Osaka, après sa victoire: "Je vais toujours garder l’image de la Serena que j’adore, pas le reste"
- Publié le 09-09-2018 à 23h16
- Mis à jour le 10-09-2018 à 09h20
La Japonaise a éclaboussé la finale de son talent et de sa classe malgré les circonstances. À 20 ans, Naomi Osaka est entrée dans l’histoire de manière fracassante. Pour sa première finale de Grand Chelem, elle a affiché une force mentale exceptionnelle pour dominer son idole Serena Williams et pour ne pas s’effondrer sous les huées du public.
"Je n’ai rien vu et rien entendu de ce qu’il se passait avec Serena. Le public faisait trop de bruit de toute manière, et puis j’étais tellement concentrée. Je vais toujours garder l’image de la Serena que j’adore, pas le reste."
Introvertie hors du court, Osaka affiche une confiance rare raquette en main. Plus le match est important, plus le stade est grand, mieux elle joue. C’était elle la patronne samedi : des services de plomb dans les moments chauds, des coups droits qui partent à une vitesse monstrueuse, une cadence intenable à l’échange et des nerfs d’acier. "Tout cela me semble encore irréel… Il y avait tellement d’émotions à la fin que je n’arrive pas à mettre les mots sur ce que je ressens et pense de tout ça. Tout ce que je veux c’est garder cette joie et prendre les choses calmement sans trop me projeter."
Il fallait la voir sous le choc après la victoire, il fallait la voir pleurer à chaudes larmes sur sa chaise puis dans les bras de sa maman. Naomi Osaka a réussi là où Kei Nishikori a échoué en devenant la première à remporter un Majeur pour le Japon. Désormais 7e mondiale, la voilà le nouveau visage du sport japonais pour une petite révolution culturelle dans un pays où sa mère avait été reniée par sa famille en décidant de faire sa vie avec un homme noir.
À Haïti ils fêteront évidemment aussi le triomphe d’Osaka, mais c’est au tournoi de Tokyo la semaine prochaine qu’on devrait voir la Naomi-Mania. Si elle assume son nouveau statut et continue de gagner, cette gamine a de quoi tout changer. "J’espère bien gagner là-bas", a-t-elle dit de sa voix si discrète en évoquant Tokyo.
Souvent pétrifiée par ce monde du tennis, Osaka est sauvée par son ambition. "J’ai toujours tendance à être négative avec moi-même, mais on ne peut pas gagner un titre du Grand Chelem si on n’a pas quand même confiance en soi. Le principal est de m’amuser, de me répéter que le tennis est un jeu car nous avons trop tendance à l’oublier."
Difficile de cerner celle qui pourrait devenir la nouvelle patronne du tennis mondial si la pression ne la dévore pas. Mais voilà qui résume le personnage : Osaka s’est excusée sur le podium d’avoir gagné et quand plus tard on lui a demandé pourquoi, elle a pleuré. "Serena voulait tant ce 24e titre... Sur le court, je ne suis plus la fan de Serena mais quand on s’est salué au filet à la fin je me sentais de nouveau comme une enfant face à elle."
Personne d’autre n’aurait pleuré, après ce triomphe, de tristesse pour sa vaincue. Encore moins quand la vaincue a déjà tout gagné et encore moins quand elle a failli gâcher la fête. Mais Osaka a une innocence sincère qui détonne. Alors elle a pleuré de joie pour elle et sa famille, mais aussi de tristesse pour son idole déchue. Unique.