Derwael championne du monde: scénario d’une journée inoubliable qui s'est jouée dans les détails
La Limbourgeoise de 18 ans a fait preuve de talent et de maîtrise aux barres.
- Publié le 03-11-2018 à 08h56
- Mis à jour le 03-11-2018 à 11h27
La Limbourgeoise de 18 ans a fait preuve de talent et de maîtrise aux barres. Sous les yeux embués de ses parents, sous les vivats d’une poignée de supporters belges ayant fait le déplacement jusqu’au Qatar pour l’encourager, et sous les applaudissements nourris des membres de nos deux équipes nationales, Nina Derwael a touché au Graal, ce vendredi, à Doha. En décrochant, avec une belle autorité et une avance confortable (0.500) sur l’immense Simone Biles, la médaille d’or aux barres asymétriques. Inouï ! Même si cette performance historique pour le sport belge n’était pas tout à fait inattendue : la Limbourgeoise - ses deux titres européens l’attestent - s’est hissée ces derniers mois parmi les meilleures spécialistes au monde.
Après avoir chanté la Brabançonne sur ce podium où, du haut de son mètre 65, elle semblait toiser Biles (14.700) et l’Allemande Elisabeth Seitz (14.600), Nina Derwael (15.200) glissa une première réaction.
"Je n’ai pas de mots, c’est un rêve qui est devenu réalité", sourit la gymnaste de 18 ans, qui avait poussé la coquetterie (ou la superstition) jusqu’à apposer un vernis doré sur ses ongles.
Et Nina de se repasser le scénario d’une journée inoubliable. "J’étais stressée dès le moment où je me suis réveillée ce vendredi matin", confie la jeune femme, qui avait déjà produit la meilleure note, la veille, sur cet agrès (15.100) lors du concours général. "Je suis contente d’avoir eu mes équipières auprès de moi pour me calmer un peu et pour me changer les idées. J’ai simplement cherché à me répéter que je devais avoir confiance dans le travail fourni aux entraînements. Je me suis préparée très sérieusement pour ce rendez-vous et il n’y a rien de plus que j’aurais pu faire."
Préférant demeurer un peu plus longtemps dans son hôtel, vu la longue attente qui était imposée aux athlètes vu l’épaisseur du programme (cinq finales par engin), Nina Derwael estime avoir fait le bon choix en ne ralliant l’Aspire Dome qu’au dernier moment. "Je ne me voyais pas rester trois heures dans la salle avant d’entrer en compétition, j’ai préféré rester au calme", dit-elle. "Sachant que j’allais passer en cinquième position sur huit, je suis aussi retournée un peu dans la salle d’échauffement au début du concours."
Le genre de détails qui, au plus haut niveau, peuvent faire la différence. Mais la différence, c’est bien sûr grâce à l’exécution parfaite d’un programme bien maîtrisé malgré sa variété et son degré de difficulté (6.500, de loin le plus élevé des finalistes) que Nina Derwael l’a faite. Et pour cela, il faut un mental de championne, l’un de ses atouts, précisément. "Pendant l’exercice, j’ai senti que j’étais bien dans le rythme, que techniquement tout se passait bien et je savais, dès lors, que je devais surtout soigner ma sortie. J’ai relativement assuré la fin du programme. Mon score m’a donné entière satisfaction. D’un côté, je me disais que c’était bien parti mais d’un autre côté, il y avait encore trois filles après moi, et non des moindres, et je n’ai pas voulu crier victoire trop vite. "
Ni Simone Biles ni la double championne olympique des barres asymétriques (2012 et 2016) Aliya Mustafina, les plus redoutables, n’ont toutefois pu déloger la Belge de la première place. Et c’est le poing serré que Nina Derwael, retenant ses larmes, accueillit l’officialisation de son premier titre de championne du monde. "C’était un gros soulagement et je ressens vraiment un bonheur énorme. Je suis sur un nuage, je ne réalise sans doute pas encore tout à fait. Mais ce titre, on va en profiter !"
Simone Biles, 1e au saut et 2e aux barres: "Mérité"
“Je suis beaucoup plus satisfaite qu’à l’issue du concours général où je l’ai emporté en tremblant. Ce vendredi, j’ai fait ce que j’avais à faire et je suis très heureuse de ma journée dans sa globalité. J’ai le sentiment d’avoir gagné aux barres aussi en raison de tout le travail que j’ai fourni dans cette épreuve qui reste mon point faible. C’était incroyable de voir Nina à l’oeuvre : c’est une superbe gymnaste et elle mérite absolument son titre de championne du monde. Elle est tellement confiante, tellement à l’aise sur les barres qu’elle est réellement une source d'inspiration pour moi."
"Les compliments de Simone me touchent"
Les routes de Nina Derwael et de Simone Biles, la superstar féminine de la gymnastique, se sont croisées à plusieurs reprises à Doha tant en qualifications qu’en finale. Ce vendredi, la Limbourgeoise a même eu le privilège de monter sur le podium en compagnie de l’Américaine. Mais sur une plus haute marche, ce qu’elle aurait eu peine à imaginer il y a quelques jours seulement. Et c’est avec une réelle émotion qu’elle a accueilli les paroles de la quadruple championne olympique de Rio à son égard.
"Nous avons eu l’occasion d’échanger quelques mots et cela reste toujours un moment très particulier pour moi dans la mesure où c’est une gymnaste que j’ai toujours admirée, et que je continue à admirer", explique Nina Derwael. "Alors l’entendre dire de vive voix que j’ai fait une belle prestation et qu’elle admire mon exercice aux barres, c’est vraiment un moment spécial et un peu hors du temps. Ses compliments me touchent, bien sûr."
La poutre pour bien terminer
Auréolée de son titre de championne du monde aux barres asymétriques, Nina Derwael va disputer une troisième et dernière finale individuelle, ce samedi après-midi (14 h 40), au cours de ces Championnats du Monde de Doha. C’est à la poutre, un agrès où elle a terminé à la sixième place en qualifications avec une note de 13.666, que la Limbourgeoise se produira au sein du Top 8 mondial. Notre compatriote va retrouver, une nouvelle fois, l’incontournable Simone Biles. "Je veux avant tout terminer mes championnats sur une bonne note et réussir un bel exercice", sourit Nina Derwael, qui avait terminé quatrième du concours général disputé jeudi.
"C’est vraiment le plus important, de se faire plaisir, de faire plaisir aux supporters qui ont fait le déplacement ici à Doha. Je suis contente d’avoir mes proches à mes côtés, je peux sentir leur soutien et c’est essentiel pour moi. J’espère, dès lors, réussir la meilleure performance possible. Je ne vais donc pas pouvoir trop faire la fête ce vendredi soir…" À la poutre, l’un de ses agrès de prédilection avec le sol (programmé également ce samedi), Simone Biles (18 médailles mondiales au compteur !) est double tenante du titre. C’est dire l’ampleur de la tâche de ses concurrentes !