Verstraete, itinéraire d'un surprenant Diable Rouge: "Ce n’était pas un des grands talents"
Birger Verstraete a percé doucement pour atteindre l’équipe A du Club Bruges où il n’a pas su s’imposer sur le long terme. Il a ensuite tracé sa route, sous les yeux d'un Belhocine admiratif.
- Publié le 05-09-2018 à 09h56
- Mis à jour le 05-09-2018 à 10h34
Birger Verstraete a percé doucement pour atteindre l’équipe A du Club Bruges où il n’a pas su s’imposer sur le long terme Ostendais d’origine, il a débuté au KVO avant d’être repéré par le Club Bruges. À l’image de la suite de sa carrière, il a pris le temps pour gravir les échelons.
Il a déjà 15 ans quand il signe au Club Bruges. Une grosse étape dans sa carrière. Il ne saute pas les marches jusqu’à atteindre le noyau A.
"Je l’ai connu chez les espoirs car j’avais un an de plus que lui", raconte Sven Dhoest. "J’étais dans le noyau pro mais je jouais mes matches avec les U21. Il m’a ensuite rejoint dans l’équipe fanion mais nous redescendions le lundi pour jouer avec les espoirs."
La réputation de Verstraete n’est pas incroyable. Bruges compte sur lui mais ne le considère pas comme un joueur d’exception. "Il n’était pas parmi les grands talents qui vont d’office faire une grande carrière, les responsables disaient de lui qu’il lui manquait quelque chose, notamment quelques centimètres et un peu de body ."
N’empêche que le Flandrien a toujours répondu présent quand les Blauw en Zwart ont fait appel à lui. "Il avait du talent et cela se voyait. Il a toujours su prester à haut niveau dès qu’il a été aligné."
Discret dans le vestiaire , il est vu comme "un gros bosseur, pas comme un gars qui parle pour ne rien dire ". Il se fait rapidement une place dans le groupe par sa simplicité et sa capacité à se lier avec les gens. "Demandez-le à n’importe qui, Birger, c’est un mec simple. Il a la tête sur les épaules et ne se prend pas pour quelqu’un qu’il n’est pas."
Ce qui a frappé Dhoest durant leur jeunesse commune, c’est la force de caractère de son ancien équipier. "Il a toujours continué à bosser pour évoluer. Sa patience était incroyable. Même s’il devait attendre, il continuait d’essayer d’aller de l’avant."
À Mouscron, il était là pour faire le nombre de Belges et est tombé sur un coach qui ne comptait pas sur lui
Le prêt de Birger Verstraete à Mouscron a fait couler beaucoup d’encre. Aux côtés de Sven Dhoest et de Zinho Gano, il débarque au Canonnier en toute fin de mercato estival 2014 pour vivre une saison extrêmement compliquée.
"La situation était vraiment bizarre pour lui comme pour nous", lance Sven Dhoest. "Il n’y avait pas assez de Belges dans l’effectif (NldR : le club était alors une succursale du Losc) et on est vraiment venus pour qu’il y ait assez de Belges sur la feuille de match."
Une situation frustrante car Birger Verstraete montrait déjà de belles choses. "Il avait beaucoup de qualités et un gros potentiel", affirme l’ancien Hurlu Teddy Mézague. "Il est arrivé pour prendre du temps de jeu mais il n’en a pas reçu ou presque. Il a eu la malchance que le coach en place (NdlR : Rachid Chihab) ne voulait pas de lui. Il avait beaucoup de joueurs de Lille sous la main et il les connaissait bien. Ce n’était pas simple de se faire un trou. Ce n’est vraiment pas de sa faute qu’il n’ait pas pu jouer. Ses qualités n’ont jamais été remises en question."
Cette expérience négative lui a forgé un sacré caractère. Bosseur depuis ses jeunes années, l’Ostendais n’a rien lâché. "Nous travaillions à fond toute la semaine mais nous ne pouvions pas jouer", se souvient Dhoest. "Nous étions sur le banc même quand notre concurrent direct était moins bon que nous. Mentalement, cela nous a forgés. Nous avons appris que le football avait ses bons côtés mais également ses moments difficiles. Nous étions face à une concurrence impossible à battre mais nous devions continuer à bosser dur."
