En danseuse vers les étoiles: 1999, l'année VDB
Cinq ans jour pour jour après la mort de Frank Vandenbroucke, DH.be revient sur son année de légende. 1999, c'est à la fois le début de la fin et la fin du début de VDB. Souvenirs.
- Publié le 12-10-2014 à 09h53
- Mis à jour le 12-10-2014 à 10h45
Cinq ans jour pour jour après la mort de Frank Vandenbroucke, DH.be revient sur son année de légende. 1999, c'est à la fois le début de la fin et la fin du début de VDB. Souvenirs.
L’adage veut que les histoires d’amour finissent mal, en général. Frank Vandenbroucke avait beau être le plus élégant des courtisans, son aventure passionnée avec la petite reine n’a pas résisté aux ravages du temps qui passait trop vite. Il y a cinq ans, VDB perdait sa dernière course. Une course contre la mort où il n’a jamais pu faire figure de favori. C’était la fin de dix années de résurrections avortées, de scandales en Une des journaux, d’histoires de dopage et d’espoirs déçus. L’immense Frank Vandenbroucke était devenu le pathétique Francisco Del Ponte, un homme qui se cachait dans des kermesses avec un pseudonyme digne d’un théâtre de marionnettes et une photo de Tom Boonen sur le passeport.
Impossible d’oublier, malgré tout, cette fabuleuse année 1999. À peine adolescents, nos yeux brillaient comme la chevelure peroxydée d’un VDB qui marchait sur le monde avec l’insolence d’un enfant espiègle qui ose se gaver à la table des géants. Encore trop naïves pour entendre parler de dopage, nos oreilles n’écoutaient que les hurlements d’une foule amoureuse de son héros, buvaient les paroles teintées d’arrogance d’un coureur tellement fort qu’il ne décidait pas seulement quand, mais aussi comment il allait gagner.
C’est l’histoire de celui que la Belgique appelait « VDB ». Pas besoin d’une comparaison animalière, pas d’autre signe distinctif que l’élégance naturelle de cet homme qui semblait né avec des pédales à la place des orteils. Trois lettres qui suffisaient à évoquer brièvement le patrimoine d’un cycliste qui avait un vélo dans l’hémoglobine et la petite reine dans les gènes. Trois lettres qui résument 1999. Cette année-là, Vandenbroucke était sublime. Il était comme ces hommes qui entrent dans une boîte de nuit, repèrent la plus belle fille de la soirée et l’arrachent en un clin d’œil à tous ses beaux prétendants. Sublime et écœurant comme le sont les géants.
L’Italie, presque jalouse qu’il ne soit pas un des siens, l’appelait Il Bimbo d’Oro. Traduction italienne du surnom de Diego Maradona, un autre génie insolent qui avait charmé le pays de Baggio et Bartoli. La Botte ne pouvait que se mettre aux pieds de VDB, tellement italien dans sa façon de caresser sa machine du bout des pieds, si gracieux quand il se dressait sur ses pédales. Quand Ballerini volait sur les pavés, Vandenbroucke dansait sur les pourcentages. En neuf mois, Il Bimbo d’Oro a marché sur le Volk, renversé les Flandres, ridiculisé l’immense Bartoli dans la Redoute et dégoûté les meilleurs grimpeurs d’Espagne. Il a aussi connu les tourments de l’affaire Sainz et laissé ses poignets sur le bitume irisé de Vérone.
1999, c’est à la fois la fin du début et le début de la fin de l’histoire de Frank Vandenbroucke. Douze mois de larmes de joie et de souffrance, d’attaques de folie et de folle élégance. En une année et sept images, nous avons choisi de rendre hommage à celui qui aurait dû devenir le plus grand cycliste du début du millénaire. L’apogée d’Il Bimbo d’Oro a finalement été aussi fulgurante, grandiose et photogénique que cette attaque presque irréelle sur les pavés d’Avila, le 24 septembre 1999. Ce jour-là, impossible de savoir si on devait imaginer Frank avec l’arc-en-ciel sur le poitrail ou le maillot jaune sur les épaules. Tout est devenu possible alors que tout s’arrêtait. C’était émouvant, incroyable, jouissif, surréaliste. C’était tellement de tout ça, que tous les dictionnaires du monde étaient à court de définition. C’était Frank Vandenbroucke. Il Bimbo d’Oro. VDB.
