François Heersbrandt quitte les bassins à 28 ans: "Je raccroche avec un sentiment de fierté"
Le nageur de 28 ans peinait à retrouver son niveau initial depuis une blessure.
- Publié le 15-11-2018 à 09h50
- Mis à jour le 15-11-2018 à 16h57
Le nageur de 28 ans peinait à retrouver son niveau initial depuis une blessure. Depuis son enfance, François Heersbrandt a fait du bassin son terrain de jeu. Il le quitte sans regret, après avoir accompli de belles prouesses dans ce sport très discipliné. Avec ses sept records de Belgique (50 m dos, 50 m et 100 m papillon en grand bassin, 50 m libre, 50 m dos, 50 m et 100 m papillon en petit bassin), l’homme a marqué l’histoire de la natation belge. Retour avec l’intéressé sur la vie d’un sportif hors pair qui nageait en eau trouble depuis 2015.
François Heersbrandt, arrêter doit être une décision réfléchie, très difficile à prendre ?
"C’est vrai, ce n’est pas facile, mais il faut relativiser. J’ai déjà participé aux trois derniers Jeux olympiques, j’ai décroché des médailles dans des compétitions internationales, mais la vie d’un sportif ne s’arrête pas qu’à ça. Nous sommes constamment dans la recherche de l’excellence, du surpassement de soi, de l’envie de faire mieux. Je n’ai pas pu me qualifier pour les Mondiaux d’Hangzhou (Chine, NdlR) en individuel le week-end dernier, ce sera difficile d’espérer quelque chose pour les Jeux. Depuis ma blessure en 2015, je récupère très doucement… et je ne sais pas si je serai capable de rattraper mon niveau d’antan."
28 ans et tirer sa révérence… ce n’est pas un peu trop tôt ?
"Cela dépend comment on le prend. On a souvent tendance à oublier que j’ai débuté ma carrière professionnelle en 2008, il y a 10 ans ! Pour ma part, ce n’est pas trop tôt, mais en comparant à la norme, cela peut le devenir. Mais je ne suis pas fâché de raccrocher."
Vous disiez il y a un peu moins d’un an vouloir accrocher vos 4e JO consécutifs ?
"C’est vrai. Mais je ne savais pas à quel point la blessure allait m’atteindre. Je peine à retrouver mes sensations, mes ondulations dans l’eau. Mais franchement, si j’avais su à quel point ça allait être compliqué… Je récupère depuis peu un genou qui ne me handicape plus dans la vie de tous les jours. Cela coince juste au niveau de la natation malheureusement."
Quel est le bilan que vous tirez de cette longue expérience du haut niveau ?
"Ce fut une expérience de vie fantastique. J’en retiens beaucoup de belles choses. Je suis très reconnaissant envers Rudy Declercq, mon coach, et Nicolas d’Harveng, mon préparateur physique, qui m’ont toujours soutenu et aidé toutes ces années. Ma carrière s’est toujours déroulée positivement, de manière évolutive. J’ai pu voyager, réaliser des performances, décrocher des médailles de bronze lors de championnats d’Europe. J’ai accompli de belles choses qui font de moi l’homme que je suis aujourd’hui."
Vous tirez complètement un trait sur la natation ?
"Non, ce serait radical et difficile d’arrêter brutalement. Je continuerai à entraîner un groupe dans mon club actuel, le CNSW, mais je n’ai pas que ça dans ma tête. J’adore le travail physique à sec ; la musculation, le renforcement… Garder le sport dans ma routine quotidienne est essentiel, j’en ai besoin."
Eindhoven, explosion de sensations
Il y a dix ans, François Heersbrandt n’est qu’aux prémices d’une carrière qui s’annonce prometteuse. Mais il ne le sait pas encore. À l’Euro d’Eindhoven, en série du 100 m papillon, il réalise le temps limite (52 secondes 83) qui lui permet d’accrocher une place aux Jeux de Pékin, à 18 ans seulement. La joie est tellement intense qu’il ne peut plus la canaliser. "C’est la première fois de ma vie que j’ai ressenti quelque chose de si fort. C’est un sentiment inexplicable. J’aimerais revivre ce genre de sensations… Rien que le fait d’évoquer ces souvenirs me donne des frissons !"
Un avenir bien tracé
Le Brabançon perdra, en fin d’année 2018, son statut d’élite. Mais pour le moment, le nageur ne se soucie pas de cela. Il se laisse le temps de réfléchir à son futur, qu’il envisage déjà dans un milieu qu’il affectionne. "J’ai un bac en informatique, c’est un domaine qui me passionne énormément également. Je viens d’annoncer ma décision quant à mon avenir sportif, je me laisse donc un peu le temps de souffler et de réfléchir à ce que je vais faire. C’est bien d’avoir en tête d’autres challenges. J’ai adopté une philosophie où l’on se nourrit d’envies. Beaucoup de personnes qui ont connu le haut niveau ont besoin de cela, sinon on peut vite tomber en dépression…"
Un modèle à respecter
Souvent dans la peau d’un outsider face à la concurrence étrangère, le nageur aura impressionné par de grosses performances là où ne l’attendait pas forcément. François Heersbrandt peut se vanter d’avoir marqué l’histoire de la natation belge, avec sept records de Belgique encore d’actualité, mais également d’avoir représenté dignement la Belgique dans une discipline où il est bien difficile de faire son trou chez nous. Mais le Waterlootois n’est pas du genre à se la raconter. "J’ai un sentiment de fierté. Je me rends compte que j’ai réalisé de belles choses. Je n’en tire que du positif. Des regrets ? Jamais, mes échecs font partie de moi. Tout ce qu’on fait nous amène à devenir quelqu’un de bien spécifique."
François Heersbrandt en 5 dates
- Mars 2008 : qualification, lors de l’Euro d’Eindhoven, pour les JO à 18 ans.
- 9 décembre 2011 : médaille de bronze en 100 m papillon à l’Euro.
- 2 août 2012 : demi-finale du 100 m papillon des Jeux de Londres. Il termine 8e de la première série.
- 6 décembre 2014 : avec le relais, record de Belgique du 4 × 50 m libre à Doha (1’24’’56).
- 11 novembre 2018 : échec dans la course à la qualification pour les Mondiaux en Chine. Il décide d’arrêter sa carrière.