Le succès des jeux Battle Royale: sont-ils prêts pour l’eSport ?
PlayerUnknown’s BattleGrounds, Fortnite, Darwin Project, H1Z1 et bientôt d’autres, les jeux vidéo proposant un mode Battle Royale font parler d’eux au point, actuellement, d’éclipser beaucoup de leurs compères. Récemment, on apprenait que Fortnite, probablement le plus populaire d’entre eux, avait dépassé le nombre de joueurs en ligne de GTA, pourtant une légende de l’industrie. Et au vu de la croissance exponentielle de l’affluence sur leurs serveurs, la hype autour de ces jeux n’est pas prête de retomber.
- Publié le 29-04-2018 à 12h19
- Mis à jour le 29-04-2018 à 13h11
PlayerUnknown’s BattleGrounds, Fortnite, Darwin Project, H1Z1 et bientôt d’autres, les jeux vidéo proposant un mode Battle Royale font parler d’eux au point, actuellement, d’éclipser beaucoup de leurs compères. Récemment, on apprenait que Fortnite, probablement le plus populaire d’entre eux, avait dépassé le nombre de joueurs en ligne de GTA, pourtant une légende de l’industrie. Et au vu de la croissance exponentielle de l’affluence sur leurs serveurs, la hype autour de ces jeux n’est pas prête de retomber.
Il faut dire que le modèle est simple mais bien huilé et qu’il offre un sentiment essentiel pour captiver les gamers : la jouissance. Quel bonheur lorsque l’on élimine un autre compétiteur et que l’on peut ramasser son loot ! Quelle joie lorsqu’on trouve une arme rare et efficace ! Et surtout, quelle jouissance lorsque l’on termine premier, ayant survécu à de nombreux autres joueurs. Savant mélange de compétitivité, de survie, de travail en équipe (lors de parties en duo ou en équipe de quatre) ou encore de technique de jeu, les modes Battle Royale connaissent le succès et devraient être le gros hit de 2018 puisque de nombreux éditeurs travaillent actuellement sur de tels modes à intégrer à des jeux existants ou à de futurs opus.
Avec une telle compétition acharnée entre joueurs et un buzz planétaire, il n’a pas fallu longtemps pour que les premières compétitions apparaissent. Au départ amateures, puisque les éditeurs de ces modes n’avaient pas prévu de serveurs personnalisés pour les tournois d’eSport, elles deviennent progressivement professionnelles puisque les premières compétitions de haut niveau ont été organisées depuis le début de l’année, un peu partout dans le monde. À titre d’exemple, on peut citer la Lyon e-Sport et la Gamers Assembly, en France, deux conventions du sport électronique durant lesquelles se sont tenues des joutes sur Fortnite. Mais est-ce que ces jeux sont prêts pour de telles compétitions ? Au-delà des serveurs, présentent-ils des bases solides pour accueillir des rencontres de haut-niveau ? Analyse des points cruciaux au développement de l’eSport sur les modes Battle Royale.
La communauté
Pour s’installer durablement sur la scène eSportive, un jeu doit s’appuyer sur une large communauté, fidèle et qui restera active de nombreuses années. Pour cela, il faut non seulement proposer un jeu amusant, non répétitif et qui donne envie d’y passer des heures mais il faut aussi assurer, sur le long terme, un suivi et des mises à jour régulières. Epic Games, le studio créateur de Fortnite, l’a bien compris puisqu’il fait régulièrement des mises à jour sur son hit. Les joueurs sont constamment confrontés à des nouveautés et ne voient donc pas l’intérêt d’aller ailleurs. Sur les autres Battle Royale, les mises à jour sont plus rares et on se contente de travailler sur la stabilité des serveurs.
Fortnite et PUBG, à eux seuls, brassent une majorité des joueurs. Le premier, ultra-populaire en Occident et fort de ses plus de 40 millions de joueurs a battu récemment un record en rassemblant 3,4 millions d’utilisateurs en même temps, surclassant son adversaire, bien plus populaire à l’Est et qui a perdu sa place de leader du marché depuis le début de l’année 2018.
Ces deux jeux, porte-drapeaux des modes Battle Royale, prouvent à eux seuls que leurs communautés sont plus que suffisantes pour envisager un succès en eSport.
Un attrait du public
Certes, pour qu’un jeu marche sur la scène du sport virtuel, il lui faut un nombre conséquent de joueurs. Mais il lui faut également un public, des gens prêts à passer des heures devant les rediffusions en live streaming sur internet et même payer des places pour assister à des affrontements entre les meilleures équipes.
Là aussi, pas de souci pour PUBG et Fortnite puisqu’à eux seuls, selon le site d’analyses du marché Newzoo, ils ont amassé pas moins de 20% du temps de visionnage pour le mois de février 2018 sur la plateforme de streaming Twitch, ce qui équivaut à environ 140,5 millions d’heures passées à regarder ces deux jeux.
L’engouement du public est donc réel, d’autant plus depuis que des personnalités du show business, comme le rappeur Drake par exemple, ont participé à des diffusions en direct du jeu aux côtés d’influenceurs à succès. Le grand public s’est alors intéressé au jeu et sa courbe d’évolution a continué son ascension.
