Faut-il réduire le nombre de coureurs par équipes?
Réduire les pelotons d’une vingtaine d’éléments n’augmenterait pas vraiment la sécurité, selon les coureurs.
- Publié le 29-11-2016 à 11h14
- Mis à jour le 29-11-2016 à 11h15
Réduire les pelotons d’une vingtaine d’éléments n’augmenterait pas vraiment la sécurité, selon les coureurs. Faut-il réduire le nombre de coureurs dans chaque équipe sur les grands Tours et sur les classiques, comme le veulent les principaux organisateurs ? Les avis sont partagés au sein du peloton. Mais la plupart des coureurs s’accordent sur un point : réduire le nombre de coureurs ne va pas forcément augmenter la sécurité.
" Mettre l’accent sur la sécurité dans ce cas-ci est un faux débat", analyse Maxime Monfort, spécialiste des grands Tours. " Retirer un coureur par équipe, cela équivaut à réduire le peloton d’une vingtaine d’éléments, à condition de ne pas augmenter le nombre d’équipes au départ, ce qui n’est pas une garantie sur le long terme. Mais passer d’un peloton de 198 coureurs à un groupe de 170 éléments ne change pas grand-chose : cela reste imposant, cela reste un peloton important."
Dans lequel les risques de chutes restent considérables et malheureusement inévitables dans ce sport itinérant. Loïc Vliegen rejoint le coureur de Lotto-Soudal dans cette analyse.
" C’est bien qu’on pense à améliorer la sécurité au sein du peloton, mais c’est vrai que sur le fond, même si cela pourrait être mieux d’avoir un peloton moins important, cela ne changerait pas beaucoup d’avoir une vingtaine de coureurs en moins", raconte le puncheur de la formation BMC, dixième cette année de l’Amstel Gold Race. " Il faut étudier d’autres pistes, comme cela avait été le cas sur l’ Eneco Tour , par exemple, avec les motos de signaleurs qui recoupaient le parcours à certains endroits pour ne pas remonter le peloton."
Comment faire alors pour diminuer les risques d’accidents, comme ceux, dramatiques, qui ont marqué la saison 2016, avec la mort du regretté Antoine Demoitié, ou avec la grave chute de Stig Broeckx, qui est toujours dans le coma. Deux coureurs qui avaient été percutés par une moto. " Il faut surtout étudier ces points, même si cela demande beaucoup plus de travail pour les organisateurs, mais il faut réagir après les drames que nous avons connus en 2016", continue Loïc Vliegen.
Patrick Lefevere, le patron d’Etixx-Quick Step, a été le plus véhément par rapport à cet argument de la sécurité pour réduire le nombre de coureur par équipe : " Cela me fait rire : ce sont les parcours qu’il faut revoir, prenez l’exemple de Gand-Wevelgem qui va faire rouler le peloton sur des chemins de terre…" a-t-il commenté dans les médias néerlandophones.
Pour Maxime Monfort, cette réduction ne devrait pas voir lieu en 2017. " Je sens que les managers vont être solidaires : ils ont tous bouclé les effectifs et leurs programmes en se basant sur des équipes de neuf et pas de huit pour les Tours."
Plus de spectacle ? Les avis divergent !
Pour Monfort, les coureurs s’adapteraient, tandis que Vliegen pense que les courses pourraient être plus belles.
L’autre argument avancé par les organisateurs de grands Tours et de classiques pour diminuer le nombre de coureurs par équipes est celui du spectacle. Trop souvent, la course cycliste peut effectivement tomber dans la monotonie, surtout sur le Tour de France, avec un peloton cadenassé par l’équipe la plus forte. Si cette armada a un coureur en moins, elle pourra moins asseoir sa domination.
Qu’en pensent les coureurs ? Romain Bardet et Chris Froome ne partagent pas le même avis. Chez nous, Maxime Monfort rejoint l’analyse du vainqueur du Tour de France.
" Passer d’une équipe de neuf à huit ne changerait pas énormément", raconte le Wallon. " J’ai plus de réserve par rapport à une équipe de sept coureurs, mais comme c’est proposé ici, c’est sur une course d’un jour, qui n’est pas comparable à un Tour. Et puis, vous savez, les coureurs s’adaptent. J’ai disputé cette année le Tour de l’Ain, sur lequel il n’y avait que six coureurs par équipe. Dans ce cas, c’est clair, on ne peut pas se louper dans l’équipe. Mais d’une manière générale, les coureurs s’adaptent. Et là, on calculait plus nos efforts…"
Loïc Vliegen , lui, pense que cette formule pourrait offrir plus de spectacle.
"Je crois que cela pourrait changer les tactiques de course, que les épreuves seraient moins cadenassées, car ce serait moins évident pour le peloton de contrôler", raconte le grand espoir wallon. " Je pense que c’est une formule qu’il faudrait tester. Mais elle a néanmoins un côté négatif : si une équipe perd plusieurs coureurs sur des chutes dans la première semaine qui est toujours nerveuse, elle pourrait être trop vite décimée."
Deux stars du peloton partagent leur avis
Romain Bardet est POUR
"Je pense que cette formule est à tester, notamment sur le Tour de France", nous avait commenté Romain Bardet, lors du Critérium de Saitama, au Japon, il y a un mois, quand ce débat était déjà d’actualité. "Cela pourrait être une bonne chose. Car on remarque depuis plusieurs saisons que le niveau est vraiment devenu très homogène dans le peloton, avec des coéquipiers qui sont de plus en plus forts. Avec des équipes aussi bien représentées en nombre, cela devient donc de plus en plus difficile de faire des différences. Les courses deviennent un peu stériles. Par contre, si on diminue le nombre de coureurs par équipe, cela peut contribuer à redonner du dynamisme sur certaines phases de course. Je ne dis pas que ce serait la recette miracle, mais cela pourrait être positif."
Chris Froome est CONTRE
"Réduire le nombre de coureurs par équipe sur les grands Tours ? Je pense que cela ne changerait finalement pas grand-chose : les plus forts resteraient devant à la fin", avait évoqué, il y a un mois, au Japon, Chris Froome à ce sujet. "Si cette décision est prise, on fera bien évidemment avec. Mais j’ai envie de prendre l’exemple du Tour de Grande-Bretagne, où il n’y avait que six coureurs par équipe au départ. Et, à la fin, les formations les plus fortes étaient quand même devant. Cela ne change donc pas énormément le verdict de la course. C’est comme au sujet de la réduction du nombre de kilomètres par étapes. Quand celles-ci sont plus courtes, les coéquipiers commencent simplement à travailler plus tôt. Mais sur des distances qui sont aussi plus courtes… Pour un résultat similaire : les plus forts sont devant."