Kevin Mirallas et sa saison passée à la Fiorentina : “Mais c’est quoi cela, il n’y a pas de jour de repos dans la semaine ?”
S’il n’est resté qu’un an à Florence, Kevin Mirallas a apprécié son passage en Toscane où il a découvert les cadences italiennes et s’est découvert un visage de leader.
- Publié le 02-05-2024 à 11h56
Il y a naturellement eu Luis Oliveira avec ses 116 matchs et 26 buts entre juillet 1996 et septembre 1999. Il y a eu ensuite la météorite Anthony Vanden Borre qui n’est finalement restée que six mois entre juillet 2007 et janvier 2008 (cinq apparitions). Et il y a eu Kevin Mirallas. Le Liégeois est le dernier Belge à avoir porté les couleurs de la Fiorentina. 30 apparitions pour deux réalisations lors de la saison 2018/19. Modestes, ces chiffres ne reflètent que partiellement l’impact de ce passage dans la carrière du joueur. La preuve.
Kevin, revenons à cet été 2018. À l’époque, vous sortez d’un prêt de six mois à l’Olympiacos et vous reprenez d’abord à Everton où vous étiez depuis 2012.
”Oui. Déjà, il faut savoir que la Fiorentina s’était déjà intéressée à moi avant que j’aille à l’Olympiacos. Mais j’avais déjà donné mon accord. Arrive la fin de saison 2017/18. Je suis parti en vacances, il y avait encore des touches avec la Fiorentina. Le nouveau coach d’Everton Marcos Silva m’a dit : ‘Écoute, tu vas faire la préparation avec nous et en fonction, on verra bien’. Cela ne changeait rien pour moi car je m’étais fixé de faire la présaison avec Everton avant de prendre une décision quant à mon futur : soit j’avais fait mon temps à Everton, soit je continuais car j’avais encore deux ans de contrat. La présaison s’est très bien passée, j’ai tout joué. Et une semaine avant le début du championnat, le coach m’a dit que je n’allais pas partir titulaire, que je n’étais pas certain d’avoir ma place. Ce qui n’était pas un problème pour moi. Sauf que le lendemain, il m’a reconvoqué pour me dire que cela allait être compliqué vu mon salaire trop conséquent, qu’il valait mieux que je parte en prêt. Et de là, cela s’est activé avec la Fiorentina.”
Pourquoi ce choix ?
”À l’époque, il y avait deux idées qui me trottaient en tête : retourner à l’Olympiacos et non pas revenir mais venir en Belgique. Mais cela n’a pas été possible car pour la Grèce, Everton voulait 12 millions et en Belgique, personne n’allait payer 12 millions. La Fiorentina a proposé ce prêt avec option d’achat à 8 millions d’euros. Je suis parti là-bas aussi avec beaucoup d’envie parce que ma femme est d’origine italienne, toute sa famille est en Sardaigne. Le cadre de vie, habiter à Florence, jouer dans un club comme la Fiorentina, dans un championnat que venait de rejoindre Ronaldo et qui voulait redevenir dominant comme dans les années 90 : il y avait beaucoup plus de points positifs au final et presque pas de négatifs.”
Pioli nous a engueulés parce qu’on parlait français.
Vous arrivez dans une équipe qui, quelques mois avant, a perdu son capitaine Davide Astori, décédé subitement.
”Oui. On parlait encore beaucoup de lui. Même moi qui ne l’ai pas connu, j’avais l’impression qu’il était toujours là au quotidien, que ce soit à l’entraînement ou en match. On était pris par la situation, ce n’était pas toujours simple. Mais cela était aussi une force pour ceux qui l’ont connu. Les discours d’avant match étaient centrés sur lui. Il fallait faire avec, ce sont les choses de la vie. Mais cela a été super facile d’arriver dans ce vestiaire. Parler italien, espagnol m’a aidé. Et il y avait beaucoup de francophones. Je me souviens d’ailleurs que Pioli nous a engueulés parce qu’on parlait français (rires). Mais avec autant de francophones dans le vestiaire, il savait que cela pouvait arriver. Et d’ailleurs, je l’ai encore tous les mois et demi, deux mois au téléphone. J’ai aussi gardé contact avec Biraghi, qui est capitaine maintenant, et d’autres qui sont partis, comme Simeone, Chiesa. Même si je ne suis resté qu’une année, cela a été une année exceptionnelle.”
Pourquoi c’est moi qui dois être l’exemple ?
Vous étiez aussi le doyen du groupe après le départ de Cyril Théréau durant l’hiver.
