N'Sakala: "Le pire moment de ma carrière"
Avant la rencontre contre la Côte d’Ivoire ce vendredi, Fabrice N’Sakala nous raconte sa Coupe d’Afrique des Nations depuis le Gabon.
- Publié le 20-01-2017 à 06h42
- Mis à jour le 20-01-2017 à 08h41
Avant la rencontre contre la Côte d’Ivoire ce vendredi, Fabrice N’Sakala nous raconte sa Coupe d’Afrique des Nations depuis le Gabon. La connexion saute au moins dix fois sur la conversation. "Fab, tu m’entends ?" , doit-on répéter sans cesse alors qu’on vient de manquer la énième blague d’un Fabrice N’Sakala écroulé de rire à l’autre bout du fil.
"J’avais prévenu, l’hôtel est bien mais le WiFi n’est pas top" , plaisante le latéral gauche congolais deux jours après avoir battu le Maroc à la Can. "Et encore, l’hôtel est bien. Il fallait voir les lits lors de notre stage au Cameroun. Dormir sur une planche en bois c’était pareil. Mais ne t’inquiète pas, on a vécu pire lors de certains déplacements."
Visiblement, vous avez l’air de bien vous amuser pour votre première Can…
"Je découvre, tout est nouveau. C’est la première fois que je suis aussi longtemps avec ce groupe."
Ça n’a pas l’air de vous déplaire. Sur les réseaux sociaux, on a l’impression que vous passez votre temps à chanter !
"Disons que la préparation d’un match est très différente ici. C’est calme au long de la semaine mais le jour du match, tout devient festif. Même quand ça ne va pas, on chante tous ensemble. En Europe, tout le monde est assis en silence, le casque sur les oreilles. Ici, le coach chante et danse avec nous dans le bus. C’est incroyable. C’est une mentalité à part et ce genre d’ambiance ne peut pas s’appliquer partout."
Vous avez battu le Maroc d’entrée de jeu dans un match serré. Comment avez-vous vécu ce match ?
"C’était vraiment dur. Il y avait une petite tension. On avait appris que le Maroc avait fait une vidéo pour se moquer de nous. Il fallait donc gagner. Je n’avais jamais vu une équipe nous coller autant de pression. Durant 45 minutes, ils venaient nous chercher très haut. Nous étions bien organisés et nous avons gagné à la mentalité."
Vous affrontez maintenant la Côte d’Ivoire et le Togo. Quels sont vos objectifs ?
"Nous qualifier pour le prochain tour. La victoire a rassuré mais tout peut basculer donc on reste méfiant même si on a bien rigolé après le match."
Pour vous qui vivez un premier événement d’une telle ampleur, une chose vous a-t-elle marqué ?
"Les supporters ! Honnêtement, j’ai l’impression de jouer à Kinshasa. Les gars sont partout, ils chantent. C’est 10 fois ce que j’ai vécu par le passé. On ne réalise pas toujours ce qu’est la Can quand on n’est pas Africain. Ici, c’est notre Coupe du Monde. Si tu fais un bon tournoi, ton pays se souviendra toujours de toi." (rires)
En Belgique aussi c’est la folie. Matonge, le quartier africain de Bruxelles, a bien fêté la dernière victoire…
"J’ai appris. Et vous savez quels supporters m’impressionnent ? Ceux d’Anderlecht. Je pensais être oublié et pourtant j’ai reçu un tas de messages de soutien. Plein m’ont dit qu’ils ont acheté des drapeaux du Congo. J’ai aussi reçu des messages de copains me disant que j’avais bronzé sur place." (il éclate de rire)
"Le pire moment de ma carrière"
"En France, on m’appelle le Belge." Cela prouve bien à quel point Fabrice N’Sakala s’est belgicisé depuis son passage à Anderlecht. Il compte d’ailleurs venir vivre en Belgique après sa carrière. "Je suis d’ailleurs toujours Anderlecht car les matches sont diffusés en Turquie. Je regarde les matches tranquillement. Je suis encore en contact avec pas mal de joueurs donc je n’hésite pas à leur envoyer un sms… quand ils se prennent un petit pont par exemple."
Vous êtes régulièrement en contact avec eux ?
"Oui, on rigole via WhatsApp. J’aime bien ennuyer ceux qui s’affrontent. Par exemple, quand Kara joue face à Conte je leur envoie des sms pour les monter l’un contre l’autre. C’est ma prépa de match." (rires)
Vous êtes actuellement prêté en Turquie. Pensez-vous revenir à Anderlecht en juin ?
"Je sais que je suis toujours apprécié à Anderlecht. J’ai toujours été soutenu par Herman Van Holsbeeck. Je reviendrai cet été et on verra ce qui se passera. Peut-être serai-je vendu d’ici là."
Vous avez tout vécu au RSCA et vous avez toujours su rebondir…
"Je dois remercier le coach de la sélection congolaise qui a continué à m’appeler quand je ne jouais pas. J’ai souvent été dos au mur et à chaque fois je revenais. Cet été, tout le monde repartait de zéro. J’ai retrouvé une place dans le groupe et même dans le onze. Puis, on me sort à Saint-Trond après 25 minutes…"
Vous avez compris que c’était fini ?
"Ce moment est le pire de ma carrière. Sortir un défenseur après 25 minutes, c’est la pire des sanctions. La douleur émotionnelle était énorme. Quand j’ai vu mon numéro sur le panneau, je savais que je devais partir. J’ai failli exploser, lancer mon maillot mais je ne l’ai pas fait."
Heureusement car vous en êtes sorti la tête haute…
"Et beaucoup de bonnes choses me sont arrivées depuis. J’ai retrouvé du temps de jeu et je suis à la Can. C’est dingue après ce que j’ai vécu. Et je trouve génial qu’on ne m’ait pas oublié à Anderlecht."
Vous recevez encore des marques de sympathie ?
"Quand je croise des supporters, ils viennent toujours me saluer. Même aux contrôles à l’aéroport on me parle d’Anderlecht. Et quand j’ai croisé un supporter la dernière fois, il m’a même fait un bisou."
"Je me sens un peu seul en Turquie"
Depuis bientôt 6 mois, Fabrice N’Sakala habite dans une villa d’Alanya avec vu sur la mer. La belle vie, diront certains. "C’est clair que la vie est sympa là-bas", explique l’ancien anderlechtois passé à Alanyaspor. "Durant les périodes de vacances, ça vit bien, ça bouge. En dehors, ça dort davantage." Le gros problème pour N’Sak, c’est la langue. "Je compte apprendre le flamand qui n’est pas facile mais le turc c’est encore un niveau au-dessus. Il est donc difficile de communiquer. J’ai quelques potes francophones dans le vestiaire mais deux ont été transférés et un autre doit partir. Je me sens parfois un peu seul donc je serre les dents. J’ai eu des coups de mou car je n’ai personne chez moi. Mais je positive toujours."
Heureusement, son anglais lui a permis de s’intégrer dans le vestiaire et de passer du bon temps au club. "Et je suis vraiment bien sur le terrain. Je suis venu prendre du temps de jeu et j’en ai. Au début, les gars étaient surpris de voir un joueur d’Anderlecht débarquer chez eux. Je leur ai dit "C’est une longue histoire" et on en a ri. Le coach m’a fait évoluer comme médian gauche mais ça ne me dérange pas. Je veux jouer. Je suis sur le bon chemin."