Si la fin de saison et le changement de coach lui ont offert davantage de temps de jeu, cette expérience reste gravée comme une épreuve dans la tête de Verstraete. "Même dans le vestiaire ce n’était pas simple", ajoute Sven Dhoest. "Nous étions quatre néerlandophones et on nous interdisait de parler néerlandais entre nous. On nous disait que si nous ne parlions par français, les autres allaient penser qu’on les critiquait. Quand nous étions seuls nous pouvions parler notre langue mais dans le vestiaire, nous devions nous forcer à parler en français."
Karim Belhocine a fait de Birger Verstraete un patron à Courtrai
Arrivé après une saison quasi blanche à Mouscron, Birger Verstraete a fait ses débuts sur la pointe des pieds. Johan Walem ne compte pas trop sur lui et ne lui offre que peu de temps de jeu. Renvoyé, Walem cède sa place à Karim Belhocine, son adjoint. L’actuel T2 d'Anderlecht a une idée derrière la tête et veut donner un rôle important à Birger Verstraete.
"Je l’ai directement aligné", se souvient Belhocine. "Je lui parlais déjà beaucoup quand j’étais adjoint car je sentais qu’il avait quelque chose et je voulais qu’il franchisse un pas. Et je ne me suis pas trompé. Il y a quelques mois, quand il a commencé à beaucoup jouer à Gand, j’ai dit que je l’imaginais bien jouer en équipe nationale."
À Courtrai, il a reçu des responsabilités qu’il n’avait jamais eues auparavant. "Il a des qualités de leader qui sommeillent en lui. Il ne les exploitait pas encore. La grinta, il l’a toujours eue mais il a appris à la transmettre à ses équipiers. Je lui disais que s’il montrait à chaque match cette rage de vaincre, il ne quitterait pas le terrain. J’ai ensuite réclamé de lui qu’il transcende ses équipiers, ce qu’il est parvenu à faire."
Avec Rolland à ses côtés, il s’impose comme un vrai médian défensif. Il récupère et relance le jeu. Sans fioritures. "Il a compris ce que je voulais de lui. Je lui ai expliqué que si nous tirions dans le même sens, il se développerait. À un moment, il comprenait ce que je voulais de lui sans que je doive lui parler."
Pour Belhocine , ses qualités sommeillaient en lui et il a pris le temps pour les laisser s’exprimer. "Il a été patient et a réussi à s’adapter. Son intelligence est ce qui le caractérise le plus. Il connaît son travail par cœur et le réalise avec beaucoup de logique et d’envie. Il n’a pas peur d’avaler les kilomètres et sait être vicieux dans le bon sens du terme. Avec les années, il a appris à utiliser ses bras et son corps. Il est capable de sentir une rencontre pour savoir quand enflammer son équipe et quand lui dire de mettre un coup de frein."
Il a pallié la blessure de Foket à droite avant de s’imposer dans l’axe
Karim Belhocine se souvient du départ de Birger Verstraete à Gand. "En tant que coach, j’étais déçu car il était un élément important mais en tant qu’homme, je ne pouvais qu’être heureux pour lui."
Comme à chaque fois, l’Ostendais a pris le temps de s’intégrer progressivement à un club plus relevé où la concurrence bat son plein. "Il n’a pas beaucoup joué après son transfert en janvier", se souvient Danijel Milicevic, un de ses proches dans le vestiaire gantois. "Avec l’opération de Thomas Foket à l’été 2018, il a dû dépanner sur le flanc droit, qui n’est pas sa place. C’est aussi pour cela qu’il a pris un peu de temps pour grandir."
C’est à l’arrivée d’Yves Vanderhaeghe qu’il s’est progressivement installé dans le onze de base pour ne plus en sortir ou presque depuis décembre dernier. "Dès que le coach lui a fait comprendre qu’il était devenu un incontournable, il a pris en confiance et a commencé à mieux s’exprimer balle au pied et vocalement. Son importance n’a fait que croître."
Sa simplicité et son jeu épuré ont directement plu à son coach. "Il a la bonne mentalité qu’il a amenée du Club Bruges et possède une qualité de transversale qui convient bien à La Gantoise", poursuit Milicevic. "Il court beaucoup et sait comment se placer. Il n’est pas encore l’homme de la dernière passe mais sait récupérer le cuir et relancer l’équipe."
Le portrait de mec discret de ses débuts ne colle plus à la personne qu’il est devenu. "C’est un des ambianceurs du vestiaire. Il donne son avis et rigole beaucoup. Notamment avec Brecht Dejaegere. Il a un fort caractère qui fait de lui un des leaders de l’équipe."