”Oui. Cela a été nouveau. Quand tu as 31 ans, tu n’es pas le plus vieux normalement comme lors de ma dernière année à Chypre où j’en avais 34 et où c’était différent. À 31 ans, je ne me rendais pas forcément compte. Pourquoi c’est moi qui dois être l’exemple ? C’était un peu spécial et difficile au début. Mais j’ai compris au fur et à mesure de la saison les demandes du coach et je me suis libéré aussi en dehors du terrain. Cela m’a beaucoup aidé.”
L’Italie est souvent assimilée à son intense préparation physique. En signant début août seulement, vous y avez échappé ?
”(Sourire). Je suis arrivé deux semaines avant le début du championnat. Les trois, quatre premiers jours, je trouvais que c’était plus simple, c’était même un peu lent par rapport à l’équipe et ce que j’avais connu en Angleterre. Donc je me suis dit que cela n’allait pas poser de problème. Sauf que la semaine avant le premier match de championnat, on m’envoie le programme et je vois un entraînement le lundi, deux le mardi, deux le mercredi, un le jeudi, un le vendredi et match le samedi. Et je me dis ‘mais c’est quoi cela, il n’y a pas de jour de repos dans la semaine ?’ En fait, tu bosses comme un dingue. C’était totalement différent de l’Angleterre où l’intensité est plus importante le week-end alors que c’est plus calme en semaine. C’était une nouvelle charge de travail avec beaucoup de musculation des jambes. Ce n’était pas forcément ce dont j’avais besoin à 31 ans. J’ai eu des pépins physiques les deux premières semaines car je n’avais pas l’habitude de travailler comme cela. Il a fallu vraiment que je m’adapte. Cela m’a pris jusqu’en octobre car il y a eu la charge physique mais aussi l’adaptation à l’équipe, à ce que le coach demandait, à tout un environnement agréable mais que je n’avais pas connu. C’est la première fois où je suis arrivé dans un championnat où j’ai dû autant m’adapter.”
Avec vos deux buts qui sont arrivés coup sur coup en décembre à Sassuolo puis contre Empoli.
”Oui. À ce moment-là, le coach Pioli qui au départ m’alignait comme ailier droit mais avec des demandes un peu particulières m’a fait jouer en décembre deuxième attaquant et cela se passait très bien. Puis quand il est parti (remplacé par Vincenzo Montella en avril), on a changé de tactique pour un 3-4-3 où j’étais piston droit. Au fur et à mesure, je me suis adapté, me disant que c’était positif aussi car c’était le système de la sélection. J’avais plus un rôle défensif, d’abord défendre puis attaquer. Cela a été un apprentissage de voir cela 31 ans. Cela reste une belle expérience.”
Qui a aussi été assez étrange au final : d’un côté, il y a ce beau parcours en Coupe achevé en demi-finale, mais il y a cette phase retour en Serie A où vous ne gagnez que deux fois pour terminer sur une série de 14 matchs sans victoire en championnat…
”C’était la première fois que je vivais cela. Surtout qu’en janvier, on était à la lutte pour les quatre, cinq premières places et il y avait un coup à jouer pour le deuxième tour. On a recruté de très bons joueurs pour faire un deuxième tour tonitruant mais c’est tout l’inverse qui s’est passé. On a éliminé l’AS Rome assez facilement 7-1 et ce match aurait dû nous lancer. Mais cela n’a pas été le cas. On s’est focalisé sur la Coupe et quand tu es éliminé ensuite, c’est compliqué de se reconcentrer sur le championnat où tu n’as plus rien à jouer.”
Les Brugeois peuvent le faire.
Quel souvenir gardez-vous du stade Artemio Franchi où évolueront les Brugeois ce jeudi soir ?
”C’est une ambiance agréable. C’est toujours plein mais ça reste correct. J’ai vraiment beaucoup aimé, mon épouse et mes enfants adoraient venir au stade. C’est totalement différent de la Grèce et de ce que les Brugeois ont connu au PAOK. C’est beaucoup plus calme même si au PAOK, les supporters grecs sont 200 fois plus chauds en championnat qu’en Coupe d’Europe où ils savent qu’ils peuvent avoir de grosses amendes.”
Vous pensez que Bruges peut se qualifier ?
”Ils peuvent le faire. Surtout quand on voit le Bruges de maintenant. Mais a contrario, la Fiorentina a cette constance depuis deux ou trois ans. Ils ont perdu en finale contre West Ham la saison dernière. Ils ont l’avantage de pouvoir savoir gérer ce type de rendez-vous et ont cette expérience que Bruges n’a pas encore.”