Terpstra : "L’arme tactique préférée des Quick Step, c’est la surprise"
Vainqueur du dernier Tour des Flandres, le Néerlandais a quitté l’équipe belge cet hiver pour Direct Énergie.
- Publié le 20-02-2019 à 07h27
- Mis à jour le 20-02-2019 à 08h11
Vainqueur du dernier Tour des Flandres, le Néerlandais a quitté l’équipe belge cet hiver pour Direct Énergie. Un thé vert encore bouillant à la main, Niki Terpstra nous emmène dans les méandres des jardins de l’hôtel Grand Hormuz de Mascate. "On va s’installer de l’autre côté de la piscine, c’est plus calme" , lance le Néerlandais. Engagé sur le Tour d’Oman pour la septième fois de sa carrière, le grand bonhomme du dernier printemps (victoire au Samyn, sur le GP E3, au Tour des Flandres et 3e de Paris-Roubaix) est un habitué du sultanat. "C’est une course idéale pour peaufiner la préparation en vue des deux prochains mois. La garantie d’évoluer sous une météo favorable est de 99,99 % et mon corps réagit plutôt bien à la chaleur. Pas de raison, dès lors, de changer une formule qui me convient..."
Classé 48e d’une 4e étape qu’il a bouclée à une quinzaine de secondes du groupe qui s’est disputé la victoire, le Hollandais (il est issu de cette province) a troqué cet hiver le maillot bleu de la Quick Step pour la tenue plus sombre de Direct Énergie. Un choix sur lequel il a accepté de se confier sans tabou à dix jours du Nieuwsblad et de l’ouverture de la période "la plus importante" de sa saison.
Niki, après huit saisons chez Quick Step, changer d’environnement doit être synonyme de chamboulements. Avec quel sentiment avez-vous débarqué au sein de l’équipe Direct Énergie ?
"Dans le même état d’esprit qu’un écolier à l’aube de la rentrée des classes (rires) . J’étais très excité mais aussi un peu nerveux car je ne connaissais pas encore beaucoup de monde dans l’équipe. En novembre, nous avons réalisé un stage de cohésion très sympa en Vendée. Cela a participé à ma bonne intégration."
Ressentez-vous une pression supplémentaire ? Vous êtes désormais la figure centrale de cette formation...
"Non, pas véritablement. La différence est que cette structure a désormais décidé de faire de la campagne des classiques l’une des priorités de sa saison et qu’il m’appartiendra de conclure le travail de toute une formation qui se dévouera pour moi. Chez Quick Step, plusieurs coureurs se partageaient les responsabilités. La pression n’est donc pas plus importante mais différente."
Parlez-vous déjà français ?
"Pas encore très bien, mais j’apprends. Le français est la langue véhiculaire de l’équipe et les briefings s’effectuent dans cette langue. Il me faut donc la maîtriser pour poursuivre mon intégration. J’ai installé une application sur mon téléphone, qui me permet de travailler dès que j’ai un peu de temps."
Avez-vous été surpris de la proposition de Direct Énergie lors du dernier mercato ? Cette équipe n’avait, jusqu’ici, pas de réelle culture des classiques pavées…
"Oui, je ne le cache pas. Je pense d’ailleurs que beaucoup de gens ont été étonnés de ma décision, lorsque celle-ci a été officialisée. Mais j’ai très vite senti que l’intérêt de Jean-René Bernaudeau (NdlR : le manager) était très concret."
Patrick Lefevere, qui n’avait pas les moyens financiers de vous conserver, vous a remercié publiquement pour avoir patienté avant de prendre votre décision. S’agissait-il d’une marque de respect envers votre précédente équipe ?
"Oui, tout à fait. Patrick était à la recherche de nouveaux sponsors pour finaliser son budget. Il a toujours été un très bon boss, et je souhaitais donc lui laisser le temps de finaliser certaines manœuvres pour voir s’il était capable, ou non, de me faire une offre. Mais le temps filait, et il devenait important pour moi de prendre une décision. Je suis heureux que Patrick ait pu trouver un nouveau partenaire avec Deceuninck (NdlR : début octobre) et que l’équipe puisse continuer sa belle aventure. Sans moi toutefois."
