l'eau sur le Dauphiné. Un cran en dessous de Fuglsang, Yates et Pinot (pour ne citer qu'eux), le leader de la Movistar inquiète à quelques jours du départ du Tour. Son statut de leader au sein de son équipe pourrait en être fragilisé...
Richie Porte (Trek Segafredo)
Faut-il compter parmi les favoris du Tour un homme qui, à 34 ans, n'a réussi qu'un seul top 5 dans un Grand Tour ? Il y a débat. Ce qui est certain, par contre, c'est que ses précédents échecs sur le Tour étaient au moins précédés de quelques références comme ses victoires finales au Tour de Suisse 2018 et au Tour de Romandie 2017. Cette année, Porte se contentera d'une 11e place au Dauphiné Libéré pour se rassurer avant le départ de Bruxelles. Mais s'il évite les chutes, qui sait...
Enric Mas (Deceuninck-Quick Step)
Décevant en Catalogne (9e), au Pays Basque (11e) et en Suisse (9e), Enric Mas n'est pas vraiment parti sur les mêmes bases qu'en 2018, année qu'il avait terminée en prenant une magnifique deuxième place à la Vuelta. Celui qui tente de négocier "un salaire d'un coureur du top 5 du Tour de France, ce qu'il n'a pas encore fait", selon Lefevere, espère pourtant se montrer sur la Grande Boucle. Pour y parvenir, il faudra toutefois combler un certain déficit de forme dans les prochains jours. En Suisse, Enric Mas a terminé derrière des Betancur, Spilak, Hirt, Benoot ou Konrad au général. Pas de quoi laisser présager un podium à Paris.
Romain Bardet (AG2R-La Mondiale)
Avec Quintana, le "cas" de Romain Bardet est sans doute le plus inquiétant à moins de deux semaines du Tour. Le deuxième du Tour 2016 et troisième de l'édition 2017 n'a pas connu une préparation idéale. Jamais vraiment dans le coup au Dauphiné, il a reconnu au soir de la dernière étape qu'il n'était "pas assez fort pour faire mieux". Avant de préciser qu'il avait, lui aussi, souffert du froid durant toute la semaine. Le lendemain, Bardet s'alignait au "Mont Ventoux Dénivelé Challenge" pour essayer d'y retrouver des sensations et de la confiance. Sans succès, puisqu'il fut battu par Jésus Herrada au sommet du mont chauve.