On a retrouvé le vrai Arnaud De Lie, vainqueur du Tro Bro Leon malgré… quatre crevaisons : “Je puais la force”
Malgré… quatre crevaisons, le Belge de 22 ans, intenable, a ajouté le Tro Bro Leon à son palmarès, au lendemain de son podium (3e) au GP du Morbihan.
- Publié le 06-05-2024 à 07h40
- Mis à jour le 06-05-2024 à 09h24
Le Taureau de Lescheret est de retour. Sa célébration caractéristique aussi. Et le temps où la Belgique s’inquiétait de son état de forme et de santé (suite notamment à la découverte de la maladie de Lyme) semble déjà bien loin.
Vainqueur du 40e Tro Bro Leon, ce dimanche, après avoir décroché la troisième place sur le Grand Prix du Morbihan, samedi, Arnaud De Lie a confirmé son retour au premier plan, après sa victoire à la Famenne Ardenne Classic, le 28 avril. Et de quelle manière. Au terme d’une course marquée par la malchance, le Belge de 22 ans a été le plus fort, de très loin.
Quatre crevaisons en 70 kilomètres : “Je ne savais même plus où j’étais dans la course”
S’il adore le Paris-Roubaix breton (4e en 2022, 2e en 2023) et ses célèbres ribinou (29 chemins agricoles pour un total de 34,6 km), Arnaud De Lie n’a pas été épargné par les crevaisons. Il en a d’abord connu une à 70 kilomètres de l’arrivée, obligeant ses équipiers à faire la poursuite. Puis il a changé de vélo, après une nouvelle (double) crevaison. Une fois de retour dans le groupe des favoris, il a… encore fois crevé, à 30 kilomètres de l’arrivée. Mais son équipe a été énorme et l’a une nouvelle fois ramené à l’avant.
”Après ma première crevaison, je ne savais même plus où j’étais dans la course, explique De Lie, Puis j’ai crevé à l’avant et à l’arrière en même temps. Le tubeless (produit colmatant) a un peu réparé mais j’ai tout de même dû changer de vélo.” Ce qui lui a permis d’attaquer une première fois dans le ribin de… la ferme (ça ne s’invente pas pour un fils d’agriculteur). “Ce secteur me convient vraiment bien et il a permis de faire une petite sélection. Mais dans la foulée, j’ai encore crevé. Mais même si on a beaucoup fait la course derrière, c’était du grand Lotto Dstny, aujourd’hui. Mes équipiers m’ont ramené à chaque fois. Collectivement, c’était vraiment très solide.”
Un calme à toute épreuve : “Il y a un mois, j’aurais arrêté la course”
La performance d’équipe fait évidemment très plaisir à Stéphane Heulot, le CEO de la formation belge, exceptionnellement présent dans la voiture (à la radio), ce dimanche. Mais c’est surtout le calme de De Lie et compagnie qui a impressionné. “Je suis très fier du groupe. On a perdu la course dix fois mais au final ; on l’a gagnée. Pourtant, je peux vous dire que lors de la dernière crevaison, dans le seul secteur qui n’était pas couvert par des assistants, cela a été difficile moralement pour Arnaud, explique le Français. À un moment, il n’était pas loin de jeter le vélo dans le fossé. Il en avait ras le bol et je peux le comprendre. Mais c’est là où on voit qu’il a gagné en maturité : il a compris qu’il ne pouvait pas quitter la course au vu du travail effectué par les copains.”
Après la dernière crevaison, Arnaud a failli jeter son vélo dans le fossé.
Le principal intéressé l’admet : “Il y a un mois, je pense que j’aurais arrêté la course”. Mais depuis lors, pas mal de choses ont changé. “J’ai beaucoup travaillé sur le fait de rester calme. Quand tout va mal, on a tendance à perdre beaucoup d’énergie et même si Stéphane (Heulot) a cru que je m’énervais, j’ai tenté de rester le plus zen possible. Cela a porté ses fruits.”
En fin de course, après un nouvel effort impressionnant dans le ribin de la ferme (”pour le spectacle et pour faire la course”), qui a coïncidé avec la formation d’un solide trio avec Riley Sheehan (Israel – Premier Tech) et Pierre Gautherat (Decathlon AG2R La Mondiale), Arnaud De Lie n’a pas non plus tenté de forcer les choses. “Il y avait encore des équipiers derrière donc je suis resté calme jusqu’au sprint. Avec l’expérience de l’an dernier (NDLR : il avait été remonté sur le fil par Nizzolo), je savais que je ne devais pas être trop vite devant. Et une fois que j’ai lancé mon sprint, j’ai directement senti que j’avais encore de bonnes jambes.”
Des jambes phénoménales : “J’ai rarement eu des telles sensations”
Ces bonnes jambes étaient évidemment essentielles pour s’imposer (devant Venturini et Gautherat) au terme d’une course qui aura été passionnante de bout en bout, par son scénario décousu. “Aujourd’hui, j’étais phénoménal, indiquait un Arnaud De Lie radieux à la descente du podium. J’ai rarement eu des sensations pareilles. Comme on dit dans le jardon : je puais la force.”
De quoi donner un nouveau supplément de confiance à celui qui reste sur trois podiums de rang depuis sa reprise. La preuve irréfutable d’un retour en forme. “La condition revient et je suis très heureux d’avoir remporté cette course qui me tenait à cœur.”
C’est évidemment d’excellent augure avec le Circuit de Wallonie, jeudi (9 mai). “Mais je ne suis pas encore convaincu qu’il doit y aller vu les efforts consentis ces deux derniers jours”, avoue Stéphane Heulot. Une réunion aura lieu en ce sens, ce lundi, comme chaque semaine. Elle servira également à définir les contours de la suite du programme d’Arnaud De Lie. Et on se dirige vers un retour au plan initial, à savoir le Tour de Suisse en préparation du premier Tour de France du Taureau de Lescheret.
“C’est à mon sens une approche idéale, termine Heulot. Il y a aura également le championnat de Belgique, pour lequel Arnaud est très motivé. Mais nous ne sommes que début mai et tout cela est encore loin. On va avancer en marchant et faire des points réguliers. Mais petit à petit, on se remet sur les rails que nous avions prévus durant l’hiver et il est clair que toute l’équipe est ravie de ce retour au premier plan.” Qui fait autant de bien à la tête qu’aux jambes d’Arnaud De Lie.”