Les cheveux sont impeccablement plaqués en arrière, la cravate rouge est solennelle, et le nouveau costume, celui de leader, est taillé sur mesure. Frank Vandenbroucke est au centre de la photo et de l’attention. Il débarque chez Cofidis avec l’étiquette de leader unique collée sur le front, au-dessus d’yeux carnassiers prêts à dévorer toutes les proies. Cofidis, une équipe de nordistes. De l’autre côté de la frontière, mais presque la porte à côté pour Frank, l’enfant de Ploegsteert. Vandenbroucke, c’est une « bonne image pour Cofidis dont le siège était basé à Bondies » raconte Bernard Quilfen, directeur sportif de l’équipe. « C’est Alain Bondue qui l’avait fait venir. Il était bien entouré, il y avait une belle équipe autour de lui avec plein de coureurs belges pour qu’il se sente comme à la maison. »
VDB l’ambitieux a quitté Patrick Lefevere et sa surpuissante Mapei. Trop italienne depuis les signatures de Bettini et Bartoli, qui a soufflé la victoire de quelques millimètres à Frank sur le vélodrome de Zurich l’année précédente au terme d’un sprint à la limite du réglementaire chahuté par une moto presque meurtrière. Vandenbroucke n’a que 24 ans, l’âge où il pourrait encore grandir dans l’ombre du requin Bartoli et brandir quelques bouquets mineurs en attendant son tour. Mais VDB a trop d’ambition pour se contenter de l’ombre. Il veut que ses yeux deviennent rouges à force de voir crépiter les flashes, que ses épaules souffrent de trop lever les bras.
« Pour les courses que moi je veux gagner, je dois être le seul. Dans l’équipe, il ne doit pas y avoir un autre coureur qui peut ne fut-ce qu’imaginer gagner. » Le discours est limpide. Frank demande le trône et la pression qui va avec. Les classiques seront son terrain de chasse, lui dont le plus grand succès d’un jour est alors une victoire sur Gand-Wevelgem. Les monuments sont dans le viseur d’un VDB déjà impatient de dégainer. Fini d’être un grand coureur, Vandenbroucke veut tout simplement devenir le meilleur du monde. Et Cofidis prend le pari de l’accompagner dans son irrésistible ascension. Une nouveauté pour une équipe qui, depuis son arrivée dans le peloton, misait plutôt sur les courses par étapes mais tapait souvent à côté, entre un Rominger vieillissant, un Casagrande rattrapé par les affaires et un Armstrong tombé malade peu après sa signature.
À côté d’un Bobby Julich qui rêve ouvertement de Tour de France, Vandenbroucke touche près de 100.000 euros par mois pour être l’homme du printemps. Nico Mattan, son gregario d’alors et de toujours, l’a suivi de l’autre côté de la frontière. Avec Peter Farazijn, Chris Peers, Philippe Gaumont ou Massimiliano Lelli, ils constitueront la garde rapprochée du Bimbo d’Oro dans sa quête d’un monument. Le Ronde, la Doyenne, ou même Sanremo ou Roubaix : peu importe le flacon du terrain de jeu, VDB veut l’ivresse de la victoire, et toute l’équipe Cofidis semble prête à se vider pour remplir l’armoire à trophées de son nouveau leader. Tous n’ont à la bouche que le nom de Vandenbroucke, et Frank adore ça.
Un ciel gris et pesant recouvre Gand en ce 1er mars 1999 où le peloton s’est donné rendez-vous pour la traditionnelle course d’ouverture de la saison belge : le circuit “Het Volk”, désormais rebaptisé “Het Nieuwsblad” depuis 2009. Dans son maillot argenté de la TVM, Peter Van Petegem pavoise au milieu des nombreux fans venus saluer les coureurs sur la ligne de départ. Le dossard numéro 1 s’est adjugé les deux dernières éditions de l’épreuve et s'annonce comme le grand favori à sa propre succession. Mais une pointe d’inquiétude se lit néanmoins sur le visage de celui qu'on surnomme "le noir de Brakel" en raison de son teint mat. Quelques semaines plus tôt sur l’équivalent français du Volk, le Grand Prix de la Marseillaise puis sur la Ruta del Sol, un garçon aux cheveux peroxydés a affiché un état de forme étincelant. Son nom : Frank Vandenbroucke. Désormais paré des couleurs de la Cofidis et plus de la puissante Mapei, ce jeune loup aux dents longues comme celui gravé dans la chair de son bras droit représente un danger supplémentaire aux côtés des éternels Johan Museeuw et Andreï Tchmil.
Vandenbroucke peut compter dans sa nouvelle formation sur deux coureurs expérimentés sur les routes flandriennes, Philippe Gaumont et Peter Farazijn. Son ami de toujours et fidèle équipier, Nico Mattan, n'a plus le droit d'enfourcher son vélo en raison de problèmes cardiaques présumés. VDB veut donc frapper un grand coup pour son pote.
Les premiers monts pavés et escarpés, traditionnels juges de paix de ce type d’épreuve, ne tardent pas à avoir raison de ceux qui n'ont pas les jambes. Après de nombreuses escarmouches, 9 hommes vont se retrouver en tête, Museeuw, Tchmil et Van Petegem, pouvant tous compter sur un équipier au contraire d’un VDB isolé.
