Le talentueux Mr. Valverde
Souvent décrié pour son passé trouble, le champion du monde n’en reste pas moins l’un des meilleurs coureurs de l’histoire.
- Publié le 20-09-2019 à 06h47
- Mis à jour le 20-09-2019 à 10h32
Souvent décrié pour son passé trouble, le champion du monde n’en reste pas moins l’un des meilleurs coureurs de l’histoire.
Grâce à son exceptionnelle polyvalence, le Murcian dispose des arguments pour conserver son titre le 29 septembre prochain dans le Yorkshire.
Unzué : "Il a été encore meilleur qu’en 2018"
Cette année, le champion du monde s’est montré très compétitif sur les Grands Tours en prenant la neuvième place de la Grande Boucle, alors qu’il a essentiellement travaillé pour Nairo Quintana et Mikel Landa, avant de finir deuxième de la Vuelta. Les performances de l’Espagnol de 39 ans ont encore ébahi le staff de son équipe. "Avec Alejandro, cela fait longtemps qu’il n’y a plus assez de qualificatifs pour le nommer. À son âge, il continue de nous surprendre, et ce n’est pas parce qu’il maintient le niveau des années précédentes, mais parce qu’il a été encore meilleur que l’année dernière dans les deux Grands Tours qu’il a disputés", s’est réjoui Eusebio Unzué, le manager général de la formation Movistar, à la fin de la Vuelta. Avec sept podiums obtenus sur le Tour d’Espagne, Alejandro Valverde est le recordman en la matière. Le 15 septembre dernier, le Murcian a également terminé pour la neuvième fois dans le top 3 d’un Grand Tour, égalant au passage la performance de l’illustre Miguel Indurain. Finalement, et même s’il n’a gagné qu’une seule épreuve de trois semaines à l’occasion de la Vuelta 2009, le Murcian fait bien partie du gotha des coureurs de Grands Tours.
Il a goûté et apprécié le Tour des Flandres
Le coureur Movistar est le recordman de victoires sur la Flèche wallonne. En 2017, le Murcian s’était également rapproché à une longueur des cinq victoires d’Eddy Merckx dans Liège-Bastogne-Liège. Mais, depuis deux saisons, Alejandro Valverde a semblé en recul sur les classiques ardennaises, notamment à cause de l’émergence de Julian Alaphilippe. Pourtant, paradoxalement, le vétéran espagnol a réalisé des prouesses au printemps dernier. Alejandro Valverde a d’abord terminé septième de Milan-Sanremo, sa meilleure performance en sept participations. Deux semaines plus tard, le Murcian terminait huitième du Tour des Flandres à l’occasion de sa découverte du Ron de . "Finalement, je suis beaucoup plus près que je ne le pensais avant la course. Au fur et à mesure des kilomètres, c’était de mieux en mieux. J’ai vibré devant ce public. Cela incite à revenir", a promis le coureur Movistar le 7 avril dernier.
Dans un registre correspondant un peu plus à ses qualités, Alejandro Valverde peut légitimement espérer remporter pour la première fois l’Amstel Gold Race ou le Tour de Lombardie, classiques dans lesquelles il cumule dix top 10.
"Longtemps que je courais après ce titre"
"Être champion du monde était un rêve pour moi." En réglant Romain Bardet, Michael Woods et Tom Dumoulin, le 30 septembre 2018, Alejandro Valverde a remporté l’une des dernières courses qui lui résistaient encore. Mais, à Innsbruck, le Murcian a surtout mis fin à une série d’échecs dans sa quête du maillot arc-en-ciel. "Cela faisait longtemps que je courais après ce titre et je pensais qu’il serait compliqué d’aller le chercher un jour", a d’ailleurs avoué l’Espagnol à sa descente du podium. Avant Innsbruck, Alejandro Valverde avait participé à onze championnats du monde, en terminant à neuf reprises dans le top 10. Le coureur Movistar était souvent tombé sur plus fort que lui, comme en 2005 avec Tom Boonen ou en 2012 avec Philippe Gilbert. D’autres fois, notamment en 2003 ou en 2013, Alejandro Valverde avait dû composer avec la stratégie de sa sélection. Désormais auréolé d’un titre, le Murcian peut espérer réaliser le doublé dans le Yorkshire. Même si l’Espagnol reste mesuré quant à ses chances de conserver le maillot arc-en-ciel. "Il faut être réaliste et on sait que le parcours correspond mieux à d’autres coureurs qu’à moi", a concédé le champion du monde à la fin de la Vuelta.