Vous passez de l’équipe WorldTour, la plus prolifique de la saison écoulée, à une formation continentale pro. Quelles différences y a-t-il entre ces deux mondes ?
"Elles sont tout de même importantes. Chez Quick Step, nous prenions le départ de chaque course ou presque pour la gagner. Le niveau global de l’équipe est donc naturellement plus élevé que chez Direct Énergie. J’ai pu le ressentir lors du stage hivernal. J’étais toutefois conscient de cet aspect des choses avant d’arriver dans ma nouvelle équipe puisque c’est aussi cela qui m’a poussé à opter pour cette structure. Je sais que le staff compte beaucoup sur moi pour tirer tout le monde vers le haut."
Qu’attendez-vous de vos équipiers sur les classiques ?
"J’espère que certains pourront m’accompagner dans la finale de ces courses, même si le plus important pour moi est qu’ils puissent bien me placer au moment d’aborder certains tronçons importants. Mais je crois que plusieurs gars pourraient surprendre beaucoup de gens ! Une bonne partie du noyau qui m’épaulera sur les classiques est engagé sur ce Tour d’Oman et nous tentons donc d’y travailler nos automatismes en course. Je sens que mes nouveaux équipiers sont extrêmement appliqués dans leurs tâches. Certains sont très costauds, mais ils n’avaient pas, jusqu’ici, le bon angle d’attaque pour aborder les classiques. Ils me disent que ma présence les motive désormais à se préparer au mieux pour toute la campagne du Nord, là où, avant, ils ne nourrissaient pas de réelles ambitions."
Après huit saisons chez Quick Step, vous devez maîtriser à la perfection les codes de cette équipe et connaître la manière dont y sont échafaudés les plans tactiques. Cela constituera-t-il un avantage pour vous sur les prochaines courses ?
"J’en sais probablement beaucoup, en effet, mais je sais aussi que l’arme tactique la plus souvent utilisée par Tom Steels et Wilfried Peeters est la surprise. Elle est donc, par nature, imprévisible (rires) . Chaque année, la manière dont nous manœuvrions à certains endroits précis était la même, et j’ai toujours cela bien à l’esprit. Décoder la manière de fonctionner de cette formation n’est pas particulièrement difficile. Il s’agit surtout d’un groupe de super haut niveau."
Que serait pour vous une campagne des classiques réussie cette année ?
"Je veux évidemment tenter de gagner mais souhaite surtout être compétitif. Je ne suis pas ce qu’on appelle un ‘serial winner’, même si je compte de grandes courses à mon palmarès. L’explosivité n’est pas ma caractéristique première et pour que je lève les bras, il faut que toutes les pièces du puzzle s’emboîtent à la perfection."
Direct Énergie n’a pas encore reçu sa wild-card pour le prochain Tour de France. Cela génère-t-il une forme de stress au sein de l’équipe ?
"Non, pas vraiment. Tenter de gagner une grande classique génère tout de même plus de pression que de batailler pour une invitation sur la Grande Boucle. Celle-ci passera de toute façon par de bons résultats."
"Valverde serait compétitif… même en cyclo-cross"
Lors de son succès sur le dernier Tour des Flandres, Niki Terpstra avait contré un mouvement de Vincenzo Nibali pour filer vers la victoire. Cette année, le Néerlandais retrouvera un autre touche-à-tout sur son chemin puisqu’Alejandro Valverde sera au départ du Ronde. "Le champion du monde sera dans le coup, c’est certain ! Si vous lui donniez un vélo de cyclo-cross, il y jouerait aussi la gagne (rires) . Il a déjà disputé À Travers la Flandre et on avait alors vu qu’il se débrouillait bien sur les pavés. Valverde est pour moi l’exemple du plaisir en compétition. Ce coureur est depuis si longtemps au sommet que ce n’est possible que si vous aimez vraiment ce que vous faites."