Mais le citoyen de Ploegsteert va se montrer le plus fort, mais aussi le plus malin. Il va contrer une attaque de Museeuw ramenée par Knaven et Tchmil, n’emmenant dans sa roue que le seul Wilfried Peeters. Mais le trou tarde à se creuser d’autant plus que l’ancien détenteur des passeports soviétique, russe, ukrainien et moldave, récemment naturalisé belge, n’entend pas laisser filer le duo. Mais sous l’impulsion d’un VDB impressionnant, l’échappée se dispute le sprint final à Lokeren. Malgré son courage, le vaillant Wilfried Peeters ne peut que s’incliner face à la classe naturelle de son adversaire de 24 ans qui a donc vaincu Van Petegem dans son jardin.
La saison est lancée et Frank Vandenbroucke fait figure d’épouvantail pour les prochaines semaines qui mèneront les coureurs entre Bruges et Roubaix en passant par Merbeke et Compiègne sans oublier un détour obligé par la Riviera italienne, son Poggio et son arrivée sur la Via Roma de San Remo. VDB, le jeune coq plein d’assurance, a lancé un messages aux vieux Lions. Il est prêt à les défier sur leurs pavés et sur leurs monts. Le rendez-vous est pris sur la Grand-Place de la Venise du Nord dans un peu plus d’un mois.
Le dopage s’est une nouvelle fois invité à la table des amateurs de cyclisme à quelques heures du début de la grand messe attendue par tout le nord du pays, le Tour des Flandres. Depuis le mois de juillet, les révélations sur le régime sanguin de certains coureurs pleuvent dans une presse qui ne demande qu’à en faire ses choux gras. Mais ce climat n’empêche une nouvelle fois pas les Flamands de descendre massivement au bas de leurs portes ou de s’agglutiner le long des différents monts pavés sur lesquels les cadors du peloton s’expliqueront dans quelques heures.
Les favoris annoncés ont marqué leur territoire en remportant des courses importantes avant la grande explication des Flandres. Difficile de sortir quelqu’un du lot. Le solide bloc Mapei emmené par un Johan Museeuw de retour aux affaires sur ses terres après avoir avoir failli laisser une jambe dans la trouée d’Arenberg et un Michele Bartoli au sommet de son art impressionne les observateurs, même si Peter Van Petegem, bien décidé à enfin accrocher un “Monument” à son palmarès et Andreï Tchmil, gonflé à bloc par son succès sur Milan-San Remo sont bien décidés à déjouer les pronostics. Et Frank Vandenbroucke dans tout ça ? Le Ploegsteertois a impressionné au Volk et affiché sa détermination sous la forme d’une accélération puissante dans le Vieux Quaremont à l’occasion du dernier GP de l’E3, terminant sur la dernière marche du podium avant d'échouer derrière Van Petegem à La Panne malgré le gain du dernier chrono. Mais qu’a-t-il prouvé sur 250 km, qui plus est sur ces archaïques chemins flamands qui s’offrent plus souvent à des coureurs dans la fleur de l’âge qu’à d’arrogants coqs gavés d’orgueil et de certitudes. Les routes du nord, balayées par le vent et la pluie, aiment la bravoure et le panache, mais punissent toujours les présomptueux. VDB l’apprendra en ce dimanche pascal.
Toujours privé de Nico Mattan, le Bimbo d'Oro peut cependant compter sur une équipe Cofidis entièrement dévouée à sa cause et prêt à tenter un Putsch sur les terres des Lions flamands. A 150 bornes de l’arrivée, le Hennuyer dynamite la course en compagnie de Philippe Gaumont. Le duo avale les échappés matinaux avant d’être emporté par les chutes. Le Nordiste ne s’en relèvera pas, le Belge est lui contraint de courber l’échine sur les pavés glissants du Molenberg. Admirablement épaulé par Peter Farazijn, VDB se retrouve quand même avec les meilleurs au pied du Mur de Grammont, avant d’à nouveau faire connaissance avec le sol, en compagnie de Tchmil et Bartoli, dans le virage débouchant sur la Oudenbergstraat.
Sans demander leur reste, Van Petegem et Museeuw s’envolent sur les pavés du Mur sous les vivas d’un public flamand ivre de bonheur à l’idée de voir ses deux Lions s’expliquer sur la Chaussée de Ninove. Mais dans cet après-midi où le cyclisme belge allait briller de mille feux malgré le ciel gris recouvrant le Brabant flamand, un wallon devait prendre place sur la photo finish. Alors, dans un effort aussi remarquable sur le plan athlétique que du panache, Vandenbroucke effectuait la jonction avec le duo de tête dans le Bosberg.
A Merbeke, il ne pouvait cependant rien contre Peter Van Petegem, enfin couronné dans une grande classique, après être passé tant de fois à côté. Le soir, dans les troquets enfumés de la localité, tous ceux qui avaient assisté à la course en arrivaient au même constat. Ce jeune coq qui était tombé dans la fosse aux lions allait un jour inscrire son nom au palmarès et imiter ainsi Claudy Criquelion. Ils ne savaient pas qu’à l’exception notable de 2003 où il allait encore subir la loi de Van Petegem, le petit prodige de Ploegsteert n’allait plus jamais illuminer les routes du Ronde de son talent.