"Mon corps a réagi à la pression"
Le 31 mai 2010, et après des années de procédures, le Murcian a été officiellement suspendu par le Tribunal arbitral du sport pour son implication dans l’Affaire Puerto, vaste opération de dopage sanguin organisée par le docteur Fuentes. Il est alors banni deux ans et perd ses victoires acquises en 2010, notamment le Tour de Romandie. De retour à la compétition en début 2012, Alejandro Valverde gagne d’entrée avant de rentrer un peu dans le rang. Notamment à cause de problèmes psychologiques. "Je ne pouvais pas et n’osais pas conduire une voiture parce que j’avais le vertige. Pendant l’entraînement, j’ai paniqué dans les descentes droites. À l’Amstel Gold Race, j’ai toujours couru à la fin du groupe. J’ai juste suivi, toujours avec un équipier à mes côtés, parce que j’avais peur d’être de nouveau étourdi. J’ai consulté un psychologue, mais rien n’a aidé. La conclusion était claire. J’étais déprimé et je suis devenu patient en psychiatrie. Mon corps a réagi très fortement à la pression due aux années passées autour du dossier du dopage", a avoué le vétéran espagnol dans le documentaire "Une année arc-en-ciel". Depuis, Alejandro Valverde va mieux et semble même plus fort qu’avant sa suspension.
Il a lutté face à Van Petegem et Evenepoel
Seize ans séparent le premier podium obtenu sur la Vuelta par Alejandro Valverde du plus récent, décroché le 15 septembre dernier. "Cela fait beaucoup d’années à se battre au plus haut niveau", a reconnu le Murcian à Madrid. Le champion du monde a ainsi côtoyé Roberto Heras, né en 1974 et Tadej Pogacar, né en 1998, sur le podium du Tour d’Espagne. Même constat pour les classiques où le coureur Movistar a ferraillé avec Davide Rebellin, qui a vu le jour en 1971, et le regretté Bjorg Lambrecht, qui venait d’avoir 22 ans au moment où il a pris la quatrième place sur la Flèche wallonne 2019. Pour sa première participation au Mondial, en 2003 à Hamilton, Alejandro Valverde avait arraché la médaille d’argent au sprint face à Peter Van Petegem, qui fêtera bientôt ses 50 ans. Dans le Yorkshire, le 29 septembre prochain, le Murcian affrontera notamment Remco Evenepoel, qui n’a pas encore 20 ans. Le 27 juin dernier, Alejandro Valverde s’est donné une chance de continuer à mater les jeunes en prolongeant avec Movistar jusqu’en 2021. "Cela me donne le calme et la confiance dont j’ai besoin pour continuer à travailler dur et à profiter des courses de vélo", a indiqué à cette occasion celui qui sera professionnel bien après ses 40 ans.
"Une sorte de dépression postnatale"
Dans le documentaire "une année arc-en-ciel", diffusé le 16 septembre par la chaîne Originales Movistar +, le Murcian est revenu sur la saison en cours. Une aventure avec le maillot irisé qui s’est débutée dans la douleur. "Je me suis dit : ‘Je suis champion du monde, le plus haut possible.’ Mais c’était une catastrophe. J’ai oublié de profiter du vélo. C’était étrange d’être le seul à avoir un autre maillot que le reste du peloton. Je voulais vraiment bien le porter. Je voulais presque rendre hommage à la pression. Je ne me sentais à l’aise que lors des entraînements, pas dans les compétitions. C’était presque une sorte de dépression postnatale", a ainsi révélé Alejandro Valverde.
Vêtu du maillot arc-en-ciel, le coureur Movistar a effectivement vécu un début de saison éloigné de ses standards, surtout sur les classiques ardennaises où il a fait de la figuration. Mais le Murcian a profité de l’été pour de nouveau rayonner avec le titre de champion d’Espagne, une neuvième place sur le Tour de France et une deuxième place sur la Vuelta. Alejandro Valverde a finalement fait honneur au maillot arc-en-ciel. En tout cas bien plus que la plupart de ses prédécesseurs.