Clément Geens, N°1 belge de Padel : “Une saison me coûte 30.000 euros”
Notre n°1 belge Clément Geens décrypte les enjeux d’un joueur pro sur le circuit international : réservation des vols, gestion des programmations, des dépenses et des revenus. “Je fais tout et tout seul.”
- Publié le 11-04-2024 à 15h19
La Belgique et le circuit professionnel de padel n’entretiennent pas une longue histoire. Le boom récent du padel a suscité des vocations, notamment chez d’anciens joueurs pros de tennis. Clément Geens, ancien meilleur 245e joueur à l’ATP, a franchi le cap du padel il y a quatre ans. “Je n’avais pas réellement d’ambition”, commence celui qui est actuellement le 123e meilleur joueur de padel du monde. “J’ai pris du plaisir à progresser et à voyager.”
Il sera évidemment présent dès le 20 avril à la Gare Maritime de Tours et Taxis à l’occasion de la troisième édition du Lotto Brussels Premier Padel. L’actuel directeur sportif de la cellule padel de la fédération Tennis Padel Wallonie-Bruxelles (anciennement appelé AFTPadel), n’a que 28 ans. Durant toute la saison, il arpente les plus beaux tournois du monde. Entre débrouilles et bons plans, il rivalise d’ingéniosité pour vivre de sa nouvelle passion.
La saison de padel, de mi-février à décembre : “Je fais 25 à 30 tournois”
La saison internationale démarre à la mi-février pour s’achever au début du mois de décembre. Le circuit comporte 24 gros tournois répartis en trois catégories : quatre Majors comme les Grands Chelems en tennis, huit P1 et douze P2 dont le Lotto Brussels Premier Padel. Le top 100 se retrouve sur les deux premiers, mais seulement la moitié dispute les P2. Autant dire que Bruxelles a frappé fort en attirant tous les meilleurs binômes du monde.
De février à décembre, les joueurs se rendent tour à tour en Arabie saoudite, au Qatar, en Amérique du Sud, en Europe avant de finir en Amérique du Sud.
Les joueurs doivent disputer au moins 22 tournois car le classement est calculé sur la base des 22 meilleurs résultats. “Moi, je joue entre 25 et 30 tournois par an, précise Clément Geens. J’en suis à deux à trois par mois. En décembre, je prends mes vacances. En janvier, je travaille le foncier en Belgique car j’ai mon autre métier. Durant la saison, je ne joue pas plus que trois tournois à la suite. En tout, je passe environ 120 jours par an à l’étranger.”
Une semaine type : “Je reviens souvent à la maison”
Clément Geens vit des semaines différentes en fonction qu’il joue un Premier Padel (comme un ATP en tennis) ou un FIP (Challenger et Futures). “Si je joue un Premier Padel, j’arrive sur place le jeudi ou le vendredi pour jouer en qualif le samedi. Les qualifs se jouent le week-end. Parfois, je joue le premier tour le lundi ou le mardi. Puis, je rentre à la maison. Sur un FIP, je pars du mercredi au dimanche si je joue la finale. Ensuite, je rentre chez moi.”
L’organisation pratique : “Je gère tout et tout seul”
L’organisation d’une saison que ce soit sur un plan sportif ou pragmatique demande du temps et de l’énergie. Clément Geens gère tout, tout seul. “Je réserve tout, tout seul de A à Z. Je cherche mon partenaire et les tournois où nous pouvons entrer. Ensuite, je planifie mes entraînements. Avec le tennis, j’ai eu l’habitude de réserver mes vols et mes logements. Je connais les bonnes applications.” Cette semaine, il s’est incliné lundi à Nice. “Le jour même, le vol retour coûtait 650 euros. J’ai attendu le lendemain pour revenir sur un vol à 150 euros. J’essaye toujours d’être économe, mais je n’en fais pas une obsession. Un écart de 100 euros par tournoi se chiffre quand on en dispute 26.”
Pour se nourrir, il profite des buffets mis à disposition par les tournois. Pour le logement, il bénéficie d’un hôtel payé par les tournois. “Je suis logé gratuitement entre la nuit qui précède mon match et celle qui suit ma défaite.”
Les revenus : “En 2023, le prize-money m’a rapporté moins de 8 000 euros”
Un joueur de padel peut gagner de l’argent grâce à ses prize-money, ses sponsors, sa participation à des interclubs ou à des exhibitions et son envie de donner des cours. “En 2023, j’ai touché en prize-money la somme de 7 000 à 8 000 euros. Sortir des qualifs d’un Premier Padel rapporte 1 300 euros. Une demi-finale d’un FIP vaut 250 à 300 euros. Sur un Major, une star peut se faire 60 000 euros.”
Viennent ensuite les sponsors. “Kuikma est mon sponsor principal qui me fournit mes raquettes et me donne de l’argent. J’ai aussi Padel Galis, Eleven Padel Nivelles, Roch4padel, Padel Events Academy, 6d Sport nutrition, TM grupo inmobiliario, Spar Marloie, Padel Wallonie-Bruxelles et Monokrom. Je joue les interclubs avec Ottignies, mais je ne suis pas payé. Pour les exhibitions, j’en fais pour aider la fédération, mais sans toucher d’argent. Je donne rarement des cours car je ne suis pas souvent là. Un professeur touche environ 70 euros de l’heure.”
Les dépenses : “Je peux vivre du padel”
Clément Geens vit de sa passion. En d’autres termes, il parvient à gagner plus d’argent qu’il ne doit en dépenser. “Oui, mais je ne peux pas non plus mettre de côté pour le reste de ma vie. J’ai bien besoin de mon boulot à la fédération. Sinon, ma situation serait compliquée. Une saison me coûte 25 000 à 30 000 euros. Je m’entraîne peu et en Belgique. Je voyage toujours seul. Mes frais de voyage avoisinent les 20 000 euros. Un joueur du top mondial dépensera plutôt 50 000 à 60 000 euros. J’ai aussi la chance d’avoir un préparateur physique détaché par la fédération.”
Il est honnête sur la question. “Je ne suis pas à plaindre. Je peux vivre de ma passion. On voit qu’en trois ans, la situation a beaucoup évolué. Les meilleurs comme Tapia ou Coello reçoivent plusieurs millions de leurs sponsors. Un joueur du top 60 vit confortablement. En dehors du top 130, c’est vraiment la galère”, conclut celui qui estime qu’il peut effacer les 23 places qui le séparent du top 100.