Incapable, douze mois plus tôt, de suivre les Massi, Casagrande et Boogerd lancés à la poursuite d'un Michele Bartoli en état de grâce dans la côte de Saint-Nicolas, Frank Vandenbroucke a l’audace d’annoncer deux jours avant le départ de la Doyenne des classiques que c’est dans cette même bosse faisant office de juge de paix qu’il dessinera son sacre ce dimanche 18 avril 1999. Renforcé par ses bonnes prestations sur les pavés du Ronde (2e) et de l’Enfer du Nord (7e), VDB annonce même l’endroit exact où il placera son démarrage décisif. Une attitude à la limite de l’arrogance qui lui vaudra d’ailleurs une petite pique certes amicale d’Eddy Merckx himself, celui-ci lui conseillant de parler moins et de se contenter de gagner. Le Bimbo d'Oro lui avait alors rétorqué avec cette espièglerie qui le caractérisait :“Pourquoi, tu es jaloux de moi?"
Mais cette arrogance était surtout de la confiance. Le Ploegsteertois savait exactement ce qu’il faisait et tenait promesse en déposant Michael Boogerd, parti le premier à l’attaque sur les pentes de Saint-Nicolas, à l’endroit même qu’il avait annoncé. Le Néerlandais serrait les dents, se déhanchant comme un beau diable sur sa machine, pour tenter de rester au contact de son rival belge qui s'envolait avec une facilité déconcertante. Mais ce dimanche ensoleillé était celui de VDB. Lui à qui l’on prédisait une carrière riche en succès de prestige allait enfin rentrer dans la cour des grands à même pas 25 printemps et en y ajoutant cette classe qui ne se penche que sur le berceau de quelques-uns.
Mais avant de matérialiser son succès de coups de pédale souples et puissants, le Bimbo d'Oro avait remporté la guerre psychologique après un mano a mano d’anthologie sur les terribles pourcentages la Redoute face au maître des lieux, Michele Bartoli. L’Italien s’était dressé sur ses pédales sur les hauteurs de Remouchamps afin de marquer son territoire. Mais cette démonstration de force n’impressionnait guère le fougueux Vandenbroucke qui non seulement répondait à l'accélération puis prenait quelques mètres sur son rival. Pour ensuite partir dans une folle escapade qui l’aurait fait rentrer dans la légende ? Non, malin, VDB avait compris que la Doyenne ne se gagnait pas à cet endroit et attendait sagement son heure. Il était sûr de son plan et se savait suffisamment fort pour le mener à bien.
Ralenti par une chute dans la côte de Stockeu, il n’avait pas perdu son sourire, rassurant ainsi Alain Bondue inquiet de voir son poulain trop diminué par la culbute. " Au pied de la Redoute, il s'est permis de me sourire. Quand j'ai vu la tête des autres, je me suis dit que Frank était déjà au-dessus du lot.", raconte le manager général de Cofidis à l’époque.
En triomphant du côté de Ans, Vandenbroucke mettait fin à 7 années de disette belge et clouait le bec aux derniers sceptiques qui interprétaient ses nombreuses places d’honneur acquises jusque là comme autant d’échecs.
Conscient de disposer de peu d’équipiers, mais suffisamment dévoués à sa cause que pour l’aider au maximum, Vandenbroucke n’oubliait pas non plus de leur dédier son succès. Notamment à Peter Farazijn qui avait imprimé un tempo d’enfer entre la Redoute et Saint-Nicolas pour dissuader les candidats à l’aventure. Un “Fausto” qui avait déjà rendu de fiers services à son chef de file sur les routes des classiques flandriennes.
Revenant, quelques mois avant sa disparition, sur ce jour dont on ne se doutait pas à l’époque qu’il serait l’apogée de sa carrière, VDB évoquait notamment sa passe d’armes avec Bartoli : “C’était un peu de la provocation à son égard. A l’époque, c’était un chasseur de classiques redoutable. Il venait de gagner la Flèche en partant à 80 bornes de l’arrivée ! On ne s’aimait pas trop sur le vélo, alors on faisait un peu d’intox. Le mano a mano dans La Redoute, je l’avais tout de même pronostiqué. C’était un peu tôt dans la course mais j’en avais envie, pour le taquiner.”
Pas question de provocation quand il revient sur son attaque décisive dans Saint-Nicolas. Juste une simple reconnaissance du parcours. “A l’entraînement, j’avais grimpé quatre ou cinq fois Saint-Nicolas. C’était nouveau, rappelez-vous. Et en face d’une maison, je revois encore laquelle, il y avait un changement de braquet et un virage. Je trouvais l’endroit idéal, stratégiquement. Quand je suis parti seul dans la bosse, c’était presque trop facile.”, explique-t-il tel un enfant heureux d'avoir réalisé un tour pendable.
