Jérôme Thiry a traversé La Manche à la nage
Le plus difficile, selon le Chastrois, l’auteur de cette incroyable performance, c’était de s’occuper l’esprit durant la traversée…
- Publié le 06-07-2018 à 15h33
- Mis à jour le 09-07-2018 à 15h28
Le plus difficile, selon le Chastrois, l’auteur de cette incroyable performance, c’était de s’occuper l’esprit durant la traversée… Ce jeudi, aux environs de 5 h du matin, Jérôme Thiry est parvenu à rejoindre le Cap Gris-Nez, en France, après un effort de 16h07 depuis Douvres (Angleterre). Le Chastrois a en effet traversé la Manche en nageant 53 kilomètres. Dont une bonne partie de nuit. "Les vagues étaient relativement hautes en quittant l’Angleterre, j’ai été surpris et perturbé durant quinze ou vingt minutes. J’étais un peu perdu et surtout secoué. Je me suis dit que si ça continuait, ce ne serait pas possible de tenir. Puis les conditions se sont améliorées", relate le sportif de l’extrême, âgé de 40 ans.
Le Chastrois a ensuite trouvé son rythme de croisière. "Pendant les dix premières heures, j’ai essayé de m’occuper l’esprit. J’avais prévu plusieurs thèmes de réflexion, comme me remémorer mon parcours pour rejoindre les pompiers ou le prochain défi pour 2019. À un moment, je suis arrivé à un stade où je me suis dit que rien ne pouvait plus m’arriver. Je n’avais qu’une seule chose en tête : terminer ! J’avais l’impression de bien pousser et je pensais arriver en 14 heures."
Sauf que sur le bateau, où se trouvent les pilotes agréés, son père Jean-Marie Thiry et son entraîneur Ghislain Maréchal, les nouvelles ne sont pas excellentes. "Ce qui rend cette traversée spéciale, c’est que les nageurs sont tributaires du vent et du courant. Quand on voit ma trajectoire, j’ai complètement dévié du Cap Gris-Nez" , explique Jérôme Thiry. "À un endroit, proche de l’arrivée, le courant ne s’inverse que toutes les six heures. Je n’arrivais plus à avancer et j’ai simplement dû attendre le bon moment pour poursuivre."
Malgré quelques douleurs aux poignets, après avoir évité les méduses et les algues, l’athlète a atteint son objectif. "C’était incroyable. Pour moi, c’était un mythe de traverser la Manche à la nage. Vraiment un défi spécial !"
Et pour y parvenir, il a pu compter sur plusieurs soutiens importants. "D’abord mon père et Ghislain Maréchal, qui me préparaient mes ravitaillements. Toutes les trente minutes, je faisais une petite pause de trente secondes pour manger ce que mon diététicien avait calculé. Ces dosages répondaient exactement à mes besoins énergétiques, donc je n’ai même pas souffert physiquement. Surtout que la préparation avec Ghislain Maréchal s’est parfaitement passée. J’avais par exemple effectué la traversée de l’IJsselmeer aux Pay-Bas (22 km) et je souffrais des épaules. Du coup, il a modifié un peu ma technique de nage et je n’ai plus rien ressenti cette fois-ci. Puis j’ai reçu une aide financière de la Province du Brabant wallon et de Décathlon, évidemment."
Dans le Top 3 des défis les plus fous
Cette incroyable performance, elle vient s’ajouter à un curriculum vitae déjà bien fourni pour Jérôme Thiry. “Mon Top 3 ? En tout premier, c’est évidemment le Triple Ultra-Triathlon de Lensahn, en Allemagne (NdlR: 11,4 km de natation, 540 bornes à vélo et 126,6 km de course à pied, soit trois fois un Ironman). C’est un effort qui a duré deux nuits et j’étais vraiment au bout du bout cette fois-là”, avoue-t-il. “Ensuite, je vais dire la Diagonale des Fous sur l’île de La Réunion (NdlR: un Ultra Trail, plus de 160 kilomètres en courant), parce qu’il faisait très chaud et humide. Puis vient la traversée de la Manche. Je voulais faire quelque chose de différent pour mes 40 ans, pour retrouver l’envie de m’entraîner. Et ce fut le cas”, raconte-t-il avec un large sourire. Même s’il a eu plusieurs heures pour y penser, il n’est toujours pas parvenu à trouver son prochain défi. “Pour 2019, j’aimerais quelque chose d’encore différent, mais je ne sais toujours pas quoi. Je vais encore un peu y réfléchir.”
Son défi a failli être… annulé !
Jérôme Thiry était très stressé avant d’entamer son défi. Et les éléments ne l’ont pas aidé. “Il était prévu que je démarre le vendredi, sauf que les conditions n’étaient pas bonnes. Il y avait trop de vent et donc des vagues trop importantes pour nager. Les pilotes agréés ont donc retardé la traversée en expliquant que ce serait peut-être possible dimanche soir. Puis ils m’ont dit que ce serait possible lundi, avant de repousser encore le départ. Mardi, les conditions étaient trop mauvaises, c’était hors de question. Il y avait encore la possibilité de partir le mercredi matin, puis le mercredi à midi. Là, j’ai hésité, parce que je devais assurer ma garde chez les pompiers, ce vendredi à 8 h. Mais j’ai discuté avec Ghislain Maréchal, mon entraîneur, et il m’a convaincu de foncer. Il avait raison ! C’était vraiment le dernier moment. Sinon, j’aurais dû repousser ma tentative au mois de septembre.” Le Chastrois est donc passé tout près d’une grosse désillusion. Surtout qu’il tenait énormément à cette traversée à la nage. “Je m’étais mis une grosse pression. Tout d’abord pour le prix de la traversée, plus de 3.000 euros pour le bateau. Fallait que je mette la balle dans le but ! J’ai investi un temps fou pour les entraînements, pour trouver des créneaux dans mon emploi du temps. Puis les gens se sont démenés pour moi. Il fallait que je le fasse. Maintenant, je suis soulagé. C’était comme un rêve.” Le sportif de 40 ans aura tout juste le temps de passer une bonne nuit chez lui, avant de se rendre à la caserne. “Ce vendredi, ma garde ne sera pas facile”, sourit-il. “J’ai très mal aux poignets, mais ça devrait aller. Après ma traversée de l’IJsselmeer, je souffrais nettement plus. Si j’étais revenu dans le même état, je n’aurais probablement pas su aller travailler. Là, je vais juste devoir me dérouiller un peu le temps”, indique-t-il, seulement quelques heures après avoir bouclé les 55 km.