Futur stade national: "Uccle est la capitale mondiale du hockey"
Le bourgmestre ucclois planche avec les clubs pour offrir à la Belgique un grand stade national.
- Publié le 12-04-2018 à 10h25
- Mis à jour le 12-04-2018 à 10h33
Le bourgmestre ucclois planche avec les clubs pour offrir à la Belgique un grand stade national. Parmi les nombreuses pistes explorées pour ériger un stade national ou régional, une commune revenait sans cesse au milieu de la table des négociations : Uccle. Avec ses mastodontes du Léopold, du Racing, d’Uccle Sport et du Wellington et ses autres matricules comme le Zaid, le Langeveld, le Vivier d’Oie et le Sukkelweg, la commune d’Uccle accueille 4.700 membres, soit près de 15 % des pratiquants à la LFH !
Le bourgmestre Boris Dilliès, ancien échevin des Sports durant 6 ans, n’est pas un hockeyeur même s’il a un peu tâté du stick. Il est plutôt coureur. Malgré cela, il a très vite saisi l’importance politique du hockey. "Uccle est la capitale mondiale du hockey", n’hésite-t-il pas à affirmer. "Quand le hockey belge gagne, Uccle n’est jamais loin."
Grâce au travail effectué par ses prédécesseurs, la commune bruxelloise dispose déjà d’une dizaine de centres sportifs pour une superficie de 2.200 hectares. "Dans chaque quartier, le sport est présent", confie le bourgmestre en rappelant qu’un club de frisbee ucclois, les Mooncatchers, sont champions d’Europe.
Boris Dilliès adapte la citation de Victor Hugo en rappelant que "lorsqu’on ouvre un club sportif, on ferme une prison". Il est parti du constat que les grands clubs de hockey ne pouvaient répondre à toutes les demandes d’inscription. Par conséquent, il a rencontré des émissaires du Léo, du Racing, d’Uccle Sport et du Wellington afin de plancher sur un projet qui réunissait deux objectifs : la construction d’un centre d’entraînement pour les équipes nationales de jeunes (Be Gold) et d’un stade national pour effacer un manque en Belgique.
La réalisation de ce projet aura des retombées à plus d’un titre. La commune se place comme capitale d’un sport en vogue. L’ARBH et la LFH tiennent enfin un stade de plus de 5.000 places. Les clubs ucclois reçoivent une possibilité de louer un terrain, qui ne leur coûte pas un centime, afin de réduire les listes d’attente au secrétariat. Le win-win est triplement évident. Pourtant, ce projet peine à sortir des cartons.
"La commune et les clubs d’Uccle doivent d’abord trouver un accord", raconte Marc Coudron. Dominique Coulon, secrétaire général de la ligue francophone, attend le premier signal positif d’une ville pour donner le feu vert aux travaux. À Uccle ou ailleurs.
Léo et Uccle Sport: le bras de fer
Trois sites ont été retenus et divisent les intervenants. Le Léo est contre le reste du monde.
Les 82.000 habitants d’Uccle suivront de près ce dossier. Personne ne veut voir un grand stade se dresser au fond de son jardin. Les nuisances visuelles et sonores, sans parler des soucis de mobilité, seront inévitables. Lors des premières réunions entre le bourgmestre et les 4 clubs ucclois, trois sites ont émergé : le stade de foot Carine Gol-Lescot, le site Pasteur et l’Hippodrome de Boitsfort.
Le bourgmestre se refuse à tout commentaire sur ces lieux. L’ARBH et la LFH apprécient le stade qui se situe à proximité du ring et qui offre une possibilité de parking sans omettre l’économie sur les coûts. Le président d’Uccle Sport, Nicolas Dassonville, dont le club est situé juste à côté, pousse également dans ce sens en rappelant que le stade offre déjà 3.000 places fixes et un club house vitré.
Bernard Lescot, administrateur du Léopold, ne partage pas cet avis et rappelle que le stade est encore utilisé par 600 jeunes footballeurs, un club de frisbee et un centre canin.
"Je ne m’oppose à rien", rappelle le Léoman. Notre volonté d’aboutir est immense. Si cette option est la seule solution, le Léo plongera dedans. Avec nos deux terrains, nous saturons. Construire un 3e terrain au Léo est impensable."
Uccle Sport parle de 450 jeunes footballeurs et non 600.
Bernard Lescot amène une autre piste : le site Pasteur qui borde la frontière avec Linkebeek du côté de l’institut Bogaert. Nicolas Dassonville s’étonne qu’on mette sur la table un site classé Natura 2000 qui interdit "un éclairage de plus de 100 lumens alors que les normes FIH en demandent 1500."
Lescot a étudié le dossier. "Il appartient au ministère de l’Intérieur. Sur ses 50 hectares, une partie seulement est classée, le haras. Sur les deux buildings, un seul est occupé en partie par des chercheurs."
Thierry Le Saux, président du Racing, penche vers la solution la plus rapide, c’est-à-dire vers le stade de foot : "Nous étions tous d’accord avant qu’un des négociateurs ne change d’avis ! Ne soyons pas aussi ridicules que le foot en échouant dans nos discussions autour d’un stade national. Le dossier est au point mort alors que nous avions un endroit où il suffisait de réaménager une tribune et l’éclairage. Nous aurions même pu être prêts pour la Pro League ." Le Saux explime sa lassitude de voir tous les jeunes du Be Gold "se taper Anvers pour les entraînements".
La piste menant à l’Hippodrome de Boitsfort plaît à tout le monde, mais elle est impensable en termes d’accessibilité, de parking et de contraintes liées au lieu.
Le Wellington, qui est dans une phase d’investissement dans ses installations, suit de près les négociations sans les freiner. "Nous sommes évidemment ravis par cette idée", rappelle Yves de Sivers, le secrétaire général du Well.