Soucieux du moindre détail, il avait aussi acheté un matériel à la pointe pour réussir à séduire sa belle. Son vélo pesait moins de 7kg et était d’une rigidité incroyable. Mais aussi très fragile si bien que son utilisation ne pouvait pas dépasser les 500km. Ses pneus en kevlar offraient un rendement exceptionnel, mais augmentaient les risques de crevaison. La chance, heureusement, était de son côté ce dimanche là.
Après un mois d’avril qu’il terminera avec le maillot de leader de la Coupe du monde sur les routes de l’Amstel Gold Race, Vandenbroucke aspire à un repos bien mérité, même si quelques courses dont les Quatre Jours de Dunkerque sont encore à son programme. Adulé et respecté, le meilleur semble encore à venir pour celui qui a vu le jour à Mouscron. La Belgique du cyclisme est fière de posséder dans son Royaume un si beau joyau. Le Tour de France n’est encore que dans un petit coin de sa tête que son étoile va déjà pâlir quelques semaines plus tard. VDB est rattrapé par le sceptre du dopage et connaît les premiers tourments de sa carrière. Mais pas les derniers.
Dans la nuit du 6 au 7 mai, la PJ de Paris interpelle deux hommes qu'elle soupçonne de posséder des substances dopantes. Leurs noms : Bertrand Lavelot et Bernard Sainz. Le premier est un avocat connu dans le peloton français pour avoir fait casser, pour vice de forme, des sanctions prises par la Fédération nationale de cyclisme à l'encontre de coureurs contrôlés positifs, le second a hérité du sobriquet d’un personnage littéraire de Norbert Jacques, le Docteur Mabuse.
La juge en charge du dossier, Michèle Colin, les met en examen tout comme trois autres cyclistes français Pascal Peyramaure, Yvon Ledanois et Philippe Gaumont, coéquipier et ami de Frank Vandenbroucke. Le Belge est d’ailleurs placé en garde à vue après avoir été interpellé au domicile de son camarade avec lequel il planifiait une journée de pêche après avoir abandonné aux Quatre Jours de Dunkerque. Officiellement, VDB n’est cité que comme témoin mais des prélèvements sanguins et urinaires sont effectués sur lui. La presse ne tarde pas à faire ses choux gras de ce scandale qui touche son nouveau roi.
Pendant plusieurs jours, le coureur, entre-temps suspendu à titre provisoire par son employeur, se mure dans le silence avant de le briser lors d’une conférence de presse organisée à l’hostellerie de la Place à Ploegsteert, à l'heure où Richard Virenque, idole contestée de l'Hexagone après son exclusion de la dernière Grande Boucle, était à son tour placé en garde à vue dans la même affaire.
Pas question de champagne et de louanges comme ce fut le cas quelques semaines plus tôt lorsque l’enfant du pays célébrait son triomphe sur les hauteurs de Ans. L'atmosphère est même plutôt pesante alors que l'assistance attendait avec impatience et un soupçon d'angoisse que les premiers mots sortent de la bouche de VDB. “ J'ai peut-être été naïf, jamais malhonnête. Je suis très gêné de ce qui arrive et je fais mon mea-culpa”, explique-t-il avant de revenir sur en détail sur les bons soins que lui prodiguait le docteur Mabuse.
Jeûne, gouttes homéopathiques, soins naturels, Vandenbroucke affirme n’avoir eu recours à aucun moyen illicite. C’est Philippe Gaumont qui lui a présenté Bernard Sainz en décembre 98 alors que le coureur belge ne semblait pas avoir entièrement confiance dans l’encadrement médical de sa nouvelle formation, lui qui était suivi par le prestigieux docteur Van Mol du temps où il pédalait sous les couleurs de la Mapei.
Charmé, limite ensorcelé par le bagout de ce véritable gourou qui l’impressionnait en lui montrant des photos où il s’occupait de quelques grands noms comme Eddy Merckx ou Raymond Poulidor, VDB était persuadé que son bon docteur, naturopathe ou homéopathe déclaré et ne possédant aucun diplôme dans le domaine, pourrait l’aider à s’améliorer avec des méthodes plus novatrices. Cet homme avait permis à son fidèle compagnon Nico Mattan de reprendre l’exercice de son métier alors qu’on avait décelé chez lui des problèmes cardiaques. Frank Vandenbroucke précisait même le coût des services de Bernard Sainz : 50.000 francs belges de consultations et 7.000 pour les produits homéopathiques. Ça fait trop cher les tisanes que pour ne pas être suspect.
