Jérémy Doku et la discussion qui change tout : comment Pep Guardiola en a fait un parfait joker
En sortant du banc contre le Real puis Chelsea, le Diable a fait très mal. Alors qu’il peinait jusqu’alors quand il n’était pas titulaire. Analyse.
- Publié le 25-04-2024 à 10h06
- Mis à jour le 25-04-2024 à 11h03
Sans doute ont-ils pensé la même chose. À trois jours d’intervalle, Dani Carvajal et Malo Gusto ont en tout cas connu une fin de match similaire. Après avoir plutôt bien contenu Jack Grealish, le latéral du Real Madrid et celui de Chelsea ont vu débouler dans leur zone Jérémy Doku. Pour passer un très mauvais moment. Si l’issue a été différente pour le Madrilène et le Londonien, les deux entrées en jeu du Diable ont laissé l’impression visuelle du joker parfait. Ce que les chiffres confirment.
En quart de finale retour de Ligue des champions, en l’espace de 56 minutes sur le terrain, Doku a affolé les compteurs : personne n’a plus tenté et réussi de dribbles (11 sur 14), ni provoqué de fautes (trois) que lui. À Wembley, 34 minutes lui ont suffi en demi-finale de Cup pour être encore une fois le joueur avec le plus de dribbles réussis (8 sur 11) et le plus de duels offensifs gagnés sur le terrain (8).
Le contraste avec ses entrées sans relief lors des sommets contre Liverpool (1-1, 21 minutes) et Arsenal (0-0, 29 minutes) a été saisissant pour un joueur qui, lors de ses neuf dernières apparitions, n’a connu que trois titularisations en Cup contre Newcastle et en championnat face à Aston Villa et Luton, deux rencontres où il s’est montré décisif. Ce qui ne lui était plus arrivé en Premier League depuis son festival contre Bournemouth le 4 novembre dernier, lui qui était à l’infirmerie tout le mois de décembre. Et ce qui commençait doucement mais sûrement aussi à irriter Pep Guardiola, circonspect devant ce paradoxe.
« Il a été incroyable contre le Real. Il a franchi un cap. Quand il est arrivé, après West Ham, je me disais 'oh mon dieu, quel incroyable joueur', et jusqu’à sa blessure, il a toujours été au top. Mais à chaque fois qu’il sortait du banc, son impact n’était pas bon. Il était bon en titulaire, moins en venant du banc, a expliqué le Catalan après la victoire sur Chelsea. Nous en avons parlé, de l’impact qu’il pouvait avoir quand les joueurs sont plus fatigués et il a cette qualité spéciale en un contre un. Il a changé le match. Comme contre Madrid en créant beaucoup d’occasions. En un contre un, Jérémy est un joueur exceptionnel, près de la surface. Il est jeune et il doit encore progresser sur plusieurs points mais dans le dernier tiers du terrain, il est extrêmement important pour nous.”
On a eu le cas pendant des années chez les Diables avec Dries Mertens"
Cette utilisation justifiée par un rendement moindre depuis son retour de blessure s’inscrit aussi dans une certaine forme de logique. “C’est tout à fait naturel pour un jeune comme Doku qui vient d’arriver, appuie Xavier Chen qui a commenté Manchester City – Real Madrid pour Pickx + Sports. Je pense qu’il y a sans doute une volonté de Guardiola de ne pas le griller en enchaînant après une période où il a été moins décisif. Il lui ôte de la pression parce qu’il n’y a rien à faire : quand il rentre comme cela, il n’a rien à perdre. Et évidemment qu’il a le profil typique du joker pour rentrer 20 ou 30 minutes face à un latéral essoufflé comme Carvajal. Cela a du sens. Mais il doit prétendre à plus la saison prochaine. Même s’il apporte vraiment beaucoup dans ce rôle-là.”
Ce que Mario Innaurato, qui était derrière le micro de DAZN-Eleven lors de City – Chelsea confirme : “Il a des caractéristiques non pas pour rentrer mais pour décider de l’issue d’un match.” Tout en s’interrogeant aussi sur l’acceptation de ce rôle de joker. “Parce que c’est toujours dangereux dans un sens, explique l’ancien préparateur physique des Diables. Les joueurs détestent qu’on leur dise qu’ils rentrent très bien dans un match. Pourquoi ? Parce que cela veut dire qu’ils ne vont pas en commencer beaucoup. C’est toujours un peu cliché. On a eu le cas pendant des années chez les Diables avec Dries Mertens qui était le joueur qui rentrait très bien dans le match pour plusieurs raisons. Et c’est un peu la même chose avec Doku. Ce sont des joueurs très vifs, à grosse personnalité qui ose sur leur premier ballon face à un adversaire un peu fatigué et qui ne se posent pas trop de quetions. Dries, comme Doku, on peut le lancer à n’importe quel moment, il apporte quelque chose. D’autant que Jérémy a cette double accélération. Il a du Eden Hazard en lui. C’est ce qui m’impressionne le plus. Il est à l’arrêt et il part. C’est une bombe. Et face à un adversaire fatigué, cela fait des dégâts. Mais c’est un peu réducteur de dire que Doku est avant tout un très bon remplaçant. Non, il peut aussi être titulaire.”
Il connaîtra encore ce rôle s’il vise des équipes du top"
Ce qui lui arrive donc plus rarement ces derniers temps et pourrait le frustrer. “Comment accepter ce rôle ? questionne Chen. Cela dépend qui tu es, dans quelle équipe tu es et qui est ton entraîneur, reprend Chen. Pour Doku, c’est facile à accepter. On prend ce qu’on te donne. Il a prouvé en début de saison qu’il avait sa place. Après, ce n’est pas quelqu’un qui a un énorme ego et il accepte ce rôle-là parce que de toute façon, jeune ou pas, il y a beaucoup de rotations dans cette équipe et tout le monde, à peu d’exceptions près, est amené à être utilisé de la sorte. Il n’y a aucun problème à l’avoir, surtout en faisant la différence comme lui. Cela donne de la confiance et fait partie de l’apprentissage. Il connaîtra encore ce rôle s’il vise des équipes du top.” Et Dani Carvajal et Malo Gusto ne seront pas les derniers à souffrir face à lui.