Dans les quatre ans maximum
À Uccle ou ailleurs, Marc Coudron espère que 2020 est possible.
Dessiner un calendrier actuellement relève de l’utopie. La lenteur de l’appareil politique rend incertain un tel exercice. Marc Coudron rappelle qu’on en a besoin au plus vite car la Pro League n’attend pas.
"Pour 2019, nous aurons d’autres alternatives, mais j’espère qu’en 2020, la Belgique disposera d’un ou deux endroits pour accueillir ces matches."
Le projet ucclois rame. Le bourgmestre aimerait profiter de ce dossier pour dynamiser sa campagne électorale. Les clubs souhaiteraient que les négociations avancent au plus vite. Pourtant, sur les six derniers mois, rien n’a bougé de manière significative.
En fonction du choix du site, le calendrier variera aussi. La réaffectation du stade de foot offre l’avantage de partir d’installations préexistantes. Il suffirait de moderniser les tribunes, de poser un terrain mouillé et de revoir l’éclairage désuet.
En revanche, le projet Pasteur impose de repartir de zéro. Bernard Lescot pense que "rien ne sera fait avant les élections". Si tout se passe bien, le stade national ucclois verra le jour en 2022.
Amstelveen, l’exemple à suivre
Marc Coudron rêve de voir en Belgique le même stade que celui qui a accueilli l’Euro.
La Pro League, c’est demain. Dès 2019, la Belgique disputera au minimum 16 matches internationaux par an, dont 8 à domicile, sans oublier les finales de playoffs et d’éventuels championnats d’Europe. Si le niveau de performance de nos équipes incite à l’optimisme, l’absence d’infrastructures dignes de ce nom inquiète de plus en plus.
Les trois entités (ARBH, LFH et VHL) travaillent de concert pour débusquer les différents endroits capables de sortir de terre un stade national d’une capacité minimale de 5.000 places. "La terminologie est sensible", prévient Dominique Coulon, le secrétaire général de la Ligue francophone de Hockey. "L’expérience désastreuse du football nous amène à évoquer plutôt la création de stades qui pourraient accueillir les équipes nationales. Aujourd’hui, seulement quelques clubs peuvent recevoir plusieurs centaines de spectateurs."
Cette absence de stade impose des dépenses douloureuses à l’ARBH lors de chaque manifestation sportive. La construction de tribunes démontables alourdit de 30.000 à 40.000 euros le budget d’un event.
Marc Coudron, le président de l’ARBH, est entré dans l’immense majorité des stades de hockey à travers le monde. En tant que joueur puis président, il a effectué le tour du monde à plusieurs reprises avec son stick. Il a ramené en Belgique quelques plans d’architecte.
"Je rêve de voir un stade semblable au Wagener Stadium d’Amstelveen", lance Marc Coudron en parlant du magnifique stade qui avait accueilli les championnats d’Europe l’été dernier. Il évoque aussi la fonctionnalité du Lee Valley à Londres qui offre une tribune fixe qui jouxte un grand hall omnisports.
Dans le Nord, Wilrijk a pris de l’avance grâce au soutien financier de la Ville d’Anvers. Le Sud a cette volonté de gommer cette lacune au niveau de ses infrastructures. "Nous avons analysé des lieux susceptibles d’accueillir ce projet", narre Dominique Coulon avant de rappeler quelques spécificités. "L’accès du site ainsi que le parking constituent le point de départ. Ensuite, nous recherchons un lieu qui vive toute l’année."
Coudron cite quelques pistes qui ont atterri sur la table de la LFH : Uccle, Woluwé, Evere, Waterloo, Auderghem, Neo, Wavre ou encore Namur. "Nous devons aussi analyser l’endroit qui nuira le moins possible aux riverains."
Les clubs ucclois ne payeront pas un euro
Les subsides publics financent 75 % alors que Belfius se charge du reste. Coût total : entre 3 et 4 millions.
Si l’argent est le nerf de la guerre, ce projet ne connaît aucun problème de financement. Le coût total des travaux oscille entre 3 et 4 millions d’euros. Des subsides régionaux engloutiront 75 % de ces dépenses.
La commune pourrait intervenir de manière très légère. Le fédéral, aussi, pourrait donner un coup d’accélérateur en élargissant le tax shelter au monde sportif.
"On a vu les bienfaits du tax shelter dans les projets culturels. Il faut que les infrastructures belges en profitent", rappelle Marc Coudron en appelant du pied le monde politique.
La somme n’effraie pas la LFH. "Nous sommes prêts à investir", rappelle Dominique Coulon qui est en train d’élaborer un business plan. Marc Coudron n’a "pas peur" en entendant ces chiffres.
Belfius , main sponsor de l’ARBH, est partie prenante pour prendre à son compte les 25 % restants, soit entre 750.000 et un million.
Par conséquent, les clubs ucclois ne mettront pas la main au portefeuille, sauf pour louer le terrain, car ils ne seront ni propriétaires ni gestionnaires. Les 4 matricules se répartiront donc les cases horaires laissées libres par le Be Gold.
L’ARBH veut un stade de 10.000 places
Marc Coudron n’a pas oublié que le replay de la finale olympique entre la Belgique et l’Argentine avait réuni plus de 9.000 personnes dans des tribunes éphémères à Uccle Sport. Il estime que les venues des Néerlandais, des Allemands, des Anglais ou des Australiens draineront du monde. "Je défendrai un stade de 6.000 à 10.000 places."
Bernard Lescot (Léopold) rappelle la tristesse de jouer devant des tribunes vides. Pour rappel, le cahier des charges de la Pro League impose au moins 5.000 places.