Mis sur la touche, descendu dans les médias, le Bimbo d'Oro veut être blanchi le plus rapidement possible, mais une information publiée dans le journal L’Equipe va tout remettre en cause. Des traces d’amphétamines ont été retrouvées dans le sang et les urines du coureur qui avait un taux d’hématocrite de 52%, soit deux au-dessus de la limite autorisée. Lorsqu’il revient chez la juge d’instruction le 19 juin, beaucoup ont perdu l'espoir de voir être blanchi celui qui était censé incarner un nouveau cyclisme. Mais après trois heures durant lesquelles il sera confronté à Sainz et Lavelot, il descend les marches du Palais de Justice avant d'annoncer d'une voix tremblante trahissant son émotion qu'il avait été mis officiellement hors de cause.
On ne parlera plus jamais des fameux résultats des analyses du coureur. Pourtant, si l’on en croit Philippe Gaumont dans son livre “Prisonnier du dopage”, le Ploegsteertois aurait consommé, quelques heures avant sa garde à vue, un pot belge, une substance bien connue du milieu dont les amphétamines sont l’un des ingrédients. Le coureur français, décédé lui aussi depuis, explique aussi que Bernard Sainz n’a probablement jamais donné directement de produits dopants à ceux qui faisaient appel à ses services. D’ailleurs, toutes les fioles saisies au cabinet du docteur Mabuse ne contenaient aucun produit illicite. Mais Gaumont explique aussi que ce dernier lui nettoyait le corps afin qu’il soit prêt à l’absorption de substances qui n’avaient elles rien de légales. Mais cela était de la responsabilité du patient.
Réhabilité, Frank Vandenbroucke peut se remettre en selle après 40 jours d'inactivité alors qu’un autre esprit torturé de la petite reine, Marco Pantani, vient d’être mis hors course d’un Giro qu’il était sur le point de gagner pour la deuxième fois consécutive en raison d’un taux d’hématocrite trop élevé. Désormais, sans le savoir, les destins de ces deux romantiques, espèce en voie de disparition dans un sport où la robotisation semble prendre le dessus, sont liés. Eux qui ne se sont croisés que très rarement dans les pelotons, eux qui ont été adulés et fascinent toujours les amateurs des années après leur mort, eux qui n’ont pas su supporter l’acharnement sur leur personne après avoir été placés un moment sur un piédestal sont en train de mourir à petit feu.
VDB ne le sait évidemment pas. Il planifie déjà sa renaissance en Vénitie, du côté de Vérone où il espère être le Roméo qui séduira cette Juliette irisée qui habite ses fantasmes et berce ses rêves. Après un mois d’août où il avait pour objectif de retrouver ses repères, il se met en évidence du côté de Plouay avant de s’envoler sur les routes espagnoles afin de parfaire sa condition en vue du Mondial. Il ne le sait pas encore, mais ces trois semaines dans la péninsule ibérique allaient avoir un impact non négligeable sur sa vie.
« Cette Vuelta a été le seul moment de ma carrière où un autre coureur m’a fait perdre l’envie de monter sur mon vélo. Je parle de Frank Vandenbroucke. Il revenait à l’hôtel aux petites heures, avec une fille, peut-être même saoul, et ensuite il nous tuait tous sur la route le lendemain. Tu sais, tu t’entraînes dur, tu passes un mois sans sexe avant un grand tour, et puis quand tu vois ça, tu te demandes ce que tu fais là. » Les mots sont de Nicola Miceli, coureur de la Liquigas en 1999, quand VDB éclabousse la Vuelta de sa classe insolente. Et la fille dont il parle, c’est Sarah Pinacci.
Frank rencontre Sarah quelques mètres après une arrivée d’étape. Une dizaine de secondes après avoir coupé la ligne en troisième position, battu par Ullrich et Olano dans un sprint de costauds qu’il ne devait pas perdre au terme d’une étape de montagne brillamment menée, les yeux de VDB se posent sur la belle Italienne. « J’ai vu un ange à droite de la route. C’est la première fois que je voyais qui allait être la femme de ma vie. » Une hôtesse Saeco qui distribue du café tous les matins avant l’étape. Jamais Vandenbroucke n’aura autant aimé le café.
Venu sur la Vuelta pour préparer les Championnats du Monde, avec un abandon programmé avec Bernard Sainz au bout de dix jours de course, Frank laisse l’amour envahir ses jambes déjà de retour sur le chemin de la grande forme. Vandenbroucke prolonge le plaisir espagnol, les rencontres fugaces avec la froide Sarah qui ne lui accorde aucune faveur jusqu’à un soir à Valence, autour d’un repas et de quelques verres de vin. Légèrement ivre, VDB promet à l’Italienne les fleurs de la victoire du lendemain, à Teruel : « Demain, je gagne pour toi. » Pari tenu.