La metagame, la clé du succès en eSport
La metagame est l’ensemble des stratégies et des tactiques de jeu mises en place par les joueurs et basées sur leurs propres analyses et expériences et non sur les règles du jeu. Autant dire qu’elle est capitale pour le développement d’un jeu eSport puisque sans cette metagame, abréviée « meta », il n’y aurait pas de haut-niveau sur le jeu.
Prenons le cas de Fortnite. Arrivé en septembre 2017, le mode Battle Royale du jeu d’Epic Games est très récent. Et son aspect compétitif l’est encore plus puisque cela ne fait que quelques mois que les premiers tournois se sont développés. La meta du jeu n’est donc pas encore en place, d’autant que les mises à jour régulières réalisées par les développeurs, ajoutant ou retirant des armes, changeant la précision de certaines ou encore diminuant les dégats des autres, n’aident pas à la mise en place de stratégies durables. La meta de Fortnite est donc encore faible mais plusieurs signes indiquent qu’elle pourrait se développer plus vite que prévu et assurer, avec elle, l’avenir du jeu sur la scène eSportive.
Ainsi, lors de la Gamers Assembly, on a remarqué que deux tactiques séparaient les joueurs. L’une, plus passive, consistait à construire un fort à une position avantageuse (le plus souvent au sommet d’une montagne) et d’attendre pour engager un combat à distance avec les adversaires. L’autre stratégie, bien plus agressive, voyait les joueurs foncer sur leurs adversaires pour engager des duels très rapprochés. Deux façons de jouer dans lesquelles ne s’enfermaient pas les joueurs mais qui ont permis de voir l’esquisse d’une metagame se mettre en place.
Des règles uniformisées
Tout est bon, l’eSport sur Fortnite est sur de bons rails ? Et bien pas encore tout à fait. En effet, certes, une metagame se dessine progressivement. Mais l’équilibre est encore précaire, notamment suite aux règles distinctes lors de tournois. Ainsi, sur certaines compétitions, les éliminations de joueurs valent beaucoup de points et la tactique agressive est dès lors privilégiée. Lors d’autres rencontres, ce sont les Top 1 qui permettent de s’envoler au classement et il est alors primordial de sauver sa peau, quitte à être particulièrement passif.
Ces règles changeantes ont énervé un bon nombre de joueurs, qui préféreraient recevoir un règlement fixe et pouvoir s’entraîner en fonction de celui-ci peu importe la compétition.
En résumé, si tout se met progressivement en place pour Fortnite et PUBG, difficile de dire que tous les jeux proposant un mode Battle Royale se feront un jour une place lors de compétitions de sport électronique. Les difficultés sont nombreuses pour réussir à proposer une expérience stable et qui plaira au plus grand nombre tout en offrant un véritable challenge aux joueurs les plus aguerris lors de tournois qui devraient, dans le futur, être plus uniformisés. L’explosion programmée du nombre de ces modes en 2018 devrait aussi apporter une concurrence qui pourrait tirer tout le monde vers le haut ou, a contrario, entraîner un trop-plein qui lasserait le public. Pour PUBG et Fortnite, l’avenir eSportif semble radieux. Mais ces deux exemples pourraient, un jour, faire un jour figure d’exception.
Gotaga, Ninja, ces streameurs qui font recette grâce à Fortnite
Fortnite a créé le buzz non seulement par son nombre hallucinant de joueurs mais aussi, et surtout, par la foule qui suit les streameurs et youtubeurs les plus populaires sur ce jeu. En France, Gotaga, ancien joueur professionnel sur Call of Duty, a vu sa communauté prendre une ampleur démesurée depuis qu’il a commencé à jouer presque exclusivement au jeu d’Epic Games. Ainsi, ses deux chaînes YouTube ont à présent dépassé le million d’abonnés et il a battu un record sur Twitch, en devenant le premier diffuseur francophone à passer le palier symbolique des 100.000 spectateurs connectés en simultané.
À l’international, c’est un autre influenceur qui a follement bénéficié du buzz Fortnite. Ninja, de son vrai nom Tyler Blevins, est aussi un ancien joueur professionnel, sur Halo. En octobre 2017, lorsqu’il a joué pour la première fois à Fortnite Battle Royale, il avait alors environ 700.000 abonnés sur Twitch. Aujourd’hui, 6 mois plus tard, il en compte près de 6 millions. Une hausse fulgurante qui lui permet de gagner plus de 500.000 dollars par mois. Une somme folle de laquelle le jeune homme soustrait un gros pourcentage, qu’il verse mensuellement à des associations caritatives.
Si ces influenceurs, et bien d’autres, ont bénéficié de Fortnite à titre personnel, ils ont également offert au jeu une visibilité incroyable. Le meilleur exemple reste le soir du 15 mars 2018, lorsque Ninja a joué, en direct, aux côtés du rappeur Drake, star internationale. Il a, ce jour-là, explosé le record de spectateurs simultanés sur Twitch avec une pointe à 627.784 connectés. Un chiffre exceptionnel pour une soirée exceptionnelle, qui a mis en lumière le jeune streameur mais surtout le jeu d’Epic Games, qui s’est retrouvé dans tous les titres de la presse grand public et a connu une publicité aussi énorme que gratuite.