Le Bimbo de Ploegsteert se glisse dans une échappée royale. Les mains en bas du guidon, il semble en promenade quand ses compagnons de route sont en souffrance. Seul Odriozola résiste à son attaque à 70 kilomètres du but. Le lieutenant de la Banesto ne quitte pas la roue de VDB. La voiture de la puissante formation espagnole se porte à la hauteur du Belge. « Si tu donnes autant, tu peux gagner. » Frank fait mine de réfléchir, mais pour lui tout est déjà clair. Dans le col suivant, il laisse Odriozola prendre le vent et fait tourner les pédales de plus en plus vite. Vandenbroucke semble planer. L’aisance est telle qu’il paraît pédaler dans le vide. Mais derrière, l’Espagnol agonise. La voiture Banesto appuie sur l’accélérateur : « Hooo Vandenbroucke, calme ! Et là, je les regarde et je leur dis : si tu me donnes la somme que tu as dit, il peut faire deuxième. Sinon je le lâche. Ils ont accepté. » Odriozola fait mine de tenter sa chance dans le dernier faux-plat, mais les jambes n’y sont plus. VDB s’impose en surclassement, et saute du podium les fleurs à la main pour les offrir à Sarah.
C’est le début d’une semaine folle. Vandenbroucke n’écoute plus les conseils de Sainz et fait la course tous les jours jusqu’à Madrid. Le Belge est un OVNI. Son coup de pédale est extraterrestre. On croirait voir un coureur se promener sur home-trainer s’il n’y avait la concurrence qui tire la langue dans sa roue. Au sommet de l’Alto de Abantos, VDB ridiculise El Chava Jimenez, meilleur grimpeur espagnol et premier roi du redoutable Angliru (où Frank en roue libre avait fait 17e) une semaine plus tôt, sous la flamme rouge pour échouer quelques secondes derrière le fuyard Laiseka. Mais le soir, à l’hôtel, c’est le drame. Sarah n’est pas là. La Saeco loge à des kilomètres de là. Frank ne jure plus que par les yeux de l’Italienne. Il veut la voir.
Deloeil tente de s’opposer à la folie de son leader, mais rien n’y fait. Son Belge ira finalement voir Sarah, avec un masseur comme toute compagnie sur le trajet. Noyé dans le regard de sa belle, il lui promet un nouveau bouquet en haut de la côte pavée d’Avila. Au terme d’une redoutable étape de montagne. Parole amoureuse d’un coureur en lévitation qui rejoint son hôtel à trois heures du matin. Mission impossible. Sauf que ce Vandenbroucke-là aurait fait passer le meilleur Tom Cruise pour un agent en papier mâché.
« Si je gagne, tu viens dormir avec moi, c’était le deal. Et elle a accepté. Je pense qu’elle ne me croyait pas capable de faire le coup deux fois. » Dès le début de l’étape, VDB fait rouler Lelli, son dernier équipier, à un rythme infernal. Jusqu’au pied du dernier grand col. Et puis, il prend les choses en mains. Les pentes sont avalées à un rythme infernal. Les mains délicatement posées en bas du guidon, Frank caresse les pédales avec une sublime légèreté. Ullrich a le masque, Tonkov n’ose plus regarder les pourcentages. Même El Chava Jimenez semble époumoné, pendant qu’Heras paraît chercher une partie de son corps qui ne le fait pas souffrir. Tous ces coureurs sont montés ou monteront sur le podium d’un Grand Tour, et ils sont à l’agonie.
Piepoli attaque, Vandenbroucke met tout à droite et le groupe des ténors disparait derrière lui. Lancé dans la descente, à une quinzaine de kilomètres de l’arrivée, il interpelle Deloeil à l’oreillette d’une phrase exceptionnelle de douce arrogance : « Alain, tu veux que je gagne comment ? » Incité à la prudence vu la fin d’étape difficile, VDB attend ses rivaux pour se présenter avec eux au pied de la côte pavée d’Avila. « De toute façon, que j’attende ou pas, je vais quand même gagner. »
Zarrabeitia rêve aussi de victoire. Le lieutenant de la ONCE flingue dès le pied. Vandenbroucke met un peu de temps pour revenir. Parce qu’il est sur le grand plateau. Arrivé à hauteur de l’Espagnol, il se dresse sur les pédales. Le buste est rectiligne, les cheveux toujours impeccables, les pédales effleurées avec une exquise violence. Si l’image n’était pas immortalisée par les caméras, on ne pourrait pas croire celui qui la raconterait. Zarrabeitia semble à l’arrêt. Vandenbroucke ne roule plus, il vole. En une centaine de mètres, l’Espagnol a disparu de l’image. Il sera le premier des humains à l’arrivée. Frank est au sommet de son art. Ullrich gagne la Vuelta, mais VDB est le meilleur coureur du monde. Le bouquet qu’il offre à une Sarah médusée sera pourtant le dernier de sa carrière.
Des douze coureurs appelés par José De Cauwer, Vandenbroucke est le dernier à poser ses valises à Vérone. Les deux semaines précédentes, Frank les a passées à Rome, dans l’appartement de Lelli mais surtout dans les bras de Sarah : « Il ne s’est presque jamais entraîné » raconte l’Italien. « Il passait tout son temps dans la chambre avec elle. Tous les matins je frappais à la porte. Une fois, il a ouvert et m’a répondu : je n’ai pas besoin de m’entraîner, je suis quand même le plus fort. »
Pourtant, la Belgique a du talent à revendre. Avec Van Petegem, Tchmil et Wauters ajoutés à VDB, quatre des douze élus ont gagné une classique en 1999. Sans compter le revenant Johan Museeuw. La veille de la course, dans une chambre d’hôtel trop exigüe pour contenir treize hommes, De Cauwer réunit pourtant les 24 yeux autour des siens pour mettre au point une stratégie. La discussion ne dure pas, tant le rapport de forces est limpide. Tous rouleront pour Vandenbroucke. « Ce qu’il a montré en Espagne, aucun coureur de ma génération n’a pu le réaliser » justifie Museeuw.
Finalement, tout ça semble presque superflu. Le VDB de la Vuelta n’avait besoin d’aucun équipier. Ici, il peut compter sur les meilleurs coureurs de classiques au monde en guise de gregarii, et sur la précieuse alliance tissée avec Ullrich sur les routes espagnoles. Frank avait aidé l’Allemand contre la furia ibère en dernière semaine, et il attend le retour d’ascenseur. Le plan est limpide : VDB veut gagner avec style. « À la James Dean », comme il aimait définir ses succès : « Je voulais mettre l’attaque décisive à deux tours de l’arrivée, et faire le dernier tour tout seul. » Nul doute que les instances de l’UCI se renseignent déjà sur le tour de taille du Belge, pour lui offrir un arc-en-ciel à sa mesure sur le podium.
Le circuit de Vérone n’est pas terriblement dur, mais la côte de Torricelle doit suffire à Frank pour faire la différence. De toute façon, ce Vandenbroucke-là aurait semé Armstrong et Pantani sur un pont d’autoroute. Tout est prêt pour le récital belge. Le vélo de VDB est « préparé comme une Formule 1 ». Il Bimbo d’Oro ne peut pas perdre. Et pourtant…
Un fracas dans le peloton. Le bruit des pédales qui tournent indéfiniment sur le bitume. Une chute. Vandenbroucke et sa poisse légendaire n’y échappent pas. L’enfant de Ploegsteert se relève et fait la jonction. Mais ses poignets gonflent avec les tours qui passent. VDB ne le sait pas encore, mais ses deux poignets sont fracturés. Pourtant, au pied de la dernière ascension du Torricelle, il est toujours là. Rassurés par Frank, Museeuw et Van Petegem ont grillé leurs cartouches pour le déposer à l’avant.
Vandenbroucke attaque. Mais pas en danseuse, non. Ses poignets ne le supporteraient pas. Ullrich joue son rôle à merveille et contrôle les poursuivants, mais le besogneux Casagrande ramène. Le titre se jouera à neuf. Privé de sa grâce et de sa puissance faute de pouvoir se dresser sur les pédales, VDB sait déjà qu’il ne gagnera pas. « J’étais vraiment un handicapé qui courait avec des coureurs normaux. Alors oui, quand Freire a attaqué, je l’ai regardé partir. Je me suis aussi demandé qui c’était ce mec. » À l’époque, Freire n’est pas encore Freire. L’Espagnol ne doit sa sélection qu’aux forfaits d’Olano, Escartin et Heras. La première ligne de son palmarès s’écrit aux couleurs de l’arc-en-ciel. Le rêve de Vandenbroucke s’envole en même temps que l’anonyme ibère surgit de la brume véronaise.
Ce jour-là, Vandenbroucke n’a pas perdu qu’une course. C’était la fin de deux mois d’insouciance. Le retour à la réalité après une Vuelta gigantesque et un Mondial honorable vu les circonstances. C’était déjà la fin de Frank Vandenbroucke. Parce qu’avec lui, il n’y a jamais eu de juste milieu. C’était tout ou rien. L’arc-en-ciel a disparu en même temps que le soleil a quitté les jambes de l’enfant de Ploegsteert. La suite de sa carrière n’a été qu’une averse. Violente et interminable. Frank est mort au Sénégal en 2009, mais VDB s’était éteint à Vérone dix ans plus tôt. Lui qui a tant rêvé de l'arc-en-ciel n'en aura eu que la malédiction.
Le jour où il tentera de mettre fin à ses jours à coups d’Actractapid, sa mère le découvre seul, apaisé mais à un souffle de perdre la vie. Allongé sur son lit, en tenue de cycliste évidemment. Les seuls vêtements dans lesquels il a jamais semblé heureux. Sur ses épaules, il portait un maillot blanc, tranché par les couleurs de l’arc-en-ciel. Comme d'habitude, Frank avait décidé où, mais aussi comment il allait en finir. VDB avait choisi de partir en champion du monde.
Fabien Chaliaud et Guillaume Gautier